Projet de loi n° 880 portant réforme des codes pénal et de procédure pénale en matière de corruption et de techniques spéciales d'enquête

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Exposé des motifs🔗

Si la corruption, phénomène universel, est un des maux les plus anciens et répandus dans les sociétés, c'est en raison de la nature intrinsèque de cet acte qui se montre économiquement destructeur et juridiquement répréhensible, dans la mesure où cela implique des agents publics ou des représentants élus ou, depuis la fin du XIXe siècle, des personnes œuvrant dans le secteur.

La corruption représente donc le détournement d'un processus dans le dessein répréhensible, pour le corrupteur, d'obtenir des avantages ou, pour le corrompu, d'obtenir une rétribution en échange de sa bienveillance.

Force est de constater qu'elle touche un nombre important de pays dans le monde et si son degré est évidemment variable dans le temps et l'espace, elle met, dans tous les cas en danger l'État de droit en portant atteinte aux valeurs qui lui sont consubstantielles. Elle mine ainsi l'esprit civique en entraînant, au delà d'un certain seuil, une perte de confiance des populations dans les institutions et leurs dirigeants.

De la même façon, elle peut être à l'origine de graves atteintes à la sécurité des personnes et des biens ou à l'environnement dès lors que les autorités chargées de faire respecter les réglementations idoines se trouvent soudoyées aux fins de faillir à leur mission d'intérêt général.

Les sommes engendrées par ce phénomène ne peuvent se chiffrer précisément, mais il est estimé qu'elles seraient globalement de l'ordre de centaines de milliards d'euros chaque année.

Aussi, les instances internationales se sont-elles organisées et la lutte contre la corruption est devenue un enjeu majeur, marqué par l'adoption continue, par la communauté internationale, de normes et d'instruments spécifiques.

Au cours de la 19ème Conférence des ministres européens de la Justice qui s'est tenue à la Valette en 1994, les ministres ont ainsi convenu pour la première fois de la nécessité de traiter la corruption à une échelle européenne.

Et dès septembre 1994, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a instauré le Groupe Multidisciplinaire sur la Corruption (G.M.C.) lequel, a établi l'année suivante, un projet de programme d'action contre la corruption. Celui-ci a ensuite été adopté par le même Comité des ministres en novembre 1996, avec une mise en œuvre fixée au 31 décembre 2000.

Analysant le phénomène de corruption comme partie prenante de la criminalité transnationale, les ministres de la justice des États membres du Conseil de l'Europe, au cours de leur 21eme Conférence tenue à Prague en juin 1997, ont recommandé une accélération de la procédure et l'adoption rapide d'une convention pénale prévoyant l'incrimination coordonnée des infractions de correspondantes.

Dans le même sens, au cours du 2eme sommet de Strasbourg, en octobre 1997, les chefs d'État et de Gouvernement des États membres du Conseil de l'Europe ont chargé le Comité des Ministres d'adopter un plan d'action tendant à promouvoir la coopération dans la lutte contre la corruption, y compris dans ses liens avec le crime organisé et le blanchiment de l'argent, et l'ont invité à conclure rapidement les travaux d'élaboration d'instruments juridiques internationaux conformément à leur Programme d'action contre la corruption.

De fait, lors de sa 101eme session du 6 novembre 1997, le Comité a adopté la résolution (97) 24 portant les vingt principes directeurs pour la lutte contre la corruption et a invité le G.M.C. à lui soumettre sans délai un projet de texte proposant la mise en place d'un mécanisme efficace pour veiller au respect et à la mise en œuvre des instruments normatifs du Conseil de l'Europe en matière de corruption.

Ainsi, le G.M.C. a présenté en mars 1998 un projet d'accord instituant le « Groupe d'État contre la Corruption-G.R.E.C.O. », dont la mise en place a été autorisée par le Comité des Ministres, lors de sa 1Q2ème session, le 5 mai 1998, sous la forme d'un accord partiel élargi.

Le G.R.E.C.O., créé le 1er mai 1999 regroupe à ce jour 48 États, les États-Unis y compris, et a donc pour objectif d'améliorer la capacité de ses membres à lutter contre la corruption en s'assurant, par le biais d'un processus d'évaluation et de pressions mutuelles, que ceux-ci respectent bien les normes établies.

Il contribue ainsi à identifier les lacunes dans les politiques nationales de lutte contre la corruption et, par là-même, incite les États à procéder aux réformes législatives nécessaires.

Lors de sa 47e session plénière, en juin 1998, le Comité européen pour les problèmes criminels (C.D.P.C.) a donné officiellement son avis sur le projet de Convention pénale sur la corruption et, par la suite, l'Assemblée Parlementaire du Conseil de l'Europe en a fait de même au cours de la troisième partie de sa session en juin 1998. Enfin, le Comité des Ministres a officiellement adopté cette Convention et l'a ouverte à la signature des États le 27 janvier 1999.

Depuis lors, la Convention pénale sur la corruption constitue l'instrument international le plus complet visant à incriminer de façon coordonnée de nombreuses conduites de corruption et à améliorer la coopération internationale pour accélérer ou permettre la poursuite des corrupteurs comme des corrompus.

C'est ainsi que, le 19 mars 2007 la Principauté l'a ratifiée et, de ce fait, elle est devenue, le 1er juillet 2007, membre à part entière du G.R.E.C.O.

Monaco est donc soumis, à ce titre, à la procédure d'évaluation de la mise en œuvre de la convention par le G.R.E.C.O. Ce processus entraîne la collecte d'informations au moyen de questionnaires, de visites dans le pays - qui permettent aux équipes d'évaluation de demander des informations complémentaires par le biais d'entretiens avec les principaux acteurs nationaux de haut niveau - et l'élaboration de rapports d'évaluation.

Ces rapports, examinés et adoptés par le G.R.E.C.O., contiennent des recommandations à l'intention des pays concernés afin qu'ils appliquent de la manière la plus satisfaisante possible les dispositions considérées. Les mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations sont ultérieurement évaluées par le G.R.E.C.O. dans le cadre d'une procédure de conformité et de suivi distincte.

Le G.R.E.C.O. procède ainsi par cycles, appelés « cycles d'évaluation », lesquels couvrent chacun des thèmes spécifiques. Le « premier cycle d'évaluation » du G.R.E.C.O. (2000-2002) a traité notamment la question de l'indépendance, de la spécialisation et des moyens utilisés par les organes nationaux engagés dans la prévention et la lutte contre la corruption, ainsi que l'étendue et la portée des immunités des agents publics par rapport aux arrestations et poursuites.

Le « deuxième cycle d'évaluation » (2003-2006) a porté sur l'identification, la saisie et la confiscation des produits du crime, la prévention et la détection de la corruption dans l'administration publique et la prévention de la pratique consistant à utiliser des personnes morales pour dissimuler les faits de corruption. Le « troisième cycle d'évaluation », lancé en janvier 2007, s'intéresse quant à lui aux incriminations prévues par la Convention pénale sur la corruption et à la transparence du financement des partis politiques.

La procédure d'évaluation suit ainsi des étapes bien définies, de la nomination par le G.R.E.C.O. d'une équipe chargée de l'évaluation d'un État-membre présélectionné, à l'analyse de la situation de chaque pays réalisée sur la base des réponses à un questionnaire et des informations recueillies au cours des rencontres avec les représentants de la fonction publique et ceux de la société civile lors des visites sur place.

In fine, l'équipe d'évaluateurs rédige un projet de rapport, transmis, pour commentaires et avis, au pays évalué, avant que ledit projet de rapport ne soit soumis au G.R.E.C.O. pour examen et adoption. Les conclusions des rapports d'évaluation peuvent établir que la législation et la pratique satisfont - ou ne satisfont pas - les dispositions examinées.

Elles aboutissent généralement à des « recommandations », qui appellent une réaction dans les 18 mois qui suivent, ou bien à des « observations » que les États membres sont invités à prendre en considération sans toutefois être obligés de faire rapport au cours de la procédure ultérieure de conformité.

L'une des forces du suivi réalisé par le G.R.E.C.O. réside dans le fait que la mise en œuvre des recommandations fait l'objet d'un examen au titre de la procédure de conformité. L'évaluation quant à la mise en œuvre satisfaisante, partielle ou non satisfaisante, d'une recommandation se fonde sur un rapport de situation complété par des documents y relatifs transmis par l'État membre évalué, 18 mois après que le rapport d'évaluation a été adopté.

Dans l'hypothèse où les recommandations n'ont pas toutes été respectées, le G.R.E.C.O. réexamine les recommandations concernées, après un délai supplémentaire de 18 mois. Les rapports de conformité et leurs addenda qu'il adopte contiennent également une conclusion générale sur la mise en œuvre de toutes les recommandations, le but étant de décider si la procédure de conformité est terminée ou non à l'égard de l'État membre en question.

Enfin, son règlement intérieur prévoit l'ouverture · d'une procédure spéciale, basée sur une approche progressive, à l'égard des membres dont la mise en œuvre des recommandations a été jugée « globalement insatisfaisante ».

De fait, en 2008, lors du premier et deuxième cycle d'évaluation conjoints, le rapport d'évaluation sur Monaco, adopté lors de la 39ème réunion plénière, a émis une série de 28 recommandations à mettre en place le plus rapidement possible dans notre législation interne. Un pré-rapport de situation sur la mise en œuvre de ces recommandations a été présenté au G.R.E.C.O. le 30 avril 2010, le rapport définitif devant intervenir au 30 octobre 2010.

Le Code pénal monégasque comporte de longue date une gamme d'incriminations permettant d'ores et déjà de réprimer la corruption, savoir la répression de la corruption passive et active de fonctionnaire ou préposé de l'administration en vue de l'accomplissement d'un acte positif ou négatif entrant dans le cadre de ses fonctions (articles 113 et 118), de la corruption passive d'arbitre ou expert en vue d'une décision ou opinion favorable à l'une des parties (article 114), de la corruption passive et active dans le secteur privé (articles 115 et 119) et, enfin, de la corruption passive de membre d'un tribunal pénal se prononçant au sujet d'un crime (article 121). Le trafic d'influence, quant à lui, n'était pas incriminé en raison de sa proximité avec les dispositions sur la corruption active des articles 118 et 119 du Code. Mais peu de plaintes ont été déposées et peu de procédures ouvertes en matière de corruption dans la Principauté.

Au vu des données internationales et européennes, il est toutefois apparu hautement opportun au Gouvernement Princier d'enrichir et de compléter ces dispositions particulières afin d'établir de manière incontestable que la Principauté est pleinement engagée dans le mouvement européen et mondial de la lutte contre la corruption.

Le Gouvernement a donc souhaité inscrire la législation monégasque dans le sillage de ces différents référentiels internationaux et européens, qu'ils soient conventionnels ou institutionnels.

À cette fin, le présent projet de loi tend, d'une part, à poursuivre l'adéquation du dispositif répressif monégasque à la Convention sur la corruption et, d'autre part, à répondre aux recommandations du G.R.E.C.O.

Sous le bénéfice de ces observations à caractère général, ledit projet appelle les commentaires ci-après.

Du point de vue formel, il est divisé en trois titres :

  1. Titre préliminaire : Définitions

  2. Titre I : Dispositions pénales

  3. Titre Il : Dispositions de procédure pénale

Si le titre préliminaire délimite le périmètre d'action de la corruption, les deux titres suivants modifient les Codes pénal et de procédure pénale dans l'ordre de numérotation de leurs articles.

I - Les faits de prise illégale d'intérêts, de corruption et de trafic d'influence

Le titre préliminaire est constitué des quatre articles définissant à la fois les acteurs et les actes de la prise illégale d'intérêts, de la corruption et du trafic d'influence.

En premier lieu, l'article 113 du Code pénal s'attache à définir et à prendre en compte, au regard des normes internationales, l'ensemble des personnes pouvant être concernées par ces actes. Sont ainsi définis l'agent public national, l'agent public étranger ou international et l'agent privé.

La démarche retenue pour la rédaction de cet article ne consiste pas en l'énumération de personnes à raison de leur profession ou de leur qualité, car la liste eut été trop longue sans pouvoir être exhaustive, mais à appréhender synthétiquement des catégories au travers de leur activité.

La qualité d'agent public a donc été redéfinie de manière autonome et la définition de la qualité d'agent privé a été élargie.

De fait, la redéfinition de la qualité d'agent public tend a assurer la conformité de notre droit aux stipulations de l'article 1.a. de la Convention pénale sur la corruption qui prévoie que « l'expression agent public est interprétée par référence à la définition de« fonctionnaire », « officier public », « maire », « ministre », ou «juge» dans le droit national de l'Etat dans lequel la personne en question exerce cette fonction et telle qu'elle est appliquée dans son droit pénal ».

Cette autonomie, au regard du droit de la fonction publique, bien que déjà présente dans la législation monégasque, le Code pénal faisant référence à « tout fonctionnaire public de l'ordre administratif ou judiciaire, tout agent ou préposé d'une administration publique » (actuel article 113), ainsi qu'à « tout arbitre ou expert » (actuel article 114), laissait place à certaines incertitudes concernant le sort réservé aux élus de la Principauté et aux personnes concourant à la réalisation d'une mission de service public.

Aussi, afin de mettre un terme à toute incertitude, la notion pénale d'agent public comprendra dorénavant ces trois catégories fonctionnelles.

L'agent public national est ams1 défini dans le présent projet comme :

« la personne dépositaire de l'ordre public, chargée d'une mission de service public ou investie d'un mandat électif public ».

Il faut entendre, comme personne dépositaire de l'autorité publique, la personne détenant un pouvoir de décision fondé sur la parcelle d'autorité publique qui leur a été confiée en raison des fonctions exercées. Cette position, adoptée par une doctrine française considère donc, comme dépositaire de l'autorité publique, la personne « qui est titulaire d'un pouvoir de décision et de contrainte sur les individus et sur les choses, pouvoir qu'elle manifeste dans l'exercice des fonctions, permanentes ou temporaires, dont elle est investie par délégation de la puissance publique » (André VITU, Corruption passive commise par une personne exerçant une fonction publique, juris­ classeur pénal, article 432-11, n° 55). En l'espèce, cette définition permet de viser la qualité de ministre ou de conseiller de gouvernement, de magistrat, d'officier public ou ministériel, de directeur de la sûreté publique ou encore de maire.

La mention de toute personne chargée d'une mission de service public va ici permettre de viser tous ceux qui, sans être dépositaire d'une parcelle d'autorité publique, sont chargés de missions de service public, et qui, accomplissent, à titre provisoire ou permanent, volontairement ou sur réquisition des autorités, un service public quelconque. Il est à noter, qu'il importe peu que les intéressés aient un statut de droit privé ou de droit public, l'agent ainsi considéré appartient à la catégorie des personnes chargées d'une mission de service public dès lors qu'il exerce des fonctions qui participent de la gestion des affaires publiques, et ce indépendamment de son statut professionnel.

Enfin, faire référence à la personne investie d'un mandat électif public permet de désigner la personne, sans distinguer le caractère national ou local dudit mandat, plaçant ainsi sur un pied d'égalité, l'ensemble des élus monégasques, qu'ils soient conseillers nationaux ou conseillers communaux.

En ce qui concerne la définition de l'agent public international ou étranger, du fait de l'étroitesse des liens entre corruption nationale et corruption internationale, il est apparu nécessaire de réprimer la corruption des agents publics étrangers au même titre que celle des nationaux. De ce fait, le présent projet de loi définit l'agent public étranger ou international comme une personne dépositaire de l'autorité publique, chargée d'une mission de service public ou investie d'un mandat électif public dans un État étranger ou au sein d'une organisation internationale publique.

S'agissant enfin de la qualité d'agent privé, sa définition était jusqu'alors très limitative : en effet, seuls « tout commis, employé ou préposé, salarié ou rémunéré sous une forme quelconque » étaient susceptibles d'être poursuivis pour des faits de corruption (actuel article 115). L'efficacité de la répression ne pouvait que s'en trouver affectée. Dès lors, le Gouvernement a souhaité redéfinir et élargir la définition de l'agent privé de manière à pouvoir faire entrer dans son périmètre, tant les agents exerçant des fonctions de direction à la tête des sociétés, que les agents exerçant une profession libérale. Pour ce faire, le Gouvernement a tenu compte de l'évolution de la définition de l'agent public et a posé une exigence négative - l'absence de possession de la qualité d'agent public - ce qui permet de définir par défaut l'agent privé comme celui, qui sans être dépositaire de l'autorité publique, ni chargé d'une mission de service public, ni investi d'un mandat électif, exerce dans le cadre d'une activité commerciale, une fonction de direction ou un travail pour une entité du secteur privé (article 113).

Il importe de souligner que la définition retenue correspond parfaitement aux exigences de la convention pénale sur la corruption, précisées dans son rapport explicatif.

En effet, l'exigence de l'exercice dans le cadre d'une activité commerciale résulte des articles 7 et 8 de la convention pénale sur la corruption relatifs respectivement aux corruptions active et passive dans le secteur privé. ·Sur ce point, le rapport explicatif sur la convention pénale précitée fait référence au domaine de l'activité commerciale, ce qui a pour effet d'exclure les activités à but non lucratif menées par des personnes ou des organisations (par exemple des associations ou autres ONG).

À cet égard, la référence à l'activité commerciale n'interdit pas, ams1 que le précise le rapport, une interprétation large de ladite activité susceptible de désigner alors « tout type d'activité marchande, en particulier le commerce des biens et la fourniture de services y compris les services fournis au public (transport, télécommunication, etc.) » (rapport explicatif sur la convention pénale, n° 53).

Par ailleurs, il s'évince du rapport explicatif que l'exercice d'une fonction de direction ou d'un travail doit être considéré comme recouvrant « la relation employeur-employé, mais aussi d'autres types de relations comme par exemple les relations entre associés, entre l'avocat et son client et d'autres encore dans lesquelles il n'y a pas de contrat de travail.

Dans les entreprises privées, cette notion doit couvrir non seulement les salariés, mais aussi la direction, à tous les échelons, y compris les membres du conseil d'administration, mais pas les actionnaires. Elle englobe également les personnes qui n'ont pas le statut d'employé ou qui ne travaillent pas en permanence pour l'entreprise - par exemple, les consultants, les agents commerciaux, etc. - mais qui peuvent engager la responsabilité de l'entreprise » (rapport précité, n° 54).

La référence à l'entité du secteur privé permet de désigner « les sociétés, les entreprises, les fondations et autres entités détenues entièrement ou dans une mesure déterminante par des particuliers [... ]. Le terme entité doit être compris comme pouvant également signifier, dans ce contexte, une personne physique » (rapport précité, n° 54).

Ensuite, il importe de qualifier les actes mêmes de prise illégale d'intérêts, de corruption et de trafic d'influence. Dans ce but, le présent projet de loi introduit trois nouveaux articles au Code pénal portant respectivement les numéros 113-1, 113-2 et 113-3 (article préliminaire).

Le premier reprend les dispositions relatives à la pnse illégale d'intérêt qui, l'article 112 du Code étant abrogé, sont déplacées par le projet de loi de l'article 112 vers l'article 113-1, en donnant une définition plus moderne de la prise illégale d'intérêts.

Le second donne la définition de l'acte de corruption en distinguant l'acte passif, qui est le fait par un agent public ou privé de solliciter, d'accepter ou de recevoir un avantage indu en échange de l'accomplissement ou du non accomplissement d'un acte de sa fonction, de l'acte actif, qui est le fait de proposer, accorder ou octroyer un avantage indu pour obtenir d'une personne l'accomplissement ou le non accomplissement d'un acte de sa fonction.

Le troisième, quant à lui, introduit la notion de trafic d'influence dans le droit pénal monégasque. En effet, cette infraction n'était jusqu'alors pas incriminée en raison de sa proximité avec les types d'infractions des actuels articles 118 et 119 du Code, savoir :

  • ► « Quiconque aura contraint ou tenté de contraindre par voies de fait ou menaces, corrompu ou tenté de corrompre par promesses, offres, dons ou présents, un fonctionnaire, agent ou préposé de la qualité exprimée en l'article 113, pour obtenir, soit une opinion favorable, soit des procès-verbaux, états, certificats ou estimations contraires à la vérité, soit des places, emplois, adjudications, entreprises ou autres bénéfices, soit tout autre acte du ministère du fonctionnaire, agent ou préposé, soit l'abstention d'un acte qui rentrait dans l'exercice de ses devoirs, sera puni des mêmes peines que le fonctionnaire, agent ou préposé corrompu » (article 118) ;

  • ► « Quiconque aura corrompu ou tenté de corrompre, par promesses, offres, dons, présents, commissions, escomptes ou primes, tout commis, employé, préposé, rémunéré ou salarié sous une forme quelconque, pour obtenir qu'il accomplisse un acte de son emploi ou qu'il s'abstienne d'un acte qui entrait dans l'exercice de ses devoirs, sera puni d'un emprisonnement de six mois à trois ans et de l'amende prévue au chiffre 3 de l'article 26 » (article 119).

Aussi, le parti a-t-il été pris d'instituer une telle infraction et de définir spécialement le trafic d'influence de la même manière que celle retenue pour la rédaction de l'article 113-2 du Code. Est ainsi, tout d'abord, défini le trafic d'influence passif puis, ensuite, le trafic d'influence actif.

Les peines dont sont assorties ces différentes infractions sont substantiellement alourdies. Le délit de prise illégale d'intérêts voit son régime s'aligner sur celui de la corruption d'un agent privé, l'emprisonnement passant ainsi de un à cinq ans contre six mois à trois ans. L'amende est, quant à elle, portée au chiffre 4 de l'article 26 du Code contre, actuellement, le chiffre 3 de ce même article (article premier).

Les sanctions des délits de corruption et de trafic d'influence sont, quant à elles, portées de cinq à dix ans d'emprisonnement et au double de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 du Code, lorsque ces délits sont commis par ou à l'encontre d'un agent public national, étranger ou international.

Ces infractions voient aggraver leurs sanctions dans les cas de corruption commis par un magistrat ou un juré au bénéfice ou au détriment d'une personne faisant l'objet de poursuites criminelles. Dans ces circonstances, la peine encourue est de huit à quinze années de réclusion et le montant de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 du Code est triplé (articles 2 et 3).

Au surplus, il importe de souligner que, voulant aller dans le sens d'une très grande fermeté envers les auteurs de ces infractions, le Gouvernement a souhaité étendre les dispositions de l'actuel article 116 du Code à l'ensemble des infractions de prise illégale d'intérêts, de corruption et de trafic d'influence. Ainsi, dans tous les cas, les coupables encourront également la peine complémentaire prévue à l'article 27 du Code (article 5).

Il apparaît outre, que l'article 118 associait d'une part l'intimidation d'agent public et, d'autre part, la corruption active de ce même agent public. Or, la lisibilité du texte pouvant prêter à confusion, le Gouvernement a dissocié ces deux infractions en créant une disposition relative uniquement à la corruption passive et active, et une autre traitant spécifiquement de l'infraction autonome d'intimidation d'agent public (article 4).

En ce qui concerne la commission de ces infractions en bande organisée, il est à noter que le droit monégasque incrimine d'ores et déjà « le crime organisé » par le biais de l'Ordonnance Souveraine n° 605 du 1er août 2006 portant application de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée.

Par ailleurs, cette incrimination existe dans la loi n° 1.161 du 7 juillet 1993 portant création au Code pénal d'une infraction de blanchiment et modifiant le Code de procédure pénale. Cette loi, introduisant l'infraction de blanchiment, a fait du crime organisé une circonstance aggravante en relation avec le même type d'infraction. Or, l'infraction de corruption constitue une infraction sous-jacente de celle de blanchiment.

Mais, pour être complet, même si la définition de « bande organisée » est là aussi prévue dans le Code pénal depuis la loi n° 1.344 du 26 décembre 2007, le Gouvernement a néanmoins jugé utile de prévoir spécifiquement l'incrimination de la commission de ces infractions en bande organisée (article 6).

Dans le but de répondre le plus précisément possible aux recommandations du G.R.E.C.O., la confiscation automatique du produit de la corruption, prévue à l'actuel article 122, est réintroduite de manière élargie dans l'article 122-2 projeté qui, sur le modèle de l'article 219 du Code pénal, prévoit une confiscation automatique du produit des infractions de prise illégale d'intérêt, de corruption et de trafic d'influence, applicable aux produits tangibles et intangibles, directs ou indirects, à leur contre-valeur, et aux avoirs illicites qui ont été mêlés à des avoirs légitimes, et ce, même en l'absence de blanchiment ou de crime organisé (article 7).

Ces nouvelles dispositions permettront d'assurer une incrimination concrète et effective et ce en parfaite conformité avec la Convention sur la corruption.

II - La procédure applicable aux infractions de prise illégale d'intérêts, de corruption et de trafic d'influence

Le titre II du présent projet de loi prévoit expressément les aménagements du Code de procédure pénale, tels que recommandés par le G.R.E.C.O.

À cette fin, le secret de l'instruction est introduit dans le droit pénal monégasque et consacré expressis verbis (article 9). À cet égard, il peut être rappelé que cette innovation a été en quelque sorte préfigurée par l'article 30 de la loi n° 1.299 du 15 juillet 2005 sur la liberté d'expression publique, lequel punit la publication ou la diffusion d'actes de procédure non débattus en audience, y compris les actes d'instruction.

L'exigence du secret de l'instruction répond à une triple préoccupation :

  • ► faciliter l'œuvre répressive en évitant la révélation erga omnes du travail de recherche et de décantation des preuves, ainsi que les

  • pressions de l'opinion publique sur la justice ;

  • ► mettre l'individu poursuivi à l'abri de la calomnie ;

  • ► protéger le public contre la diffusion éventuelles d'informations faussées et/ ou abusives.

En affirmant le secret de l'instruction, l'article 9 impose d'en préciser à la fois les conditions d'application et les limites.

Dans cette optique, l'obligation au secret ne concerne que les personnes impliquées dans la procédure. Sont concernées, en premier lieu, les personnes qui y concourent par l'exercice d'une activité responsable ou décisionnelle ayant pour objet de mener l'instruction à bonne fin : tel est le cas des membres de la police judiciaire chargés de diligenter des enquêtes ou d'exécuter des commissions rogatoires, ainsi que des magistrats du parquet ou des magistrats instructeurs du siège.

En second lieu, relèvent également de cette catégorie, les personnes auxquelles il échet de conserver trace des actes de l'instruction ou d'exécuter les décisions prises par les autorités du premier groupe : greffiers, experts, interprètes, policiers et carabiniers placés sous les ordres des officiers de police judiciaire, huissiers, etc.

En revanche, et parce qu'ils n'exercent pas cette activité responsable qui est le propre de la participation à l'instruction, sont exclues de ces dispositions la personne inculpée, la partie civile, les personnes civilement responsables, les témoins, ainsi que les journalistes.

En ce qui concerne les avocats, ceux-ci ne sauraient être appréhendés comme des personnes concourant à l'instruction. Cependant ils demeurent tenus au secret professionnel pour tout ce qui concerne cette phase procédurale.

De fait, le secret couvre non seulement les actes de l'instruction eux-mêmes (auditions de témoins, interrogatoires, perquisitions, etc.), mais plus généralement tout ce qui a été appris au cours de l'instruction, fût-ce sans lien direct avec l'affaire.

Dès lors, toute communication intentionnelle, à une personne étrangère à l'instruction d'un de·s éléments confidentiels du dossier, constitue une violation punissable exposant le coupable aux peines prévues à l'article 308 du Code pénal, savoir un emprisonnement de un à six mois et l'amende prévue au chiffre 2 de l'article 26 du Code.

Le respect du secret de l'instruction s'impose donc, « sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense ». Les dispositions projetées exigent ou permettent des dérogations au principe du secret, dans l'intérêt de la conduite de l'information ou de la défense ou, plus généralement, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice. Aussi peut-il être envisagé de produire au cours d'une autre instance pénale - voire civile - des pièces provenant d'une instruction préparatoire, et dont la nature pourrait conduire à éclairer la justice et à contribuer à la manifestation de la vérité.

De la même manière, le troisième alinéa de l'article 31 projeté, prévoit la possibilité, pour le Procureur général, de déroger au secret de l'instruction, « afin d'éviter la propagation d'informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l'ordre public », cette disposition permet ainsi au Parquet d'assurer un certain équilibre dans la communication menée autour des affaires pénales médiatiques.

En outre, et pendant la durée de l'instruction, pareille révélation autorisée découle notamment de la communication du dossier aux avocats de l'inculpé ou de la partie civile, des indications fournies à l'officier de police judiciaire dans le cadre d'une commission rogatoire ou des informations données à l'expert dans le cadre de sa mission.

À la clôture de l'instruction, le maintien du secret de l'instruction dépendra de la décision judiciaire prononcée. En effet, si une ordonnance de non-lieu est rendue, le secret est maintenu. En revanche, dans l'hypothèse d'une ordonnance de renvoi devant la juridiction de jugement, le secret de l'instruction s'efface pour laisser la place à la publicité propre à l'audience.

Par ailleurs, il est apparu opportun au Gouvernement de moderniser les dispositions générales du livre premier du Code de procédure pénale en modifiant ses articles 31 et 32. Ils ont donc été fondus dans l'article 32 projeté (article 10) et la possibilité reconnue, par l'actuel article 33 du Code de procédure pénale, au Ministre d'État de requérir les officiers de police judiciaire, aux fins de « faire tous actes nécessaires à l'effet de constater les infractions à la loi pénale », n'a pas été maintenue.

Cette suppression a été dictée par la volonté de se conformer au principe de séparation des fonctions garanti par l'article 6 de la Constitution, alors même que la disposition en cause était pour le moins désuète.

En revanche, une nouvelle disposition a été introduite donnant au Procureur général la possibilité d'évaluer les officiers de police judiciaire, une fois recueillies les observations du Directeur de la sûreté Publique et après avis du premier président de la Cour d'appel (article 11). Il est en effet naturel, ces officiers étant placés par l'effet de la loi (article 42 et suivants du Code de procédure pénale), sous l'autorité du Procureur général, qu'un dispositif d'évaluation soit organisé, afin d'assurer une mise en œuvre effective des dispositions légales en vigueur.

Les dispositions de l'article 34 du Code de procédure pénale sont réitérées à l'identique. Néanmoins, ce texte est enrichi d'un quatrième alinéa introduisant le principe d'opportunité des poursuites (article 12).

En effet, en ce qu'il reçoit notamment les dénonciations et les plaintes et apprécie les suites à leur donner, le parquet général jouit d'une latitude certaine dans le déclenchement et l'exercice des poursuites. Aussi pourra-t-il mettre en mouvement l'action publique ou requérir un classement sans suite, étant toujours rappelé le principe fixé par l'Ordonnance du 9 mars 1918 selon lequel le directeur des services judiciaires dirige l'action publique sans pouvoir l'exercer personnellement ou en suspendre le cours. Cette règle est, du reste, réitéré dans le dispositif du projet de loi n° 778 relative à l'administration et à l'organisation judiciaire.

Explicitement introduit dans la procédure pénale monégasque, le principe de l'opportunité des poursuites décline ses avantages à chaque étape de son application tant au stade de la mise en mouvement qu'au stade de l'exercice des poursuites, l'opportunité apparaissant préférable au principe dit de légalité, en application duquel le parquet général aurait obligation de poursuivre, quelle que soit la gravité de l'infraction ou quels que soient les éléments permettant d'en apprécier la qualification et d'en mesurer la caractérisation.

Les raisons présidant au choix du procureur général de classer sans suite pourront être tant de pur droit, lorsque l'action publique est prescrite, en cas de décès du mise en cause ou lorsque les faits ne sont pas constitutifs d'infractions, que de pur fait lorsque l'auteur d'une infraction minime est inconnu et que les chances de l'identifier sont nulles.

Dans tous les cas, et tel que prévu au cinquième alinéa de l'article 34 du Code, le procureur général doit informer la victime ou l'auteur de la dénonciation, de sa décision de classer sans suite. Ces derniers pourront dès lors, s'ils le souhaitent, mettre directement l'action publique en mouvement, par le truchement de la constitution de partie civile.

L'introduction, au sixième alinéa, de la possibilité de former un recours contre une décision de classement sans suite, dans le délai de deux mois à compter de la notification de la. décision de classement sans suite prise à la suite de la dénonciation, auprès du Directeur des Services Judiciaires, offre une garantie supplémentaire pour le traitement des affaires de corruption pouvant s'avérer très sensible.

III - L'introduction des techniques spéciales d'enquête

Dans le but de répondre le plus précisément possible aux desiderata européens, expressément formulés par le G.R.E.C.O., le Gouvernement a intégré dans le dispositif procédural des techniques spéciales d'enquête en distinguant, d'une part, les sonorisations et fixations d'images de certains lieux ou véhicules (article 14) et, d'autre part, les enquêtes discrètes (article 15).

Ainsi, le présent projet de loi comporte une innovation significative en ce qu'il contribue désormais à dessiner un régime juridique de ces techniques, qui peuvent être regroupées sous le vocable européen « d'enquête pénale proactive ».

Sont principalement concernées par ces nouvelles techniques les nouvelles formes de délinquances collectives, ainsi que les formes d'infractions répétitives qui ne sont guère portées à la connaissance de la police dont notamment la corruption. La police doit donc pouvoir recourir à certaines techniques spéciales, afin de démontrer leur existence ou, tout du moins, pour empêcher leur réitération.

Ces mesures, exceptionnelles, si elles comblent une lacune du droit pénal procédural monégasque, doivent cependant être strictement encadrées. En effet, s'agissant par exemple des sonorisations et fixations d'images de certains lieux ou véhicules, mises en place sans le consentement des intéressés, elles constituent une atteinte grave à la liberté individuelle, à la vie privée et à l'inviolabilité du domicile. Elles nécessitent donc des garanties renforcées. C'est ainsi que les conditions de légalité, de judiciarité et d'exceptionnalité se doivent d'être respectées (article 14).

Il apparaît que le texte projeté répond parfaitement à ces exigences et que les conditions de mise en place de ces procédures sont strictement encadrées par le nouvel article 106-12. C'est ainsi que ces techniques de sonorisation ne peuvent être mises en œuvre que pour les infractions les plus graves relevant de la criminalité et de la délinquance organisées, excluant par là-même toute autre infraction. Cette exclusion se justifie par la volonté du Gouvernement de respecter le principe de proportionnalité entre un moyen procédural dérogatoire et la gravité de l'infraction qui autorise son emploi.

Aux fins de respecter le principe de judiciarité, ces techniques ne peuvent être autorisées que par un magistrat. De fait, le juge d'instruction doit donc autoriser qu'il soit procédé, sous son contrôle, et après avis du procureur général, à une telle opération de sonorisation.

Le respect du principe de spécialité, dans le cadre de l'application des dispositions de l'article 61 du Code de procédure pénale concernant l'obligation de dénonciation des infractions, garantit quant à lui, que les informations recueillies à l'occasion d'investigations proactives ne pourront être utilisées que pour soutenir l'accusation à l'occasion de laquelle elles ont été conduites.

Aussi ne pourrait-il être envisagé, à titre d'illustration, que sur une procédure pour trafic de stupéfiants, les renseignements obtenus proactivement soient utilisés dans une affaire d'homicide. En conséquence, les renseignements devront être détruits si l'enquête proactive n'aboutit pas à des poursuites pénales ou à une décision définitive dans un délai raisonnable.

Dans le même sens, le pnnc1pe de proportionnalité est pareillement respecté, en ce qu'il commande que les mesures proactives ne soient utilisées que si la valeur qu'elles sauvegardent, l'ordre public, est supérieure à la valeur atteinte, l'intimité de la vie privée.

En conséquence, l'interception de lignes téléphoniques dans certains lieux, la mise en place d'un procédé de sonorisation ou de fixation d'image se doit d'être exclue et des lieux sanctuarisés. Tel est ainsi le cas de l'exclusion prévue par le nouvel article 106-13 du Code concernant la mise en œuvre de tels dispositifs dans le véhicule, le bureau ou le domicile des membres du Conseil National par exemple.

Pour le reste, l'autorisation doit être limitée dans le temps pour respecter le principe de proportionnalité et garantir l'effectivité du contrôle exercé par les magistrats. Tel est l'objet du nouvel l'article 106-14 du Code, qui dispose que l'autorisation fixe la durée de la mesure qui ne peut excéder deux mois mais peut être renouvelée dans les mêmes conditions de forme et de durée.

Compte tenu de la spécificité du procédé, cette périodicité s'avère raisonnable car elle permet aux magistrats de faire régulièrement le bilan de l'opération en cours tout en leur offrant les moyens de la faire durer en fonction des nécessités de l'espèce.

Par ailleurs les dispositions des nouveaux articles 106-15 et 106-16 imposent le respect des conditions de forme du procès verbal et de son contenu.

S'agissant de la procédure spécifique de l'infiltration, son introduction dans le Code de procédure pénale répond à la forte incitation des divers instruments internationaux envers les États signataires à mettre en œuvre des procédures d'infiltration en matière de criminalité organisée (article 15).

Il en est ainsi de la recommandation n° 2001-11 du 19 septembre 2001 du Conseil de l'Europe concernant les principes directeurs pour la lutte contre le crime organisé qui invite les États membres à adopter une législation permettant « les opérations d'infiltrations, les livraisons surveillées et le recours à des informateurs ».

De même, l'article 20 de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, relatif aux techniques d'enquêtes spéciales, invite les États parties, si les principes fondamentaux de leur système juridique le permettent, à recourir à des « opérations d'infiltrations » en vue de « combattre efficacement la criminalité organisée ». De son côté, la Convention du Conseil de l'Europe du 8 novembre 1990 relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime dispose en son article 4 que « chaque partie envisage d'adopter les mesures législatives [... ] qui se révèlent nécessaires pour lui permettre d'employer des techniques spéciales d'investigation comme l'observation, l'interception de télécommunications, l'accès à des systèmes informatiques ».

L'infiltration consiste, pour un officier ou un agent de police judiciaire, « à surveiller des personnes suspectées de commettre un crime ou un délit en se faisant passer, auprès de ces personnes, comme un de leurs coauteurs, complices ou receleurs », y compris sous une identité d'emprunt et sans encourir de sanctions pénales.

Parce qu'elle constitue une opération exceptionnelle, tant dans son principe qu'en raison de sa dangerosité pour les agents qui la mettent en œuvre, l'infiltration doit être strictement encadrée. Toutefois, en tant que procédure au service de la manifestation de la vérité particulièrement difficile à obtenir par d'autres moyens, le recours aux infiltrations doit être développé pour les cas les plus graves de la criminalité.

Ainsi, dans le respect du pnnc1pe de proportionnalité entre le moyen procédural dérogatoire qu'est l'infiltration et la gravité de l'infraction qui autorise son emploi, les techniques proactives d'infiltration font l'objet d'une utilisation réservée aux cas de criminalité les plus graves et soumise à l'autorisation et au contrôle de magistrats.

Dans le même sens, l'infiltration est strictement encadrée matériellement. Aussi, les agents concernés ne peuvent effectuer, sans être pénalement responsables, qu'un nombre d'actes limitativement énumérés par la loi, et qui constituent une modalité accessoire de la production de la preuve.

On relèvera que l'exonération de responsabilité pénale est également applicable aux personnes « requises » par les officiers ou agents de police judiciaire pour leur permettre de procéder à l'opération d'infiltration, le fournisseur d'un véhicule ou d'un appartement par exemple.

Matériellement, l'exonération de la responsabilité vaut pour les actes tendant à :

  • ► acquérir, détenir, transporter, livrer ou délivrer des substances, biens, produits, documents ou informations tirés de la commission des infractions ou servant à leur commission;

  • ► utiliser ou mettre à la disposition des personnes se livrant à ces infractions des moyens de caractère juridique ou financier, ainsi que des moyens de transport, de dépôt, d'hébergement, de conservation ou de télécommunication.

Toutefois, le deuxième alinéa de l'article 106-17 projeté du Code dispose que, « à peine de nullité, ces actes ne peuvent constituer une incitation à commettre des infractions ». Il s'agit, dans le prolongement du droit en vigueur qui édicte que l'autorisation de procéder à une infiltration ne peut être donnée que pour des actes ne déterminant pas la commission des infractions, d'interdire toute provocation de la part des enquêteurs.

Fortement encadrée matériellement, l'infiltration l'est également juridiquement. En effet, afin de respecter le principe de judiciarité, l'infiltration doit être autorisée par le procureur général ou le juge d'instruction, comme l'indique le nouvel article 106-17 du Code de procédure pénale, qui dispose que le magistrat concerné peut autoriser qu'il soit procédé, « sous son contrôle », à une opération de cette nature.

De même, l'alinéa premier du nouvel article 106-19 du Code précise que cette dernière mention doit être écrite et spécialement motivée « à peine de nullité ». L'autorisation doit également mentionner la ou les infractions qui justifient le recours à cette procédure, ainsi que l'identité de l'officier de police judiciaire sous la responsabilité duquel se déroule l'opération.

Néanmoins, il ne saurait être fait mention de l'identité d'emprunt de l'agent infiltré dans la décision d'autorisation de l'opération par le magistrat, afin d'assurer sa sécurité. La préservation de l'identité de l'agent infiltré est par ailleurs assurée par les dispositions du nouvel article 106-20 du Code, qui punit sévèrement la révélation de cette identité.

L'autorisation donnée doit être limitée dans le temps pour respecter le principe de proportionnalité et garantir l'effectivité du contrôle exercé par les magistrats. Tel est l'objet de l'avant-dernier alinéa du nouvel article 106-19 du Code, qui précise que la durée de l'infiltration fixée par l'autorisation ne peut excéder quatre mois, mais peut être renouvelée dans les mêmes conditions de forme et de durée. Compte tenu de la spécificité de la méthode de l'infiltration, cette périodicité semble raisonnable car elle permet aux magistrats de faire régulièrement le bilan de l'opération en cours tout en leur offrant les moyens de la faire durer en fonction des nécessités de l'espèce.

L'autorisation et le contrôle dont sont investis le procureur général et le juge d'instruction requièrent qu'ils soient à même d'interrompre à tout moment l'infiltration, l'alinéa précité le prévoyant expressément. À toutes ces conditions formelles, vient s'ajouter une substantielle, puisque la mise en œuvre d'une infiltration doit être justifiée par « les nécessités de l'enquête ».

Si l'interruption de l'infiltration peut être réalisée à tout moment, il convient de laisser à l'agent le temps nécessaire pour s'extraire sans péril. En effet, une sortie trop rapide peut aisément devenir suspecte aux yeux des membres du réseau criminel et les amener à prendre des mesures de représailles ou à adopter des stratagèmes de dissimulation qui annihileront tout le travail d'investigation réalisé par l'agent infiltré.

Dans ce sens, l'article 106-21 projeté prévoit le cas où l'agent infiltré prolonge son activité au-delà du délai fixé par le juge afin de garantir sa propre sécurité et sans engager sa responsabilité pénale.

Si l'amélioration de la transparence dans laquelle vont se dérouler les infiltrations est nécessaire, l'autorisation d'infiltration ne saurait être versée au dossier de la procédure lorsque l'opération vient à cesser. En effet, ce versement au dossier signifierait que les parties, et notamment la défense, auraient accès à l'autorisation donnée par les magistrats, qui comporte un certain nombre d'informations parmi lesquelles peuvent figurer notamment la mention d'un indicateur. En effet, les professionnels, spécialistes de l'infiltration, soulignent que la réussite d'une mission suppose l'existence d'un « indicateur » qui offre à la police un moyen de pénétrer le groupe délinquant. Or, en versant cette autorisation au dossier, les personnes ayant été interpellées sauraient donc qu'une opération de cette nature a été menée et n'auraient de cesse d'identifier celui qui a commis, ou permis, ces faits avec les conséquences dramatiques susceptibles d'en découler mettant ainsi en péril la capacité opérationnelle de l'agent pour d'autres infiltrations.

Parmi les techniques spéciales d'enquête introduites par le présent projet, figure en bonne place la question du témoignage anonyme. Cette innovation notable répond tout d'abord aux exigences de l'article 6§3d de la Convention européenne des droits de l'homme concernant le droit à un procès équitable et plus particulièrement le droit à l'interrogation et à la convocation des témoins, mais aussi à la recommandation n° R (97) 13 du Comité des Ministres sur l'intimidation des témoins et les droits de la défense qui incite les États membres à reconnaître le rôle spécifique des témoins dans la procédure pénale et leur rappelle leur devoir de protection contre les pressions en mettant à la disposition de ces témoins des mesures de protection de nature à garantir efficacement leur sécurité.

Ainsi, à l'instar de ces textes, le Gouvernement a-t-il entendu mettre en place la possibilité pour une personne de témoigner librement, sans être soumise à aucune manœuvre d'intimidation (article 17).

De fait, le nouvel article 147-1 du Code prévoit les conditions dans lesquelles cette mesure peut être mise en place, notamment s'il existe un risque réel pour la vie ou la sécurité physique du témoin ou de celle des membres de sa famille ou de ses proches. Si ces conditions sont respectées, le présent projet de loi prévoit toute une série de mesures encadrant le témoignage anonyme, tant au niveau de l'audition, en acceptant le recours à un système de communication électronique, qu'au niveau de la transmission des questions avant l'audition, ou encore la non-signature du procès verbal. Il est à noter que le Gouvernement a fait le choix de retenir le terme de communication électronique, à l'instar de la formulation retenue pour l'insertion de la sous-section I de la section II du titre VI du livre I du Code de procédure pénale (article 13).

Toujours dans un but de proteçtion, est érigée en infraction punie d'un emprisonnement maximal de 5 ans et d'une amende de 18 000 à 90 000 euros, la révélation de l'identité ou de l'adresse du témoin anonyme.

En revanche, dans le strict respect de l'article 6§3 précité, il est nécessaire de veiller à l'utilisation qui peut être faite de ce type de témoignage. Dans ce but, le projet s'attache à prévoir que lorsque l'anonymat a été accordé à une personne, une condamnation ne peut reposer exclusivement sur la preuve principale fournie par celle-ci.

Par ailleurs le Gouvernement a souhaité, en matière de corruption, donner au juge monégasque la possibilité de sécuriser à un stade précoce de l'enquête les diverses formes d'avoir susceptibles d'être confisqués, et la possibilité de gérer les avoirs saisis. Tel est l'objet de la modification de l'article 596-1 du Code de procédure pénale en rendant ses dispositions applicables en matière de corruption.

La saisie des biens pourra donc être ordonnée, tant en matière de blanchiment, qu'en matière de corruption et de trafic d'influence, après avis du juge d'instruction ou du tribunal qui prescrira toutes les mesures d'administration utiles (article 18).

Pour le reste, la dimension internationale n'est pas oubliée puisque le texte projeté améliore sensiblement la coopération judiciaire internationale en autorisant notamment la mise en place d'équipes communes d'enquête. En effet, si la Convention franco-monégasque sur les équipes communes d'enquête et l'Ordonnance Souveraine n° 605 du 1er août 2006 portant application de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et de ses protocoles prévoient la possibilité de mettre en place des équipes communes d'enquête, aucune disposition spécifique sur l'entraide judiciaire n'existait dans la législation pénale procédurale monégasque. L'insertion d'un paragraphe 1er comprenant les articles 596-2 à 596-4 dans le Code de procédure pénale s'avère de ce fait être un progrès au regard des dispositions internationales (article 19).

C'est ainsi qu'est projetée la création d'une équipe commune d'enquête, en présence d'une procédure complexe concernant d'autres États étrangers ou lorsque plusieurs États effectuent des enquêtes relatives à des infractions qui exigent une action coordonnée et concertée entre eux.

Deux dispositions méritent plus spécifiquement d'être signalées, la première, figurant au nouvel article 596-2 du Code, confère aux agents étrangers détachés en Principauté, dans la limite des pouvoirs conférés par leur statut, mission pour :

  • ► constater toute infraction et en dresser procès verbal ;

  • ► recevoir par procès-verbal les déclarations susceptibles de fournir des renseignements sur les faits en cause ;

  • ► seconder les officiers de police judiciaire monégasques dans l'exercice de leurs fonctions ;

  • ► procéder à des surveillances et, à condition d'être spécialement habilités pour cela, à des infiltrations, dans les conditions prévues par les articles 106-17 et suivants du Code.

En ce qui concerne les deux premières missions, même si ces actes sont effectués en priorité selon les règles du Code de procédure pénale monégasque, les agents détachés peuvent également, pour des raisons de simplicité et d'efficacité, les réaliser dans les formes prévues par le droit de leur État.

Afin de lever toute ambiguïté, ces agents ne peuvent en aucun cas exercer par délégation les pouvoirs propres de l'officier de police judiciaire responsable de l'équipe commune d'enquête, leur rôle se limitant strictement aux opérations prescrites.

Cette précision, qui vise à exclure tout pouvoir de coercition, permet d'éviter un transfert de souveraineté dans la mesure où les agents poursuivant ne disposent pas du droit d'interpellation et ne peuvent pas entrer dans les domiciles et les lieux non accessibles au public.

Enfin, un original des procès-verbaux établis doit être rédigé ou traduit en langue française et versé au dossier de la procédure monégasque.

La seconde, objet d'un nouvel article 596-3 du même Code, transpose de manière similaire les dispositions précédentes s'agissant de la compétence des agents détachés monégasques auprès d'une équipe commune d'enquête. Ces agents, qui pourront être des officiers ou des agents de police judiciaire détachés dans les conditions prévues par la convention d'entraide judiciaire, pourront procéder aux opérations prescrites par le responsable de l'équipe commune d'enquête sur toute l'étendue du territoire de l'État d'intervention, dans la limite des pouvoirs qui leur sont reconnus par le Code de procédure pénale.

Par dérogation à l'article 43 du Code de procédure pénale, leur compétence s'exercera donc sur l'ensemble du territoire de l'État d'intervention.

À l'instar de l'article 596-2, leurs missions seront donc définies par l'autorité judiciaire territorialement compétente pour composer et diriger l'équipe commune d'enquête.

Dans le même sens, il est précisé que ces agents pourront recevoir les déclarations et constater les infractions selon les dispositions du Code de procédure pénale, à condition toutefois qu'ils obtiennent au préalable l'accord de l'État d'intervention.

Enfin, la démarche retenue par le Gouvernement consiste à limiter la mise en place d'équipes communes d'enquêtes à l'égard des États liés à la Principauté par des conventions internationales les prévoyant.

Toujours dans un· objectif d'efficacité et de collaboration, le Gouvernement Princier a souhaité introduire, comme ci-avant indiqué, dans un paragraphe 2 au Titre XI du Livre IV du Code de procédure pénale, les procédures d'enquêtes proactives, parmi lesquelles la vidéoconférence (article 19).

Il est en effet apparu hautement opportun au Gouvernement de consacrer une disposition particulière afin de donner la possibilité de réaliser l'audition, l'interrogatoire ou la confrontation de plusieurs personnes au moyen de télécommunications garantissant la confidentialité de la transmission.

L'utilisation de techniques modernes de communication à distance, préconisée par plusieurs instruments internationaux, présente un intérêt tout particulier en matière d'entraide judiciaire internationale, spécialement en matière de lutte contre la corruption.

De fait, l'autorisation d'utiliser des moyens de communications électroniques garantissant la confidentialité de la transmission au cours de la procédure pénale et la sécurité de la procédure, en vue d'interroger des personnes à distance, permet de surmonter les obstacles procéduraux ou matériels liés au déplacement de ces personnes ou des autorités susceptibles de les entendre.

Les dispositions prévues sont applicables pour l'exécution simultanée, sur un point du territoire monégasque et sur un point situé à l'extérieur, des demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires étrangères ou des actes réalisés à l'étranger sur demande des autorités judiciaires monégasques.

Lorsqu'il s'agit d'un interrogatoire, d'une audition ou d'une confrontation réalisé à l'étranger sur demande des autorités judiciaires monégasques, cet acte est réalisé selon les règles prévues par les articles 60 -10 et 125 à 147 et 166 à 175 du Code de procédure pénale.

Enfin, l'article 596-6 du Code prévoit que les dispositions des articles 300 à 306 du Code pénal et 323 du Code de procédure pénale concernant le faux témoignage et le refus de témoigner sans en être légitimement empêché sont applicables aux témoins entendus sur le territoire de la Principauté à la demande d'une juridiction étrangère dans le cadre de cette procédure.

Pour être complet, on relèvera enfin que le présent projet institue le casier judiciaire des personnes morales, en modifiant les articles 650 et 653 du Code de procédure pénale afin d'étendre l'application de leurs dispositions aux personnes morales (articles 20 et 21).

De fait, si le principe général de la responsabilité des personnes morales a été posé en droit monégasque par la loi n° 1.349 du 25 juin 2008 modifiant le livre premier du Code pénal, aucune disposition n'avait été prévue concernant une quelconque inscription de leur condamnation au casier judiciaire.

Ces nouvelles dispositions permettront d'assurer une information concrète et effective, et ce en parfaite conformité avec les exigences de transparence européennes.

Tel est l'objet du présent projet de loi.

Dispositif🔗

Titre préliminaire - Définitions🔗

Article préliminaire🔗

L'article 112 du Code pénal est abrogé.

Le paragraphe IV, section II, chapitre III, livre III du Code pénal, est remplacé par le présent paragraphe comprenant les articles 113 à 122-2, intitulé comme suit :

« § IV - De la prise illégale d'intérêts, de la corruption et du trafic d'influence

Article 113 : Au sens du présent paragraphe, un agent public national est une personne dépositaire de l'autorité publique, ou chargée d'une mission de service public, ou investie d'un mandat électif public.

Un agent public étranger ou international est une personne dépositaire de l'autorité publique, ou chargée d'une mission de service public, ou investie d'un mandat électif public dans un État étranger, ou au sein d'une organisation internationale publique.

Un agent privé est une personne qui sans être dépositaire de l'autorité publique, ni chargée d'une mission de service public, ni investie d'un mandat électif public, exerce dans le cadre d'une activité commerciale, une fonction de direction ou un travail pour une entité du secteur privé.

Article 113-1 : La prise illégale d'intérêts est le fait pour un agent public national de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt matériel ou moral dans une opération ou dans une entreprise dont il a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement.

La participation d'un agent public national à une délibération, même exclusive de tout vote, portant sur une affaire dans laquelle il a un intérêt matériel ou moral, vaut surveillance ou administration au sens du premier alinéa du présent article.

Article 113-2 : La corruption passive est le fait par un agent public ou privé de solliciter, d'accepter ou de recevoir, directement ou indirectement, tout avantage indu, pour lui-même ou pour autrui, pour accomplir ou s'abstenir d'accomplir ou pour avoir accompli ou s'être abstenu d'accomplir un acte de sa fonction ou facilité par sa fonction.

La corruption active est le fait par quiconque de proposer, d'accorder ou d'octroyer, directement ou indirectement tout avantage indu, pour lui­ même ou pour autrui, pour obtenir d'une personne physique ou morale qu'elle accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte de sa fonction ou facilité par sa fonction ou pour avoir accompli ou s'être abstenu d'accomplir un acte de sa fonction ou facilité par sa fonction.

Article 113-3 : le trafic d'influence passif est le fait par un agent public de solliciter, d'accepter ou recevoir, directement ou indirectement, tout avantage indu, pour lui-même ou pour autrui, pour abuser de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir ou d'avoir fait obtenir d'une autorité ou d'une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable ou pour avoir abusé de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir ou d'avoir fait obtenir d'une autorité ou d'une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable.

Le trafic d'influence actif est le fait par quiconque de proposer, d'accorder ou d'octroyer, directement ou indirectement, pour lui-même ou pour autrui, tout avantage indu pour obtenir d'une personne physique ou morale qu'elle abuse de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d'une autorité ou d'une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable ou pour avoir abusé de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d'une autorité ou d'une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable. »

Titre Ier - Dispositions pénales🔗

Chapitre Ier - De la prise illégale d'intérêts🔗

Article 1er🔗

L'article 114 du Code pénal est remplacé par les dispositions suivantes :

« Le délit de prise illégale d'intérêts est puni de un à cinq ans d'emprisonnement et de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 lorsqu'il est commis par un agent public national. »

Chapitre II - De la corruption🔗

Article 2🔗

Les articles 115 à 118 du Code pénal sont remplacés par les dispositions suivantes :

« Article 115 : La corruption passive est punie de cinq à dix ans d'emprisonnement et du double de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 lorsqu'elle est commise par un agent public national.

La corruption active est punie des mêmes peines, lorsqu'elle est commise sur l'agent public national.

Article 116 : La corruption passive est punie de la réclusion de huit à quinze ans et du triple de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 lorsqu'elle est commise par un magistrat ou un juré, au bénéfice ou au détriment d'une personne faisant l'objet de poursuites pénales.

Article 117 : La corruption passive est punie de un à cinq ans d'emprisonnement et de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 lorsqu'elle est commise par un agent privé.

La corruption active commise sur un agent privé est punie des mêmes peines.

Article 118 : La corruption passive est punie de cinq à dix ans d'emprisonnement et du double de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 lorsqu'elle est commise par un agent public étranger ou international.

La corruption active sur un agent public étranger ou international est punie des mêmes peines. »

Chapitre III - Du trafic d'influence🔗

Article 3🔗

Les articles 119 à 121 du Code pénal sont remplacés par les dispositions suivantes :

« Article 119 : Le trafic d'influence actif est puni de cinq à dix ans d'emprisonnement et du double de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 lorsqu'il est commis sur un agent public national.

Le trafic d'influence passif commis par un agent public national est puni des mêmes peines.

Article 120 : Le trafic d'influence passif est puni de la réclusion de huit à quinze ans et du triple de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 lorsqu'il est commis par un magistrat, au bénéfice ou au détriment d'une personne faisant l'objet de poursuites pénales.

Article 121 : Le trafic d'influence actif est puni de cinq à dix ans d'emprisonnement et du double de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 lorsqu'il est commis sur un agent public étranger ou international.

Le trafic d'influence passif commis par un agent public étranger ou international est puni des mêmes peines. »

Chapitre IV - Dispositions générales🔗

Article 4🔗

Est inséré au Code pénal un article 121-1 rédigé comme suit :

« Est puni de la réclusion de cinq à dix ans et du double de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26, le fait d'user de menaces, de violences ou de commettre tout autre acte d'intimidation pour obtenir d'un agent public qu'il accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat, ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat, soit qu'il abuse de son autorité vraie ou supposée en vue de faire obtenir d'une autorité ou d'une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable ».

Article 5🔗

L'article 122 du Code pénal est remplacé par les dispositions suivantes :

« Dans tous les cas visés au présent paragraphe, les coupables encourent également la peine complémentaire d'interdiction des droits mentionnés à l'article 27 du présent Code, pendant cinq ans au moins et dix ans au plus, à compter du jour où ils auront subi leur peine.

L'agent public national est en outre privé du droit d'exercer une fonction publique ou une mission de service public ou bien encore une fonction élective ou juridictionnelle de manière définitive ou temporaire pour une durée de cinq ans au moins et dix ans au plus, à compter du jour où il aura subi sa peine. »

Article 6🔗

Est inséré au Code pénal un article 122-1 rédigé comme suit :

« Les infractions prévues par les articles 114 à 121 sont punies de dix à vingt ans de réclusion et de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 dont le maximum peut être porté au décuple, lorsqu'elles sont commises en bande organisée. »

Article 7🔗

Est inséré au Code pénal un article 122-2 rédigé comme suit :

« Le tribunal ordonne la confiscation du produit des infractions de prise illégale d'intérêt, de corruption et de trafic d'influence.

Il ordonne également la confiscation de tous biens acquis en utilisant le produit de ces infractions.

Il peut également ordonner la confiscation du produit de ces infractions ou de tous biens acquis en utilisant ce produit auprès de toute autre personne les détenant et en quelque lieu qu'ils se trouvent, dès lors qu'elle ne pouvait en ignorer l'origine frauduleuse.

Si le produit de ces infractions a été mêlé à des biens légitimement acquis, ces biens peuvent être confisqués à concurrence de la valeur estimée du produit qui y a été mêlé.

Si le produit de ces infractions ne peut pas ou plus être trouvé en tant que tel dans le patrimoine de la personne condamnée, le tribunal peut ordonner la confiscation de biens ou de capitaux d'une valeur équivalente à celle du produit de ces infractions.

La confiscation peut être prononcée sans préjudice des droits des tiers.

Le procureur général procède aux formalités d'enregistrement et de publicité nécessaires. »

Article 8🔗

L'article 218-3 du Code pénal est modifié comme suit :

« Pour l'application de la présente section, est qualifié de biens et de capitaux d'origine illicite le produit des infractions punies dans la Principauté d'une peine d'emprisonnement supérieure à trois ans.

Est également qualifié de biens et de capitaux d'origine illicite le produit des infractions mentionnées aux articles 82, 83, 265, 268, 304, 324, 327 alinéa 1er, 328-5, 335, 337, 360, 362, 363, et 364 du Code pénal, aux articles 44 et 45 de la loi n ° 606 du 20 juin 1955, aux articles 23, 24 et 25 de la loin° 1.058 du l0juin 1983 et à l'article 49 de la loi n° 1.338 du 7 juillet 2007. »

Titre II - Dispositions de procédure pénale🔗

Chapitre Ier - De la procédure🔗

Article 9🔗

L'article 31 du Code de procédure pénale est modifié comme suit :

« Sauf dans les cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est secrète.

Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel selon les dispositions de l'article 308 du Code pénal.

Toutefois, afin d'éviter la propagation d'informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l'ordre public, le procureur général peut, d'office ou à la demande de la juridiction d'instruction ou des parties, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause ».

Article 10🔗

L'article 32 du Code de procédure pénale est modifié comme suit :

« La police judiciaire constate les infractions à la loi pénale, en rassemble les preuves et en recherche les auteurs.

Elle est exercée, sous l'autorité de la Cour d'appel et sous la direction du procureur général, par les officiers de police judiciaire, les carabiniers, les agents de la sûreté publique et, dans les cas qu'elles déterminent, les fonctionnaires désignés par les lois spéciales. »

Article 11🔗

L'article 33 du Code de procédure pénale est remplacé par les dispositions suivantes :

« Le procureur général, en concertation avec le premier président de la Cour d'appel et après avoir recueilli les observations du directeur de la sûreté publique, établit l'évaluation des officiers de police judiciaire. »

Article 12🔗

L'article 34 du Code de procédure pénale est modifié comme suit :

« Le procureur général a la direction de la police judiciaire et exerce l'action publique.

Il est chargé de la recherche et de la poursuite des crimes et des délits.

Il reçoit les dénonciations et les plaintes qui lui sont adressées ainsi que tous rapports, procès-verbaux, renseignements qui lui sont transmis par les officiers de police judiciaire ou par toute autre voie, sur les crimes et les délits.

Il apprécie la suite à leur donner.

En cas de classement de l'affaire, il notifie sa décision en mentionnant les motifs de fait ou de droit qui la justifient, au plaignant, à la victime lorsque celle-ci a été identifiée, ainsi qu'au dénonciateur.

Toute personne ayant dénoncé des faits au procureur général peut former un recours, dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision de classement sans suite prise à la suite de cette dénonciation, auprès du directeur des services judiciaires. Le directeur des services judiciaires peut enjoindre au procureur général d'engager des poursuites. S'il estime le recours infondé, il en informe l'intéressé.

Le plaignant peut alors se constituer partie civile conformément aux dispositions des articles 73 à 81. »

Chapitre III - Des techniques spéciales d'enquête🔗

Article 13🔗

L'intitulé de la section II du titre VI du livre I du Code de procédure pénale est modifiée comme suit :

« section II: Des techniques spéciales d'enquête »

Est inséré à la section II du titre VI du livre I du Code de procédure pénale une Sous-section I intitulée « Des transports, des perquisitions, des saisies et de l'interception, de l'enregistrement et de la transcription des correspondances émises par voie de communications électroniques » comprenant les articles 92 à 106-11.

Article 14🔗

Est inséré à la section II du titre VI du livre I du Code de procédure pénale une Sous-section II intitulée « Des sonorisations et des fixations d'images de certains lieux ou véhicules » comprenant les articles suivants:

« Article 106-12: Lorsque les nécessités de l'information l'exigent, et pour les seules infractions relevant de la criminalité et de la délinquance organisées, le juge d'instruction peut, après avis du procureur général, autoriser, par ordonnance motivée, les officiers de police judiciaire commis sur commission rogatoire à mettre en place un dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, la captation, la .fixation, la transmission et l'enregistrement de paroles prononcées par une ou plusieurs personnes à titre privé ou confidentiel, dans des lieux ou véhicules privés ou publics ou de l'image d'une ou plusieurs personnes se trouvant dans un lieu privé. Ces opérations sont effectuées sous l'autorité et le contrôle du juge d'instruction.

Article 106-13 : La mise en place de ce dispositif technique ne peut concerner les lieux visés à l'article 106-8, ni être mise en œuvre dans le véhicule, le bureau ou le domicile des personnes visées à ce même article.

Article 106-14: La commission rogatoire donnée à l'officier de police judiciaire pour effectuer les opérations prescrites en vertu de l'article 106-12 doit mentionner tous les éléments permettant d'identifier les véhicules ou les lieux privés ou publics visés, l'infraction qui motive le recours aux mesures techniques à mettre en œuvre ainsi que la durée de celles-ci.

Ces mesures ne peuvent excéder deux mois à compter de leur mise en œuvre. Elle peuvent être renouvelées dans les mêmes conditions de forme et de durée.

Article 106-15: Le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire commis par lui dresse procès-verbal de chacune des opérations de mise en place du dispositif technique et des opérations de captation, de fixation et d'enregistrement sonore ou audiovisuel. Ce procès-verbal mentionne la date et l'heure auxquelles l'opération a commencé et celles auxquelles elle s'est terminée.

Les enregistrements sont placés sous scellés fermés. Les dispositions de l'article 106-10 leur sont applicables.

Article 106-16 : Le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire commis par lui décrit ou transcrit dans un procès-verbal qui est versé au dossier les images ou les conversations enregistrées qui sont utiles à la manifestation de la vérité.

Les conversations en langue étrangère sont transcrites en français avec l'assistance d'un interprète requis à cette fin. »

Article 15🔗

Est inséré à la section II du titre VI du livre I du Code de procédure pénale une Sous-section III intitulée « Des enquêtes discrètes » comprenant les articles suivants :

« Article 106-17: Lorsque les nécessités de l'enquête le justifient le procureur général ou le juge d'instruction, dans le cadre d'une commission rogatoire, peut autoriser, à titre exceptionnel, qu'il soit procédé, sous son contrôle, à une opération d'infiltration.

L'infiltration consiste, pour un officier ou un agent de police judiciaire agissant sous la responsabilité d'un officier de police judiciaire chargé de coordonner l'opération, à surveiller des personnes suspectées de commettre un crime ou un délit en se faisant passer, auprès de ces personnes, comme un de leurs coauteurs, complices ou receleurs. L'officier ou l'agent de police judiciaire est à cette fin autorisé à faire usage d'une identité d'emprunt et à commettre si nécessaire les actes mentionnés à l'article 106-18. À peine de nullité, ces actes ne peuvent constituer une incitation à commettre des infractions.

L'infiltration fait l'objet d'un rapport rédigé par l'officier de police judiciaire ayant coordonné l'opération.

Article 106-18 : Les officiers ou agents de police judiciaire autorisés à procéder à une opération d'infiltration peuvent, sur l'ensemble du territoire de la Principauté, sans être pénalement responsables de ces actes :

  • 1 °} acquérir, détenir, transporter, livrer ou délivrer des substances, biens, produits, documents ou informations tirés de la commission des infractions ou servant à la commission de ces infractions ;

  • 2°) utiliser ou mettre à disposition des personnes se livrant à ces infractions des moyens de caractère juridique ou financier ainsi que des moyens de transport, de dépôt, d'hébergement, de conservation et de télécommunication.

L'exonération de responsabilité prévue au premier alinéa est également applicable aux personnes requises par ces officiers ou agents de police judiciaire pour leur permettre de procéder à l'opération d'infiltration.

Article 106-19 À peine de nullité, l'autorisation donnée en application de l'article 106-17 est délivrée par écrit et doit être spécialement motivée.

Elle mentionne la ou les infractions qui justifient le recours à cette procédure, l'identité de l'officier de police judiciaire sous la responsabilité duquel se déroule l'opération ainsi que l'identité d'emprunt de l'agent ou des agents qui effectuent l'infiltration.

Cette autorisation fixe la durée de l'opération d'infiltration, qui ne peut excéder quatre mois. L'opération peut toutefois être renouvelée dans les mêmes conditions de forme et de durée. Le procureur général peut, à tout moment, ordonner son interruption avant l'expiration de la durée fixée.

L'autorisation est versée au dossier de la procédure après achèvement de l'opération d'infiltration.

Article 106-20: L'identité réelle des officiers ou agents de police judiciaire ayant effectué l'infiltration sous une identité d'emprunt ne doit apparaître à aucun stade de la procédure.

La révélation de l'identité de ces ·officiers ou agents de police judiciaire est punie de cinq ans d'emprisonnement et de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 du Code pénal.

Lorsque cette révélation a causé, même indirectement, la mort de ces personnes, les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et du double de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 du Code pénal, sans préjudice, le cas échéant, de l'application des dispositions relatives aux crimes et délits contre les personnes prévues par le Code pénal.

Article 106-21 : En cas de décision d'interruption de l'opération ou à l'issue du délai fixé par la décision autorisant l'infiltration et en l'absence de prolongation, l'agent infiltré peut poursuivre les activités mentionnées à l'article 106-18, sans en être pénalement responsable, le temps strictement nécessaire pour lui permettre de cesser sa surveillance dans des conditions assurant sa sécurité.

Article 106-22 : L'officier de police judiciaire sous la responsabilité duquel se déroule l'opération d'infiltration peut seul être entendu en qualité de témoin sur l'opération.

Toutefois, s'il ressort du rapport mentionné au troisième alinéa de l'article 106-1 7 que le suspect est directement mis en cause par des constatations effectuées par un agent ayant personnellement réalisé les opérations d'infiltration, cette personne peut demander à être confrontée avec cet agent dans les conditions prévues par les articles 147-1 à 147-5.

Article 106-23 : Aucune condamnation ne peut être prononcée sur le seul fondement des déclarations faites par les officiers ou agents de police judiciaire ayant procédé à une opération d'infiltration. »

Chapitre III - Du témoignage anonyme🔗

Article 16🔗

Est inséré dans la section IV du titre VI du livre I du Code de procédure pénale un paragraphe 1 intitulé « Dispositions générales » comprenant les articles 125 à 147.

Article 17🔗

Est inséré dans la section IV du titre VI du livre I du Code de procédure pénale un paragraphe 2 intitulé « § 2.- Du témoignage anonyme » comprenant les articles suivants :

« Article 147-1 : Lorsque la peine encourue est au moins égale à cinq ans d'emprisonnement, le juge d'instruction seul peut procéder à l'audition d'un témoin dont l'identité demeure secrète dans les cas suivants :

  • 1°) si cette audition est susceptible de mettre gravement en danger la vie ou la sécurité physique du témoin ou celle des membres de sa famille ou de ses proches ;

  • 2°) si le témoin est un officier ou un agent de police judiciaire infiltré. Le témoignage anonyme doit au préalable être autorisé par le premier président de la Cour d'appel saisi par le juge d'instruction. Cette ordonnance ne peut faire l'objet d'aucun recours.

Article 147-2 : Le juge d'instruction procède à l'audition du témoin en prenant toutes les mesures nécessaires pour tenir secrète son identité. À cette fin, il peut avoir recours à un système de communication électronique.

Le Ministère public, l'inculpé, la partie civile et leurs conseils dûment avisés au moins huit jours à l'avance, sauf urgence motivée par ordonnance, peuvent soumettre au juge d'instruction, avant et pendant l'audition du témoin, les questions qu'ils souhaitent voir poser. Celles-ci sont écartées si elles sont de nature à conduire à divulguer l'identité du témoin.

Le juge d'instruction fait dresser, dans les formes de l'article 137 du présent code, un procès-verbal de l'audition mentionnant les questions posées et les réponses apportées ainsi que les questions écartées. Le témoin dont l'anonymat est protégé ne signe pas le procès-verbal.

L'identité et l'adresse du témoin doivent être précisées dans un autre procès-verbal signé par ce témoin. Celui-ci atteste que les déclarations consignées dans le procès-verbal visé à l'alinéa précédent, joint en copie, ont bien été faites par lui. Le procès-verbal et la copie jointe ne sont pas versés au dossier de la procédure mais conservés par le premier président de la Cour d'appel.

Article 147-3 : La chambre du conseil de la Cour d'appel peut être saisie par les parties de toute difficulté inhérente à cette procédure, notamment lorsqu'il est fait grief à cette dernière d'interdire l'exercice des droits de la défense. La décision n'est soumise à aucun recours.

Le témoin, s'il le souhaite, peut autoriser la révélation de son identité.

Article 147-4: Toute révélation de l'identité ou de l'adresse du témoin dans des conditions autres que celles prévues au second alinéa de l'article précédent est punie d'un emprisonnement maximum de cinq ans et de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 du Code pénal.

Article 147-5 : Aucune condamnation ne peut être prononcée sur le seul fondement de déclarations recueillies dans les conditions prévues par les articles 147-1 à 147-3. »

Chapitre IV - De la saisie🔗

Article 18🔗

Le titre X du livre IV du Code de procédure pénale est modifié comme suit :

« De la saisie en matière de blanchiment, de corruption et de trafic d'influence

Article 596-1 : En matière de blanchiment, de corruption ou de trafic d'influence, la saisie des biens pourra être ordonnée, après avis du procureur général, par décision motivée du juge d'instruction ou du tribunal qui prescrira toutes mesures d'administration utiles.

L'appel de cette décision pourra être interjeté dans les vingt heures de sa notification aux parties dans les conditions prévues à l'article 226. L'appel n'a pas d'effet suspensif.

La décision de saisie concernant un navire sera portée à la connaissance du Directeur des affaires maritimes dans le respect des dispositions du chapitre V du titre premier du livre III du Code de la mer.

La décision de saisie d'un véhicule à moteur sera portée à la connaissance du service compétent dans les conditions fixées par ordonnance souveraine.

Lorsqu'il y a lieu, la décision sera inscrite, à la diligence du procureur général au répertoire du commerce et de l'industrie, au registre spécial des sociétés civiles ou à la conservation des hypothèques.

En cas de non-lieu ou de relaxe, ou s'il y a mainlevée de la mesure de saisie, la décision ordonne la radiation des inscriptions effectuées.

Sous réserve des mesures d'administration prévues au premier alinéa, les biens saisis ne pourront faire l'objet, à peine de nullité, d'aucune constitution de droit réel ou personnel.

Les dispositions du présent titre ne font pas obstacle aux pouvoirs du procureur général en matière de crimes et délits flagrants, tels qu'ils résultent de l'article 255. »

Chapitre V - De l'entraide judiciaire🔗

Article 19🔗

Est inséré un titre XI au livre IV du Code de procédure pénale rédigé comme suit :

« Titre XI

De l'entraide judiciaire internationale

Section I

De l'application des traités et accords

§ 1er Des équipes communes d'enquêtes

Article 596-2 : Avec l'accord préalable du directeur des services judiciaires et le consentement de l'État étranger concerné, l'autorité judiciaire compétente peut créer une équipe commune d'enquête, soit lorsqu'il y a lieu d'effectuer, dans le cadre d'une procédure monégasque, des enquêtes complexes impliquant la mobilisation d'importants moyens et qui concernent d'autres États étrangers, soit lorsque plusieurs États effectuent des enquêtes relatives à des infractions exigeant une action coordonnée et concertée entre eux.

Les agents étrangers détachés par un autre État auprès d'une équipe commune d'enquête, dans la limite des attributions attachées à leur statut, peuvent, sous la direction de l'autorité judiciaire compétente, avoir pour mission, le cas échéant, sur tout le territoire de la Principauté :

  • 1) de constater tous crimes, délits ou contraventions et d'en dresser procès-verbal, au besoin dans les formes prévues par le droit de leur État ;

  • 2) de recevoir par procès-verbal les déclarations qui leur sont faites par toute personne susceptible de fournir des renseignements sur les faits en cause, au besoin dans les formes prévues par le droit de leur État ;

  • 3) de seconder les officiers de police judiciaire de la Principauté dans l'exercice de leurs fonctions ;

  • 4) de procéder à des surveillances et, s'ils sont spécialement habilités à cette fin par l'autorité compétente de l'État ayant procédé à leur détachement, à des infiltrations.

Les agents étrangers détachés auprès d'une équipe commune d'enquête peuvent exercer ces missions, sous réserve du consentement de l'autorité compétente de l'État ayant procédé à leur détachement.

Ces agents n'interviennent que dans les opérations pour lesquelles ils ont été désignés. Aucun des pouvoirs propres de l'officier de police judiciaire de la Principauté, responsable de l'équipe, ne peut leur être délégué.

Un original des procès-verbaux qu'ils ont établis et qui doit être rédigé ou traduit en langue française est versé à la procédure monégasque.

Article 596-3: Les officiers et agents de police judiciaire monégasques détachés auprès d'une équipe commune d'enquête peuvent procéder aux opérations prescrites par le responsable d'équipe, sur toute l'étendue du territoire de l'État où ils interviennent, dans la limite des pouvoirs qui leur sont reconnus par le présent code.

Leurs missions sont dé.finies par l'autorité de l'État étranger compétente pour diriger l'équipe commune d'enquête sur le territoire duquel l'équipe intervient.

Ils peuvent recevoir les déclarations et constater les infractions dans les formes prévues par le présent code, sous réserve de l'accord de l'État sur le territoire duquel ils interviennent.

Article 596-4 : Les dispositions du présent paragraphe ne sont applicables qu'à l'égard des États liés à la Principauté par des traités ou des accords prévoyant la constitution d'équipes communes d'enquêtes.

§2 De la vidéoconférence

Article 596-5: Pour l'exécution simultanée, sur le territoire de la Principauté et à l'étranger, de demandes d'entraides judiciaire internationales ou en application des articles 596-2 à 596-4, lorsque les nécessités de l'enquête ou de l'instruction le justifient, l'audition ou l'interrogatoire d'une personne ainsi que la confrontation entre plusieurs personnes peuvent être effectués entre un point du territoire de la Principauté et un point situé à l'extérieur, se trouvant reliés par des moyens de communications électroniques permettant la visualisation ainsi que l'audition des intéressés et, garantissant la confidentialité de la transmission.

Ces actes sont réalisés conformément aux règles prévues par les articles 60-10,125 à 147 et 166 à 175.

Article 596-6 : Les dispositions des articles 300 à 306 sont applicables aux témoins entendus sur le territoire de la Principauté à la demande d'une juridiction étrangère. »

Chapitre VI - Du casier judiciaire des personnes morales🔗

Article 20🔗

L'article 650 du Code de procédure pénale est modifié comme suit :

« Toute condamnation, soit contradictoire, soit par contumace, soit par défaut non frappée d'opposition, prononcée pour un crime ou un délit par une juridiction de la Principauté donne lieu à la rédaction par le greffier d'un extrait dit « bulletin n° 1 » destiné à être classé au greffe général.

Ce bulletin mentionne les nom, prénoms, filiation, date et lieu de naissance, domicile, profession et nationalité du condamné.

Lorsqu'il s'agit d'une personne morale, ce bulletin mentionne l'identité, les raison ou dénomination sociale, forme juridique, siège social et objet social de la personne morale condamnée.

Il mentionne également la juridiction qui a statué, le caractère définitif ou non du jugement ou de l'arrêt, son caractère contradictoire, par défaut ou par contumace, la date de la condamnation, la nature des crimes et délits qui ont motivé la condamnation et la date de ces infractions, la nature, la durée, le taux de la peine prononcée, le bénéfice du sursis s'il a été accordé, le texte visé par le jugement ou l'arrêt, le refus de l'imputation de la détention préventive ou, s'il y a eu imputation, la date du mandat d'arrêt ou de l'ordonnance de prise de corps. »

Article 21🔗

L'article 653 du Code de procédure pénale est modifié comme suit :

« Le greffe général reçoit et classe au casier judiciaire, en ce qui concerne les personnes physiques de nationalité monégasque, après vérification de leur identité au registre de l'état civil, et les personnes morales ayant leur siege social dans la Principauté, les bulletins afférents aux condamnations prononcées par les juridictions des pays étrangers avec lesquels existent des traités ou des accords de réciprocité, ainsi que les bulletins énumérés dans l'article 651 en provenance des mêmes pays.

Il en délivre des extraits dans les conditions prévues aux articles ci-dessous. »

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