Tribunal de première instance, 21 novembre 2013, SARL O. et autres c/ Société Civile Immobilière P. et autres
Abstract🔗
Baux - Bail mixte à usage d'habitation et de bureau - Domiciliation de sociétés - Qualité de parties au contrat des sociétés (non).
Résumé🔗
Le bail est à usage mixte d'habitation bourgeoise et de bureau administratif pour la domiciliation du siège de deux sociétés. Le bail ayant été consenti à deux personnes physiques, les deux sociétés sont tiers au contrat de bail et n'ont pas qualité pour agir contre le bailleur.
Motifs🔗
TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
JUGEMENT DU 21 NOVEMBRE 2013
I - En la cause n° 2011/000318 (assignation du 12 janvier 2011) de :
La société à responsabilité limitée dénommée SARL O., immatriculée au Répertoire du Commerce et de l'Industrie sous le n° 09 S 04982, dont le siège social est X1 MC 98000 MONACO, agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice, domicilié en cette qualité audit siège,
DEMANDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Patrick GAYETTI et Maître Julien SALOMON, avocats au Barreau de Nice,
Monsieur N. BA., né le 30 mai 1973 à Sofia (Bulgarie), de nationalité bulgare, domicilié à Monaco - X,
Madame T. BU. épouse BA., née le 24 juillet 1973 à Sofia (Bulgarie), de nationalité bulgare, domiciliée à Monaco - X,
INTERVENANTS VOLONTAIRES, ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Patrick GAYETTI et Maître Julien SALOMON, avocats au Barreau de Nice,
d'une part ;
Contre :
La société Civile Immobilière P., dont le siège social est X à MONACO prise en la personne de son gérant en exercice Monsieur G. LA VE., demeurant et domicilié X à MONACO,
DÉFENDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur,
La Société Civile Immobilière C., dont le siège social est X à MONACO prise en la personne de son co-gérant en exercice Monsieur C. MA., demeurant et domicilié X à MONACO,
DÉFENDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur,
d'autre part ;
II - En la cause n° 2012/000315 (assignation du 5 janvier 2012) de :
La Société Civile Immobilière C., société de droit monégasque enregistrée au répertoire spécial des sociétés civiles sous le n° 10 SC 14485, dont le siège social se trouve X - 98000 Monaco, agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice, Monsieur P. MA., demeurant et domicilié en cette qualité à ladite adresse,
DEMANDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur,
d'une part ;
Contre :
La SARL O., immatriculée au Répertoire du commerce et de l'industrie sous le n° 09 S 04982, dont le siège social est « X » X1 98000 Monaco, prise en la personne de son associé gérant en exercice, demeurant et domicilié en cette qualité à ladite adresse,
DÉFENDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Patrick GAYETTI et Maître Julien SALOMON, avocats au Barreau de Nice,
Monsieur N. BA., né le 30 mai 1973 à Sofia (Bulgarie), de nationalité bulgare, domicilié à Monaco - X,
Madame T. BU. épouse BA., née le 24 juillet 1973 à Sofia (Bulgarie), de nationalité bulgare, domiciliée à Monaco - X,
INTERVENANTS VOLONTAIRES, ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Patrick GAYETTI et Maître Julien SALOMON, avocats au Barreau de Nice,
La Société Civile Immobilière P., société de droit monégasque enregistrée au répertoire spécial des sociétés civiles sous le n° 00 SC 09894, dont le siège social est X à Monaco (98000), prise en la personne de son gérant en exercice, Monsieur G. LA VE., demeurant et domicilié en cette qualité à ladite adresse et résidant X à Monaco,
Monsieur G. LA VE., gérant de la SCI P., demeurant et domicilié X à Monaco (98000),
DÉFENDEURS, ayant élu domicile en l'étude de Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur,
d'autre part ;
LE TRIBUNAL,
Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, huissier, en date du 12 janvier 2011, enregistré (n° 2011/000318) ;
Vu le jugement avant-dire-droit de ce Tribunal en date du 15 décembre 2011 ayant notamment autorisé la SCI C. à appeler en garantie la SCI P. et G. LA VE., en sa qualité de gérant de la SCI P., et renvoyé la cause et les parties à l'audience du 26 janvier 2012 ;
Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, huissier, en date du 5 janvier 2012, enregistré (n° 2012/000315) ;
Vu les conclusions de Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur, au nom de la SCI P. et G. LA VE., en date des 9 mai 2012, 18 janvier 2013 et 11 juillet 2013 ;
Vu les conclusions de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de la SARL O., N. BA. et T. BU. épouse BA., en date des 20 novembre 2012, 13 février 2013 et 19 juin 2013 ;
Vu les conclusions de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur, au nom de la SCI C., en date des 16 janvier 2013 et 24 avril 2013 ;
À l'audience publique du 10 octobre 2013, les conseils des parties ont été entendus en leurs plaidoiries et le jugement a été mis en délibéré pour être prononcé ce jour 21 novembre 2013 ;
CONSIDÉRANT LES FAITS SUIVANTS :
Suivant contrat en date du 10 décembre 2009, la SCI P. a donné à bail aux époux BA. un appartement situé dans l'immeuble « X », à usage mixte d'habitation bourgeoise et de bureau administratif pour la domiciliation du siège des SARL O. et SARL MONACO SOLAR ENERGY.
Ce bail a été résilié à l'initiative de la SCI P., représentée par l'agence immobilière SARL MIELLS AND PARTNERS, par courrier du 30 juillet 2010 à effet du 30 août 2010 et les clefs ont été remises le 1er octobre 2010.
Suivant acte authentique du 9 novembre 2010, la SCI P. a vendu son bien à la SCI C. représentée par Monsieur MA.
Par acte d'huissier en date du 12 janvier 2011, la SARL O. a assigné la SCI P. et la SCI C. devant le Tribunal de Première Instance de Monaco aux fins d'obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- leur condamnation in solidum à lui restituer, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, la jouissance des lieux cédés par l'acte de vente du 9 novembre 2010 dans l'immeuble « X »,
- leur condamnation in solidum au paiement de la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour privation de jouissance (somme à parfaire),
Elle soutient, à l'appui de ses prétentions :
- qu'elle a été expressément autorisée par la SCI P. à établir son siège social et ses activités commerciales dans l'immeuble « X », ainsi qu'il résulte des avenants au bail initialement consenti aux époux BA.,
- que la SCI P. a vendu le bien à la SCI C. en violation de ses droits.
Cette procédure a été enregistrée sous le numéro 2011/000318.
Par décision en date du 15 décembre 2011, le Tribunal de première instance de Monaco a autorisé la SCI C. à appeler en garantie :
- la SCI P. prise en la personne de son gérant Monsieur G. LA VE.,
- Monsieur G. LA VE.
Selon acte d'huissier en date du 5 janvier 2012, la SCI C. a assigné la SARL O., la SCI P. et Monsieur G. LA VE. gérant de la SCI P. devant le tribunal de première instance de Monaco aux fins de voir :
- dire que la SCI P. sera appelée à la garantir de toutes les condamnations éventuelles prononcées à la demande de la SARL O.,
- dire qu'elle sera condamnée à régler tous les frais de procédure qui trouvent leur fondement dans l'assignation du 12 janvier 2012,
- prononcer la jonction de la présente instance avec celle introduite par exploit d'assignation du 12 janvier 2011 à l'initiative de la SARL O.,
Cette procédure a été enregistrée au greffe civil sous le n° 2012/000315.
Les parties ont déposé des conclusions identiques dans chacune des deux procédures.
Les époux BA. sont intervenus volontairement à l'instance par voie de conclusions en date du 13 février 2013.
Par conclusions récapitulatives en date du 13 février 2013 et du 19 juin 2013, la SARL O. demande au Tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- de prononcer la nullité de la résiliation intervenue à l'initiative de la SCI P. par courrier du 30 juillet 2010,
- de constater que la SARL O. dispose d'un droit d'occupation de l'appartement tel que cela ressort du bail du 10 décembre 2009 et ce au contradictoire de chacune des parties défenderesses,
- de considérer la clause figurant à l'article 7b) du bail du 10 décembre 2009 comme contraire aux dispositions des articles 1 et 2 de la loi n° 490 datée du 24 novembre 1948 relative aux baux commerciaux,
- de dire qu'elle est en droit de revendiquer la propriété commerciale sur le bien immobilier et de solliciter la nullité de la clause litigieuse.
En conséquence :
- de condamner in solidum la SCI P. et la SCI C. à lui restituer la jouissance de l'appartement situé dans l'immeuble X à Monaco, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du 1er octobre 2010 ou, au plus tard, de la signification de la décision à intervenir,
- de condamner in solidum les SCI ci-dessus désignées à lui verser un montant de 29.111 euros par mois au titre du préjudice qu'elle subit, soit la somme de 960.665 euros, arrêtée au 30 juin 2013, à parfaire au jour de la décision à intervenir et jusqu'à restitution de la jouissance de l'appartement,
- en tant que de besoin, de prendre acte de l'intervention volontaire de Monsieur et Madame BA. et de la reprise à leur compte des demandes présentées par la SARL O., s'agissant de la nullité de la résiliation du bail intervenue à effet du 30 septembre 2010 et des conséquences en découlant.
À l'appui de leurs prétentions, la SARL O. et Monsieur et Madame BA. font valoir :
- que le bail en date du 10 décembre 2009 a été conclu pour une durée incompressible d'un an (alinéa 1) et que le délai de préavis pour pourvoir le résilier est de trois mois minimum,
- que la résiliation intervenue à l'initiative de la SCI P. avant l'expiration du délai d'un an et sans respect du préavis, encourt la nullité,
- que l'article 7 b) du contrat de bail, qui stipule que la location a un caractère strictement civil et ne saurait transférer au preneur le droit à propriété commerciale, est contraire aux dispositions de la loi du 24 novembre 1948 et revêt comme tel un caractère abusif,
- que la SARL O. est donc en droit de revendiquer la propriété commerciale et de s'opposer à l'application de la clause susvisée,
- que les parties ont d'ailleurs vendu le bien immobilier à un prix inférieur au marché en prenant en compte la réalité,
- qu'elle a été privée des modalités d'exercice de son activité à compter du 1er octobre 2010 et sollicite une juste indemnisation.
Par conclusions en date du 24 avril 2013, la SCI C. demande au Tribunal :
- de déclarer irrecevables les demandes de la SARL O. et des époux BA.,
- de les débouter de toutes leurs demandes,
- de les condamner solidairement au paiement de la somme de 50.000 euros au titre de dommages et intérêts.
Elle rappelle :
- que les époux BA. ont cosigné un document aux termes duquel ils reconnaissent la régularité de leur congé, sa date de réception et sa prise d'effet,
- qu'ils ont quitté les lieux le 30 septembre 2010 et que le bien a été vendu par acte authentique du 9 novembre 2010 « libre de toute occupation »,
- que la SCI P. lui a fait parvenir en outre le 29 novembre 2010 un engagement de couvrir notamment tous les frais qui seraient la conséquence d'une action de Monsieur et Madame BA. ou de la SARL O..
La SCI C. soutient :
- que les demandeurs n'ont pas d'intérêt légitime à agir,
- que leurs demandes sont irrecevables en raison de leur turpitude et du caractère blâmable de leur présentation,
- que tant Monsieur et Madame BA., que la SARL O., dont ils sont les seuls et uniques associés, se sont expressément engagés, aux termes des différents baux, à ne pas exercer d'activité commerciale dans le local litigieux,
- que les nouvelles demandes introduites par conclusions sont irrecevables au double motif :
qu'elles violent les règles attributives de compétence des juridictions monégasques puisqu'elles ne peuvent être portées que devant la commission arbitrale des loyers commerciaux (CALC),
qu'elles violent le principe de l'immutabilité du litige, puisqu'il s'agit de demandes nouvelles avec des objets nouveaux, sans lien direct avec les demandes initiales,
- que le bail, auquel la SARL O. n'est pas partie, dont la résiliation est contestée ne lie que la SCI P. à Monsieur et Madame BA.,
- que ce bail n'autorise qu'une domiciliation du siège social de la société conformément à l'ordonnance n° 993 du 16 février 2007 portant application de la loi n° 1.331 du 8 janvier 2007 et ce pour une durée d'un an renouvelable une fois,
- qu'aucune activité commerciale n'a jamais été exercée dans le local litigieux,
- que les preneurs ont acquiescé à la résiliation en organisant eux-mêmes leur départ,
- que la loi n° 410 sur les baux commerciaux ne concerne que les hypothèses où l'activité commerciale est exercée depuis plus de trois années, ce qui n'est pas le cas en l'espèce,
- que les demandeurs sont de particulière mauvaise foi et ont formé leur action dans le seul but d'obtenir indûment une somme astronomique.
Par conclusions récapitulatives et responsives en date du 19 juin 2013, la SARL O. et Monsieur et Madame BA. répliquent :
- que leurs nouvelles demandes sont recevables car elles n'entrent pas dans le champ limitatif de compétence de la CALC prévu aux articles 5 et 10 de la loi n° 490,
- que ces nouvelles demandes sont connexes et rattachables par un lien suffisant à la demande principale car elles portent sur les conséquences de la résiliation du bail,
- que bien que n'étant pas partie au contrat de bail du 10 décembre 2009, la SARL O. revendique des droits induits par cet acte juridique et a donc qualité et intérêt à agir pour voir prononcer les mesures sollicitées par le tribunal,
- qu'en tout état de cause, les époux BA. interviennent volontairement dans le cadre de la procédure et reprennent à leur compte les demandes initialement présentées par la SARL O.,
- qu'une activité commerciale était bien exercée dans les lieux s'agissant de l'étude, l'installation, l'import-export, la location et l'achat de machines et matériels neufs,
- que le fonds de commerce était exploité par Monsieur BA. depuis 2006 sous l'enseigne commerciale O., soit depuis plus de trois ans, à la date de résiliation du bail,
- qu'ils formulent une demande légitime afin de reprendre l'exploitation des lieux alors que la SCI C. fait montre à leur égard d'un acharnement démesuré.
Par conclusions récapitulatives du 11 juillet 2013, la SCI P. demande :
- que soit prononcée la jonction des deux instances,
- que les pièces 15 et 16 produites par la SARL O. soient déclarées nulles pour non respect des conditions prévues à l'article 324 du Code de procédure civile et en toute hypothèse, qu'elles soient écartées des débats du fait de leur caractère outrancier,
- que la SARL O. soit déclarée irrecevable en ses demandes pour défaut de qualité à agir,
- que les époux BA. qui ne peuvent se substituer à la demanderesse soient déclarés irrecevables en leur intervention volontaire,
- que la SARL O. soit déclarée irrecevable en ses demandes pour transgression du principe de l'immutabilité du litige.
En tout état de cause :
- qu'il soit constaté que le contrat de bail à loyer n° 118471 en date du 10 décembre 2009 a été régulièrement résilié, conformément aux stipulations contractuelles, par la SCI P.,
- qu'il soit constaté que les époux BA., locataires, ont accepté de quitter les lieux le 30 septembre 2010,
- qu'il soit constaté que la SARL O. n'a pas exploité un fonds de commerce dans les locaux objet du bail durant au moins trois années consécutives.
En conséquence :
- que la SARL O. soit déboutée de l'ensemble de ses demandes,
- qu'il soit dit et jugé que les dispositions de la loi n° 490 du 24 novembre 1948 ne sont pas applicables au contrat de bail n° 118471 du 10 décembre 2009,
- que la SCI C. soit déboutée de ses demandes formées à son encontre et à l'encontre de Monsieur G. LA VE. au titre de l'appel en garantie,
- que la SARL O. soit condamnée à lui verser une somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- que la demanderesse soit condamnée à lui rembourser toutes sommes dont elle pourrait être déclarée redevable envers la SCI C. du fait de la présente procédure,
- que Monsieur et Madame BA. soient condamnés à lui verser une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de leur intervention abusive.
SUR CE,
Sur la jonction des procédures
Dans un souci de bonne administration de la justice, il convient au regard de leur lien de connexité d'ordonner la jonction des procédures enregistrées au greffe civil sous les numéros 2011/000318 et 2012/000315, lesquelles opposent au surplus les mêmes parties.
Sur la recevabilité des demandes formées par la SARL O.
- sur le défaut de qualité à agir
Aux termes des dispositions de l'article 1020 du Code civil, les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu à l'article 976.
Cet article consacre l'effet relatif des conventions. Les tiers ne peuvent demander l'exécution d'un contrat comme inversement elle ne peut pas leur être réclamée.
En l'espèce, le contrat de bail du 10 décembre 2009 à usage mixte d'habitation et de bureau administratif portant sur un appartement de deux pièces principales (lot 23), une cave (lot 14) et un parking (lot 11) situés dans l'ensemble immobilier « X » à Monaco, a été conclu entre la SCI P., en qualité de bailleur et Monsieur N. BA. et Madame T. BA., en qualités de preneurs.
Ainsi, la SARL O., qui n'y est pas partie ne peut revendiquer de droits induits par cet acte juridique, qui ne crée à son égard ni droit, ni obligation.
En tant que tiers, elle n'a pas qualité pour solliciter la nullité de la résiliation du bail, ni revendiquer la jouissance et la propriété commerciale des lieux.
- sur l'intervention volontaire
L'article 383 du Code de procédure civile dispose que « quiconque aura intérêt dans une instance suivie entre d'autres personnes aura le droit d'y intervenir ».
Cette disposition a vocation à s'appliquer dans le cas où l'instance se poursuit entre les parties principales et où le tiers intervenant a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir une des parties.
Tel n'est pas le cas lorsque l'intervention volontaire tend à substituer intégralement le demandeur, qu'elle sait irrecevable à agir.
Or en l'espèce, c'est en réponse aux conclusions des défendeurs soulevant la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la SARL O., que les époux BA. ont demandé au tribunal, par conclusions du 13 février 2013, de prendre acte de leur intervention volontaire et de la reprise par leurs soins et à leur compte des demandes présentées par la SARL O., s'agissant de la nullité de la résiliation du bail intervenue à effet du 30 septembre 2010 et des conséquences en découlant.
Cette immixtion des époux BA. dans le procès en cours ne peut dès lors constituer une intervention volontaire, au sens de l'article 383 du Code de procédure civile, et doit en conséquence être déclarée irrecevable.
- Sur la demande de nullité des pièces n° 15 et 16 produites par la SARL O.
Au vu de l'irrecevabilité des demandes formées, tant par le demandeur principal que par les intervenants volontaires, il n'y a pas lieu de statuer sur la validité des pièces communiquées par le demandeur au soutien de ses prétentions au fond.
- Sur l'appel en garantie formé par la SCI C.
La SCI C. a assigné la SCI P. et Monsieur G. LA VE. gérant de la SCI P. devant le tribunal de première instance de Monaco afin que la SCI P. la garantisse de toutes les condamnations éventuelles prononcées à la demande de la SARL O..
Dans la mesure où les demandes formées par la SARL O. ont été déclarées irrecevables, l'appel en garantie est devenu sans objet.
Sur les demandes de dommages et intérêts
- Sur les demandes formées par la SCI C. et la SCI P. à l'encontre de la SARL O.
La SARL O. qui ne disposait que d'une simple domiciliation de son siège social dans les lieux loués et n'était nullement signataire du bail du 10 décembre 2009, ne pouvait ignorer son défaut de qualité à agir en justice à l'encontre, tant du bailleur initial que de l'actuel propriétaire, afin de revendiquer la propriété commerciale des lieux.
En conséquence, il y a lieu de la condamner à payer à la SCI C., ainsi qu'à la SCI P. une somme de 5.000 euros chacune, à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.
- Sur la demande formée par la SCI P. et la SCI C. à l'encontre des époux BA.
L'intervention volontaire des époux BA., dès lors qu'elle tend exclusivement à régulariser la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la société O. dont ils sont les uniques associés, et non à solliciter des droits propres, revêt un caractère manifestement abusif.
Monsieur et Madame BA. doivent être en conséquence condamnés à payer à la SCI C. et à la SCI P. la somme de 2.000 euros, chacune, à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice.
Sur l'exécution provisoire
À défaut d'urgence et en l'absence de titre authentique ou de promesse reconnue, il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire de la présente décision sur le fondement de l'article 202 du Code de procédure civile.
Sur les dépens
La société O. et les époux BA., parties perdantes, seront condamnés aux entiers dépens de l'instance, distraits au profit de Maître Arnaud ZABALDANO et de Maître Olivier MARQUET, avocats- défenseurs, chacun pour ce qui les concerne.
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL,
Statuant publiquement par jugement contradictoire et en premier ressort,
Ordonne la jonction des procédures enregistrées au greffe civil sous le numéro 2011/000318 et sous le numéro 2012/000315 ;
Déclare irrecevables les demandes formées par la SARL O. au titre de l'exécution du contrat de bail du 10 décembre 2009 ;
Déclare irrecevable l'intervention volontaire des époux BA. ;
Dit n'y avoir lieu de statuer sur la demande de nullité de pièces ;
Constate que l'appel en garantie formé par la SCI C. à l'encontre de la SCI P. et de Monsieur G. LA VE., en sa qualité de gérant, est sans objet ;
Condamne la SARL O. à payer à la SCI C. la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Condamne la SARL O. à payer à la SCI P. la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Condamne Monsieur et Madame BA. à payer à la SCI C. la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Condamne Monsieur et Madame BA. à payer à la SCI P. la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du présent jugement ;
Condamne la SARL O. et Monsieur et Madame BA. aux entiers dépens de l'instance, y compris ceux réservés par jugement du 15 décembre 2011, distraits au profit de Maître Arnaud ZABALDANO et de Maître Olivier MARQUET, avocats-défenseurs, chacun pour ce qui les concerne ;
Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le greffier en chef, au vu du tarif applicable ;
Composition🔗
Ainsi jugé par Madame Martine COULET-CASTOLDI, Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Emmanuelle CASINI-BACHELET, Juge, Madame Sophie LEONARDI, Juge, qui en ont délibéré conformément à la loi assistées, lors des débats seulement, de Madame Isabelle TAILLEPIED, Greffier ;
Lecture du dispositif de la présente décision a été donnée à l'audience du 21 NOVEMBRE 2013, dont la date avait été annoncée lors de la clôture des débats, par Madame Martine COULET-CASTOLDI, Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Madame Isabelle TAILLEPIED, Greffier, en présence de Monsieur Jean-Jacques IGNACIO, Substitut du Procureur Général, et ce en application des dispositions des articles 15 et 58 de la loi n° 1.398 du 18 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires.