Tribunal de première instance, 20 janvier 2000, Société Daimler Chrysler AG c/ H. L. et B. P., épouse L.

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Abstract🔗

Action paulienne

Faillite du débiteur - Acte frauduleux antérieur à la faillite - Action individuelle d'un créancier bénéficiant à l'ensemble des créanciers de la procédure collective : recevabilité - Caractère frauduleux - Virement de fonds opéré par le débiteur sans cause - Acte destiné à distraire des biens du patrimoine apparent d'une société

Exécutio provisoire

Décision rendue en matière de faillite (art. 572, C. com.) - Action paulienne au profit de la masse des créanciers-assimilation - Urgence de la cause (faillite) - Effets irréparables (non)

Résumé🔗

L'action de l'article 1022 du Code civil, dite action paulienne, appartient à tout créancier qui entend faire déclarer inopposable un acte accompli par son débiteur en fraude de ses droits ; il est admis en jurisprudence que l'ouverture d'une procédure collective à l'encontre du débiteur ne fait pas obstacle à l'exercice individuel par un créancier de l'action paulienne à l'encontre d'un acte frauduleux passe par le débiteur, avant l'ouverture de la procédure collective.

Aucune règle du droit de la faillite ne prohibe l'exercice d'une telle action par un créancier, étant relevé que cette action se distingue de l'action en inopposabilité des articles 456 et 457 du Code de commerce, que la loi réserve au seul syndic de la procédure collective.

Il s'ensuit que l'action de la Société Daimler, dont le profit bénéficiera à l'ensemble des créanciers de la procédure collective compte tenu du principe d'égalité auquel ils sont soumis, doit être déclarée recevable, sans égard pour la jurisprudence isolée dont se prévalent les époux L., dès lors que la décision citée ne concerne pas l'action paulienne de l'article 1022 du Code civil mais l'action dite oblique de l'article 1021 de ce code et apparaît en conséquence inopérante en la cause.

Ainsi que l'a rappelé comme constant le tribunal dans son jugement du 20 juin 1996 confirmé par arrêt du 19 mai 1998, la Société Irsam déclarée en cessation des paiements le 29 juillet 1994, a fait virer le 21 octobre 1993, la somme de 7 000 000 de dollars US de son compte ouvert à la banque Nagelmackers sur le compte d'H. L. auprès de l'UBS et celui-ci a fait virer cette somme le 12 novembre 1993 sur le compte de son épouse au Crédit Foncier de Monaco.

Ainsi que le tribunal l'a jugé, l'acte frauduleux attaqué par la Société Daimler a consisté en un virement de la Société Irsam à B. L., H. L. n'étant intervenu qu'en tant qu'intermédiaire.

Il n'est pas établi ni même allégué que la société commerciale Irsam, que dirigeait H. L. était en relation d'affaires avec B. L., ou plus précisément, que celle-ci était créancière de la société Irsam à hauteur de 7 000 000 de dollars US.

Il s'ensuit que le virement dont s'agit apparaît avoir été opéré sans cause, même si le conseil des époux L. a indiqué à l'audience que cette opération était motivée par la nécessité de réunir des fonds à l'effet de cautionner une demande de mise en liberté provisoire formée par H. L. devant la Chambre du Conseil de la Cour d'appel le 13 novembre 1993.

Envisagée sous ce motif, ou encore sous l'angle d'une donation, l'opération revêt un caractère frauduleux, eu égard aux présomptions suffisamment graves, sérieuses et concordantes de la cause.

En effet, la fourniture d'une caution destinée à assurer la représentation d'un inculpé en justice ou le don manuel de 7 000 000 de dollars US à un tiers (B. L.) apparaissent totalement étrangers à l'objet social (négoce international) de la société anonyme Irsam ; il doit en être déduit que le virement de cette somme est intervenu pour des considérations non liées au fonctionnement normal de la société et a eu pour conséquence, sinon pour objet de distraire du patrimoine apparent de la société Irsam un important élément d'actif constitué de liquidités bancaires.

La circonstance que cette opération de virement soit intervenue en octobre et novembre 1993, alors que la société Irsam et H. L. étaient solidairement tenus de rembourser, à l'échéance du 31 janvier 1994, un billet à ordre émis en juillet 1993 au profit de la Société Mercedes (devenu la Sté Daimler) pour plus de 20 000 000 de dollars US, caractérise la volonté d'H. L., en sa qualité de dirigeant de la société Irsam, de soustraire les fonds concernés du droit de gage général dont sa créancière, la société Mercedes, était titulaire.

Au vu de ces considérations, il y a lieu d'admettre l'action de la société Daimler et de déclarer inopposable à l'ensemble des créanciers de la société Irsam en liquidation des biens le virement ci-dessus analysé, effectué en fraude de leurs droits.

Il convient en conséquence d'ordonner la réintégration de la somme de 7 000 000 de dollars US, augmentée des intérêts qu'elle a pu produire, dans le patrimoine de la société Irsam.

La présente action produisant effet à l'égard et au profit de tous les créanciers dans la masse de la procédure collective ouverte à l'encontre de la Société Irsam, le Tribunal estime devoir ordonner l'exécution provisoire de la présente décision par référence au principe en vigueur dans toute procédure collective, énoncé par l'article 572 du Code de commerce selon lequel « sauf les cas prévus au 2e alinéa de l'article 481 et au 1er alinéa de l'article 513, les décisions rendues dans une procédure de cessation des paiements, de règlement judiciaire ou de liquidation des biens, sont exécutoires sur minute et par provision ».

En outre, un tel principe inscrit dans le droit d'ordre public de la faillite, caractérise l'urgence de la cause, au sens de l'article 202 du Code de procédure civile. Par ailleurs l'exécution provisoire présentement ordonnée n'apparaît pas de nature à produire des effets irréparables.


Motifs🔗

Le Tribunal

Considérant les faits suivants :

Par jugement du 20 juin 1996 - confirmé en cause d'appel par arrêt du 19 mai 1998 - auquel il y a lieu de se reporter, le Tribunal, statuant notamment sur l'action paulienne en inopposabilité d'un virement de 7 000 000 de dollars US, formée par la société Mercedes Benz AG à l'effet d'obtenir la réintégration de cette somme dans le patrimoine de la société Irsam dont elle est créancière, a rappelé qu'une action paulienne fondée sur l'article 1022 du Code civil ne peut prospérer que si les deux parties à l'acte prétendument frauduleux sont mises en cause, en l'espèce la société Irsam d'une part et les époux L. d'autre part ;

Observant que le syndic de la société Irsam, déclarée en cessation des paiements le 29 juillet 1994, n'avait pas été attrait en la cause ni n'était volontairement intervenu aux débats, le Tribunal a d'office soulevé l'irrecevabilité de la demande de la société Mercedes par application de l'article 441 du Code de commerce ; il a donc déclaré cette société « irrecevable en son action paulienne tendant à la révocation du virement de 7 000 000 de dollars US opéré le 12 novembre 1993 sur le compte de B. P. épouse L. auprès de la banque Crédit Foncier de Monaco » ;

Par l'exploit susvisé du 12 août 1998, la société Mercedes Benz AG devenu Daimler Benz AG, puis Daimler Chrysler AG, ci-après la société Daimler, tirant les enseignements de cette décision, a fait assigner H. L., pris en son nom personnel et ès-qualités d'ancien président de la société Irsam, B. P. son épouse et A. G., syndic de la cessation des paiements de la société Irsam, en présence du Crédit Foncier de Monaco, pour que soit :

• prononcée la révocation rétroactive de la donation de 7 000 000 de dollars US consentie par la société Irsam à B. L. avec le concours d'H. L. le 12 novembre 1993,

• et ordonnée en conséquence la réintégration de ladite somme, en principal et intérêts, dans le patrimoine de la société Irsam,

sous le bénéfice de l'exécution provisoire du jugement à intervenir ;

L'établissement bancaire Crédit Foncier de Monaco, par lettre du 12 août 1998, a fait connaître qu'il s'en remet à justice ;

Le syndic A. G., qui rappelle que sa mission consiste à appréhender le maximum d'éléments d'actif afin d'indemniser au mieux les créanciers de la société Irsam en liquidation des biens depuis le 11 juillet 1997, demande au Tribunal de faire droit aux prétentions de la société Daimler ;

Dans des conclusions ultérieures, il précise qu'il ne fait ainsi qu'acquiescer à la demande de cette société dans l'intérêt de la masse des créanciers et estime qu'un créancier peut agir à titre individuel si son action est intentée dans l'intérêt de cette masse et n'entraîne aucune dépense qui puisse lui être imputée ; le syndic prétend que la somme de 7 000 000 de dollars US a été frauduleusement détournée de l'actif de la société Irsam par les époux L. ; il précise n'avoir pas lui-même intenté l'action par manque de moyens et reconnaît à la société Daimler le droit d'agir ainsi qu'elle le fait ;

Les époux B. et H. L. s'opposent aux demandes dont ils font l'objet. Dans le dernier état de leurs écrits judiciaires, ils concluent à l'irrecevabilité pour agir de la société Daimler pour avoir engagé une instance que seul le syndic à la liquidation des biens de la société Irsam pouvait introduire. Subsidiairement, ils concluent au rejet des demandes de cette société et soulèvent l'irrecevabilité des demandes du syndic pour être formées de défendeur à défendeur, en sollicitant en tant que de besoin le rejet de ces demandes. À titre reconventionnel, ils poursuivent la condamnation de la société Daimler à leur payer 50 000 francs de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Les époux L. prétendent que la société Daimler n'a pas qualité pour agir au nom et pour le compte de la procédure collective de la société Irsam, cette action n'appartenant qu'à cette société débitrice assistée de son syndic ou au syndic lui-même. Selon eux, A. G. ne saurait en outre être suivi en sa demande formée de défendeur à défendeur ;

Ils se prévalent d'un arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris le 13 mars 1998 ayant déclaré irrecevable une action oblique engagée par un créancier postérieurement au jugement de liquidation judiciaire, alors que seul le liquidateur est habilité à représenter le débiteur, pour en déduire que la société Daimler est irrecevable à agir ;

Sur le fond, ils font valoir que la société Irsam n'a pas consenti une donation à B. L. puisque la somme litigieuse se trouvait au crédit d'un compte personnel d'H. L. à l'étranger et que ce compte a été débité le 12 novembre 1993 pour créditer celui de son épouse au Crédit Foncier de Monaco ;

Ils estiment en conséquence qu'il convient d'abord d'établir que la société Irsam était titulaire de la somme concernée pour que puisse ensuite être ordonnée la réintégration de cette somme dans le patrimoine de cette société, ajoutant que la société Irsam n'a jamais consenti de donation à B. L. ;

Quant à la fraude à laquelle se réfère le syndic, ils considèrent qu'elle ne pourra être établie qu'à l'issue de leur éventuelle condamnation par le Tribunal correctionnel devant lequel ils sont renvoyés le 28 mars prochain, en sorte qu'il y aurait lieu de faire application du principe selon lequel « le criminel tient le civil en l'état », sans que le Tribunal civil puisse d'ores et déjà se prononcer ;

Enfin, ils estiment faire l'objet d'un harcèlement procédural de la part de la société Daimler, générant un préjudice dont ils réclament réparation ;

La société Daimler, par conclusions en réponse, rappelle que sur la base de textes français similaires à l'article 451 du Code de commerce, la jurisprudence de la Cour de cassation énonce de façon constante que le droit exclusif reconnu au syndic pour agir au nom et dans l'intérêt des créanciers ne fait pas obstacle à ce qu'un créancier exerce l'action paulienne contre tous les actes faits en fraude de ses droits par le débiteur. Elle en déduit donc sa qualité pour agir, en observant que la jurisprudence citée par les époux L. n'est pas pertinente ;

Elle relève par ailleurs qu'en s'associant à son action, le syndic G. est implicitement intervenu en la cause en sa qualité de représentant de la société Irsam et de la masse des créanciers ;

Au fond, elle se prévaut de la décision rendue par ce Tribunal le 20 juin 1996 pour affirmer qu'H. L. n'est intervenu qu'en tant qu'intermédiaire dans le virement de la société Irsam à B. L., de telle sorte que sa demande tend bien « à la révocation rétroactive de l'ensemble de l'opération de virement » ;

Elle reprend en conséquence ses précédentes demandes sauf à conclure au rejet des prétentions des époux L. et à solliciter leur condamnation à lui payer 50 000 francs pour résistance abusive ;

Sur quoi :

La recevabilité de l'action intentée par la société Daimler :

Attendu que cette société vient aux droits de la société Mercedès Benz AG, ainsi qu'il est constant ;

Attendu que si le jugement précité du 20 juin 1996 a constaté la suspension des poursuites à l'encontre de la société Irsam sans la condamner au paiement de sommes au profit de la société Mercedès, il a toutefois implicitement mais nécessairement reconnu la créance de la société Mercedès sur la société Irsam en condamnant H. L. en sa qualité de donneur d'aval au profit de la société Irsam ; qu'en effet, le Tribunal a relevé que L. s'était engagé à rembourser la société Mercedès en qualité de caution solidaire de la société Irsam, elle-même tenue au paiement à titre de débitrice principale en vertu d'un billet à ordre tiré par cette société et protesté faute de paiement à son échéance ;

Qu'il en résulte que la société Irsam est débitrice de la société Daimler ;

Qu'il est constant, au demeurant, que la société Mercedès a été définitivement admise à l'état des créances de la société Irsam pour un montant supérieur à 95 millions de francs ;

Attendu que l'action de l'article 1022 du Code civil, dite action paulienne, appartient à tout créancier qui entend faire déclarer inopposable un acte accompli par son débiteur en fraude de ses droits ; qu'il est admis en jurisprudence que l'ouverture d'une procédure collective à l'encontre du débiteur ne fait pas obstacle à l'exercice individuel par un créancier de l'action paulienne à l'encontre d'un acte frauduleux passé par le débiteur avant l'ouverture de la procédure collective ;

Qu'aucune règle du droit de la faillite ne prohibe l'exercice d'une telle action par un créancier, étant relevé que cette action se distingue de l'action en inopposabilité des articles 456 et 457 du Code de commerce que la loi réserve au seul syndic de la procédure collective ;

Attendu qu'il s'ensuit que l'action paulienne de la société Daimler, dont le profit bénéficiera à l'ensemble des créanciers de la procédure collective compte tenu du principe d'égalité auquel ils sont soumis, doit être déclarée recevable, sans égard pour la jurisprudence isolée dont se prévalent les époux L., dès lors que la décision citée ne concerne pas l'action paulienne de l'article 1022 du Code civil mais l'action dite oblique de l'article 1021 de ce code et apparaît en conséquence inopérante en la cause ;

La recevabilité des demandes du syndic :

Attendu qu'après avoir formé les mêmes demandes que la société Daimler, le syndic a toutefois précisé qu'il entendait acquiescer aux demandes de cette société ;

Qu'il s'ensuit qu'il y a lieu de considérer les prétentions du syndic de la liquidation des biens de la société Irsam comme un simple acquiescement, lequel n'encourt aucune irrecevabilité ;

La règle « le criminel tient le civil en l'état » :

Attendu que l'invocation de cette règle par les époux L. ne les a pas pour autant conduits à solliciter le sursis à statuer qui en est le nécessaire corollaire ;

Attendu, en tout état de cause, que ce principe n'a pas lieu de s'appliquer en la cause, dès lors que faute de production de pièces à cet égard, il n'est pas établi, dans la présente instance, que les époux L. auront à répondre devant le Tribunal correctionnel de l'opération de virement de 7 000 000 de dollars US décrite par le jugement du 20 juin 1996 (page 33 lettre M) ;

L'acte concerné par l'action paulienne :

Attendu, ainsi que l'a rappelé comme constant le Tribunal dans son jugement du 20 juin 1996, que la société Irsam a fait virer le 21 octobre 1993 la somme de 7 000 000 de dollars US de son compte ouvert à la banque Nagelmackers 1747 sur le compte d'H. L. auprès de l'UBS et que celui-ci a fait virer cette somme le 12 novembre 1993 sur le compte de son épouse au Crédit Foncier de Monaco ;

Qu'ainsi que le Tribunal l'a jugé, l'acte frauduleux attaqué par la société Daimler a consisté en un virement de la société Irsam à B. L., H. L. n'étant intervenu qu'en tant qu'intermédiaire ;

Attendu qu'il n'est pas établi ni même allégué que la société commerciale Irsam que dirigeait H. L. était en relation d'affaires avec B. L., ou plus précisément que celle-ci était créancière de la société Irsam à hauteur de 7 000 000 de dollars US ; qu'il s'ensuit que le virement dont s'agit apparaît avoir été opéré sans cause, même si le conseil des époux L. a indiqué à l'audience que cette opération était motivée par la nécessité de réunir des fonds à l'effet de cautionner une demande de mise en liberté provisoire formée par H. L. devant la Chambre du Conseil de la cour d'appel le 13 novembre 1993 ;

Attendu qu'envisagée sous ce motif, ou encore sous l'angle d'une donation, l'opération revêt un caractère frauduleux eu égard aux présomptions suffisamment graves, sérieuses et concordantes de la cause ;

Qu'en effet, la fourniture d'une caution destinée à assurer la représentation d'un inculpé en justice ou le don manuel de 7 000 000 de dollars US à un tiers (B. L.) apparaissent totalement étrangers à l'objet social (négoce international) de la société anonyme Irsam ; qu'il doit en être déduit que le virement de cette somme est intervenu pour des considérations non liées au fonctionnement normal de la société et a eu pour conséquence, sinon pour objet, de distraire du patrimoine apparent de la société Irsam un important élément d'actif constitué de liquidités bancaires ;

Que la circonstance que cette opération de virement soit intervenue en octobre et novembre 1993, alors que la société Irsam et H. L. étaient solidairement tenus de rembourser, à l'échéance du 31 janvier 1994, un billet à ordre émis en juillet 1993 au profit de la société Mercedès pour plus de 20 000 000 de dollars US, caractérise la volonté d'H. L., en sa qualité de dirigeant de la société Irsam, de soustraire les fonds concernés du droit de gage général dont sa créancière, la société Mercedès, était titulaire ;

Attendu qu'au vu de ces considérations, il y a lieu d'admettre l'action de la société Daimler et de déclarer inopposable à l'ensemble des créanciers de la société Irsam en liquidation des biens le virement ci-dessus analysé, effectué en fraude de leurs droits ; qu'il convient en conséquence d'ordonner la réintégration de la somme de 7 000 000 de dollars US, augmentée des intérêts qu'elle a pu produire, dans le patrimoine de la société Irsam ;

Les demandes principale et reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts :

Attendu que les époux L., qui succombent en leurs prétentions, doivent être déboutés de leur demande fondée sur une procédure qualifiée à tort d'abusive ;

Attendu, en revanche, qu'ils apparaissent avoir fautivement résisté à la demande de la société Daimler, compte tenu de la fraude ci-dessus caractérisée dont ils se sont rendus coupables, occasionnant ainsi à la société demanderesse un préjudice lié à la nécessité de faire valoir ses droits en justice ;

Qu'au regard de ces circonstances, le Tribunal estime devoir attribuer le montant des dommages-intérêts devant revenir à la société Daimler à la somme de 30 000 francs ;

L'exécution provisoire :

Attendu que la présente action produisant effet à l'égard et au profit de tous les créanciers dans la masse de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société Irsam, le Tribunal estime devoir ordonner l'exécution provisoire de la présente décision par référence au principe en vigueur dans toute procédure collective, énoncé par l'article 572 du Code de commerce selon lequel  « sauf les cas prévus au 2e alinéa de l'article 481 et au 1er alinéa de l'article 513, les décisions rendues dans une procédure de cessation des paiements, de règlement judiciaire ou de liquidation des biens, sont exécutoires sur minute et par provision » ;

Qu'en outre, un tel principe inscrit dans le droit d'ordre public de la faillite caractérise l'urgence de la cause, au sens de l'article 202 du Code de procédure civile ; que par ailleurs, l'exécution provisoire présentement ordonnée n'apparaît pas de nature à produire des effets irréparables ;

Les dépens :

Attendu qu'il y a lieu de les mettre à la charge des époux L. par application de l'article 231 du Code de procédure civile ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal statuant contradictoirement,

Déclare l'action de la société Daimler Benz AG devenue Daimler Chrysler AG recevable et fondée ;

Déclare inopposable à la masse des créanciers de la liquidation des biens de la société Irsam le virement de la somme de 7 000 000 de dollars US opéré à partir du compte de cette société le 21 octobre 1993 en faveur du compte ouvert par B. P. épouse L. au Crédit Foncier de Monaco le 12 novembre 1993, par l'intermédiaire du compte d'H. L. ;

Ordonne en conséquence la réintégration de cette somme, augmentée des intérêts qu'elle a pu produire, dans le patrimoine de la société Irsam représentée par son syndic A. G. ;

Déboute H. L. et B. P. épouse L. de l'ensemble de leurs prétentions ;

Les condamne à payer à la société Daimler Benz AG la somme de 30 000 francs à titre de dommages-intérêts ;

Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement ;

Composition🔗

M. Narmino, prés. ; Mlle Le Lay, prem. subst. proc. gén. ; Mes Escaut, Karczag-Mencarelli, av. déf. ; Fridmanis, av. bar. de Paris.

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