Cour de révision, 28 avril 2016, m. PO. c/ Ministère public
Abstract🔗
Procédure pénale - Débats - Rejet de la demande de renvoi - Violation des droits de la défense (non) - Instruction - Violation du secret de l'instruction (non) - Secret opposable à la partie civile (non)
Résumé🔗
Est justifié le rejet par la cour d'appel de la demande de renvoi dès lors que le prévenu avait déjà bénéficié d'un renvoi pour trouver un autre avocat, que ce n'est que cinq jours avant l'audience qu'il avait sollicité un nouveau report et qu'il avait été en mesure, durant les cinq mois de l'instance d'appel de choisir un autre conseil et de préparer sa défense.
Le prévenu ne peut invoquer la violation du secret de l'instruction, au motif qu'une attestation rédigée par lui-même a été produite dans une autre instance par un salarié d'une société, dès lors que le secret de l'instruction n'est pas opposable à la partie civile, qualité qu'avait la société.
Motifs🔗
Pourvoi N° 2016-25
Hors Session pénal
COUR DE RÉVISION
ARRÊT DU 28 AVRIL 2016
En la cause de :
- m. PO., né le 22 octobre 1957 à Vintimille (Italie), de Constantino et de Nicolosa DE., de nationalité française, portier, demeurant X1 à Villefranche-sur-Mer (06230) ;
Prévenu de :
ÉTABLISSEMENT D'UNE ATTESTATION FAISANT ÉTAT DE FAITS MATÉRIELLEMENT INEXACTS
Ayant élu domicile en l'étude de Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et plaidant par Maître Daniel TARASCONI, Avocat au barreau de Marseille ;
DEMANDEUR EN RÉVISION,
d'une part,
Contre :
- LE MINISTÈRE PUBLIC,
En présence de :
- La Société Anonyme Monégasque A. exploitant l'HÔTEL B., dont le siège social est X2 à Monaco, agissant poursuites et diligences de son Président délégué en exercice, domicilié et demeurant en cette qualité audit siège, constituée partie civile, représentée par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur ;
DÉFENDEURS EN RÉVISION,
d'autre part,
LA COUR DE RÉVISION,
Statuant hors session et uniquement sur pièces, en application des dispositions de l'article 489 du Code de procédure pénale ;
VU :
l'arrêt rendu par la Cour d'appel, statuant en matière Correctionnelle, le 18 janvier 2016 ;
la déclaration de pourvoi souscrite au greffe général, le 22 janvier 2016, par Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur, au nom de M. m. PO. ;
la requête déposée le 5 février 2016 au greffe général, par Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur, au nom de M. m. PO., signifiée le même jour ;
la notification du dépôt de la requête faite à Maître Richard MULLOT pour la SAM A., partie-civile, par lettre recommandée avec avis de réception du Greffe Général en date du 5 février 2016, conformément aux dispositions de l'article 477 du code de procédure pénale ;
les conclusions du Ministère Public en date du 9 février 2016 ;
la contre-requête déposée le 19 février 2016 au greffe général, par Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de la SAM A., signifiée le même jour ;
La réplique déposée le 24 février 2016 au greffe général, par Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur, au nom de M. m. PO., signifiée le même jour ;
le certificat de clôture établi le 14 mars 2016, par le Greffier en Chef attestant que tous les délais de la loi sont expirés ;
Ensemble le dossier de la procédure,
À l'audience du 14 avril 2016, sur le rapport de Monsieur Jean-Pierre DUMAS, Premier-Président,
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Attendu, selon l'arrêt critiqué, que la SAM A., a saisi le juge d'instruction d'une plainte avec constitution de partie civile pour dénoncer une campagne de diffamation dont elle aurait fait l'objet de la part d'une minorité d'employés animée par M. f. AN.; qu'une information a été ouverte, à l'occasion de laquelle a été produite une attestation du 8 février 2012, rédigée par M. m. PO., salarié de la société et délégué du personnel ; qu'estimant que cette attestation faisait état de faits matériellement inexacts, la société a adressé une plainte au procureur général ; que, sur requête de celui-ci, une information a été ouverte contre X des chefs de dénonciation calomnieuse, faux et usage ; que, par arrêt du 13 octobre 2014, la chambre du conseil de la cour d'appel, siégeant comme juridiction d'instruction, a renvoyé M. m. PO. devant le tribunal correctionnel pour avoir « à MONACO, le 8 février 2012, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription, établi sciemment un certificat ou une attestation faisant état de faits matériellement inexacts », faits prévus et réprimés par l'article 103 du code pénal ; que, par jugement du 5 mai 2015, le tribunal a déclaré le prévenu coupable et l'a condamné à 1.000 euros d'amende avec sursis ainsi qu'à payer 1.000 euros à la société à titre de dommages-intérêts ; que, le 18 janvier 2016, la cour d'appel, après avoir rejeté une demande de renvoi formulée par M. m. PO., a confirmé le jugement :
Sur les deux premiers moyens réunis ;
Attendu que M. m. PO. reproche à la cour d'appel d'avoir rejeté sa demande de renvoi, alors, selon le pourvoi, qu'en statuant ainsi, elle l'a privé, d'une part de l'assistance d'un avocat et d'autre part d'un procès équitable, en violation de l'article 6§3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu qu'en ayant retenu que M. m. PO. avait déjà bénéficié d'un renvoi pour trouver un autre avocat, que ce n'est que cinq jours avant l'audience qu'il avait sollicité un nouveau report et qu'il avait été en mesure, durant les cinq mois de l'instance d'appel de choisir un autre conseil et de préparer sa défense, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le grief n'est pas fondé ;
Et sur le troisième moyen ;
Attendu que M. m. PO. fait encore grief à l'arrêt de violer l'article 31 du code procédure pénale, relatif au secret de l'instruction, en se fondant sur une attestation rédigée par lui-même mais produite dans une autre instance par un autre salarié de la même société, M. f. AN.;
Mais attendu que le secret de l'instruction n'est pas opposable à la partie civile, qualité qu'avait la société ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur la demande de dommages-intérêts :
Attendu que la société demande que M. m. PO. soit condamné à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts, au motif que son pourvoi serait abusif ;
Mais attendu que le demandeur au pourvoi n'a fait qu'user normalement d'une voie de droit qui lui est reconnue par la loi pour défendre ses intérêts ; qu'il n'y a pas lieu d'accueillir la requête de la défenderesse ;
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
Rejette le pourvoi ;
Rejette la demande de dommages-intérêts formée par la SAM A. ;
Condamne M. m. PO. aux dépens, dont distraction au profit de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.
Composition🔗
Ainsi délibéré et jugé le vingt-huit avril deux mille seize, par la Cour de Révision de la Principauté de Monaco, composée de Messieurs Jean-Pierre DUMAS, Premier-Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, rapporteur, Guy JOLY et François CACHELOT, Conseillers.
Et Monsieur Jean-Pierre DUMAS, Premier-Président, a signé avec Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles.
Le Greffier en Chef, le Premier Président.