Cour d'appel, 11 avril 1988, R. L. c/ Ministère public.

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Abstract🔗

Contrainte

Pression d'un tiers - Irresponsabilité (non)

Résumé🔗

L'invocation par l'auteur de vols, pour justifier ses méfaits, de la pression exercée sur lui par un tiers qui lui réclamait de l'argent et l'avait poussé à absorber une substance avant d'agir, ne saurait établir l'existence d'un état de contrainte.


Motifs🔗

LA COUR,

statuant correctionnellement,

Statuant sur les appels respectivement relevés par R. L. et le Ministère public d'un jugement du Tribunal correctionnel en date du 12 janvier 1988 lequel, du chef de vols, délits prévus et punis par les articles 309 et 325 du Code pénal, a condamné R. L. à la peine de quatre années d'emprisonnement et à celle de 50 000 F d'amende et a ordonné la confiscation de divers objets saisis ayant servi à commettre ces infractions ou destinés à les commettre ;

Considérant que les faits résultant de la procédure sont les suivants :

Le 30 juillet 1986, vers 10 h 20, un individu qui était ultérieurement identifié comme étant R. L. et qui s'était présenté à plusieurs reprises comme un client éventuel à la bijouterie P., y dérobait divers bijoux d'une valeur de 494 906 F hors taxes en dépit de la résistance de la vendeuse E. S. qu'il malmenait physiquement tout en la menaçant d'un pistolet factice et en lui vaporisant au visage de la peinture noire et du gaz lacrymogène ;

Il parvenait à prendre la fuite avec les bijoux volés et le sac de la vendeuse en abandonnant sur les lieux divers documents lui appartenant dont un passeport israélien à son nom qui permettait son identification et le matériel destiné à commettre ce vol, bombe aérosol de peinture, corde de nylon, gants, rouleau de sparadrap, couteau à cran d'arrêt et le pistolet en plastique ;

Une information était ouverte le jour même et le magistrat instructeur décernait contre R. L. un mandat d'arrêt international ;

Interpellé aux Pays-Bas le 6 novembre 1986, R. L. faisait l'objet d'une procédure d'extradition et était inculpé le 21 août 1987 par le juge d'instruction de Monaco ;

Après avoir nié les faits tant lors de son interrogatoire de première comparution que lors d'une confrontation en date du 10 septembre 1987, au cours de laquelle il était pourtant formellement reconnu par plusieurs témoins dont E. S., et après avoir soutenu avoir travaillé en usine en Israël jusqu'au 3 août 1986 et avoir été victime du vol de son passeport le 15 juillet 1986 à Tel-Aviv, R. L. devait en définitive admettre être l'auteur des vols commis dans la bijouterie P. ;

Il prétendait alors avoir commis les faits à l'instigation d'un certain M. F. et sur les indications de ce dernier qui lui aurait fourni le matériel abandonné sur les lieux et à qui il aurait remis les bijoux volés à la gare de Nice, où R. L. s'était fait conduire en taxi, ne conservant pour lui qu'une montre qu'il déclarait avoir vendue le jour même à un inconnu pour 10 000 F ;

Renvoyé devant le Tribunal correctionnel par ordonnance du 16 décembre 1987 du magistrat instructeur, R. L. maintenait à l'audience ces dernières déclarations en précisant qu'il avait agi sous la pression de M. F. à qui il devait de l'argent et sous l'empire d'une pilule également remise par M. F. ;

Considérant que R. L., qui comparaît en état de détention devant la Cour, assisté de Maître Marquilly, avocat-défenseur, persiste à l'audience dans ses aveux ;

Considérant que le Ministère public, relevant que l'extradition a été retardée par les procédures engagées aux Pays-Bas par le prévenu, requiert, eu égard à la gravité des faits, confirmation des peines prononcées ;

Que R. L., déclarant manifester des regrets, sollicite une application moins sévère de la loi pénale ;

Sur ce,

Considérant que les faits étant constants et reconnus, R. L. a été, à juste titre, déclaré coupable des vols visés à la prévention ;

Considérant, sur la répression, que tant l'importance des vols que les circonstances dans lesquelles ils ont été préparés et commis, alors par ailleurs que rien n'établit l'existence d'une contrainte qui aurait été, à l'en croire, exercée sur lui, confèrent aux faits un caractère de réelle gravité ;

Qu'à cet égard, les premiers juges ont fait une exacte application de la loi qui doit être approuvée et qu'il y a lieu de confirmer également de ce chef le jugement déféré ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

La Cour d'appel de la Principauté de Monaco, jugeant correctionnellement,

Confirme dans toutes ses dispositions le jugement du Tribunal correctionnel du 12 janvier 1988 ;

Composition🔗

MM. Huertas, prem. prés. rap. ; Serdet, subst. ; Me Marquilly, av. déf.

Note🔗

Le demandeur a été déchu de son pourvoi par arrêt de la Cour de révision du 1er juin 1988.

En ce qui concerne la contrainte : voir arrêt de la Cour d'appel du 19 décembre 1986 (publié) (affaire R., Dame B. c/ L.).

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