Ordonnance-loi n° 664 du 23 mai 1959 sur le nantissement des biens d'équipement

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Vu l'ordonnance constitutionnelle du 5 janvier 1911 modifiée par les ordonnances des 18 novembre 1917, 12 juillet 1922, 17 octobre 1944 et 16 janvier 1946 ;

Vu notre ordonnance n° 1.933 du 28 janvier 1959, qui suspend temporairement les ordonnances susvisées en tant qu'elles concernent le pouvoir législatif et la commune et qui transfère au Conseil d'État, à titre consultatif, les attributions conférées au Conseil National ;

Article 1er🔗

Les biens d'équipement nécessaires à l'exercice d'une profession, d'un commerce ou d'une industrie peuvent faire l'objet de nantissements restreints dans les conditions fixées ci-après.

Article 2🔗

Le paiement du prix d'acquisition peut être aussi garanti, aussi bien envers le prêteur de deniers qu'envers le vendeur.

Les cautions qui interviennent directement ou indirectement par aval, par acceptation d'effets ou autrement dans l'octroi de crédits d'équipement sont assimilées aux prêteurs de deniers.

Article 3🔗

Les règles édictées par l'ordonnance souveraine du 23 juin 1907 sur le nantissement des fonds de commerce sont applicables, sous réserve des dispositions de la présente ordonnance-loi.

Article 4🔗

Le nantissement est consenti par acte authentique ou sous seing privé, enregistré au droit fixe prévu par l'article 3 de la loi n° 580 du 29 juillet 1953.

Lorsqu'il est consenti au vendeur, il est donné dans l'acte de vente.

Lorsqu'il est consenti au prêteur, il est donné dans l'acte de prêt, lequel doit mentionner, à peine de nullité, que les deniers versés par le prêteur ont pour objet d'assurer le paiement du prix des biens acquis ; il doit alors être conclu, au plus tard, à la date de la livraison.

Dans tous les cas, les biens acquis doivent être énumérés dans le corps de l'acte et chacun d'eux doit être décrit d'une façon précise afin de l'individualiser par rapport aux autres biens de même nature appartenant à l'acquéreur ; l'acte indique également le lieu où les biens ont leur attache fixe, ou précise, au cas contraire, qu'ils sont susceptibles d'être déplacés ; en outre, si des effets ont été créés en représentation de tout ou partie du prix, il en est fait mention pour leur nombre et leur montant. Ces mentions doivent figurer, en sus de celles énumérées à l'article 3 de l'ordonnance souveraine du 23 juin 1907, sur les bordereaux d'inscription prévus par ce même article.

Article 5🔗

Historique de consolidation

Le privilège résultant du contrat de nantissement s'établit par le seul fait de l'inscription opérée dans les conditions prévues par l'ordonnance souveraine du 23 juin 1907 et par la présente ordonnance-loi.

À compter de sa date, l'inscription conserve le privilège pendant dix ans ; elle cesse d'avoir effet si elle n'a pas été renouvelée avant l'expiration de ce délai.

Article 6🔗

Les biens donnés en garantie peuvent en outre, à la requête du bénéficiaire du nantissement, être revêtus sur une pièce essentielle et d'une manière apparente, d'une plaque fixée à demeure indiquant la date et le numéro de l'inscription du privilège dont ils sont grevés. Sous peine des sanctions prévues à l'article 21, le débiteur ne peut faire obstacle à cette apposition, et les marques ainsi apposées ne peuvent être détruites, retirées ou recouvertes, avant l'extinction ou la radiation du privilège du créancier nanti.

Article 7🔗

Toute cession ou subrogation dans le bénéfice du nantissement doit être mentionnée en marge de l'inscription prise en conformité de l'article 5 de la présente ordonnance-loi dans les soixante jours de l'acte authentique ou sous seing privé, enregistré au droit fixe qui la constate, sur remise au fonctionnaire chargé du service du répertoire du commerce et de l'industrie d'une expédition ou d'un original dudit acte.

Les bénéficiaires des subrogations légales ne sont pas tenus d'en requérir mention.

La règle établie par l'article 1107 du Code civil s'applique quelle que soit la date de l'inscription ou de la mention en marge.

Article 8🔗

Par exception aux dispositions de l'article précédent, le bénéfice du nantissement est transmis de plein droit aux porteurs successifs des effets qu'il garantit, soit que ces effets aient été souscrits ou acceptés à l'ordre du vendeur ou du prêteur, soit, plus généralement, qu'ils représentent la mobilisation d'une créance valablement gagée, suivant les dispositions de la présente ordonnance-loi.

Si plusieurs effets sont créés pour représenter la créance, le privilège attaché à celle-ci est exercé par le premier poursuivant pour le compte commun et pour le tout.

Article 9🔗

Le débiteur qui, avant paiement ou remboursement des sommes garanties, veut remettre en gage ou aliéner, à titre gratuit ou onéreux, tout ou partie des biens grevés, doit, sous peine des sanctions prévues à l'article 21 et de la nullité de l'acte intervenu, obtenir le consentement préalable du créancier nanti, ou, à défaut, l'autorisation du juge des référés dans quelque main qu'ils passent.

Article 10🔗

Lorsqu'il a été satisfait aux exigences de publicité requises par la présente ordonnance-loi et que les biens grevés ont été revêtus d'une plaque, conformément à l'article 6, le privilège du créancier nanti ou de son subrogé suit les biens grevés dans quelques mains qu'ils passent.

Article 11🔗

Le privilège du créancier nanti subsiste si le bien grevé devient immeuble par destination.

L'article 1971 du Code civil n'est pas applicable aux biens nantis.

Article 12🔗

Le privilège s'exerce sur les biens grevés par préférence à tous autres privilèges, à l'exception :

  • 1° Du privilège des frais de justice ;

  • 2° Du privilège des frais exposés pour la conservation de la chose lorsque les dépenses conservatoires sont postérieures au nantissement.

Il s'exerce notamment à l'encontre de tout créancier hypothécaire et par préférence aux privilèges du trésor princier, à ceux du bailleur, du vendeur du fonds de commerce à l'exploitation duquel est affecté le bien grevé, ainsi qu'au privilège du créancier nanti sur l'ensemble dudit fonds.

Toutefois, pour que son privilège soit opposable au créancier hypothécaire, au vendeur du fonds de commerce, au créancier nanti sur l'ensemble dudit fonds préalablement inscrit et au bailleur, le créancier nanti en application de la présente ordonnance-loi doit leur signifier, par acte extra-judiciaire, une copie de l'acte constatant le nantissement. Cette signification doit, à peine de nullité, être faite dans les trente jours du nantissement.

Article 13🔗

L'état des inscriptions existantes, délivré en application de l'article 12 de l'ordonnance souveraine du 23 juin 1907, devra comprendre les inscriptions prises en exécution de la présente ordonnance-loi. Il pourra également être délivré à tout requérant, sur sa demande, un état attestant seulement qu'il existe, ou qu'il n'existe pas, sur les biens désignés, des inscriptions prises en vertu des dispositions, soit de l'ordonnance souveraine du 23 juin 1907, soit de la présente ordonnance-loi.

Article 14🔗

En cas de saisie faite en application des dispositions des titres IV et VI du Code de procédure civile, il ne peut être procédé à la vente des biens saisis que huit jours après la notification de la poursuite aux créanciers inscrits, en vertu des dispositions de la présente ordonnance-loi, depuis quinze jours au moins avant cette notification au domicile par eux élu dans leurs inscriptions ; la notification rend exigibles les créances garanties par elles.

Pendant ce délai de huit jours, lesdits créanciers pourront demander au président du tribunal de première instance, par voie de requête, d'ordonner la vente des biens grevés, à la diligence du poursuivant. Ces biens seront vendus en même temps que le fonds. le droit au bail ou le mobilier saisis.

Article 15🔗

À défaut de paiement à échéance, le créancier peut poursuivre la réalisation des biens grevés dans les conditions prévues à l'article 61 du Code de commerce.

Cependant, s'il existe des inscriptions de nantissement sur le fonds, le créancier bénéficiaire du privilège établi par la présente ordonnance-loi doit, huit jours avant, notifier la réalisation de ces biens aux créanciers inscrits sur le fonds de commerce depuis quinze jours au moins avant la notification au domicile par eux élu dans leurs inscriptions.

Pendant ce délai, tout créancier inscrit, si sa créance est exigible, pourra assigner tous les intéressés devant le tribunal de première instance, pour demander qu'il soit procédé à la vente du fonds et du droit au bail à sa requête ou à celle du créancier nanti en application de la présente ordonnance-loi, conformément aux articles 555 et suivants du Code de procédure civile.

Les biens grevés seront vendus en même temps que les autres éléments du fonds de commerce.

Article 16🔗

Les biens grevés en vertu de la présente ordonnance-loi, dont la vente est poursuivie avec celles d'autres meubles, devront faire l'objet d'une mise à prix distincte ou d'un prix distinct si le cahier des charges oblige l'adjudicataire à les prendre à dire d'expert.

Dans tous les cas, les sommes provenant de la vente de ces biens seront attribuées, par préférence, aux bénéficiaires des inscriptions de nantissement les grevant, à concurrence du montant de leurs créances en principal, frais et intérêts conservés par ces inscriptions.

La quittance délivrée par le créancier bénéficiaire du privilège n'est soumise qu'au droit fixe prévu par l'article 3 de la loi n° 580 du 29 juillet 1953.

Article 17🔗

Les inscriptions sont rayées soit du consentement des parties intéressées, soit en vertu d'un jugement passé en force de chose jugée.

À défaut de jugement la radiation totale ou partielle ne peut être opérée par le fonctionnaire chargé du service du répertoire du commerce et de l'industrie que sur le dépôt d'un acte de consentement donné par le créancier.

La radiation est opérée moyennant une inscription faite par le fonctionnaire chargé du service du répertoire du commerce et de l'industrie en marge de l'inscription.

Il en est délivré certificat aux parties qui le demandent.

Article 18🔗

Le droit d'inscription des créances garanties au moyen du nantissement est fixé à 0,65 F par mille du capital de ces créances.

Article 19🔗

Article 20🔗

Ne sont pas soumis à l'application de la présente ordonnance-loi :

  • 1° Les véhicules automobiles visés par la loi n° 419 du 2 avril 1949 ;

  • 2° Les navires et autres bâtiments de mer visés par l'ordonnance souveraine du 16 octobre 1915 ;

  • 3° Les aéronefs visés par la loi n° 622 du 5 novembre 1956.

Article 21🔗

Est puni des peines de l'article 404 du Code pénal, tout acquéreur ou détenteur de biens nantis en application de la présente ordonnance-loi, qui les détruit ou tente de les détruire, les détourne ou tente de les détourner, ou, enfin, les altère ou tente de les altérer d'une manière quelconque en vue de faire échec aux droits du créancier.

Sont punis des mêmes peines ceux qui, par des manœuvres frauduleuses ont privé ou tenté de priver le créancier de tout ou partie de son privilège sur les biens nantis.

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