Projet de loi n° 995 relative à la technologie blockchain
Exposé des motifs🔗
La technologie « Blockchain » est considérée comme une grande révolution, voire même la révolution technologique des débuts de ce 21ème siècle. Compte tenu des innovations qu'elle comporte et des nombreux usages qui pourraient en être faits, certains estiment que ladite technologie pourrait à l'avenir connaître un essor comparable à celui d'internet. Ainsi, certains ont pu parler de technologie disruptive ou de rupture à son sujet.
Cette technologie a pour objet de permettre à des utilisateurs de consulter et de mettre à jour un registre partagé (que l'on appelle une blockchain ou chaîne de blocs) dont le contenu est maintenu de façon décentralisée, sans la présence d'un tiers de confiance. C'est au travers d'un mécanisme de consensus que s'effectue la mise à jour de cette blockchain, ce qui assure un ordonnancement clair et sans ambiguïté des transactions et des blocs et garantit l'intégrité et la traçabilité du contenu de ce registre partagé entre les différents nœuds distribués du réseau.
Son potentiel et ses usages, sans cesse en développement, se doivent d'être régulés.
Cet impératif n'a pas échappé au Conseil National qui, lors de la séance publique du 21 décembre 2017 , a adopté une proposition de loi ayant pour objet de décrire cette technologie et de l'encadrer.
Fort des orientations données, en matière de transition numérique de la Principauté, par son Altesse sérénissime le prince Souverain, le Gouvernement a exprimé son désir de voir transformer cette proposition en projet de loi.
En déposant sur le bureau de l'assemblée le présent projet de loi, le Gouvernement Princier entend ainsi continuer son processus de modernisation et de transition numérique initié avec la loi n° 1.383 du 3 août 2011 sur l'économie numérique et complété, plus récemment, avec le dépôt, des projets de loi relative à l'identité numérique d'une part et à la modification de la loi n° 1.383 du 3 août 2011 , précitée, d'autre part.
Aux vues des données internationales et européennes, et selon le site « blockchainfrance.wordpress.com », la technologie blockchain est définie comme « une technologie de stockage numérique et de transmission à coût minime, décentralisée et totalement sécurisée », Dans le même sens, en mai 2017, le « Vocabulaire de l'informatique » français a défini officiellement la blockchain comme « un mode d'enregistrement de données produites en continu, sous forme de blocs liés les uns aux autres dans l'ordre chronologique de leur validation, chacun des blocs et leur séquence étant protégés contre toute modification ».
Il importe au Gouvernement de préciser que la blockchain est une technologie qu'il ne faut pas confondre avec les usages qui en sont fait, par des blockchains particulières se développant dans de nombreux secteurs d'activités, notamment la banque, la finance (Bitcoin, Ethereum),les registres fonciers, les documents et la logistique dans les transports maritimes ou encore la traçabilité des aliments et des produits.
Aussi, il convient tout d'abord de préciser que plusieurs grandes catégories de blockchain peuvent être crées.
En premier lieu, il existe les blockchains publiques, qui sont totalement décentralisées et auxquelles tout le monde peut accéder car il n'y a aucune barrière d'entrée, aucune permission à demander pour effectuer une transaction et où tous les acteurs sont en situation égalitaire dans leur participation au réseau comme Bitcoin ou Ethereum. Les blockchains publiques reposent sur l'anonymat des participants et l'absence de régulateur.
En second lieu, il y a les blockchains qui fonctionnent dans un réseau privé sur lequel le gérant peut modifier le protocole quand il le souhaite et où personne ne peut y participer sans y être autorisé par une autorité centrale.
Font partie de cette catégorie les blockchains utilisées par les banques au sein de leur réseau interne ou encore celles utilisées par certaines banques centrales pour les opérations de règlement de devises en monnaie d'une banque centrale.
Enfin, il existe les blockchains dites « de consortium » qui regroupent plusieurs acteurs mais qui ne sont pas publiques et ouvertes à tous. C'est une blockchain hybride où les droits d'écriture et de modification sont modifiables et certains nœuds peuvent être rendus publics tandis que d'autres restent privés. De fait, dans ce dernier type de blockchain, des organisations présélectionnées opèrent chacune un noeud différent et elles peuvent être restreintes à certains utilisateurs. Elles sont donc considérées comme étant partiellement décentralisées et s'adaptent particulièrement aux environnements régulés à I'instar du consortium bancaire R3 CEV qui regroupait plus de 80 banques internationales expérimentant la technologie.
De manière générale, la blockchain repose sur trois techniques éprouvées : une base de données (un registre partagé), des échanges de fichiers (échanges « peer to peer » ou de « pair à pair ») et l'utilisation de la cryptographie asymétrique pour signer les transactions garantissant ainsi l'identité du signataire et l'intégrité du contenu.
La caractéristique essentielle du dispositif est que ce registre est décentralisé et qu'ainsi, aucune autorité ne tient le rôle de tiers de confiance.
De fait, le registre est fiabilisé et sécurisé par ses utilisateurs, dans la mesure où chacun vérifie la validité de la chaîne. En outre, les données ne peuvent être modifiées.
S'il est historiquement admis que la technologie Blockchain est née avec la blockchain bitcoin en 2009, créée anonymement sous le pseudonyme « Satoshi NAKAMITO », il n'en demeure pas moins que celle-ci ne peut être réduite au bitcoin ou autres crypto-monnaies, dans la mesure où ses utilisations peuvent être diverses et que son potentiel d'utilisation est considérable.
Dans cette optique, la question de la habilité et de la sécurité de la technologie est également un enjeu majeur, tant pour le développement de la Blockchain que pour ses utilisateurs. Car, en dépit du slogan des initiateurs de la Blockchain, selon lequel « the code is law », (le codage fait la loi), le développement de cette technologie ne saurait se faire en dehors de règles adaptées lorsque celles du droit commun s'avèrent insuffisantes, à l'instar d'ailleurs d'internet dont le fonctionnement est désormais régi par un corpus de règles spécifiques.
Hors de la Principauté, diverses initiatives ont d'ores et déjà été prises par plusieurs Etats pour réglementer la technologie Blockchain et ses applications, tantôt par les autorités des marchés financiers, comme en Suisse, à Malte ou aux États-Unis, tantôt avec I adoption d'un cadre légal et réglementaire, comme en Italie, au Luxembourg, à Malte, et récemment en France.
Dans ce sillage, il est apparu hautement opportun au Gouvernement d'aller encore plus loin et de consacrer, avec le présent projet de loi, la force probante de la blockchain et l'encadrement des levées de fonds sous forme d'actifs numériques qui donnent lieu à l'émission de jetons sur cette technologie.
Ce choix s'explique par l'attrait qui se manifeste à Monaco pour ce nouveau mode de financement de l'activité économique des entreprises. La pratique révèle en effet que de nombreuses opérations de levées de fonds sous forme d'actifs numériques effectuées au moyen de la technologie blockchain, que l'on désigne couramment sous le terme « d'Initial Coin Offerings » (ICOs) connaissent dans le monde un succès croissant avec des montants collectés parfois considérables.
Or, de telles opérations, en principe réalisées sans intermédiaire financier, s'adressent souvent à un public averti mais peuvent parfois intéresser également le grand public, alors même que les fonds investis dans une ICO ne sont pas garantis et qu'il s'agit d'investissements présentant un risque de perte en capital. De même, la valeur des jetons émis, appelés communément en la matière « tokens », est susceptible de grandes variations, et la pratique a révélé des cas de fraudes, voire de risques de blanchiment de capitaux.
Compte tenu des risques potentiels présentés par les ICOs et afin de sécuriser ce nouveau mode de financement des entreprises à Monaco, le Gouvernement a donc souhaité poser un cadre légal destiné, d'une part, à protéger les investisseurs qui pourraient souhaiter participer à de telles opérations lancées par des sociétés installées à Monaco en leur fournissant une information de qualité, et d'autre part à favoriser le développement des sociétés dans ce domaine à la fois nouveau et complexe.
De fait, le présent projet de loi prévoit que les émissions de jetons sur une blockchain soient soumises à une autorisation administrative obligatoire, laquelle sera délivrée par le Ministre d'Etat sous la forme d'un label, après consultation d'une commission spécialement constituée à cet effet. Ladite commission examinera, en particulier, si une information suffisante des souscripteurs est envisagée par l'entreprise émettrice des jetons et si la levée de fonds présente toutes les garanties requises, notamment en ce qui concerne la technologie proposée, et les modalités de collecte et d'utilisation des fonds recueillis. Ces éléments d'information devront être réunis au sein d'un document d'informations appelé communément « whitepaper ».
De surcroît, il est apparu expédient au Gouvernement de veiller à ce que les différents opérateurs appelés à participer aux levées de fonds sur la blockchain respectent les standards de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, applicables à Monaco, conformément à la loi n° 1.362 du 3 août 2009 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption, modifiée.
En conséquence, le Gouvernement entend, dans le présent projet loi, accompagner l'essor de cette nouvelle technologie en définissant d'une part, de manière générale la technologie blockchain et les usages qui en seront fait et d'autre part, en encadrant de manière précise le dispositif des offres de jetons.
Sous le bénéfice de ces observations d'ordre général, le présent projet de loi appelle les commentaires particuliers ci-après.
Le projet de loi comporte les six chapitres suivants :
Chapitre I : Définitions ;
Chapitre II : Régime et force probante ;
Chapitre III : Des offres de jetons ;
Chapitre IV : Du contrôle de la régularité des offres de jetons ;
Chapitre V : Des sanctions ;
Chapitre VI : Dispositions diverses et transitoires.
Le Chapitre I intitulé « Définitions » comprend les définitions nécessaires à la bonne compréhension de la loi.
L'article premier définit la terminologie employée dans le projet de loi. Outre une définition générale de la technologie blockchain, intitulée dans le projet de loi « dispositif d'enregistrement numérique sur un registre partagé », il explicite les termes habituellement employés pour définir les actifs basés sur cette technologie.
Pour définir les jetons, le Gouvernement a choisi de reprendre distinction couramment admise entre « security token », « utility token », « coin ».
Les « security tokens » sont des jetons qui revêtent la plus grande spécificité.
Concrètement ceux-ci désignent des jetons présentant une ou plusieurs caractéristiques des instruments financiers, tels que par exemple des droits de vote, ou des droits sur les résultats de l'exploitation sans conférer de part ou d'action dans le capital de la société. C'est d'ailleurs l,une des particularités des offres de jetons qui n'ont pas pour effet d,emporter la dilution des droits des actionnaires.
Quant aux « utiIity tokens », ceux-ci désignent les jetons qui sont représentatifs d'un droit d'usage sur des biens, des produits ou un droit d'accès à des services consentis par le porteur du projet.
S'agissant des coins, il s'agit de biens dont I'objet principal est de remplir l'une des trois fonctions traditionnellement attribuées à [a monnaie.
Si aucun des biens inscrits sur la blockchain ne peut aujourd'hui être considéré comme remplissant I'ensemble de ces fonctions, d'où leur nature non-monétaire, certains d'entre eux s'en rapprochent et méritent à ce titre d'être distingués des autres. La définition proposée dans le présent projet de loi a pour objet de tenir compte de cette nature hybride en identifiant les biens qui, sans pouvoir être considérés comme d'authentiques devises, s'en rapprochent bel et bien.
Le Gouvernement a ensuite estimé opportun de définir un « protocole contractuel numérique », communément appelé « smart contracts », ou « contrat intelligent », à savoir une technique apparue avec la blockchain Ethereum se traduisant par des programmes informatiques parfois complexes utilisant la technologie blockchain. C'est en particulier via ces smart contracts que les offres de jetons sont la plupart du temps réalisées.
Les clés privée et publique sont quant à elles une technique préexistant à la technologie blockchain et reprise par la blockchain Bitcoin et les blockchains qui I'ont suivie. Les techniques cryptographiques asymétriques dont la clé privée est assortie permettent de garantir l'impossibilité d'accéder au « wallet » (portefeuille) correspondant par une personne ne disposant pas de cette clé.
La clé publique, quant à elle, est un corollaire indissociable de la clé privée permettant aux tiers de réaliser des transactions avec le détenteur de la clé privée et de vérifier son identité sans que ce dernier n'ait nul besoin de divulguer sa clé privée.
Etant rappelé que les offres de jetons sont des opérations de levées de fonds effectuées à travers une blockchain et qui donnent lieu à une émission de jetons, celles-ci sont définies en termes généraux, afin d'englober la grande diversité de techniques pouvant être mises en oeuvre pour proposer à des personnes d'acquérir les jetons qui font l'objet de ces offres.
Les raisons de ce choix tiennent au fait qu'il est difficile d'identifier des traits communs à l'ensemble de ces offres, tant la nature du projet sous-jacent, que la technologie mise en œuvre, varie d'une offre à l'autre. La plupart d'entre elles se caractérisent cependant par l'échange des jetons faisant l'objet de I'offre contre des devises nationales ou des cryptomonnaies populaires (au premier rang desquelles I'ether et le bitcoin), un prix décoté par rapport à celui auquel ces jetons pourront être acquis postérieurement à l'offre le cas échéant, ainsi qu'une certaine implication des souscripteurs dans la réussite de I'offre et du développement futur du projet, dont la réussite dépend souvent du nombre de souscripteurs à l'offre et, une fois I'offre réalisée, de la fréquence d'utilisation et du volume d'échange des jetons.
Les Chapitres II et III intitulés « Régime et force probante » et « Des offres de jetons » comprennent les articles 2 à 7 et posent le cadre général de Ia blockchain et de l'offre de jetons.
L'article 2 pose un principe général de présomption simple de l'existence, du contenu et de la date des informations stockées sur la blockchain. cette présomption est justifiée par f inaltérabilité des transactions figurant sur la blockchain. Toutefois, cette présomption ne sera recevable que sous réserve du respect des exigences prévues au sein d'une Ordonnance souveraine distincte, à l'instar de la loi italienne renvoyant la valeur probatoire du dispositif à sa conformité à l'article 41 , relatif à l'horodatage électronique, du règlement eIDAS n°910/2014 du 23 juillet 2014 sur l'identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur.
L'article 3, prévoit, quant à lui, une présomption simple de ce que toute transaction a été effectuée par le propriétaire de la clé privée correspondante, et participe du même esprit que celui de l'article 2. S'il est en effet impossible, en l'état actuel de la technologie, de réaliser une transaction sur la blockchain sans disposer de la clé privée qui permet cette réalisation, la divulgation ou le vol de cette clé pourrait hypothétiquement mettre en péril l'identification de la personne à l'origine de la transaction.
De ce fait, il incombe à la personne qui s'en prévaut, c'est-à-dire le propriétaire de la clé privée dans la plupart des cas, d'apporter la preuve de ce que cette clé a été volée ou divulguée à un tiers et utilisée aux fins de réaliser une transaction donnée. Le présent projet de loi a ainsi pris le parti de responsabiliser pleinement le détenteur de la clé privée en lui faisant supporter le risque de sa divulgation.
Cette solution est dans le droit fil de la philosophie sous-jacente à la technologie blockchain, qui donne tous pouvoirs au propriétaire de la clé privée pour réaliser toutes transactions au moyen de cette clé sans intervention possible d'une entité tierce. Il incombe dès lors à ce dernier de s'assurer qu'aucun tiers ne peut être mis en mesure de I'utiliser.
L'article 4 distingue les différents types possibles d'offres de jetons (publiques ou privées) et pose un principe d'interdiction de I'offre au public des security tokens. Ledit article fait peser sur l'émetteur la responsabilité de définir et de déterminer les caractéristiques générales de l'offre (nature des jetons, droits afférents et caractère public ou privé).
L'article 5 pose le principe selon lequel toute offre de jetons est subordonnée à l'obtention d'un label délivré par le Ministre d'État après l'avis consultatif d'une commission dédiée. Compte tenu du manque de sérieux dont ont pu faire preuve nombre d'émetteurs de jetons par le passé, et quoique le secteur ait connu une certaine professionnalisation sur la période récente, il est apparu nécessaire de soumettre les offres de jetons à une autorisation administrative préalable et obligatoire, délivrée sous la forme d'un label.
L'octroi du label certifie en effet la qualité de l'information fournie et des conditions de l'offre, sans toutefois offrir aux souscripteurs de garantie sur le succès économique de l'investissement proposé ou sur l'opportunité de participer à cette offre.
Ledit article fixe également les modalités de l,intervention de la commission consultative, laquelle doit disposer de toutes les informations lui permettant de rendre un avis éclairé. outre la possibilité d'entendre les représentants de l'émetteur et de toute personne dont elle estime l,audition utile, est ainsi imposée la communication à la commission, des pièces nécessaires à l'instruction de la demande d'autorisation, parmi lesquelles figure un document d'informations destiné à l'information des souscripteurs, dit « white paper ».
Ce document, dont la communication aux souscripteurs est essentielle, doit notamment contenir des renseignements sur l'émetteur et sur I'offre elle-même, avec des précisions sur la nature des droits attachés aux jetons à émettre. La liste des pièces nécessaires à f instruction de la demande ainsi que le contenu du « white paper » seront définis par ordonnance souveraine.
Il s'agit là d'une pièce centrale de l'offre de jetons. Les offres réalisées par le passé, et dans un contexte fortement non régulé, ont témoigné de ce que la qualité, la forme et le contenu de ce document ont pu grandement varier d'un émetteur à l'autre. Il est dès lors apparu nécessaire de requérir de l'émetteur qu'il y fasse figurer un certain nombre d'informations requises.
Parce qu'un « white paper », établi conformément aux dispositions réglementaires en la matière devra contenir toutes les informations nécessaires à la bonne compréhension du projet, sa communication à la commission consultative est destinée à lui donner une information précise sur le projet.
Dans le même sens, le contenu dudit « white paper », doit être clair, exact et non trompeur.
En considération des éléments portés à sa connaissance, la commission, appréciera si l'information des souscripteurs ne cherche pas à les induire en erreur, voire à masquer une partie des informations nécessaires.
La clarté de I'information peut en effet faire défaut même aux projets les plus sérieux et prometteurs lorsque, par exemple, les caractéristiques techniques des droits attachés aux jetons font l'objet d'une description trop imprécise pour que leur teneur soit suffisamment compréhensible pour les souscripteurs potentiels.
L'article 6 prévoit que seules des sociétés immatriculées sur le territoire de la Principauté peuvent réaliser une offre de jetons dans le cadre de la présente loi. Autrement dit, seules les sociétés domiciliées à Monaco pourront solliciter la délivrance du label délivré par le Ministre d'Etat aux fins d'initier une offre de jetons sur le fondement de la présente loi.
L'obligation, pour l'émetteur qui entend offrir des security tokens,
d'être constitué sous forme de société par actions tient à certaines caractéristiques attachées à ces titres lesquels ne peuvent être émis que par des sociétés par actions.
Il importe par exemple d'éviter qu'une société à responsabilité limitée puisse émettre des titres négociables.
Enfin, il incombe à I'émetteur de garantir que la conservation des fonds et des actifs recueillis dans le cadre de l'offre, ainsi que leur suivi, peuvent être effectivement assurés. Cet impératif est d'autant plus essentiel qu'une malfaçon de la technologie sous-jacente aux jetons, voire une fraude quelconque conduisant à leur disparition ou distraction, devrait en principe donner lieu à une restitution des fonds aux souscripteurs. Quant à I'obligation d'assurer leur suivi, elle permet d'assurer que les fonds seront utilisés conformément aux conditions prévues par le projet d'offre.
L'article 7 prévoit le placement sous séquestre des fonds collectés pour toute la durée de I'opération. Il convient en effet de s'assurer que ces fonds pourront être restitués aux souscripteurs le cas échéant en cas d'échec de la levée de fonds ou d'abandon du projet, et qu'ils ne seront utilisés qu'une fois I'opération arrivée à terme, ou aux échéances prévues selon le calendrier fixé dans le « white paper ».
Dans la continuité de ce principe, l'article énonce plusieurs hypothèses dans lesquelles les fonds devront être restitués aux souscripteurs. Leur placement préalable sous séquestre permet de garantir le respect de cette obligation, et en particulier qu'ils ne pourront être utilisés que dans les conditions prévues par le « white paper ».
Le Chapitre IV, intitulé « Du contrôle de la régularité des offres jetons », comprend les dispositions relatives au contrôle, par l'Etat, de
conformité des offres de jetons aux dispositions de la présente loi.
L'article 8 prévoit ainsi qu'il incombe à la Direction de l'Expansion Economique d'effectuer le contrôle du respect des obligations prévues par la loi. Ledit contrôle, effectué d'office ou sur signalement, est mené par des fonctionnaires ou agents spécialement commissionnés à cet effet et tenus au secret professionnel ainsi qu'à l'obligation de discrétion. Dans l'hypothèse où ils feraient appel à un expert, ce-dernier est soumis aux mêmes obligations.
L'article 9, vient, quant à lui, encadrer la procédure de contrôle, celle-ci pouvant être menée sur pièces ou sur place.
A cet effet, les agents de la Direction de l'Expansion Economique sont dotés du pouvoir d'obtenir communication de tous documents professionnels, de convoquer et entendre toute personne le cas échéant en ayant recours aux systèmes de visioconférence ou audioconférence, d'accéder aux locaux à usage professionnel et de recueillir des explications sur place, ainsi que tous documents. Ils sont également habilités à se faire communiquer la transcription des informations contenues dans les programmes informatiques des professionnels.
Enfin, il peut être procédé à toute constatation utile, notamment à partir d'un service de communication au public en ligne ou encore en consultant les données librement accessibles ou rendues accessibles, y compris par imprudence, par négligence ou par le fait d'un tiers. Ces données peuvent ainsi être retranscrites par tout traitement approprié dans des documents directement utilisables pour les besoins du contrôle.
En outre, les contrôles sur place doivent notamment respecter le principe de l'inviolabilité du domicile et respecter certains horaires.
Aux fins de préserver les droits de la défense, les contrôles in situ ne peuvent être effectués qu'en présence d'un représentant de la personne contrôlée. De même, toute personne convoquée peut se faire assister par un conseil de son choix.
Comme suite aux constatations, vérifications et visites menées en application de cet article, un procès-verbal est dressé contradictoirement lorsque les vérifications et visites sont effectuées sur place ou sur convocation.
En cas de manquement aux obligations prescrites par la loi et ses textes d'application, un rapport est adressé au Ministre d'État.
Les modalités d'application de cet article seront précisées dans une ordonnance souveraine.
L'article 10 prévoit, en cas de manquement aux obligations de la loi, constaté lors des contrôles, que le Ministre d'Etat transmet le rapport mentionné à l'article 9 à la Commission prévue à l'article 5, aux fins de recueillir son avis quant aux suites à donner et au prononcé éventuel d'une sanction.
La Commission est ainsi chargée de notifier les griefs susceptibles d'être formulés à la personne morale concernée et ses représentants légaux.
L'article encadre également la procédure qui découle de cette transmission en prévoyant la possibilité de consultation des dossiers par les personnes mises en cause et l'assistance par un conseil. Le respect du contradictoire est garanti par une procédure d'échanges entre les représentants de la personne morale et la commission. Les représentants de la personne morale mise en cause sont convoqués par la commission en vue d'être entendus en leurs explications, ou dûment appelés à les fournir, étant précisé que toute audition donne lieu à la rédaction d'un procès-verbal consignant l'ensemble des explications.
La commission joue ici un rôle essentiel dans le dispositif, dans la mesure où il lui incombe de se prononcer sur la documentation fournie par l'émetteur et d'entendre les représentants de la société émettrice et, en cas de manquements avérés, de proposer une sanction.
Il importe au Gouvernement de relever que, sauf cas d'urgence conformément à l'article 11, aucune décision de révocation ou de suspension de I'autorisation ne pourra intervenir sans que cette commission n'ait entendu ou appelé le titulaire du label à faire valoir ses explications et rendu un avis préalable.
Des modalités complémentaires seront prévues par ordonnance souveraine.
Le Chapitre V, intitulé « Des sanctions » comprend les articles 11 à 15 et prévoit la possibilité de sanctions administratives et pénales.
L'article 11 prévoit, lorsque la personne morale ne respecte pas les conditions ou les limites de l'autorisation, ou si les fonds n'ont pas été placés sous séquestre ou encore dans l'hypothèse où l'offre ne serait plus conforme au « white paper » que le Ministre d'Etat puisse, sur proposition de la commission prévue par l'article 5, suspendre ou révoquer I'autorisation d'émettre une offre de jetons.
Il est ici question de s'assurer de ce que l'émetteur n'altère en aucune façon les conditions de I'offre, une fois l'autorisation délivrée. Il lui revient donc de définir précisément les modalités de l'offre et de veiller à la rédaction du white paper, lesquels devront être respectés lors de la réalisation de l'opération.
Le troisième alinéa permet au Ministre d'État, lorsque l'urgence le justifie, de suspendre provisoirement l'autorisation par décision motivée. Il appartiendra le cas échéant à l'émetteur, d'exercer un recours devant le Président du Tribunal de première instance statuant comme en matière de référé afin de solliciter la levée de la mesure prise par le Ministre d'Etat.
L'article 12 impose à l'émetteur de jetons de mettre un terme aux communications relatives à une offre dont I'autorisation aurait été suspendue ou révoquée. L'objectif est d'éviter qu'une offre qui ne satisferait plus les conditions de l'autorisation continue d'attiser I'intérêt de potentiels souscripteurs, voire que l'émetteur cherche à continuer de collecter frauduleusement des souscriptions sans y être autorisé.
L'article 13 permet au Ministre d'État de publier sur tout support approprié la ou les sanctions prononcées en application de l'article 11 sauf dans les cas où cette publication compromettrait une enquête pénale en cours ou lorsque le préjudice qui en résulterait serait disproportionné. Cette publication permet de renforcer le caractère dissuasif du dispositif, en particulier lorsqu'elle pourrait entraîner un préjudice réputationnel important pour l'émetteur.
Dans l'hypothèse où la publication compromettrait une enquête pénale ou ne serait disproportionnée que pour un court délai, le Ministre d'Etat peut décider de reporter cette publication à l'expiration de ce délai. Cette disposition permet de moduler l'application de la sanction dans le temps en évitant qu'une situation temporaire compromette l'efficacité du dispositif.
Enfin, tout ou partie des frais de publication peut être mis à la charge de la personne sanctionnée.
L'article 14 ajoute aux sanctions administratives une sanction pénale à l'encontre de toute personne ou des dirigeants des personnes morales qui procèdent ou tentent de procéder à une offre de jetons sans avoir obtenu préalablement l'autorisation d'y procéder. Dans la mesure où la sanction peut s'élever jusqu'au montant des fonds collectés, celle-ci apparaît proportionnée à la gravité de l'acte en cause. Une telle sanction est nécessaire pour assurer l'effectivité des obligations instituées par le présent projet de loi.
De même, une sanction pénale peut être prononcée à l'encontre des dirigeants des personnes morales qui procèdent ou tentent de procéder à une offre de jetons alors que l'autorisation dont ils étaient titulaires a été suspendue ou révoquée.
Ceux-ci encourent également une sanction pénale s'ils procèdent ou tentent de procéder à une offre de jetons autre que celle autorisée ou qui excède les limites de l'autorisation.
Les personnes morales déclarées responsables desdites infractions encourent une amende dont le montant est égal au quintuple de l'amende prévue pour leurs dirigeants.
L'article 15 vient compléter l'arsenal répressif en prévoyant une sanction pénale à l'encontre de toute personne faisant obstacle ou tentant de faire obstacle aux contrôles exercés en application de l'article 9 de la présente loi.
Enfin, le Chapitre VI intitulé « Dispositions diverses et transitoires » comprend les articles 16 et 17 venant poser d'une part, la soumission des sociétés titulaires d'une autorisation d'émission de jetons aux dispositions relatives à la réglementation en vigueur en matière de blanchiment et d'autre part, le délai de mise en conformité avec la présente loi.
L'article 16 soumet les sociétés titulaires d'une autorisation de procéder à une offre de jetons à l'ensemble des dispositions de la loi n° 1.362 du 3 août 2009 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption, modifiée.
Il incombera donc aux sociétés titulaires du label de respecter les obligations de vigilance définies par les dispositions légales et réglementaires en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, de même que l'ensemble des prescriptions applicables en la matière.
Il est en effet apparu essentiel au Gouvernement de sécuriser les offres de jetons opérées par les sociétés installées sur son territoire au regard des risques en matière de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme.
De même, et à f instar de la France, il échet également d'ajouter aux professionnels soumis à la loi n° 1.362 du 3 août 2009, modifiée, susmentionnée, toute personne qui, à titre de profession habituelle, se porte contrepartie ou agit en tant qu'intermédiaire en vue de l'acquisition ou de la vente d'actifs numériques.
Sont ici visées les plates-formes de conversion qui interviennent pour réaliser des opérations d'échange de crypto-monnaies contre de la monnaie légale, étant rappelé qu'une telle activité à Monaco nécessiterait la délivrance préalable d'un agrément de prestataire de service de paiement par l'Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (A.C.P.R.).
L'article 17 accorde un délai de six mois pour se mettre en conformité avec les dispositions de la présente loi, aux sociétés qui, au jour de l'entrée en vigueur de la loi, ont initié une offre de jetons sans toutefois que ceux-ci aient été émis. A cet égard, il leur incombe donc de déposer une demande de label dans les conditions des articles 4 à 2. A défaut, ils encourent les sanctions de l'article 11 .
Tel est l'objet du présent projet de loi.
Dispositif🔗
Chapitre I - Définitions🔗
Article 1er🔗
Au sens de la présente loi on entend par:
« Actif numérique » : des jetons tels que définis par la présente loi ainsi que toute représentation d'une valeur qui n'est pas émise ou garantie par une banque centrale ou par I'Etat, qui n'est pas nécessairement attachée à une monnaie ayant cour légal et qui ne possèdent pas le statut juridique d'une monnaie, mais qui est acceptée par des personnes physiques ou morales comme un moyen d'échange et qui peut être transférée, stockée ou échangée électroniquement ;
« Clé privée » : mécanisme cryptographique permettant à son titulaire de signer des transactions dans le cadre d'un dispositif d'enregistrement numérique sur un registre partagé.
« Clé publique » : mécanisme cryptographique permettant aux tiers de vérifier la signature de transactions réalisées dans un dispositif d'enregistrement numérique sur un registre partagé sans contraindre le signataire à révéler sa clé privée.
« Dispositif d'enregistrement numérique sur un registre partagé » : un dispositif d'enregistrement numérique permettant de garantir la disponibilité, l'authentification, la traçabilité, l'intégrité, la confidentialité et la conservation des opérations ;
« Jeton » : un bien incorporel, représentant sous un format numérique, un ou plusieurs droits, pouvant être émis, inscrits, conservés ou transférés au moyen d'un dispositif d'enregistrement numérique sur un registre partagé.
Celui-ci peut représenter alternativement ou cumulativement :
une ou plusieurs des caractéristique(s) d'un instrument financier au sens de I'article 2 du Code de commerce ;
un droit d'usage sur des biens, des produits ou des services ;
une unité de valeur non monétaire.
« Offre de jetons » : une proposition de souscrire à un ou plusieurs jetons, lesquels seront émis en utilisant un dispositif d'enregistrement numérique sur un registre partagé.
« Protocole contractuel numérique » : un programme informatique utilisant un dispositif d'enregistrement numérique sur un registre partagé et permettant d'exécuter automatiquement une série d'actions prédéterminées lorsque les conditions prédéfinies dans le programme sont réunies ;
Chapitre II - Régime et force probante🔗
Article 2🔗
Toute information enregistrée dans un dispositif d'enregistrement numérique sur un registre partagé vaut présomption simple de son existence, de son contenu et de sa date, jusqu'à preuve contraire sous réserve du respect des exigences fixées par ordonnance souveraine.
Article 3🔗
Toute action réalisée au sein d'un dispositif d'enregistrement numérique sur un registre partagé au moyen d'une clé privée, vérifiée par la clé publique correspondante, est présumée l'avoir été par le titulaire de ladite clé privée jusqu'à preuve contraire.
Chapitre III - Des offres de jetons🔗
Article 4🔗
Une offre de jetons peut être privée ou publique dans les conditions fixées par ordonnance souveraine.
Une offre au public sur des jetons revêtant une ou plusieurs caractéristiques d'instruments financiers réalisée par une personne morale domiciliée à Monaco est prohibée.
Il appartient à l'émetteur de déterminer :
la nature du jeton à émettre et les droits y afférents et ;
le caractère public ou privé de l'émission.
Article 5🔗
La réalisation d'une offre de jetons est subordonnée à l'obtention d'un label revêtant la forme d'une autorisation administrative préalable délivrée par le Ministre d'Etat, après avis motivé d'une commission chargée d'instruire la demande d'autorisation, dont la composition est précisée par ordonnance souveraine.
La commission se prononce après réception des pièces constitutives de la demande d'autorisation parmi lesquelles figure notamment un document destiné à l'information des souscripteurs, portant sur l'émetteur et les risques présentés par l'offre. Le contenu dudit recueil doit être clair, exact et non trompeur.
La liste des pièces à joindre à la demande d'autorisation est précisée par ordonnance souveraine.
La commission peut entendre les représentants de la société émettrice ainsi que toute personne dont elle estime l'audition utile.
Article 6🔗
Seule une personne morale immatriculée à Monaco peut présenter une offre de jetons.
Lorsque les jetons revêtent une ou plusieurs caractéristiques d'un instrument financier, l'offre ne peut être présentée que par une société par actions.
Dans le cadre de l'offre de jetons, la personne morale visée au premier alinéa devra notamment proposer des moyens permettant la sauvegarde des actifs et des fonds recueillis ainsi que le suivi de leur utilisation en conformité avec le projet présenté dans la demande d'autorisation.
Article 7🔗
Les fonds collectés dans le cadre d'une offre de jetons sont placés sous séquestre à compter de l'émission des jetons pendant la durée de l'opération dans les conditions prévues par ordonnance souveraine.
En cas de révocation de l'autorisation, d'abandon du projet présenté ou lorsque le montant minimum n'est pas atteint, les fonds séquestrés sont restitués aux souscripteurs.
Chapitre IV - Du contrôle de la régularité des offres de jetons🔗
Article 8🔗
Le contrôle de I'application des dispositions du Chapitre III et des mesures prises pour son application, est exercé par les agents de la Direction de l'Expansion Economique, spécialement commissionnés et assermentés à cet effet.
Dans l'exercice de ces contrôles, les agents visés au précédent alinéa ainsi que tout expert dont ils sàssurent le concours sont tenus au secret professionnel dans les conditions de l'article 308 du code pénal. Ils sont en outre liés par l'obligation de discrétion pour tout ce qui concerne les faits et informations dont ils ont connaissance dans l'exercice de leurs fonctions.
L'expert ainsi désigné ainsi que les agents de la Direction de l'Expansion Economique ne doivent pas se trouver en situation de conflit d'intérêts avec les personnes contrôlées.
Article 9🔗
A l'effet d'exercer la mission qui leur est dévolue, les agents peuvent effectuer des contrôles sur pièces et sur place, sans que le secret professionnel ne puisse leur être opposé sauf en ce qui concerne les informations couvertes par le secret applicable aux relations entre un avocat et son client, et notamment :
1°) se faire communiquer tous documents professionnels, quel qu'en soit le support, qu'ils estiment utiles à l'exercice de leur mission dont ils peuvent prendre copie par tous moyens ;
2°) convoquer et entendre toute personne susceptible de leur fournir des informations le cas échéant par un système de visioconférence ou d'audioconférence ;
3°) accéder aux locaux professionnels ou à usage professionnel à l'exclusion des parties de ceux-ci affectées au domicile privé et procéder à toutes les opérations de vérification qu'ils estiment nécessaires ;
4°) recueillir des explications sur place auprès des dirigeants ainsi que de toute personne, tous renseignements, documents ou justificatifs utiles à l'accomplissement de leur mission ;
5°) se faire communiquer la transcription, par tout traitement approprié, des informations contenues dans les programmes informatiques des professionnels, dans des documents directement utilisables pour les besoins du contrôle ainsi que la conservation de cette transcription sur un support adéquat ;
6°) ils peuvent à partir d'un service de communication au public en ligne, consulter les données librement accessibles ou rendues accessibles, y compris par imprudence, négligence ou par le fait d'un tiers, le cas échéant en accédant et en se maintenant dans des systèmes de traitement automatisé d'information le temps nécessaire aux constatations ; ils peuvent retranscrire les données par tout traitement approprié dans des documents directement utilisables pour les besoins du contrôle.
Dans le cadre des contrôles, la visite des locaux professionnels ou à usage professionnel, à l'exclusion des parties de ceux-ci affectés au domicile privé, ne peut être effectuée qu'entre six et vingt-et-une heures, ou, en dehors de ces heures, lorsque l'accès au public est autorisé ou lorsqu'une activité professionnelle est en cours. Cette visite ne peut en outre avoir lieu qu'en présence d'un représentant de la personne contrôlée.
Toute personne convoquée ou entendue a le droit de se faire assister d'un conseil de son choix.
A l'issue du contrôle sur place, les agents de la Direction de l'Expansion Economique rédigent le procès-verbal des constatations opérées, avec la précision de la nature, la date et du lieu de celles-ci. Il est signé par le ou les agents et par la personne concernée par les investigations. En cas de refus de celle-ci, mention en est faite au procès-verbal.
Indépendamment de ce procès-verbal, et lorsque des manquements sont constatés aux obligations prescrites par la présente loi et ses textes d'application, les agents mentionnés au premier alinéa consignent dans un rapport au Ministre d'État les opérations auxquelles ils ont procédé au cours de leurs contrôles.
Les modalités d application du présent article sont précisées par ordonnance souveraine.
Article 10🔗
Le rapport consignant les manquements constatés par les agents de la Direction de l'Expansion Economique lors du contrôle est transmis par le Ministre d'Etat, à la commission visée à l'article 5.
La personne mise en cause est informée par la commission, par tout moyen écrit, des griefs susceptibles d'être formulés à son encontre.
Lorsque les griefs sont notifiés à une personne morale, ils le sont également à ses représentants légaux.
La notification des griefs précise que la personne mise en cause peut prendre connaissance du contenu du dossier auprès de la commission et se faire assister à cette fin par un conseil de son choix.
La personne mise en cause est convoquée par la commission en vue d'être entendue en ses explications, ou dûment appelée à les fournir.
Lors de son audition, la personne mise en cause peut être assistée du conseil de son choix. Ses explications sont consignées dans un rapport établi par la commission, dans lequel celle-ci émet un avis sur l'existence d'un manquement, et dans l'affirmative, formule une proposition de sanction.
La commission délibère hors la présence du rapporteur désigné de l'affaire.
Les modalités d'application du présent article sont précisées par ordonnance souveraine.
Chapitre V - Des sanctions🔗
Section I - Des sanctions administratives🔗
Article 11🔗
Lorsqu'un manquement tenant notamment à la mise en oeuvre d'une offre de jetons en méconnaissance des conditions ou des limites de l'autorisation prévue à l'article 5 est avéré, ou s'il advient que l'offre n'est plus conforme au document d'information prévu au même article, le Ministre d'Etat peut, sur proposition de la commission prévue à l'article 5, mettre fin à l'offre de jetons en révoquant l'autorisation visée à l article 5 ou en suspendre les effets.
La décision privant d'effets ou suspendant les effets d'une autorisation ne peut être prise qu'après avis de la commission visée à l'article 5 conformément à l'article 10.
Toutefois, lorsque l'urgence le justifie, le Ministre d'État peut suspendre l'autorisation à titre provisoire par décision motivée sans que la commission soit saisie. Dans ce cas, toute personne intéressée à laquelle les mesures prescrites font grief, peut demander au Président du Tribunal de première instance saisi et statuant comme en matière de référé, d'ordonner la levée desdites mesures.
L'exercice de poursuites pénales n'ayant pas abouti à une décision de justice passée en force de chose jugée ne fait pas obstacle à l'application du présent article.
Les modalités d'application du présent article sont précisées par ordonnance souveraine.
Article 12🔗
La décision privant d'effets ou suspendant les effets de I'autorisation visée à l'article 5 entraîne pour la personne autorisée l'obligation de mettre fin à toute communication concernant l'offre.
Article 13🔗
Le Ministre d'État peut décider de procéder à la publication de sa décision au Journal de Monaco et, le cas échéant, sur tout autre support papier ou numérique.
Toutefois, les sanctions administratives prononcées par le Ministre d'État sont publiées de manière anonyme dans les cas suivants :
1°) lorsque la publication sous une forme non anonyme compromettrait une enquête pénale en cours ;
2°) lorsque le préjudice qui résulterait d'une publication sous une forme non anonyme serait disproportionné.
Lorsque les situations mentionnées aux chiffres 1° et 2°) sont susceptibles de cesser d'exister dans un court délai, le Ministre d'État peut décider de différer la publication pendant ce délai.
II peut également décider de mettre à la charge de la personne sanctionnée tout ou partie des frais de la publication visée à l'alinéa premier.
Section II - Des sanctions pénales🔗
Article 14🔗
Sont punis de l'amende prévue au chiffre 4° de l'article 26 du Code pénal dont le maximum peut être porté jusqu'au montant du profit éventuellement réalisé :
1°) les personnes ou les dirigeants des personnes morales qui procèdent ou qui tentent de procéder à une offre de jetons sans 1'autorisation visée à l'article 5 ;
2°) les dirigeants des personnes morales qui procèdent ou qui tentent de procéder à une offre de jetons alors que l'autorisation dont ils étaient titulaires au titre de l'article 5 a été suspendue ou révoquée ;
3°) les dirigeants des personnes morales qui procèdent ou qui tentent de procéder à une offre de jetons autre que celle autorisée ou qui excède les limites déterminées par I'autorisation ou qui n'est pas conforme aux conditions mentionnées par celle-ci.
Les personnes morales déclarées responsables des infractions prévues au présent article encourent une amende dont le montant est égal au quintuple de I'amende prévue pour les dirigeants des personnes morales visées au précédent alinéa.
Article 15🔗
Sont punis d'un emprisonnement d'un à six mois et de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 du Code pénal ou de l'une de ces deux peines seulement les dirigeants ainsi que toute personne qui font obstacle ou tentent de faire obstacle aux contrôles exercés en application de l'article 9 de la présente loi.
Les personnes morales déclarées responsables de l'infraction prévue au précédent alinéa encourent une amende dont le montant est égal au quintuple de l'amende prévue pour les dirigeants des personnes morales visées au dit alinéa.
Chapitre VI - Dispositions diverses et transitoires🔗
Article 16🔗
Sont ajoutés à l'article premier de la loi n° 7.362 du 3 août 2009, modifiée, les chiffres 21° et 22°), rédigés comme suit :
« 21°) les personnes morales titulaires de I'autorisation de procéder à une offre de jetons visée à I'article 5 de la loi n° XXX du XXX ;
22°) toute personne qui, à titre de profession habituelle, soit se porte elle-même contrepartie, soit agit en tant qu'intermédiaire, en vue de l'acquisition ou de la vente d'actifs numériques pouvant être conservées ou transférées dans le but d'acquérir un bien ou un service, mais ne représentant pas de créance sur l'émetteur ».
Article 17🔗
Les personnes qui au jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, ont initié une offre de jetons qui n'a pas encore donné lieu à leur émission, disposent d'un délai de six mois pour se conformer aux dispositions de la présente loi.