Projet de loi n° 958 relative à la sauvegarde de justice, au mandat de protection future et à l'exercice de l'activité de mandataire judiciaire à la protection des personnes

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Exposé des motifs🔗

Le Conseil National a, le 28 mai 2015, adopté une proposition loi portant le n° 209 relative à la sauvegarde de justice et au mandat protection future.

Conséquemment et conformément à l'article 67 de la Constitution, le Gouvernement Princier s'est engagé, par une lettre en date du 23 septembre 2015, adressée au Président du Conseil National, à transformer en projet de loi ladite proposition.

Cette décision de transformation s'est imposée en ce qu'elle fait écho à une préoccupation déjà présente depuis longtemps au sein du Gouvernement Princier puisqu'en 2014, à la suite dîne réflexion initiée en 2012, un groupe de travail avait été formé entre le Gouvernement et la Direction des Services Judiciaires pour aborder la question de l'opportunité d'introduire au sein du Code civil le mandat de protection future et la sauvegarde de justice.

Par ailleurs, tant les Services Juridiques de l'État, que la Commission de révision des codes, ou le Directeur des Services Judiciaires, ont, depuis un certain temps, mis en exergue la nécessité de procéder à une modernisation des dispositions relatives aux régimes de protection des majeurs.

En effet, l'allongement significatif de la durée de vie des personnes accroît d'autant la probabilité que des majeurs se trouvent dans l'incapacité de pourvoir efficacement à leur protection et à celle de leurs biens. Ainsi comme le souligne, en 2009, la Cour de cassation du pays voisin dans son rapport annuel dédié aux personnes vulnérables, « l'âge, le handicap et de manière plus générale, l'altération des facultés mentales ou physiques sont des facteurs qui peuvent conduire à la vulnérabilité de la personne ». L'État doit alors proposer, par des dispositions efficaces, un accompagnement aux personnes pour que, dans la mesure de leur besoin, elle puisse bénéficier de l'accompagnement nécessaire, voire d'une protection juridique.

Toutefois, parce qu'elle porte atteinte au principe selon lequel les majeurs exercent seuls les actes de la vie civile, l'intervention d'une protection étatique pour pallier à la vulnérabilité de certaines personnes est gouvernée par les principes de subsidiarité, de proportionnalité et de nécessité qui poursuivent tous pour objectif le maintien de I'autonomie des personnes.

Dans ces conditions, la contrainte que fait peser le régime de protection sur le majeur doit être proportionnée à l'état de vulnérabilité dans lequel ce dernier se trouve. De même, le régime de protection ne devrait intervenir que dans l'hypothèse où les règles traditionnelles de secours et d'assistance imposées entre les membres d'une même famille ne permettent pas d'assurer une protection efficace. Enfin, un tel régime ne saurait être prononcé si le majeur considéré ne présente pas un état de vulnérabilité imposant l'intervention d'une protection juridique.

Ainsi, toutes réformes des dispositions relatives à la protection des majeurs doit indubitablement s'inscrire dans le respect de ces principes. Tel est le cas du présent projet de loi qui, outre la volonté d'affirmer de manière expresse lesdits principes, connaît trois volets.

Le premier volet est la sauvegarde de justice, largement inspirée du droit français. Elle présente pour particularité d'assurer de façon temporaire, pour les mêmes causes que l'ouverture d'une tutelle ou d'une curatelle, la protection d'une personne sans restreindre, par principe, sa capacité. La proposition de loi du Conseil National envisageait, à l'instar du pays voisin, de consacrer deux formes de sauvegarde de justice, savoir une temporaire destinée à assurer la protection du majeur pendant la procédure aux fins d'ouverture d'une tutelle ou d'une curatelle et une forme autonome qui viendrait en concurrence de la tutelle et de la curatelle.

Le présent projet de loi se limite à l'introduction de la sauvegarde de justice en tant que mesure provisoire pour offrir une protection estimée urgente, dans le cadre de la procédure aux fins d'ouverture d'une tutelle ou d'une curatelle. En effet, dès lors que la sauvegarde de justice autonome aurait été ouverte pour les mêmes causes que la curatelle ou la tutelle, cette dernière ne viendrait qu,ajouter un régime concurrent à la tutelle et la curatelle qui permettent, pourtant, déjà aujourd'hui de protéger les personnes qui souffrent d'altérations des facultés mentales ou physiques. La sauvegarde de justice en tant que régime autonome ne se distinguerait donc pas significativement de la tutelle ou de la curatelle par son champ d'application.

En outre, s'agissant de la préservation de la capacité du majeur qui est une des recommandations fixées notamment par la Recommandation n° R[99] du Conseil des Ministres aux États membres du Conseil de l'Europe sur les principes concernant la protection juridique des majeurs incapables du 23 février 7999 et commandée par le principe de proportionnalité ci-avant énoncé, l'absence de sauvegarde de justice en tant que régime autonome dans notre corpus juris n'est pas de nature à porter atteinte à la préservation de la capacité juridique du majeur vulnérable.

En effet, dans l'hypothèse où un majeur peut raisonnablement conserver l'ensemble de sa capacité, il appert que le placement de ce dernier sous un régime de protection juridique ne serait pas nécessaire. Au contraire si un majeur devait, eu égard à l'altération de ses facultés mentales ou physiques, être représenté dans l'accomplissement d'un acte déterminé, les dispositions actuelles permettent d'ores et déjà de restreindre l'ouverture de la mesure de protection juridique à l'accomplissement de certains actes déterminés entraînant alors une incapacité du majeur pour la réalisation desdits actes et ce, à I'instar de ce qui a été prévu par la proposition de loi dans le cadre d'une sauvegarde de justice autonome pour laquelle un mandataire spécial pouvait être nommé. En conséquence, la sauvegarde de justice en tant que mesure autonome ne se distinguerait pas non plus, quant à son contenu, des autres régimes de protection.

Aussi, tel qu'envisagée par le présent projet de loi, la sauvegarde de justice est une mesure temporaire mise à la disposition du juge afin de pourvoir à la protection du majeur pendant la durée de la procédure ouverte aux fins d'ouverture d'une tutelle ou d'une curatelle. Ladite mesure permettra au juge d'offrir une protection juridique temporaire aux majeurs dont l'état de vulnérabilité le nécessite. Elle apparaît alors comme un complément raisonnable des régimes d'incapacité dont elle ne risque pas de perturber la cohérence.

Le second volet du présent projet concerne l'introduction du mandat de protection future qui est un régime de protection de nature conventionnelle. Celui-ci permet à toute personne de désigner, de façon anticipée, par mandat, une personne qui sera en charge de le représenter ou de veiller à la protection de ses intérêts personnels ou patrimoniaux pour le cas où une altération de ses facultés mentales ou physiques viendrait à le rendre incapable de veiller à ses propres intérêts.

Naturellement et comme le relève justement la proposition de loi dans son exposé des motifs, la consécration d'un mandat de protection future répond à la nécessité de prendre en compte la volonté de la personne protégée. Cette prise en compte présente, en effet, des avantages indéniables en ce qu'elle permet à la personne protégée de se sentir en confiance avec son mandataire et ainsi de s'assurer d'une adhésion accrue du majeur protégé aux décisions prises par le mandataire et d'une pleine coopération du mandant dans la mission de ce dernier.

Il faut d'ailleurs relever que le principe d'un aménagement conventionnel de la protection de la personne et de ses biens est une solution qui a déjà séduit de nombreux pays comme l'Allemagne, l'Angleterre, la Suisse, I'Espagne, l'Italie, la France et le Québec.

Par ailleurs et en sus de ce qui a été suggéré par la proposition de loi, le présent projet apporte une nouvelle facette du mandat de protection future puisqu'il permet de le conclure pour autrui. En effet, la proposition de loi limitait le domaine du mandat de protection future au seul mandat pour soi-même, sans doute parce que cette situation correspond aux besoins qui s'expriment le plus fréquemment en Principauté. Il n'en demeure pas moins que le Gouvernement Princier considère qu'il peut être opportun de consacrer la possibilité pour les père et mère d'un enfant de désigner par anticipation la personne qui, après leur décès ou la surveillance de leur propre inaptitude, serait chargé de représenter leur enfant et de prendre soin de ses intérêts personnels et patrimoniaux.

Enfin, conformément à ce qui a été proposé par le Conseil National, le présent projet vient poser les principes de l'exercice à titre professionnel de l'activité de mandataire judiciaire.

Sous le bénéfice de ces observations d'ordre général, le présent projet de loi appelle les commentaires particuliers ci-après.

À titre liminaire, il convient de préciser qu'afin de faciliter la lisibilité des développements suivants, ces derniers ne suivront pas l'ordre numérique des articles mais un ordre thématique suivant les différents volets exposés ci-avant du présent projet, savoir l'affirmation expresse des principes qui régissent la matière, la sauvegarde de justice, le mandat de protection future et la profession de mandataire judiciaire.

Concernant l'affirmation des principes qui régissent la matière, ceux-ci sont, par le projet de loi et conformément à la proposition n° 209, affirmés dans les dispositions générales applicables à l'ensemble des régimes de protection du majeur.

À cet effet, un nouvel article 410-4-1 du Code civil pose le principe selon lequel les personnes qui en ont besoin reçoivent une protection de leurs biens et de leur personne. La mise en oeuvre de cette dernière est donc un droit pour tout majeur qui se trouve dans une des situations prévues à I'article 410-4° du Code civil.

Ce même article précise en outre que la protection mise en oeuvre, conformément aux dispositions du code civil, doit s'inscrire dans le respect des libertés et droits fondamentaux et de la dignité de la personne. En effet, si cette précision apparaît être une évidence dans un Etat de droit comme la Principauté, cette affirmation n'est toutefois pas inutile car elle en fait l'un des principes directeurs des régimes de protection des majeurs incapables.

Par ailleurs, cet article désigne l'intérêt de la personne protégée comme élément prépondérant à prendre en considération par le juge dans toutes décisions relatives aux mesures de protection. Cet intérêt doit alors primer sur toute autre considération.

Corrélativement, ce même article indique que la préservation de l'autonomie de la personne doit être recherchée. En effet, son intérêt passe nécessairement par le maintien, si la situation le permet, de sa capacité et de sa liberté de se déterminer.

Par suite, l'insertion d'un nouvel article 410-4-2 du Code civil vient limiter la liberté du juge dans le prononcé d'une mesure de protection, à la caractérisation d'une véritable nécessité induite par l'état de vulnérabilité de la personne concernée. cet article conditionne également le prononcé d'une mesure de protection par le juge, à la preuve de l'inefficacité de l'application des règles de droit commun de la représentation, de celles relatives aux droits et devoirs respectifs des époux et des règles des régimes matrimoniaux, conférant alors un caractère subsidiaire aux mesures de protection.

L'article 410-4-2 pose également les principes de proportionnalité et d'individualisation de la mesure de protection, étant ainsi en adéquation avec la règle préalablement établie selon laquelle, la préservation de l'autonomie et de l'intérêt de la personne protégée doit toujours être recherchée. Aussi, le juge se doit d'adapter chaque mesure en fonction du degré d'altération des facultés mentales ou physiques de l'intéressé.

Enfin, parce qu'une mesure de protection est le plus souvent assurée par une personne qui n a pas la qualité de mandataire judiciaire, l'article 410-4-3 inséré par le présent projet, pose, dans cette hypothèse, le principe de gratuité de cette activité sous réserve de dispositions légales qui viendrait prévoir la possibilité de proposer une indemnisation du tuteur, curateur ou mandataire, non professionnel (article 6).

De plus, l'article 410-4° a fait l'objet d'une modification dans sa rédaction visant d'une part à regrouper dans un même alinéa l'altération des facultés mentales et corporelles et d'autre part, à éviter l'énumération des causes d'altération des facultés mentales. En effet, leur multitude rend inexacte la tentative d'exhaustivité du texte et l'apparition possible de nouvelles maladies peut conduire à exclure une hypothèse qui nécessiterait pourtant le prononcé d'une mesure de protection. Par la nouvelle rédaction, le projet de loi soumet donc à l'appréciation souveraine du juge l'altération de ces facultés conformément aux données scientifiques qui lui sont exposées (article 5).

Sur le deuxième volet du présent projet, savoir l'insertion de la sauvegarde de justice dans le corpus juris monégasque, s'est préalablement posé la question de la place de ces dispositions dans le Code civil.

À cet égard, la proposition de loi avait envisagé une insertion des articles relatifs à la sauvegarde de justice au sein du Chapitre II du Titre X du Livre premier du Code civil dans une section IV intitulée « Des majeurs en sauvegarde de justice » afin de classer les mesures de protection de manière décroissante, de la plus restrictive à la moins restrictive pour le majeur protégé.

Toutefois, une contradiction est apparue dans la consécration d'une telle structure. En effet, en l'état actuel de la législation, les intitulés du Titre X et du Chapitre II susmentionnés font référence aux majeurs incapables alors que, comme le reconnait d'ailleurs la proposition de loi, la sauvegarde de justice préserve par principe la capacité du majeur si bien que dans certains cas la classification du majeur sous sauvegarde de justice, parmi les incapables majeurs, pourrait être erronée.

Fort de ce constat, le présent projet propose de consacrer la solution préconisée par le pays voisin, savoir ôter toute référence à la capacité ou à l'incapacité du majeur et désigner les régimes dont s'agit de « régimes de protection ». Cette solution est apparue d'autant plus justifiée que la notion de majeur protégé figure déjà dans les dispositions actuellement en vigueur de notre droit. En conséquence, les intitulés du Titre X du Livre I et du Chapitre II dudit Titre sont modifiés (articles 2 et 41.

Dans le même temps, le présent projet saisi l'occasion d'une restructuration du code civil pour proposer de faire remonter les articles 410-2° et 410-3° au sein du Chapitre I du Titre X du Livre I du Code civil intitulé « De la majorité ». Ce déplacement est nécessaire pour une meilleure cohérence des dispositions puisque les dispositions dont s'agit ne concernent pas un régime de protection mais viennent poser une exception au principe contenu à l'article 410-1° selon lequel les actes réalisés par un majeur sont valables puisqu'il en a la capacité.

Les articles 410-2° et 410-3° sont donc simplement déplacés. Seule une modification formelle à l'article 410-2° a été apportée pour numéroter les trois cas exposés dans lesquels un héritier pourra exercer une action en nullité d'un acte passés de son vivant par le de cujus (articles 2 et 3). De plus, par souci de cohérence, les intitulés des sections II et III du chapitre II du Titre X du code civil font l'objet d'une modification formelle (article 8).

La structure ayant été modifiée, il fallait encore déterminer la place adéquate des dispositions propres à la sauvegarde de justice. Sur ce point, dans la mesure où la sauvegarde de justice est envisagée dans le présent projet de loi uniquement comme une mesure temporaire de protection, pour le temps de la procédure aux fins d'ouverture d'une tutelle ou d'une curatelle, il est apparu expédient de la faire figurer avant la tutelle et la curatelle puisque, chronologiquement, elle ne peut être prononcée qu'avant. De surcroît, cette mesure n'étant pas un nouveau régime de protection autonome, une classification selon le degré de restriction de la capacité du majeur est apparue source de confusion.

En conséquence, les dispositions qui concernent la sauvegarde de justice sont insérées au sein des articles 410-9-1 à 410-9-6 du Code civil.

Pour ce qui est en premier lieu de l'article 410-9-1° celui-ci ouvre la possibilité pour le Tribunal de première instance, saisi aux fins d'ouverture d'une tutelle ou d'une curatelle, de placer le majeur concerné sous sauvegarde de justice, si le Tribunal constate que le majeur se trouve dans l'une des hypothèses prévues par l'article 410-4° . Ainsi, le majeur pourra bénéficier d'une première protection provisoire et pourra être représenté dans l'accomplissement de certains actes déterminés.

Néanmoins, cette mesure ne peut pas perdurer au-delà de la procédure aux fins de tutelle ou de curatelle si bien que l'article 410-9-5 prévoit qu'à défaut de mainlevée prononcée par le Tribunal, la sauvegarde de justice prend fin à partir du jour de l'ouverture de la tutelle ou de la curatelle ou, dans l'hypothèse où le Tribunal conclu à l'inopportunité de placer le majeur sous l'un de ces deux régimes de protection, à la date de son jugement.

En outre, la mise en oeuvre de la sauvegarde de justice nécessite préalablement que le Tribunal ait entendu ou, à tout le moins, appelé le majeur sur ce point. Cette obligation va dans le sens d'une prise en compte de la volonté du majeur et permet au Tribunal d'apprécier directement l'état de vulnérabilité de l'intéressé. Ce dernier peut naturellement être assisté de son avocat ou avocat-défenseur qui est le conseil naturel en matière judiciaire. Cette possibilité d'assistance permet de garantir que le majeur, suspecté d'être atteint d'une altération de ses facultés mentales ou physiques conduisant à une certaine vulnérabilité, soit conseillé au mieux, l'avocat ayant pour mission de veiller aux intérêts de son client.

Il est toutefois des hypothèses où l'audition du majeur concerné n'est pas possible. Tel est le cas en présence d'une situation urgente ou lorsque l'audition de ce dernier est de nature à compromettre sa santé ou bien encore, s'il est hors d'état d'exprimer sa volonté. Dans le premier cas, le Tribunal peut instaurer la mesure de sauvegarde en urgence et par suite, entendre, dans les meilleurs délais, le majeur concerné. Dans les der,x derniers cas, la sauvegarde de justice peut être prononcée sans l,audition du majeur.

Le présent projet ne reprend pas la possibilité, instaurée par la proposition de loi, d'un placement sous sauvegarde de justice sur simple déclaration du médecin traitant du majeur concerné. En effet, une telle automaticité pourrait conduire à des dérives. Dès lors, si le médecin conserve la possibilité de signaler au Ministère public un état de vulnérabilité de l'un de ses patients, un tel signalement n,emporte pas, de facto, placement du majeur visé par la déclaration sous sauvegarde de justice.

S'agissant en deuxième lieu de l'article 410-9-2, il expose que, par principe, la personne placée sous sauvegarde de justice conserve sa capacité juridique. La protection juridique réside dans l'affirmation que les actes pensés pour cette personne, alors qu'elle était sous sauvegarde de justice, sont susceptibles de faire l'objet d'une action en rescision pour lésion ou en réduction. Pour mémoire, l'action en rescision pour lésion sanctionne le déséquilibre de prestations réciproques. De son côté, la réduction pour excès sanctionne une opération économiquement désavantageuse. Ces actions sont ouvertes sous les conditions et dans les cas prévus par les textes. Dès lors, l'article dont s'agit ouvre la possibilité d'exercer deux nouvelles actions qui s'ajoutent à l'action en nullité qui est normalement encourue sur le fondement de l'article 410-2°, à la condition de rapporter la preuve d'un trouble mental.

Les actes ainsi passés par un majeur sous sauvegarde de justice peuvent dès lors être remis en cause par le jeu de différentes actions ce qui laisserait entrevoir une apparente insécurité juridique pour son cocontractant. Toutefois celle-ci est largement atténuée par la précision selon laquelle le Tribunal qui statue sur un acte passé par un majeur sous sauvegarde de justice doit prendre en considération l'utilité ou l'inutilité de l'opération, l'importance ou la consistance du patrimoine du majeur sous sauvegarde et la bonne ou mauvaise foi de son cocontractant.

De plus, l'article 410-9-6 prévoit que les décisions du Tribunal relatives au placement sous sauvegarde de justice, à la nomination d'un mandataire spécial et à la mainlevée de la sauvegarde de justice figurent dans un registre tenu par le greffe général auprès duquel toute personne peut s'adresser pour savoir si un majeur est placé sous sauvegarde.

En troisième lieu, I'article 410-9-3 prévoit la possibilité pour le Tribunal de nommer un mandataire spécial aux fins d'accomplir les actes qu'il désigne, sous réserve néanmoins de caractériser une véritable nécessité. Dans cette hypothèse, le majeur incapable se voit déposséder d'une partie de sa capacité juridique puisqu'il ne peut plus exercer les actes entrant dans le champ de compétence du mandataire spécial et ce, sous peine de nullité. II convient à ce stade de préciser que la nullité ici envisagée est relative puisqu'elle a pour objet la seule protection des intérêts particuliers du majeur protégé. C'est ainsi que conformément au second alinéa de I'article 410-9-2, I'action en nullité ne peut être exercée que par le majeur ou ses héritiers. Par exception, cette action peut également être exercée par le mandataire spécial si le Tribunal le prévoit.

L'article 410-9-3 institue également l'obligation pour le mandataire spécial de rendre compte de sa gestion annuellement. En effet, s'il est peu probable qu'une procédure aux fins de placement sous tutelle ou sous curatelle dure pendant plus d'un an, il est apparu toutefois important de prévoir que, dans cette hypothèse, le juge tutélaire puisse exercer un contrôle sur la gestion, à l'instar des pouvoirs qu'il a déjà dans le cadre de la tutelle et de la curatelle.

En quatrième et dernier lieu, le présent projet affirme, à l'article 410-9-4, le principe du maintien du mandat de protection future afin de privilégier la prise en compte de la volonté du majeur protégé. Aussi le juge ne peut mettre fin totalement ou partiellement au mandat de protection future que s'il constate que ledit mandat ne permet pas d,offrir la protection nécessaire à l'intéressé. Plus encore, l'atteinte au mandat ne peut être que partielle si bien que le Tribunal peut maintenir le mandat pour les dispositions qui lui paraissent efficaces.

Le second alinéa de cet article pose quant à lui l'obligation, pour les personnes qui ont compétence pour demander l'ouverture d'une tutelle ou d'une curatelle et à celles qui hébergent le majeur sous sauvegarde de justice, d'effectuer les actes dont elles connaissent l'urgence, à la condition toutefois que ces personnes aient connaissance de l'existence de la sauvegarde (article 7).

Pour le troisième volet du présent projet de loi relatif à l'introduction du mandat de protection future, il a été décidé, sur la forme, d'introduire ces dispositions, conformément à ce qui avait été suggéré par la proposition de loi, au sein d'une nouvelle section contenant les articles 410-37 à 410-57, à la suite de la section relative à la curatelle. Il convient toutefois de préciser que cette structure n'est pas justifiée par le souci de classer en fonction de leur degré d'incapacité et de contrainte les régimes de protection mais simplement de distinguer le régime de nature conventionnelle de ceux qui sont organisés par la voie judiciaire.

Sur le fond, I'article 410-37 énonce, en premier lieu, le principe selon lequel toute personne peut donner mandat à une autre personne de pourvoir à sa protection personnelle ou à celle de ses biens pour le cas où elle se trouverait dans l'une des causes prévues à l'article 410-4°, savoir si elle était atteinte d'une altération de ses facultés mentales ou physiques ne lui permettant plus de veiller à ses propres intérêts. L'édiction d'un tel mandat est évidemment conditionnée à la capacité juridique du mandant, celui-ci ne devra donc pas être sous tutelle. Cela signifie, a contrario, qu'un mandat de protection future peut être fait par une personne placée sous curatelle, dans les conditions qui sont toutefois fixées à l'article 410-39.

Cet article ajoute encore que le mandat de protection future peut être conclu pour autrui. Il faut préciser que dans l'hypothèse où les deux parents sont vivants et tous deux titulaires de l'autorité parentale, ce mandat ne peut être réalisé que conjointement par ces derniers. En effet, la possibilité de nommer un représentant pour son enfant résulte traditionnellement d'une prérogative attachée à l'exercice de l'autorité parentale.

Conformément à ce qui est exposé ci-avant, l'insertion d'une telle possibilité est apparue nécessaire dans la mesure où les parents d,un enfant devraient pouvoir organiser le sort de leur enfant mineur ou de leur enfant majeur ne pouvant plus pourvoir seul à ses intérêts après leur mort ou dans l'hypothèse où ils seraient dans l'incapacité de pourvoir à ses intérêts. En d'autres termes, cette disposition permet aux parents de s'assurer de nommer une personne de confiance pour prendre soin de leur enfant en cas de décès prématuré ou du prononcé de leur incapacité. Il en va de même, pour le cas de parents d'un enfant handicapé qui, de par son handicap, nécessiterait d'être placé sous protection.

Ainsi, s'agissant du mandat de protection future pour soi-même, sa mise en oeuvre est suspendue à la caractérisation de la survenance de l'une des hypothèses prévues à l'article 410-4°. Quant au mandat de protection future pour autrui, elle nécessite la survenance du décès du mandant ou la caractérisation de son incapacité à veiller sur le bénéficiaire ou sur ses biens.

Enfin, cet article règle également le sort des actes d'administration qui se révèlent utiles jusqu'à l'homologation du mandat de protection future puisqu'il confie leur réalisation à la personne désignée par ledit mandat.

En deuxième lieu, l'article 410-38 soumet le mandat de protection future aux règles générales relatives au mandat. En effet, sous réserves des spécificités attachées à la particularité de l'objet et qui sont spécialement régies par la section dont s'agit, ce contrat est un mandat et, à ce titre, il doit en respecter les règles communes. Dès lors, le mandat de protection future est soumis au respect des articles 1823 à 1849 du Code civil, sans préjudice toutefois des dispositions spéciales contraires. Cette règle est d'ailleurs conforme au principe énoncé sous l'adage « speciala generalibus derogant ».

Seront alors applicables au mandat de protection future :

  • I'article 1823 : qui d'une part, pose une définition du mandat dans laquelle s'inscrit pleinement le mandat de protection future, en ce que le mandant donne par ce biais, le pouvoir au mandataire de veiller sur sa personne ou sur ses biens et à ce titre, d'exercer des actes en son nom et, d'autre part, il affirme la nécessité pour le mandataire d'accepter sa mission ce qui est également prévu pour le mandat de protection future ;

  • l'article 1825 qui prévoit la gratuité du mandat, sauf convention contraire. Ce principe est d'ailleurs affirmé à l'article 410-43 au sein des dispositions générales relatives aux régimes de protection ;

  • l'article 1826 qui énonce que le mandat est soit général, soit spécial suivant son étendue ;

  • l'article 1828 qui énonce le principe selon lequel, le mandataire ne peut pas exercer des actes pour le compte du mandant qui n'entreraient pas dans le champ défini par le mandat ;

  • les articles 1830 et 1831 qui régissent la responsabilité du mandataire en cas d'inaction qui porterait préjudice au mandant, un dol ou une faute commise par le mandataire et qui impose au mandataire de finir les choses commencées après la mort du mandant si cela est nécessaire ;

  • l'article 1832 qui se cumule avec l'obligation gestion au juge tutélaire chaque année instituée de rendre compte de sa gestion au juge tutélaire chaque année instituée par l'article 410-49 ;

  • l'article 1833 auquel il est d'ailleurs renvoyé par l'article 410-45 ;

  • l'article 1834 qui concerne l'absence de solidarité entre les mandataires lorsqu'ils sont plusieurs ;

  • l'article 1835 qui rend le mandataire débiteur des intérêts des sommes qu'il a employé à son usage et de celles dont il est reliquataire ;

  • l'article 1836 qui régit la relation du mandataire avec les tiers cocontractants pour les actes allant au-delà de ses pouvoirs ;

  • les articles 1837 à 1840 qui régissent les obligations du mandant ;

  • les articles 1847 à 1848 qui s'enquiert des actes effectués par le mandataire alors que le mandat avait pris fin ;

  • I'article 1849 qui prévoit la notification du décès du mandataire au mandant et la poursuite du mandat par les héritiers jusqu'à ce qu'un autre régime de protection soit institué.

D'ailleurs, le présent projet profite, en son article 13, qu'il soit renvoyé aux dispositions sur le mandat pour modifier l'article 1829 du Code civil qui assimile encore la femme au mineur émancipé et qui fait référence à l'acceptation du mandat sans l'autorisation du mari.

En troisième lieu, l'article 410-39 instaure des règles spécifiques quant à la formation du mandat de protection future. Il impose, en effet, que ledit mandat soit reçu par un notaire, de même que l'acceptation du mandataire. La forme notariée présente plusieurs avantages. Elle garantit une plus grande sécurité juridique, en permettant notamment au notaire de s'assurer que le mandant jouit de ses facultés de discernement au moment de l'acte. Elle permet en outre au notaire d'exercer sa mission de conseil dans un domaine où les considérations patrimoniales revêtent une importance particulière.

En revanche, ce n'est que par l'homologation par le Tribunal de première instance, conformément à ce qui est énoncé à l'article 410-42, que ledit mandat prend effet.

Ainsi, dans l'intervalle entre la conclusion du mandat de protection future et son homologation, l'article 410-39 prévoit que celui-ci peut être modifié par la forme notariée ou révoqué par le mandant à la condition de notifier sa révocation au notaire et au mandataire. De plus, ce dernier peut renoncer au mandat en notifiant sa renonciation au mandant et au notaire. Ces dispositions sont importantes puisque le mandat de protection future étant, par définition, conclu bien avant sa mise en oeuvre, les relations entre le mandant et le mandataire peuvent évoluer et la confiance initialement existante entre ces personnes pourrait s'être estompée. Ainsi, cela permet de s'assurer que la volonté du mandat et du mandataire est toujours actuelle.

En quatrième lieu, l'article 410-40 pose le principe selon lequel toute personne peut être désignée mandataire et corrélativement, énumère celles qui, par exception, ne peuvent pas revêtir cette qualité, savoir la personne qui travaille dans l'établissement qui héberge le mandant ou le bénéficiaire du mandat, leur médecin traitant, le curateur ayant assisté le mandant dans la rédaction dudit mandat. Ces incompatibilités sont posées en raison de la possibilité pour ces personnes d'user de leur influence et de la confiance qui leur est accordée par le mandant pour tirer profit de la situation.

En cinquième lieu, l'article 410-41 vient prévoir la possibilité pour le mandant de désigner plusieurs mandataires.

En sixième lieu, comme indiqué ci-avant, l'article 410-42 suspend la mise en oeuvre du mandat de protection future à son homologation par le Tribunal de première instance. par suite, ledit article indique les éléments à caractériser, suivant que le mandat est conclu pour le mandant ou pour un bénéficiaire. Pour le premier cas, l'homologation est conditionnée à la preuve de l'existence d'une des causes prévues à l,article 410-4°, cette preuve étant nécessairement rapportée par le rapport circonstancié d'un médecin désigné par le Tribunal, soumis à l'appréciation de ce dernier. Pour le second cas, l'homologation est conditionnée à la preuve du décès du mandant ou de son inaptitude à prendre en charge les intérêts personnels et patrimoniaux du bénéficiaire.

L'homologation complète les garanties de l'acte notarié. Elle permet en effet de s'assurer de la survenance du décès ou de l'altération des facultés mentales ou physiques dont la caractérisation est nécessaire à la mise en oeuvre du mandat. À titre de comparaison, il pourrait être indiqué que la solution française, qui consiste à faire produire effet au mandat par la seule production au greffe d'un certificat établissant l'altération des facultés personnelles, n'a pas été transposée puisque cela a pour effet d'abandonner à une appréciation purement médicale les conditions auxquelles la loi subordonne les effets juridiques du contrat.

En outre, l'homologation permet au juge de contrôler le contenu du mandat de protection future et par conséquent de s'assurer de son efficacité.

En septième lieu, l'article 410-43 complète l'article précédent en prévoyant, à l'instar de l'ouverture des autres régimes de protection, l'audition du mandant. De surcroît, cet article affirme la compétence du Tribunal de première instance pour contrôler le contenu du mandat de protection future.

Par ailleurs, afin de privilégier dans la mesure du possible la volonté du mandant, le deuxième alinéa multiplie les issues possibles à l'homologation. En effet, au-delà de la seule homologation ou de son refus, le juge peut également assortir le mandat homologué d'une autre mesure de protection ou bien encore de ne l'homologuer que pour partie. En d'autres termes, le tribunal peut :

  • homologuer le mandat ;

  • refuser d'homologuer le mandat ;

  • homologuer le mandat et l'assortir d'une autre mesure de protection ;

  • homologuer partiellement le mandat

  • homologuer partiellement le mandat et l'assortir d'autres mesures protection.

Enfin, parce que le principe de subsidiarité est également applicable en la matière, le troisième alinéa dudit article prévoit la possibilité pour le Tribunal de refuser l'homologation lorsque les règles du droit commun relatives aux droits et devoirs respectifs des époux et aux régimes matrimoniaux apparaissent suffisantes pour pourvoir aux intérêts du bénéficiaire par son conjoint. Cette règle n'est pas applicable lorsque le mandataire est l'époux du mandant.

En huitième lieu, l'article 410-44 impose l,inscription du mandat sur un registre ad hoc pour assurer une pleine information des tiers.

En neuvième lieu, l'article 410-45 pose le principe d,une exécution personnelle du mandat par le mandataire. Il prévoit toutefois la possibilité pour ce dernier de se faire substituer à titre spécial. Dans ce cas, le mandataire répond de celui qu'il s'est substitué quand il n'a pas reçu le pouvoir de se substituer quelqu'un ou quand il en a reçu le pouvoir mais que celui qu'il a choisi était notoirement incapable ou insolvable.

En dixième lieu, I'article 410-46 soumet les droits et obligations du mandataire aux dispositions relatives aux différents aspects du statut du mandant ou du bénéficiaire lorsque le mandat s'applique à la protection de la personne.

En onzième lieu, l'article 410-47 vient déroger à la règle posée par l'article 1827 selon laquelle le mandat conçu en des termes généraux n'englobe que les actes d'administration puisqu'il prévoit qu'un tel mandat, dans le cadre d'un mandat de protection future, englobe tous les actes qui peuvent être réalisés par un tuteur, savoir ; tant des actes d'administration que des actes de disposition. Pour ces derniers, lorsqu'ils sont exercés à titre gratuit, ils doivent être autorisés par le Tribunal.

En douzième lieu, I'article 410-48 explique que le mandataire procède à l'inventaire des biens du mandant ou du bénéficiaire sous le contrôle du juge tutélaire et qu'il doit établir annuellement le compte de sa gestion. Ledit juge vérifie alors la régularité, la sincérité et la fidélité du compte de gestion par rapport à l'état du patrimoine et à la situation financière du mandant.

Plus encore, l'article 410-49 pose le principe selon lequel le mandataire rend compte de sa gestion de façon annuelle au juge tutélaire. ce dernier exerce d'ailleurs déjà cette compétence dans le cadre de la tutelle et de la curatelle.

En treizième lieu, l'article 410-50 soumet à l'autorisation du Tribunal ta possibilité, pour le mandataire, d'être déchargé de ses fonctions.

L'article 410-51 prévoit en outre que la mise en oeuvre du mandat peut être contestée par toute personne intéressée, devant le Tribunal de première instance.

En quatorzième lieu et afin de prévoir une protection efficace, l'article 410-52 prévoit la nullité de plein droit des actes entrant dans le champ de compétence du mandataire et conclus par le mandant ou par le bénéficiaire du mandat. De son côté, l'article 410-53 indique, à l'instar des actes passés dans le cadre de la sauvegarde, que les actes réalisés par le mandant ou le bénéficiaire qui ne relèvent pas du pouvoir du mandataire peuvent faire I'objet d'une action en nullité, en rescision pour lésion ou en réduction. En outre, l'article 410-54 prévoit que les actes passés avant l'homologation, alors que l'état qui justifie la mise en oeuvre du mandat de protection future était notoire au moment de la conclusion des actes, peuvent être annulés. Cette disposition s,attache donc à la bonne foi du cocontractant.

En quinzième lieu, l'article 410-55 prévoit les hypothèses dans lesquelles le mandat de protection future prend fin étant précisé que ces dernières dérogent donc aux dispositions communes relatives au mandat.

Ainsi, le mandat de protection future prend lin par le rétablissement des facultés dont l'altération avait justifié sa mise en œuvre, le décès du mandant ou du bénéficiaire du mandat, le décès du mandataire ou son incapacité, la révocation du mandataire, le placement du mandant ou du bénéficiaire sous curatelle ou sous tutelle.

En seizième lieu, l'article 4 10-56 oblige le mandataire ou ses héritiers à tenir, à la disposition du mandant, du bénéficiaire et de la personne amenée à poursuivre la gestion, l'inventaire des biens et des actualisations auxquelles il a donné lieu pendant une durée de cinq ans. Pour la même durée, il tient également à disposition les cinq derniers comptes de gestion et les pièces nécessaires pour continuer la gestion ou assurer la liquidation de la succession.

En dix-septième lieu, il est apparu opportun d'inclure une disposition quant à la loi applicable dans l'hypothèse d'un conflit de lois présentant des éléments d'extranéité. Ainsi, l'article 410-57 reprend la règle de conflit posée par l'article 15 de la Convention de La Haye du 13 janvier 2000 sur la protection internationale des adultes. Dès lors, cette règle de conflit qui est d'ores et déjà applicable du fait de la Convention pour tous les États signataires, serait également applicable pour le cas où l'élément d'extranéité concerne un État non signataire de ladite Convention, le droit monégasque ne connaîtrait alors qu'une seule règle de conflit de lois (article 12).

En dix-huitième et dernier lieu, l'insertion du mandat de protection future dans notre corpus juris a impliqué la modification de certaines dispositions pour prendre en compte son existence et introduire, dans la désignation du tuteur ou du curateur, l'obligation pour le Tribunal de proposer en priorité cette mission au mandataire désigné dans le mandat de protection future. Aussi, le présent projet de loi modifie les articles 410-14°et 410-35° afin de faire primer la volonté du majeur protégé (articles 9 et 11).

S'agissant enfin du dernier volet, le projet de loi vient poser les règles générales relatives à l'exercice de la profession de mandataire judiciaire. À cet égard, le présent projet fait de l'activité de mandataire judiciaire une profession dont l'exercice est conditionné à la délivrance d'un agrément par le Ministre d'État. Une telle restriction est justifiée par la nécessité d'opérer un contrôle quant aux compétences et à la bonne moralité des personnes qui entendent exercer cette profession. Ce contrôle apparaît en effet impératif eu égard à la particularité de la profession de mandataire judiciaire. La gestion des biens d'autrui ou de sa personne impose pour celui-ci d'avoir une véritable éthique, qui plus est lorsqu'il exerce cette profession pour le compte de la justice.

Pour ce qui est des conditions de délivrance, le présent projet renvoi à une ordonnance souveraine pour les fixer, permettant ainsi d'assurer une certaine flexibilité nécessaire en la matière. Le projet de loi précise toutefois les personnes qui ne pourraient pas être nommées tuteur, curateur ou mandataire spécial parce que leur profession est incompatible avec cette qualité ou qu'elles entrent elles-mêmes dans le cadre de l'article 410-4° (article 15).

Conformément à ce qui précède, le présent projet restreint donc l'exercice de la profession de mandataire judiciaire, aux seules personnes régies par les dispositions de la présente loi. Dès lors, celles qui n'auraient notamment pas sollicité l'agrément auprès du Ministre d'État ne pourraient pas exercer cette activité à titre professionnel (article 14).

Par suite, et afin de se prémunir contre les dommages qui résulteraient de l'exercice de leur profession, les mandataires judiciaires doivent justifier de la souscription d'une assurance de responsabilité civile qui prend en charge le risque spécifique attaché à cette profession. Cette obligation permet en effet d'assurer, en cas d'engagement de la responsabilité civile du mandataire judiciaire, le paiement des dommages et intérêts auquel il serait condamné (article 16).

Naturellement, le présent projet affirme l'existence en la matière d'un secret professionnel qui doit être respecté par le mandataire judiciaire. celui-ci ne peut en être délié que dans les cas prévus par la loi et pour assurer sa défense dans le cadre de poursuites pénales (article 17).

Pour ce qui est des sommes perçues par le mandataire judiciaire, celui-ci perçoit une rémunération qui est à la charge de la personne protégée en proportion de ses ressources. En cas de ressources insuffisantes, cette rémunération est versée par l'État. Bien entendu, cette rémunération lui est versée en plus des sommes qui lui sont allouées conformément aux articles 380 et 398 du Code civil au titre de la somme annuelle nécessaire à l'entretien et à l'éducation de la personne protégée et à l'administration de ses biens, ainsi qu'au titre d'éventuelles indemnités et des remboursements des dépenses justifiées effectuées par le mandataire judiciaire.

Le montant de cette rémunération est fixé par le juge tutélaire pour une tutelle qui concerne un mineur et par le Tribunal de première instance pour une mesure de protection qui concerne un majeur (article 18).

Pour finir sur la rémunération du mandataire judiciaire, l'article 380 du code civil est modifié en son premier alinéa afin de préciser que les indemnités qui peuvent éventuellement être allouées par le conseil de famille ne peuvent être octroyées au mandataire judiciaire qu'à la condition qu'il justifie de l,insuffisance manifeste de sa rémunération eu égard à la longueur et à la complexité de sa mission. Ainsi, ces indemnités revêtent dans ce cas un caractère subsidiaire (article premier).

Enfin, le présent projet reprend les dispositions transitoires contenues dans la proposition de loi, savoir l'application immédiate des dispositions de la présente loi et corrélativement, l'octroi d'un délai de trois ans, pour les personnes exerçant les fonctions de tuteur ou de curateur à l'entrée en vigueur de la loi, pour se mettre en conformité avec les présentes dispositions (article 19).

Tel est l'objet du présent projet de loi.

Dispositif🔗

Article 1er🔗

Le premier alinéa de l'article 380 du Code civil est modifié comme suit :

« À l'ouverture de la tutelle, et, s'il y a lieu, en cours d'exercice, le conseil de famille règle, par aperçu, et selon l'importance des biens régis, la somme annuellement nécessaire à l'entretien et à l'éducation du pupille et à I'administration de ses biens, ainsi que les indemnités qui pourraient être allouées au tuteur. ces indemnités ne peuvent toutefois être allouées au mandataire judiciaire que sur justification, par celui-ci, de l'insuffisance manifeste de la rémunération versée en application de l'article 18 de la loi n°.... du .... compte tenu de la longueur ou de la complexité des diligences accomplies au titre des actes nécessaires à I'exercice de la tutelle. »

Article 2🔗

L'intitulé du Titre X du Livre I du Code civil est modifié comme suit :

« De la majorité et des mesures de protection du majeur ».

Les articles 410-2° et 410-3° de la Section I du Chapitre I du Titre X du Livre I du Code civil sont abrogés.

Article 3🔗

Sont insérés, au sein du Chapitre I du Titre X du Livre I du Code civil, après l'article 410-1°, les articles 410-2° et 410-3°, rédigés comme suit :

« Article 410-2° : un acte juridique ne peut être valablement accompli par celui qui s'y est déterminé sous I'empire d'un trouble mental.

La personne qui en demande la nullité doit établir I'existence de ce trouble au moment de l,acte.

De son vivant, la nullité ne peut être demandée que par I'auteur lui-même, le tuteur ou le curateur qui lui aurait été nommé, ou par le mandataire qui y aurait été habilité par un mandat de protection future.

Après son décès, elle ne peut l'être par ses héritiers que dans l'un des cas suivants :

  • 1 : Si la preuve du trouble mental résulte de I'acte lui-même ;

  • 2 : Si une instance tendant à prononcer un régime d'incapacité était en cours au moment du décès ;

  • 3 : Si l'acte attaqué est une donation entre vifs ou un testament.

Article 410-3°: Celui qui, sous I'empire d'un trouble mental a causé un préjudice à autrui doit le réparer. »

Article 4🔗

L'intitulé du Chapitre II du Titre X du Livre I du Code civil est modifié comme suit :

« Des mesures de protection du majeur ».

Article 5🔗

L'article 410-4° du Code civil est modifié comme suit :

« Lorsqu'un majeur est dans l'impossibilité de pourvoir seul à ses intérêts en raison d'une altération soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher I'expression de sa volonté, il est pourvu à la gestion de ses intérêts par l'un des régimes prévus aux articles 410-9° à 410-57.

L'altération des facultés mentales ou corporelle est attestée par le rapport d'un médecin, désigné par le juge tutélaire sur simple requête ou d'office »

Article 6🔗

Sont insérés, au sein du Chapitre II du Titre X du Livre I du code civil, après l'article 410-4° , les articles 410-4-1 à 410-4-3 rédigés comme suit :

« Article 410-4-1 : Les personnes majeures reçoivent la protection de leur personne et de leurs biens que leur état ou leur situation rend nécessaire selon les modalités prévues au présent titre.

Cette protection est instaurée et assurée dans le respect des libertés et droits fondamentaux ainsi que de la dignité de la personne.

Elle a pour finalité I'intérêt de la personne protégée. Elle favorise dans la mesure du possible, I'autonomie de celle-ci.

Article 410-4-2 : La mesure de protection ne peut être ordonnée par le juge qu'en cas de nécessité et lorsqu'il ne peut être suffisamment pourvu aux intérêts de la personne par l'application des règles de droit commun de la représentation, de celles relatives aux droits et devoirs respectifs des époux et des règles des régimes matrimoniaux, en particulier celles prévues à I'article 190, par une autre mesure de protection judiciaire moins contraignante ou par le mandat de protection future conclu par I'intéressé .

La mesure est proportionnée et individualisée en fonction du degré d'altération des facultés personnelles de l'intéressé.

Article 410-4-3 : Les personnes autres que le mandataire judiciaire à la protection des majeurs exercent, sauf dispositions contraires, à titre gratuit les mesures de protection. »

Article 7🔗

Est insérée, après l'article 410-9° et avant la Section II intitulée « Des majeurs en tutelle » du chapitre II du Titre X du Livre I du code civil, une Section I-l intitulée « De Ia sauvegarde de justice » comportant les articles 410-9-1 à 410-9-6, rédigés comme suit :

« Article 410-9-1 : Le tribunal de première instance peut, durant l'instruction d'une procédure de curatelle ou de tutelle, placer sous sauvegarde de justice, pour la durée de l'instance, la personne qui, pour l'une des causes prévues à l'article 410-4° juridique a besoin d'une protection temporaire ou d'être représentée pour l'accomplissement de certains actes déterminés.

Le tribunal statue sur la sauvegarde de justice après avoir entendu ou appelé la personne intéressée, qui peut être assistée d'un avocat ou d'un avocat-défenseur.

En cas d'urgence, le tribunal peut toutefois statuer sons avoir entendu I'intéressé. En ce cas, il I'entend dans les meilleurs délais, sauf si, sur avis médical, son audition est de nature à porter préjudice à sa santé ou s'il est hors d'état d'exprimer sa volonté.

Article 410-9-2 : La personne placée sous sauvegarde de justice conserve I'exercice de ses droits. Toutefois, elle ne peut, à peine de nullité, faire un acte pour lequel un mandataire spécial a été désigné en application de I'article 410-9-3.

Les actes que la personne a passés et les engagements qu'elle a contractés pendant la durée de la mesure peuvent être scindés pour simple lésion ou réduits en cas d'excès alors même qu'ils pourraient être annulés en vertu de l'article 410-2°. Le tribunal de première instance prend notamment en considération l'utilité ou l'inutilité de l'opération, I'importance ou la consistance du patrimoine de la personne placée sous sauvegarde de justice et la bonne ou la mauvaise foi de ceux arec qui elle a contracté.

L'action en nullité, en rescision ou en réduction n'appartient qu'à la personne protégée et, après sa mort, à ses héritiers. Elle s'éteint par le délai de cinq ans prévu à l'article 1152.

Article 410-9-3 : Le tribunal de première instance peut désigner un mandataire spécial, dans les conditions et selon les modalités prévues aux articles 410-14° à 410-16°, à l'effet d'accomplir un ou plusieurs actes déterminés, même de disposition, rendus nécessaires par la gestion du patrimoine de la personne placée sous sauvegarde de justice' Le mandataire peut notamment recevoir mission d'exercer les actions prévues à l'article 410-9-2.

Chaque année, le mandataire spécial rend compte de sa gestion au juge tutélaire.

Article 410-9-4 : Le mandat par lequel la personne protégée a chargé une autre personne de I'administration de ses biens continue à produire ses effets dès le prononcé de la sauvegarde de justice sauf, si le tribunal de première instance considère que la poursuite de ce mandat n'est pas de nature à offrir la protection nécessaire à la personne protégée. Le cas échéant, le tribunal peut décider de mettre fin totalement ou partiellement au mandat, le mandataire étant entendu ou dûment appelé.

Ceux qui ont la qualité pour demander l'ouverture d'une curatelle ou d'une tutelle sont tenus d'accomplir les actes conservatoires indispensables à la préservation du patrimoine de la personne faisant l'objet d'une procédure de placement sous sauvegarde de justice, dès lors qu'ils ont connaissance tant de leur urgence que de l'existence de cette procédure. Les mêmes dispositions sont applicables à la personne ou à l'établissement qui héberge la personne concernée.

Article 410-9-5 : Le tribunal de première instance peut, à tout moment, ordonner la mainlevée de la sauvegarde de justice si le besoin de protection temporaire cesse.

A défaut de mainlevée, la sauvegarde de justice prend fin à partir du jour où prend effet une mesure de curatelle ou de tutelle ou à la date du jugement du tribunal lorsque celui-ci refuse l'ouverture d'une mesure de tutelle ou de curatelle.

Article 410-9-6 : Les décisions du tribunal de première instance prévues aux articles 410-9-1, 410-9-3 et 410-9-5 sont exécutoires par provision et mentionnées, à la requête du ministère public, sur un registre tenu à cet effet au greffe général. Ces décisions sont immédiatement opposables aux tiers dès leur mention sur ce registre.

Sur simple demande, le greffier en chef délivre à tout requérant un certificat indiquant qu'il existe ou non une décision plaçant un majeur sous sauvegarde de justice. »

Article 8🔗

L'intitulé de la section II du chapitre II du Titre X du Livre I du Code civil est modifié comme suit :

« De la tutelle ».

L'intitulé de la Section III du chapitre II du Titre X du code civil est modifié comme suit :

« De la curatelle ».

Article 9🔗

L'article 410-14° du Code civil est modifié comme suit :

« Le tribunal de première instance désigne le tuteur qui peut être une personne morale. s'il existait un mandat de protection future, le tribunal propose cette mission en priorité au mandataire désigné dans l'acte. »

Article 10🔗

Sont insérés, à l'article 410- 15° du Code civil, après les mots « des descendants », les mots « , du mandataire judiciaire ».

Article 11🔗

L'article 410-31° du Code civil est modifié comme suit :

« Le tribunal de première instance désigne le curateur. S'il existait un mandat de protection future, le tribunal propose cette mission en priorité au mandataire désigné dans I'acte.

Le curateur est soumis aux règles applicables au tuteur du majeur.

Aucun autre organe n'intervient dans le fonctionnement de la curatelle. »

Article 12🔗

Est insérée, au sein du Chapitre II du Titre X du Livre I du Code civil, après l'article 410-36°, une Section IV intitulée « Du mandat de protection future » comportant les articles 410-37 à 410-57, rédigés comme suit :

« Article 410-37 : Toute personne majeure ou mineure émancipée, à condition de ne pas être placée sous tutelle, peut, par un mandat, charger une ou plusieurs personnes de la représenter pour le cas où, pour I'une des causes prévues à l'article 410-4°, elle ne pourrait plus pourvoir seule à ses intérêts.

Les père et mère ou le dernier vivant d'entre eux, à condition d'être juridiquement capables, peuvent, s'ils exercent l'autorité parentale sur leur enfant mineur, désigner un ou plusieurs mandataires chargés de le représenter. Cette désignation prend effet au décès des père et mère ou à compter du jour où ils ne peuvent plus prendre soin de I'intéressé. Cette désignation est également possible pour leur enfant majeur dont ils assument la charge matérielle et morale pour le cas où cet enfant ne pourrait plus pourvoir seul à ses intérêts pour I'une des causes prévues a l'article 410-4°.

Durant la procédure d'homologation prévue par l'article 410-42 du Code civil, la personne désignée peut accomplir tous actes d'administration utiles.

Article 410-38 : Le mandat de protection future est soumis aux dispositions des articles 1823 à 1849 qui ne sont pas incompatibles avec celles de la présente section.

Article 410-39 : Le mandat de protection future, à peine de nullité, est reçu par un notaire choisi par le mandant. L'acceptation du ou des mandataires est faite dans les mêmes formes. L'acceptation est également requise dans les mêmes formes dans les cas où le mandat prévoit un ou plusieurs mandataires de substitution.

Tant que le mandat n'a pas pris effet, le mandant peut le modifier dans les mêmes formes ou le révoquer en notifiant sa révocation au mandataire et ou notaire et le mandataire peut A renoncer en notifiant sa renonciation au mandant et au notaire.

La personne en curatelle ne peut conclure un mandat de protection future que pour elle-même et avec I'assistance de son curateur.

Article 410-40 : Le mandataire peut être toute personne physique choisie par le mandant et jouissant, pendant toute la durée du mandat de la capacité civile, à I'exception :

  • 1 : De celle qui exerce une fonction ou occupe un emploi dans un établissement hébergeant ou dispensant des soins au mandant ou au bénéficiaire du mandat ;

  • 2 : Du médecin traitant du mandant ou du bénéficiaire du mandat ;

  • 3 : Du curateur ayant assisté le mandant lors de la rédaction du mandat conclu pour soi-même.

Article 410-41 : Plusieurs mandataires peuvent être désignés par le mandant en vue d'accomplir leur mission en commun, d'attribuer à chacun d'eux un domaine de représentation spécifique ou de prévoir le contrôle des actes des mandataires par un ou plusieurs subrogés mandataires.

Article 410-42 : Le mandat de protection future prend effet après avoir été homologué par le tribunal de première instance, sur requête du mandataire désigné dans l'acte.

Dans le mandat conclu pour soi-même, l'homologation judiciaire est subordonnée à la preuve que le mandant, pour l'une des causes prévues à I'article 410-4°, ne peut plus pourvoir seul à ses intérêts. Cette preuve est établie par le rapport circonstancié d'un médecin désigné par le tribunal de première instance sur requête du mandataire.

Dans le mandat conclu pour autrui, cette homologation est subordonnée à la preuve du décès ou de l,inaptitude du mandant à prendre en charge les intérêts personnels et patrimoniaux du bénéficiaire du mandat, ainsi qu'à la preuve que ce dernier, pour I'une des causes prévues à l'article 410-4°, ne peut plus pourvoir seul à ses intérêts. Cette dernière preuve est établie conformément a l'alinéa précédent.

Article 410-43 : Le tribunal de première instance se prononce sur I'homologation après avoir entendu le mandant sauf si, sur avis médical, son audition est de nature à porter préjudice à sa santé ou s'il est hors d'état d'exprimer sa volonté. Il homologue le mandat en tenant compte de l'adéquation de son contenu à la situation personnelle et patrimoniale du mandant ou du bénéficiaire.

Si le tribunal estime que le mandat, en raison de son domaine d'application, ne permet pas de protéger efficacement les intérêts personnels et patrimoniaux du mandant ou du bénéficiaire, il peut soit l'homologuer et l'assortir d'une curatelle ou d'une tutelle complémentaire confiée, le cas échéant, ou mandataire de protection future, soit l'homologuer partiellement afin de ne mettre en oeuvre que les mesures nécessaires à la protection du mandant ou du bénéficiaire, soit refuser I'homologation.

Saul si le conjoint a été désigné comme mandataire, le tribunal peut refuser l'homologation lorsque les règles du droit commun relatives aux droits et devoirs respectifs des époux et aux régimes matrimoniaux apparaissent suffisantes pour qu'il soit pourvu aux intérêts du mandant ou du bénéficiaire par son conjoint avec qui la communauté de vie n'a pas cessé.

Article 410-44 : Une fois homologué, le mandat de protection future est inscrit sur un registre ad hoc, tenu par le greffe général conformément aux dispositions de I'article 410-8°.

Article 410-45 : Le ou les mandataires exécutent personnellement le mandat. Toutefois, ils peuvent se substituer un tiers pour les actes de gestion du patrimoine, mais seulement à titre spécial.

Le mandataire répond de la personne qu'il s'est substitué dans les conditions de l'article 1833.

Article 410-46 Lorsque le mandat s'applique à la protection de la personne, les droits et obligations du mandataire sont définis par les dispositions relatives aux différents aspects du statut personnel du mandatant ou du bénéficiaire. Toute stipulation contraire est réputée non écrite.

Article 410-47 : Par dérogation à l'article 1827, le mandat, même reçu en généraux, inclut-tous les actes patrimoniaux que le tuteur a le pouvoir d'accomplir seul ou avec une autorisation du tribunal de première instance.

Toutefois, le mandataire ne peut accomplir un acte de disposition à titre gratuit qu'avec I'autorisation du tribunal.

Article 410-48 : Le mandataire chargé de l'administration des biens du mandant ou du bénéficiaire fait procéder, sous le contrôle du juge tutélaire, à leur inventaire lors de I'ouverture de la mesure et assure son actualisation au cours du mandat afin de maintenir à jour l'état du patrimoine du mandant ou du bénéficiaire.

Il établit annuellement le compte de sa gestion et le transmet au juge tutélaire afin qu'il s'assure que le compte est régulier, sincère et donne une image fidèle du patrimoine et de la situation financière du mandant ou du bénéficiaire.

Article 410-49 : Le mandataire est tenu de rendre compte tous les ans au juge tutélaire de la situation personnelle du mandant ou du bénéficiaire et des actes qu'il a réalisés en vue d'assurer sa protection.

Article 410-50 : Le mandataire ne peut, pendant I'exécution du mandat, être déchargé de ses fonctions qu'avec l'autorisation du tribunal de première instance, saisi sur requête.

Article 410-51 : Tout intéressé peut saisir le tribunal de première instance, selon le droit commun, aux fins de contester la mise en oeuvre du mandat de protection future et de voir statuer sur les conditions et les modalités de son exécution.

Article 410-52 : Durant l'exécution du mandat de protection future, tous les actes accomplis ou les engagements contractés par le mandant ou le bénéficiaire qui entrent dans le pouvoir de représentation du mandataire sont nuls de plein droit.

Article 410-53 : Les actes accomplis ou les engagements contractés par le mandant ou le bénéficiaire qui ne relèvent pas du pouvoir de représentation du mandataire pendant I'exécution du mandat peuvent être rescindés pour simple lésion ou réduits en cas d'excès alors même qu'ils pourraient être annulés sur le fondement de I'article 410-2°. Le tribunal de première instance prend notamment en considération l'utilité ou I'inutilité de l'opération, I'importance ou la consistance du patrimoine du mandant ou du bénéficiaire et la bonne ou la mauvaise foi de ceux avec qui il a contracté.

Article 410-54 : L'article 410-24°est applicable au mandat de protection future.

Article 410-55 : Le mandat mis à exécution prend fin par :

  • 1 : Le rétablissement des facultés personnelles du mandant ou du bénéficiaire constaté par le tribunal de première instance au vu du rapport circonstancié d'un médecin qu'il désigne, à la demande du mandant, du mandataire ou de tout intéressé ;

  • 2 : Le décès du mandant en cas de mandat conclu pour soi-même, ou du bénéficiaire, en cas de mandat conclu pour autrui ;

  • 3 : Le décès du mandataire ou son incapacité ;

  • 4 : La révocation du mandataire prononcée par le tribunal de première instance à la demande de tout intéressé lorsque I'exécution du mandat est de nature à porter atteinte aux intérêts du mandant ou du bénéficiaire ou, sauf s'il s'agit de son conjoint, lorsque les règles de droit commun relatives aux droits et devoirs respectifs des époux et aux régimes matrimoniaux apparaissent suffisantes pour qu'il soit pourvu aux intérêts du mandant ou du bénéficiaire par son conjoint avec qui la communauté de vie n'a pas cessé ;

  • 5 : Une décision motivée du tribunal de première instance justifiant de mettre fin au mandat, en cas de placement du mandant ou du bénéficiaire en curatelle ou en tutelle. Dans ce cas, le tribunal propose cette mission en priorité au mandataire.

Article 410-56 : À l'expiration du mandat ou à la suite de la révocation du mandataire dans les cinq ans qui suivent, le mandataire tient à la disposition de la personne amenée à poursuivre la gestion, du mandant ou du bénéficiaire qui a recouvré ses facultés ou de ses héritiers I'inventaire des biens et les actualisations auxquelles il a donné lieu, ainsi que les cinq derniers comptes de gestion et les pièces nécessaires pour continuer celle-ci ou assurer la liquidation de la succession.

Article 410-57 : L'existence, l'étendue, la modification et l'extinction des pouvoirs de représentation conférés par un adulte, soit par un accord, soit un acte unilatéral, pour être exercés lorsque cet adulte sera hors d'état de pourvoir à ses intérêts, sont régies par la loi de l'État de la résidence habituelle de I'adulte au moment de l'accord ou de I'acte unilatéral, à moins qu'une des lois mentionnées au second alinéa ait été désignée.

Les Etats dont la toi peut être désignée sont les suivants :

  • 1 : Un État dont I'adulte possède la nationalité ;

  • 2 : L'État d'une résidence habituelle précédente de l'adulte ;

  • 3 : Un État dons lequel sont situés des biens de I'adulte, pour ce qui concerne ces biens.

Les modalités d'exercice de ces pouvoirs de représentation sont régies par la loi de l'État où ils sont exercés. »

Article 13🔗

L'article 1829 du Code civil est modifié comme suit :

« Les mineurs émancipés peuvent être choisis pour mandataires ; mais le mandant n'a d'action contre le mandataire mineur que d'après les règles relatives aux obligations des mineurs. »

Article 14🔗

Seuls les mandataires judiciaires régis par les dispositions de la présente loi peuvent exercer, à titre professionnel, les fonctions de tuteur, curateur ou administrateur qui leur ont été confiées par décision du juge tutélaire ou du tribunal de première instance.

Article 15🔗

L'exercice de I'activité de mandataire judiciaire est soumis à la délivrance d'un agrément délivré par décision du Ministre d'Etat, en priorité aux personnes de nationalité monégasque.

Les conditions de délivrance et de retrait de cet agrément sont prévues par ordonnance souveraine.

Toute délivrance est portée à ra connaissance de la Direction des services Judiciaires par la Direction de l'action et de l'aide sociales.

Les personnes qui ne pourraient pas être désignées judiciairement en qualité de tuteur, curateur ou mandataire spécial, en application des articles 410-9-8, 410-14°, 410-16° et 410-31° du Code civil, ne peuvent pas solliciter un agrément aux fins d'exercice d'une activité de mandataire judiciaire.

Article 16🔗

Le mandataire judiciaire doit pouvoir justifier, sur demande de l'autorité administrative compétente, de la souscription d,une assurance d.e responsabilité civile couvrant les dommages causés par les personnes dont la charge lui a été confiée par décision de justice ainsi que'la souscription d'une assurance de responsabilité civile professionnelle.

Article 17🔗

Les mandataires judiciaires sont tenus au secret professionnel.

Outre les cas où la loi impose ou autorise la révélation d'un secret, les mandataires judiciaires en sont déliés pour I'exercice des droits nécessaires à leur défense en cas de poursuites pénales.

Article 18🔗

Sans préjudice des articles 380 et 398 du Code civil, les mandataires judiciaires perçoivent une rémunération versée, selon les cas, sur décision du juge tutélaire ou du tribunal de première instance prise après avis du conseil de famille.

Cette rémunération est à la charge totale ou partielle de la personne qui fait l'objet de la mesure de protection, selon que celle-ci bénéficie de ressources suffisantes. A défaut, elle est versée par l'État dans les conditions fixées par ordonnance souveraine.

Article 19🔗

Les dispositions de la présente loi s'appliquent immédiatement à compter de leur entrée en vigueur.

Toutefois, ceux qui, au jour de son entrée en vigueur, exercent à titre professionnel les fonctions de tuteur ou de curateur disposent de trois ans pour se mettre en conformité avec la présente loi.

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