Projet de loi n° 946 portant création de l'activité de multi family office
Exposé des motifs🔗
Le service de family office connaît un essor indéniable tant en Europe qu'en Amérique du Nord ou en Asie, sans toutefois que les législations nationales réglementent systématiquement l'activité en tant que telle.
Dans nombre d'Etats en effet, les acteurs de ce secteur économique interviennent dans le cadre d'autres réglementations professionnelles pour collaborer aux côtés de familles disposant d'un patrimoine important afin de les conseiller et de les assister dans la gestion et l'organisation de celui-ci et ce, dans la perspective sinon de l'accroître, à tout le moins de le préserver.
Pour atteindre ces objectifs, le family office est alors amené à déployer une palette de services aussi variés que ceux consistant, par exemple, à assurer la transmission et la sauvegarde d'éléments du patrimoine, la diversification structurelle de celui-ci, ou la gouvernance d'entités juridiques appartenant à une famille ou à certains de ses membres, ou encore la formation d'un des membres de la famille appelé à assumer des responsabilités de direction d'une entité du groupe familial, voire à proposer des solutions en lien avec des œuvres caritatives.
Cette diversité des domaines d'intervention, combinée à l'impératif de tenir compte des intérêts propres à chaque famille comme l'un des critères majeurs de décision, permet de différencier l'activité de family office de la simple gestion de patrimoine.
Cette variété de services est d'ailleurs, pour certains, à l'origine même du développement des family offices, dès lors que la clientèle aurait en effet progressivement exprimé des besoins plus élevés en personnalisation et en étendue des services que les prestations traditionnelles des départements classiques de banque privée fournies jusqu'ici par les acteurs financiers.
A Monaco, si l'activité de family office existe depuis plusieurs années, force est de constater qu'elle s'est déployée, pour l'essentiel, au travers de structures spécialement constituées au service d'une seule famille, avec pour objet la gestion de son patrimoine et la fourniture de conseils exclusivement à son attention, ces structures devant, en outre, recruter le personnel qui y est employé, de même qu'assumer les risques attachés à l'exercice de l'activité.
Quant à l'activité de multi family office, laquelle fait appel à des structures dont la vocation est d'intervenir aux côtés de plusieurs familles indépendamment les unes des autres et ce, en assurant la confidentialité indispensable aux actes et conseils dispensés à chacune, elle ne fait actuellement l'objet d'aucun encadrement juridique, alors que la clientèle, résidente ou installée à l'étranger, pourrait trouver à Monaco les conditions d'une offre de services nouvelle qui, en exigeant de hauts standards de professionnalisme des acteurs de la place (compétence, indépendance, sécurité, moralité), répondrait ainsi à ses attentes.
Tel est l'objectif de la proposition de loi n° 211 portant création de l'activité de multi family office, adoptée par le Conseil National lors de la séance publique du 11 juin 2014, à laquelle le Gouvernement Princier a souhaité donner une suite législative le 26 novembre 2014 en la transformant en un projet de loi et ce, conformément à sa politique générale conduite depuis plusieurs années, tendant à renforcer l'attractivité de la Principauté.
Destiné à conférer à l'activité de multi family office un statut légal, le présent projet de loi ambitionne ainsi d'offrir à la clientèle un niveau élevé de protection lui permettant de placer sa confiance dans des professionnels qui seront assujettis à un régime juridique cohérent et reposant sur des mécanismes de contrôle et de surveillance qui ont fait leur preuve.
C'est ainsi que le projet de loi, en s'inspirant de certains principes posés par la proposition de loi n° 211, s'attache tout d'abord à encadrer les seuls multi family offices, étant donné qu'il importe de préserver la faculté pour toute famille d'opter en faveur de la création d'une structure spécialement dédiée à la gestion en direct de son patrimoine, ce qui implique de devoir lui laisser, en ce cas, une marge de manœuvre suffisante dans la limite, néanmoins, des règles générales applicables aux activités économiques développées à Monaco.
Le projet de loi entend également soumettre l'exercice de l'activité de multi family office à la délivrance d'une autorisation administrative du Ministre d'Etat ainsi qu'à l'agrément de la Commission de contrôle des activités financières lorsque la structure proposera des services relevant de certaines activités prévues par la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007 sur les activités financières, modifiée.
De plus, est-il prévu d'assujettir les personnes exerçant l'activité de multi family office à une obligation de secret professionnel et d'interdire l'usage de l'appellation « multi family office » sans autorisation, à peine de sanction pénale.
Enfin, reprenant encore une option de la proposition de loi n° 211, le projet de loi vient ajouter le multi family office à la liste des organismes et des personnes relevant du champ d'application de la loi n° 1.362 du 3 août 2009 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption.
Le Gouvernement Princier a toutefois estimé, compte tenu de l'ampleur des enjeux financiers en cause, eu égard à la valeur des patrimoines privés concernés par cette activité, que les multi family offices devraient revêtir une forme sociétale dont le régime juridique présente des garanties de pérennité et de stabilité.
C'est la raison pour laquelle le projet de loi innove en exigeant des futures structures qu'elles se constituent sous la forme de sociétés anonymes, dans la mesure où le régime de droit commun applicable à cette forme sociale requiert des exigences en termes de capital et de contrôle des comptes qui sont à même de susciter la confiance indispensable à l'émergence de cette nouvelle activité.
Ainsi, en faisant reposer le cadre juridique du multi family office sur des structures fiables du point de vue économique ainsi que sur un niveau élevé de qualité des acteurs de ce nouveau secteur, le présent projet de loi s'inscrit en adéquation avec le principe essentiel selon lequel la création, à Monaco, de l'activité de multi family office devra s'opérer dans le respect de la place financière et de la protection des intérêts de la clientèle.
Sous le bénéfice de ces observations d'ordre général, le présent projet de loi appelle les commentaires particuliers ci-après.
L'option choisie de réglementer le multi family office et de soumettre cette activité à autorisation préalable, commande naturellement de la définir (art. premier).
Ainsi, l'activité visée, concerne en premier lieu, celle qui est exercée à titre de profession habituelle, par opposition aux actes qui pourraient être accomplis à titre accessoire dans le cadre d'une autre profession, ou ceux réalisés à titre occasionnel sans donner lieu à une rémunération parce qu'ils le seraient en dehors de toute activité professionnelle.
En second lieu, la définition proposée met en exergue l'un des critères distinctifs du multi family office, savoir les destinataires du service du multi family office, lesquels sont nécessairement des personnes physiques, des familles ou des entités juridiques leur appartenant.
L'objet même du family office porte sur l'assistance qui peut être apportée à des personnes physiques prises en leur qualité de titulaire d'un patrimoine ou d'ayant cause, le patrimoine étant lui-même conçu dans une perspective familiale.
Ainsi, le patrimoine d'une ou plusieurs personnes physiques entre dans le champ de compétence d'un family office lorsqu'il est envisagé sous l'angle de la préservation d'intérêts familiaux. Il peut en être ainsi par exemple lorsqu'il s'agit de faire fructifier tout ou partie d'un patrimoine ou de le sauvegarder afin de préserver l'avenir de membres de la famille, de leur réserver ou de leur transmettre des revenus ou des biens. Il va de soi également que tous les actes relevant de l'organisation patrimoniale et de sa structuration poursuivant ce même but, participent également du domaine d'activité des family offices.
En outre, les entités juridiques appartenant à une ou plusieurs personnes physiques sont aussi concernées par les services du family office, dès lors qu'elles détiennent une partie du patrimoine familial ou qu'elles constituent une part de celui-ci. Le patrimoine de la famille doit en effet pouvoir être appréhendé dans son ensemble de manière à permettre au family office d'adopter une approche globale des intérêts patrimoniaux d'une famille.
Il importe de préciser que la notion d'entité juridique visée ici, correspond à celle retenue par la loi n° 1.381 du 29 juin 2011 relative aux droits d'enregistrement exigibles sur les mutations de biens et droits immobiliers, modifiée, dans la mesure où ainsi que mentionné dans l'exposé des motifs de cette loi, « ces entités ont en commun d'être créées en vue de faire fructifier un patrimoine, de le transmettre ou de le mettre à l'abri d'éventuelles poursuites de créanciers, et parfois de voir réaliser plusieurs de ces objectifs à la fois ».
Compte tenu cependant des objectifs largement différents du présent projet de loi par rapport à ceux poursuivis par la loi n° 1.381 du 29 juin 2011, modifiée, susmentionnée, il échet de souligner que les sociétés dont les titres sont admis à la négociation sur un marché réglementé doivent ici être comprises dans la notion d'entité juridique, de même que les fonds régis par la loi n° 1.339 du 7 septembre 2007 relative aux fonds communs de placement et aux fonds d'investissement, dès lors que ces entités peuvent de fait abriter des droits patrimoniaux que les multi family offices doivent être en mesure d'appréhender dans leur champ d'activité.
En ce qui concerne la nature des actes qu'un multi family office devrait être habilité à accomplir, il faut considérer que ceux-ci peuvent consister en des conseils et des services de nature patrimoniale, conformément à l'énumération qui en est faite par le projet de loi.
Les conseils en matière patrimoniale sont ainsi le cœur de l'activité du multi family office, et le champ de cette activité de conseil est très large puisqu'il peut porter sur des questions tant juridiques que fiscales, ainsi que sur des problématiques financières, sous réserve de demeurer dans la limite des conditions posées à cet égard aux articles 4 et 5 du projet de loi ainsi qu'il sera exposé plus avant.
A cet égard, il convient de souligner que le multi family office sera habilité à dispenser des conseils en matière d'organisation patrimoniale, portant par exemple sur la diversification de la composition d'un patrimoine et ses incidences, de même que sur la répartition géographique de certains de ses éléments en considération des besoins et des données fiscales applicables dans chaque cas d'espèce. Seront aussi compris dans le champ de compétence du multi family office les divers impératifs de transmission et de sauvegarde de tout ou partie du patrimoine familial, notamment au regard des exigences juridiques attachées à la nationalité ou au lieu de résidence.
A ce stade, il y a lieu d'observer que le multi family office ne se confond nullement avec l'activité de conseil juridique exercée à titre de profession habituelle, laquelle bénéficie d'une autorisation du Ministre d'Etat sur le fondement de la loi n° 1.144 du 26 juillet 1991 concernant l'exercice de certaines activités économiques et juridiques, modifiée.
En effet, ce n'est qu'à titre accessoire que le multi family office pourra être conduit à dispenser des conseils en matière juridique, dès lors que ceux-ci seront nécessaires à l'accomplissement de la mission générale confiée au family office.
Pour le reste, sous réserve du respect des dispositions de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007 sur les activités financières, modifiée, le suivi administratif et financier d'un patrimoine consiste notamment en une action de surveillance, mais également d'analyse et d'évaluation des investissements réalisés. Il peut aussi comporter la présentation d'une analyse prospective avec des conseils pour l'avenir portant sur l'évolution du patrimoine familial.
Par ailleurs, les conseils et les services de nature patrimoniale visés à l'article premier, portent également sur la coordination des prestataires de services extérieurs au multi family office qui interviennent en relation avec le patrimoine d'une personne physique ou d'une famille, le suivi ou l'évaluation de leurs performances.
Il revient donc au multi family office qui externalise les fonctions et les métiers dont les compétences ne sont pas représentées au sein même de la société de commander les diverses prestations utiles, de les recueillir et d'en faire la synthèse au bénéfice de chaque famille concernée.
S'agissant du domaine financier, le Gouvernement Princier considère qu'il échet que certaines des activités relevant de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, susmentionnée, savoir celles visées aux chiffres premier, 3 et 4 de l'article premier de ce texte, entrent dans le domaine de compétence des multi family offices.
Ainsi, et à condition d'avoir obtenu un agrément préalable de la Commission de contrôle des activités financières dans les conditions prévues par la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, susvisée, un multi family office pourra être habilité au titre de la gestion de portefeuille pour le compte de tiers, de la réception et transmission d'ordres ainsi que dans le domaine du conseil financier, ou pour l'une ou plusieurs de ces activités.
Il a en effet été considéré qu'il devait être possible aux multi family offices qui entendent apporter un service offrant une large gamme de compétences y compris en matière financière, d'être en mesure de le faire, dès lors que les exigences de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, leur seraient également applicables.
A cet effet, il est proposé d'apporter une exception à la règle énoncée à l'article 6 de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, susvisée, selon laquelle pour obtenir l'agrément de la Commission de contrôle des activités financières, les sociétés anonymes monégasques qui n'ont pas la qualité d'établissement de crédit, doivent notamment justifier d'un objet social exclusif, visant tout ou partie des activités mentionnées à l'article premier de ce texte (art. 13).
L'exception ainsi prévue n'a vocation à concerner que les multi family offices dûment agréées par la Commission dans les conditions prévues par la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, susvisée ainsi que par l'Ordonnance Souveraine n° 1.284 du 10 septembre 2007, modifiée, prise pour son application.
L'objectif poursuivi est de maintenir sous le contrôle de l'autorité compétente en matière d'activités financières à Monaco, l'ensemble des activités visées à l'article premier de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, susvisée, confirmant ainsi, l'interdiction d'exercer en ces domaines, en dehors de l'agrément et du contrôle de la Commission de contrôle des activités financières.
Enfin, la définition proposée du multi family office exclut les activités qui sont opérées entre les membres d'une même famille, étant observé que sont ici visées les single family offices, lesquels ne sont pas concernées par le présent projet de loi ainsi que précédemment exposé (art. premier).
Le choix opéré par le Gouvernement Princier en faveur d'une réglementation de l'activité des multi family offices le conduit à proposer de soumettre son exercice à la délivrance d'une autorisation du Ministre d'Etat, étant ajouté que l'importance des enjeux, ainsi que la valeur des patrimoines des familles concernées, justifient que seul soit rendu possible, en l'espèce, un exercice sous la forme sociale de la société anonyme monégasque (S.A.M.).
En effet, le régime juridique applicable à la S.A.M. présente des garanties de pérennité et de stabilité nécessaires à l'activité en cause.
Ainsi, les exigences en termes de capital social et de contrôle des comptes avec la présence obligatoire d'un ou deux commissaires aux comptes dans la société selon les cas, offrent aux structures concernées le cadre juridique et financier adéquat, permettant d'accueillir l'activité des multi family offices dans des conditions favorables, au regard de la confiance indispensable que de telles entités dédiées au conseil personnalisé en matière patrimoniale, doivent être en mesure d'offrir à leur clientèle.
De plus, la procédure de constitution des S.A.M, régie par les dispositions de l'Ordonnance du 5 mars 1895 sur les sociétés anonymes et en commandite par actions, modifiée, ainsi que le contrôle de leur activité prescrit par les dispositions de la loi n° 767 du 8 juillet 1964 relative à la révocation des autorisations de constitution des sociétés anonymes et en commandite par actions, modifiée, permet à l'Administration d'assurer le contrôle et la régulation des activités entreprises sous cette forme sociale.
De fait, cet encadrement participera à l'émergence d'une nouvelle activité réglementée dans le respect de la place monégasque et de la protection des intérêts des clients.
L'autorisation de constitution de la société portera la mention « multi family office », laquelle devra en outre apparaître dans la dénomination de la société, permettant ainsi aisément son identification (art. 2).
En définitive, l'autorisation du multi family office pourrait constituer un cas particulier d'autorisation de constitution des S.A.M.
Il reste que lorsque le multi family office exercera tout ou partie des activités relevant des chiffres premier, 3 et 4 de l'article premier de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, susvisée, celui-ci devra obtenir au préalable un agrément de la Commission de contrôle des activités financières dans les conditions prévues par cette loi ainsi que par l'Ordonnance Souveraine n° 1.284 du 10 septembre 2007, modifiée (art. 5).
Au demeurant, un objet social type sera établi pour chacune des deux sortes de multi family offices, étant souligné que les sociétés autorisées seront tenues d'intégrer aux statuts de leur société, l'objet social correspondant à leur activité autorisée.
Le libellé des deux objets sociaux types sera défini par ordonnance souveraine (art. 3).
Compte tenu de l'importance des enjeux en cause et de la nécessité de préserver l'intégrité de la place monégasque, le Gouvernement Princier est particulièrement attaché à la qualité des services que ces sociétés seront amenées à fournir. C'est la raison pour laquelle il sera requis des personnes physiques appelées à créer et à intervenir au sein des multi family offices, de justifier de sérieuses garanties de compétence professionnelle et d'honorabilité.
C'est ainsi, qu'outre les conditions de constitution et de formation de droit commun applicables à toutes les S.A.M., l'autorisation du multi family office ne sera délivrée qu'en considération des qualités présentées par les actionnaires ainsi que par les personnes physiques qui assurent des fonctions de direction et d'administration au sein de la société.
Ceux-ci devront en effet justifier de leur bonne moralité ainsi que de compétences professionnelles suffisantes dans les domaines tels que la gestion patrimoniale, le droit, la fiscalité, ou la finance, par la présentation de diplômes ou d'une expérience professionnelle en ces matières.
Les conditions requises à cet égard seront définies par ordonnance souveraine (art. 4).
Il est à noter que les dirigeants et administrateurs des S.A.M. ne pourront être que des personnes physiques afin de renforcer l'intuitu personae de la relation entre le multi family office et ses clients (art. 4 et 5).
Au demeurant, et afin que ces conditions soient respectées en permanence par les multi family offices, les changements d'actionnaires, d'administrateurs ou de dirigeants, devront faire l'objet d'une demande d'agrément auprès du Ministre d'Etat. A cette occasion, les conditions de compétence et d'honorabilité attendues seront appréciées conformément aux dispositions qui seront définies par ordonnance souveraine (art. 4).
En cas de manquement à ces dispositions, l'autorisation de constitution de la S.A.M. pourrait être révoquée dans les conditions et selon la procédure prévues par la loi n° 767 du 8 juillet 1964, modifiée, susmentionnée, étant précisé qu'il est proposé, à cet effet, d'ajouter à l'article premier de cette loi, une nouvelle hypothèse de révocation de l'autorisation, laquelle serait applicable en cas de méconnaissance par le multi family office des dispositions légales ou réglementaires le régissant (art. 4 et 12).
Ajoutons que l'ensemble des autres règles encadrant les S.A.M. demeurent applicables aux multi family offices.
Toutefois, lorsque l'objet du multi family office porte sur tout ou partie des activités visées aux chiffres premier, 3 et 4 de l'article premier de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, susvisée, la procédure d'agrément par la Commission de contrôle des activités financières et d'autorisation de constitution de la S.A.M. correspond à celle applicable en vertu de ce texte.
Il en résulte notamment que les changements d'actionnaires, de dirigeants, ou d'administrateurs de la société sont portés à la connaissance de la Commission de contrôle des activités financières, conformément aux dispositions de l'article 8 de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, susvisée.
La Commission dispose alors à ce titre du pouvoir d'apprécier sur le fondement des dispositions de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, susmentionnée, et de l'Ordonnance Souveraine n° 1.284 du 10 septembre 2007, modifiée, susvisée, les modifications entreprises (art. 5).
En outre, la Commission apparaît comme l'autorité naturelle pour le contrôle de l'activité des multi family offices agréés par elle, et ce dans les conditions prévues par les dispositions légales et réglementaires régissant les activités financières, étant observé qu'il est à cet effet proposé de modifier l'article 34 de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, susmentionnée afin d'accroître les compétences de la Commission en ce qui concerne les multi family offices (art. 6, 14 et 15).
Le présent projet de loi énonce par ailleurs diverses autres conditions d'exercice de l'activité du multi family office, lesquelles sont applicables à toutes les sociétés quelle que soit la nature de leurs activités.
Il en est ainsi de l'obligation d'assurance professionnelle qui pèse sur tous les dirigeants et administrateurs des S.A.M. constituées pour l'exercice du multi family office (art. 7).
S'agissant du mode de rémunération du multi family office, celui-ci revêt une importance de premier ordre dans la mesure où il conditionne son indépendance vis-à-vis des investissements et des prestations de services recommandés ou réalisés.
Aussi, afin d'assurer l'indépendance du service dispensé, importe-t-il que la rémunération du multi family office soit exclusivement constituée de celle qui lui est directement remise par le client, à l'exclusion de tous droits perçus d'un tiers au titre d'un pourcentage ou d'un intéressement sur un investissement recommandé ou sur une transaction à réaliser (art. 8).
En ce qui concerne l'utilisation du titre de « multi family office », il découle du principe de l'autorisation administrative préalable, l'interdiction de l'usage de cette qualité sans être bénéficiaire de l'autorisation mentionnée à l'article 2 du projet de loi.
Cette interdiction est prescrite à peine de sanctions pénales (art. 9).
Toutefois, il importe de réserver le cas des établissements de crédit, agréés au titre de tout ou partie des activités relevant des chiffres premier, 3 et 4 de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, et qui, à ce titre, exerceraient déjà des activités entrant dans le champ d'application de la définition proposée du multi family office.
Compte tenu de leur précédente habilitation, laquelle résulterait du libellé de leur objet social, ces établissements ne devraient pas être tenus de solliciter un nouvel agrément ; le projet de loi envisage donc de les autoriser à faire usage du titre « multi family office », sous réserve du contrôle de la Commission de contrôle des activités financières (art. 11).
Par ailleurs, afin de garantir une indispensable relation de confiance entre le multi family office et ses clients, le projet de loi soumet cette activité à l'obligation de secret professionnel, et ce à peine de sanctions pénales, imposant ainsi aux professionnels du secteur de taire les confidences recueillies à l'occasion de l'exercice de cette activité (art. 10).
Enfin, l'institution du multi family office parmi les activités réglementées à Monaco, justifie qu'elle soit ajoutée à la liste des organismes et des personnes soumises aux dispositions de la loi n° 1.362 du 3 août 2009 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption (art. 16 et 17).
Tel est l'objet du présent projet de loi.
Dispositif🔗
Article 1er🔗
L'activité de multi family office au sens de la présente loi consiste à fournir, à titre de profession habituelle, des conseils et des services de nature patrimoniale à des personnes physiques, à des familles ou à des entités juridiques appartenant à des personnes physiques ou à des familles ou dont elles sont fondatrices ou bénéficiaires.
Aux fins de la présente loi on entend par :
a) « Conseils et services de nature patrimoniale » :
les conseils en matière patrimoniale, portant notamment sur la planification et l'organisation patrimoniale, le suivi administratif et financier d'un patrimoine ;
la coordination des prestataires de services extérieurs au multi family office intervenant en relation avec un patrimoine, le suivi ou l'évaluation de leurs performances ;
la gestion, pour le compte de tiers, de portefeuilles de valeurs mobilières ou d'instruments financiers à terme ;
la réception et la transmission d'ordres sur les marchés financiers, portant sur des valeurs mobilières ou des instruments financiers à terme, pour le compte de tiers ;
le conseil et l'assistance dans les matières visées aux chiffres 1) à 3) de l'article premier de la loi n°1.338 du 7 septembre 2007, modifiée ;
à l'exclusion des activités visées aux chiffres 2 et 5 à 7 de l'article premier de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée.
b) « Entité juridique » : Toute société, toute personne morale ou toute construction juridique telle que notamment les fondations, les fiducies, les trusts, qui appartient directement ou indirectement à une ou plusieurs personnes physiques ou à une famille ou dont elles sont fondatrices ou bénéficiaires ;
Ne sont pas visées par la présente loi les activités de family office entre membres d'une seule famille à titre privé.
Article 2🔗
L'activité de multi family office est subordonnée à l'obtention préalable d'une autorisation administrative, laquelle, délivrée par Arrêté ministériel, ne peut être consentie qu'à des sociétés anonymes monégasques dans les conditions prévues, selon les cas, aux articles 4 ou 5.
L'autorisation de constitution de la société anonyme porte alors la mention « multi family office », laquelle est également intégrée dans la dénomination de la société.
Article 3🔗
L'objet social type du multi family office est défini par ordonnance souveraine pour chacune des deux catégories de multi family office relevant, selon le cas, des articles 4 et 5.
Article 4🔗
Lorsque l'objet de la société de multi family office est exclusif des activités relevant des chiffres premier, 3 et 4 de l'article premier de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, les actionnaires et les personnes physiques ayant le pouvoir de diriger ou d'administrer la société, doivent satisfaire à des conditions de compétence professionnelle et de moralité définies par ordonnance souveraine.
Les dirigeants et les administrateurs de la société doivent être des personnes physiques.
Tout changement d'actionnaire, de dirigeant ou d'administrateur est, à peine de révocation de l'autorisation de constitution de la société dans les conditions fixées par la loi n° 767 du 8 juillet 1964, modifiée, subordonné à l'obtention d'un agrément préalable délivré par décision du Ministre d'Etat.
Nonobstant les dispositions particulières des précédents alinéas, la société de multi family office demeure soumise aux règles régissant les sociétés anonymes.
Article 5🔗
Lorsque l'objet de la société de multi family office porte sur tout ou partie des activités relevant des chiffres premier, 3 et 4 de l'article premier de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, l'exercice du multi family office est subordonné à l'obtention préalable d'un agrément délivré par la Commission de contrôle des activités financières dans les conditions prévues par la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, et les textes pris pour son application.
Les dirigeants et les administrateurs de la société doivent être des personnes physiques.
Tout changement d'actionnaire, de dirigeant ou d'administrateur est communiqué à la Commission de Contrôle des Activités Financières conformément à l'article 8 de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée.
Nonobstant les dispositions particulières des précédents alinéas, la société de multi family office visée au premier alinéa, demeure soumise aux dispositions de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, et des textes pris pour son application.
Article 6🔗
Le contrôle de l'activité des sociétés de multi family office est exercé dans les conditions prévues par la loi n° 767 du 8 juillet 1964, modifiée.
Lorsque la société de multi family office est agréée au titre de tout ou partie des activités relevant des chiffres premier, 3 et 4 de l'article premier de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, le contrôle de ces activités en incombe en outre à la Commission de contrôle des activités financières dans les conditions prévues par ce texte.
Article 7🔗
Les dirigeants et les administrateurs de la société doivent justifier en permanence d'une assurance couvrant leur responsabilité civile professionnelle.
Article 8🔗
Le multi family office ne peut percevoir d'autre rémunération que celle reçue directement et exclusivement de son client.
Article 9🔗
Nul ne peut user du titre de « multi family office » s'il n'a pas obtenu l'autorisation requise par la présente loi.
Sont punis de six jours à trois mois d'emprisonnement et de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 du Code pénal dont le maximum peut être porté jusqu'au montant du profit éventuellement réalisé, ceux qui se prévalent de ce titre sans avoir obtenu l'autorisation prévue à l'article 2.
Article 10🔗
Toute personne exerçant l'activité de multi family office est soumise à une obligation de secret professionnel selon les dispositions de l'article 308 du Code pénal.
Article 11🔗
Les établissements de crédit, agréés pour tout ou partie des activités visées aux chiffres premier, 3 et 4 de l'article premier de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, dont l'objet social comporte, à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, les activités de multi family office définies à l'article premier, peuvent faire usage du titre « multi family office », sans avoir à solliciter la délivrance de l'agrément prévu à l'article 5.
Article 12🔗
A l'article premier de la loi n° 767 du 8 juillet 1964, modifiée, est ajouté un chiffre 6 rédigé comme suit :
« 6° dans l'exercice de son activité autorisée, le multi family office a méconnu les dispositions légales ou réglementaires qui lui sont applicables. »
Article 13🔗
Au chiffre premier de l'article 6 de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, après le terme « premier », sont insérés ceux de « à l'exception des sociétés de multi family office agréées dans les conditions prévues par l'article 5 de la loi n° XXX du XXX portant création de l'activité de multi family office ».
Article 14🔗
A l'article 34 de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, est inséré un deuxième alinéa rédigé comme suit :
« Il en va de même en ce qui concerne une société agréée au titre de tout ou partie des chiffres 1er, 3 et 4 de l'article premier, en application de l'article 5 de la loi n° XXX du XXX portant création de l'activité de multi family office, lorsqu'elle constate la méconnaissance des obligations prescrites par cette loi. »
Article 15🔗
A l'article 34 de la loi n° 1.338 du 7 septembre 2007, modifiée, est ajouté un chiffre 7 rédigé comme suit :
« 7° a méconnu les dispositions de la loi n° XXX du XXX portant création de l'activité de multi family office ou de ses textes d'application de manière substantielle et réitérée. »
Article 16🔗
Le chiffre 15°) de l'article premier de la loi n° 1.362 du 3 août 2009 est modifié comme suit :
«15°) Les multi family offices »
Article 17🔗
A l'article premier de la loi n° 1.362 du 3 août 2009, est ajouté un chiffre 16 rédigé comme suit :
«16° Les personnes non mentionnées aux chiffres précédents et à l'article 2 qui, à titre professionnel, réalisent, contrôlent ou conseillent des opérations entraînant des mouvements de capitaux. »
Article 18🔗
Sont abrogées toutes dispositions contraires à la présente loi.