Projet de loi n° 869 relative à la prévention et à la répression des violences particulières
Exposé des motifs🔗
Si la brutalité est de tous les âges, les progrès réalisés, dans la période récente, dans les divers domaines de la connaissance comme dans l'organisation de la communauté internationale auraient pu laisser espérer une réduction substantielle de la violence dans les rapports humains.
Or, force est de constater que ces rapports sont loin d'être pacifiés. Au contraire, aujourd'hui encore, un grand nombre de femmes, d'hommes et d'enfants meurent ou souffrent du fait d'actes divers, confinant parfois à la barbarie, leur infligeant d'innombrables et souvent d'irréparables souffrances physiques et psychologiques. Ces actes sont d'autant plus inadmissibles lorsqu'ils sont infligés sur des personnes en état de faiblesse ou de vulnérabilité par des membres de leur famille ou de leur proche entourage.
Toutefois, la donne nouvelle qui caractérise l'ère contemporaine à l'égard de ce fléau consiste certainement dans la prise de conscience mondiale de la nécessité du combat que les États doivent engager en vue de son éradication.
C'est ainsi que tant dans le cadre des Nations-Unies que sur le plan européen, et notamment au travers du Conseil de l'Europe, un certain nombre d'instruments internationaux et de recommandations de nature diverse ont identifié une typologie de faits de violences contre lesquelles la lutte doit être menée et de mesures susceptibles d'être mises en oeuvre à cette fin.
Sans dresser une liste exhaustive de ces textes internationaux et européens auxquels la Principauté a en général adhéré, ce qui serait par trop fastidieux, peuvent être citées au premier chef la Convention européenne des droits de l'homme ainsi que la jurisprudence de la Cour de Strasbourg qui, à l'instar des articles 19 et 20 de notre Constitution, garantissent notamment le droit à la vie, le droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants, ainsi que le droit à la liberté et à la sûreté.
Mais il importe tout autant d'avoir à l'esprit :
la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (1979) ;
la Déclaration des Nations Unies sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes (1993) ;
la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant (1989), ainsi que son Protocole facultatif concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (2000) ;
la Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels (2007) ;
la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et son Protocole visant à prévenir, supprimer et sanctionner la traite d'êtres humains, en particulier les femmes et les enfants (2000) ;
le Programme d'action adopté lors de la 4ème Conférence mondiale sur les femmes (Pékin, 1995) et la Résolution sur les nouvelles mesures et initiatives pour la mise en oeuvre de la Déclaration et du Programme d'action de Pékin adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies (23ème session extraordinaire, New York, 5-9 juin 2000).
Sensible à cette problématique, le Conseil National a, le 28 avril 2008, adopté une proposition de loi portant le n° 190 et relative à la lutte contre les violences domestiques que le Gouvernement Princier a d'emblée souhaité transformer en projet de loi.
Certes une divergence a été perceptible s'agissant de la notion de « violence domestique » elle-même dès lors que l'Assemblée estimait indispensable, pour la caractériser, d'institutionnaliser civilement des formes d'union autres que le mariage. L'approche du Gouvernement a, pour sa part, été autre. Fondée sur une conception réaliste du droit pénal, celui-ci entend en effet saisir les violences domestiques de manière globale et factuelle en ciblant les faits commis tant entre conjoints qu'entre personnes vivant ensemble sous le même toit ou y ayant vécu durablement.
Mais par-delà cette différence, qui relève en définitive de la technique législative, il importe avant tout de souligner la vision élargie qui est celle du Gouvernement par rapport à l'objet du texte d'avril 2008. En effet, le présent projet de loi, s'il intègre la teneur de la proposition de loi n° 190 sous la réserve ci-dessus, ne porte désormais uniquement plus sur les violences domestiques stricto sensu, c'est-à-dire celles substantiellement liées au logis (lat. domus), mais sur les violences dites particulières.
Cette notion n'est pas sans appeler des commentaires circonstanciés.
Notre Code pénal comporte de longue date une gamme complète d'incriminations qui permettent au juge de réprimer des violences contre les personnes : meurtre, viol, coups et blessures etc. Nous nous situons là dans le cadre, tristement général, du droit commun de la violence.
Mais au vu des données internationales et européennes susmentionnées, le Gouvernement a souhaité que soient spécifiquement prises en considération par le législateur des violences particulières, c'est-àdire justifiant, de la part de la société, une réponse juridique excédant le cadre du droit commun. L'explication en est donnée dès l'article préliminaire.
Elle tient tout d'abord à la notion même de violence qui, loin d'être uniquement physique, voire sexuelle, peut également être de nature moins visible et plus sournoise, telle la violence psychique ou économique, ce qui a, entre autres, amené les rédacteurs du dispositif à ériger le harcèlement en infraction pénale. Les dommages causés par ces violences sont bien entendu d'autant plus dévastateurs lorsqu'elles sont commises par un auteur cohabitant ou ayant cohabité, à quelque titre que ce soit, avec la victime.
Mais la considération première qui a guidé le Gouvernement dans sa démarche et l'a amené à regarder les violences dont s'agit comme particulières tient à la vulnérabilité extrême des personnes qui en sont les victimes, parmi lesquelles au premier chef les femmes et les enfants, mais aussi les incapables majeurs et les personnes souffrant de handicap. La liste des faits et comportements violents analysés ci-dessous suffit à en prendre conscience. En découlent naturellement des modes de répression, de prévention, de protection ou de réparation ou encore des modalités de procédure spécifiques, ou bien des sanctions aggravées ou adaptées.
Pour bâtir ce texte, définir son champ d'application et arrêter la teneur de ses dispositions, outre celles résultant de la transposition de la proposition de loi n° 190, le Gouvernement a entendu se référer expressément aux travaux du Comité ad hoc pour prévenir et combattre la violence à l'égard des femmes et la violences domestique (C.A.H.V.I.O.).
Travaillant sous l'égide de la Direction Générale des droits de l'homme et des affaires juridiques du Conseil de l'Europe, ce Comité a rendu un premier rapport le 27 mai 2009 consacré à la détermination d'éléments pour le contenu de futurs instruments internationaux destinés à servir de référence aux législations internes des États.
De même, la Recommandation (2002)5 du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe aux Etats membres sur la protection des femmes contre la violence, adoptée le 30 avril 2002, a constitué une référence de synthèse extrêmement appréciable.
Sur cette base et comme annoncé ci-avant, le projet de loi identifie un certain nombre de comportements particulièrement violents lesquels, s'ils ne sont pas impunis à ce jour, méritent un traitement juridique particulier (I). Pour le reste, il met également en place des régimes spécifiques applicables non seulement aux victimes mais aussi aux auteurs de violence (II).
Sous le bénéfice de ces observations à caractère général, le présent projet de loi appelle les commentaires particuliers ci-après.
Du point de vue formel, le projet de loi est divisé en quatre titres :
Titre premier : Dispositions pénales
Titre II : Dispositions de procédure pénale
Titre III : Dispositions civiles
Titre IV : Dispositions diverses
Si le dernier des titres comprend diverses mesures d'ordre administratif, les trois premiers modifient les codes pénal, de procédure pénale et civil dans l'ordre de numérotation de leurs articles. Cette présentation, certes nécessitée par la logique légistique, rend cependant le texte d'un accès difficile d'où l'intérêt de la présentation plus pratique et synthétique à laquelle procèdent les développements suivants.
I. - Les faits de violence, leur répression et leur traitement juridique
Les faits de violence ciblés par le projet sont les suivants :
les violences domestiques ;
les « crimes d'honneur » ;
les mutilations sexuelles féminines ;
les mariages forcés ;
les violences domestiques
Ayant justifié la démarche qui a conduit à l'adoption de la proposition de loi n° 190, la lutte contre les violences domestiques constitue
bien évidemment le cœur du dispositif projeté.
À ce sujet, il importe tout d'abord de qualifier la notion. Ce point avait fait débat au regard de l'option qui était celle de la proposition de loi n° 190. Le parti retenu par le gouvernement, au titre des dispositions pénales du présent projet de loi, est de considérer comme violences domestiques celles perpétrées entre conjoints ou entre personnes vivant ensemble sous le même toit ou y ayant vécu durablement.
Il y a là un élément central du texte qui permet d'appréhender des violences particulières, au sens de l'article premier du projet, dès lors que la communauté de vie entre l'auteur et la victime rend celle-ci plus vulnérable. Il en est ainsi en raison, notamment, de la fréquentation quotidienne et le cas échéant de l'existence d'enfants dans le couple, ce contexte engendrant
Naturellement la crainte de représailles, voire d'une escalade dans les actes violents, et faisant donc naturellement obstacle à la dénonciation de ces crimes ou délits à l'autorité, alors même que, dans les situations les plus graves de détresse psychologique, la victime peut en venir à considérer son calvaire comme normal ou même mérité.
L'exposé des motifs de la proposition de loi n° 190 procède à une description et à une analyse précise et détaillée de ce fléau planétaire et le Gouvernement entend expressément s'y référer.
Face à ce phénomène qui prospère sur fond de lâcheté et d'abus de faiblesse, la réponse de la société doit être déterminée et intransigeante. C'est ainsi que le projet aggrave significativement la répression d'un certain nombres d'infractions de droit commun dès lors que commises entre personnes en situation de communauté de vie.
Celle-ci est présumée entre conjoints et le juge n'aura donc point à s'attacher à procéder à un examen particulier à partir du moment ou l'auteur et la victime sont engagés dans les liens du mariage.
Pour le reste, cette notion vise les personnes vivant ensemble sous le même toit hors toute considération juridique.
Peu importe en effet que le logis soit le domicile de l'un ou des protagonistes ou simplement une résidence. Peu importe également la nature de la relation les unissant ; l'infraction est effectivement caractérisée dès lors que la communauté de vie est réelle, que celle-ci unisse des ascendants ou des descendants, des parents et des enfants naturels ou adoptifs, des familles recomposées ou bien encore tout simplement des êtres cohabitant pour des motifs qui leur sont propres et dans lesquels le législateur n'a pas à entrer quant à réprimer les violences dont s'agit.
Une précision particulière doit être donnée en ce qui concerne les personnes ayant vécu durablement sous le même toit mais n'y vivant plus ensemble au moment des faits poursuivis. Il advient en effet que postérieurement à une séparation, des violences se produisent, se poursuivent ou s'intensifient.
Dans ce cas, les liens tissés lors de la période de cohabitation peuvent engendrer des situations de vulnérabilité de la victime justifiant une réponse pénale particulière dans le cadre du présent projet. Le caractère durable de la relation relèvera bien entendu de l'appréciation souveraine du juge du fond.
Ce type d'appréciation s'apparente, du point de vue de la démarche, par exemple à celle de la notion de « relation habituelle » avec une personne se livrant à la prostitution qui, selon l'article 268 du Code pénal, caractérise le proxénétisme. Le juge devra dès lors s'attacher à apprécier si le temps passé ensemble entre l'auteur et la victime de violences domestiques a été déterminant pour aggraver le traumatisme causé par des faits qui, en toute hypothèse, tombent sous le coup de la loi pénale.
Il en est notamment ainsi des menaces (article 2), des violences légères (article 8), des coups et blessures avec ou sans préméditation ou guet-apens, qu'ils aient, ou non, entraîné une maladie ou une incapacité (article 9).
Dans tous les cas où ces faits sont commis entre conjoints, personnes vivant ensemble sous le même toit ou y ayant vécu durablement, le projet, à l'instar de la proposition de loi n° 190, alourdit substantiellement les peines, soit par un doublement de la sanction prévue pour l'infraction de droit commun, soit par le maximum de ladite sanction. En outre, est prévue une aggravation supplémentaire de la peine, intégrant le cas échéant la révocation du sursis ou de la liberté d'épreuve, lorsque l'auteur n'exécute pas son obligation de réparation (article 10).
Ce dispositif est du reste également applicable aux auteurs de mutilations génitales féminines, de crimes d'honneur et de viols entre époux ou domestiques (article 12).
Il importe de souligner que l'aggravation de la sanction est indifférente à la localisation des faits dont s'agit, que ce soit à l'intérieur du logis, c'est-à-dire la violence domestique littérale, ou en tout autre lieu public ou privé. De ce point de vue, il est à noter que le projet de loi, tenant compte de la vocation touristique de la Principauté, fait désormais obligation aux hôteliers de dénoncer à l'autorité compétente les faits de violences particulières perpétrés dans leurs établissements, la répression ne pouvant épargner ceux qui viendraient à Monaco pour donner libre cours à de si funestes penchants (article 25).
Dans le même sens, le Gouvernement a intégré dans le dispositif répressif la pénalisation, prévue par la proposition de loi n° 190, de la privation, entre conjoints, de documents indispensables à la vie quotidienne tels les documents d'identité ainsi que de moyens de paiement, chéquiers, cartes de paiement ou monnaie fiduciaire, dans le but d'exercer un moyen de pression particulièrement efficace (article 16).
Pour être complet, on relèvera enfin que le projet n'évite pas de traiter de cette forme contemporaine de la servitude que constitue l'esclavage domestique.
De fait, les affaires d'esclavage domestique qui sont portées à la connaissance des services administratifs et judiciaires révèlent généralement tant une violence psychologique qui a pour objectif de soumettre et de conditionner une personne, qu'une violence physique pouvant, à l'extrême, aller jusqu'au viol et violences sexuelles.
Aussi, le Gouvernement a-t-il considéré que le présent projet de loi est lieu de compléter et d'améliorer l'arsenal répressif monégasque à l'endroit d'auteurs de faits graves, profitant là encore de la vulnérabilité de personnes méritant l'attention particulière du législateur. L'article 249-2 du Code pénal a ainsi été modifié afin de viser et de sanctionner spécifiquement toutes les formes d'esclavage domestique (article 11).
Ces nouvelles dispositions pénales permettront d'assurer une protection concrète et effective, et ce en parfaite conformité avec l'article 4 (interdiction de l'esclavage et travail forcé) de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, tel qu'interprété par la Cour de Strasbourg.
les « crimes d'honneur »
Les crimes dits d'honneur sont des actes de violence, souvent des meurtres, commis par les membres masculins d'une famille à l'encontre de ses membres féminins, lorsqu'ils sont perçus comme cause de déshonneur pour la famille tout entière.
Une femme peut ainsi être la cible d'individus au sein de sa propre famille pour des motifs divers, comprenant notamment le refus de participer à un mariage arrangé, le refus des faveurs sexuelles ou la tentative de divorce, que ce soit dans le cadre de la violence conjugale exercée par son mari ou dans un contexte avéré d'adultère.
La simple interprétation selon laquelle son comportement a « déshonoré » sa famille est suffisante pour enclencher des représailles. S'ils peuvent être causés par un fait tout à fait anodin, les actes criminels ou délictueux perpétrés au nom de l'honneur peuvent être des plus atroces : défigurations à l'acide, immolations, enterrement de personnes vivantes, tortures, etc.
Le Fond des Nations Unies pour la Population (F.N.U.A.P.) chiffre à 5.000 par année les victimes dans le monde de crimes d'honneur et la communauté internationale organisée s'est naturellement mobilisée contre ces pratiques d'un autre âge. C'est ainsi que le Secrétaire Général des Nations Unies Kofi ANNAN déclarait le 5 juin 2000 : « on a assisté à une mobilisation à l'échelle mondiale contre les pratiques traditionnelles néfastes, par exemple ce que l'on appelle « crimes d'honneur » et qu'il me paraît plus juste d'appeler crimes honteux ».
Dans ce sillon, l'Assemblée Générale adoptait le 31 janvier 2001 une résolution 55/66 intitulée « Mesures à prendre en vue d'éliminer les crimes d'honneur commis contre les femmes », ces crimes étant tout récemment encore mis en cause dans un rapport de l'O.N.U. publié le 20 juillet 2009.
L'Europe occidentale n'est pas à l'abri de ce fléau ainsi que le rappelait le 14 mai dernier un membre de l'Assemblée Parlementaire du Conseil de l'Europe dans un rapport ayant conduit à l'adoption d'un projet de résolution intitulé « urgence à combattre les crimes dits d'honneur ».
De fait, le Conseil de l'Europe assume toute sa part dans le combat mondial contre ces actes de barbarie et la Recommandation (2002) 5 sur la protection des femmes contre la violence adoptée par le Comité des Ministres le 30 avril 2002, précitée, invite notamment les États membres à incriminer toutes violences à l'égard des femmes et des enfants commises en vertu de la coutume dite des « meurtres d'honneur ». Cette préoccupation est bien entendu partagée par le C.A.H.V.I.O.
À Monaco, aucun crime dit d'honneur n'a à ce jour heureusement pu être déploré et le droit pénal positif permettrait d'ores et déjà d'en punir d'éventuels auteurs au titre de la répression des crimes et délits contre les personnes.
Il est toutefois apparu hautement opportun au Gouvernement de consacrer une disposition particulière afin d'établir de manière incontestable que la Principauté est pleinement engagée dans le mouvement européen et mondial en vue de l'éradication des crimes dits d'honneur.
À cette fin, la technique législative est identique à celle retenue pour les violences domestiques, savoir une aggravation substantielle des peines lorsque les actes infractionnels ont été commis dans « l'intention de punir ou de réparer une inconduite prétendument liée à l'honneur » (article 9), l'adverbe « prétendument » soulignant sans conteste que l'honneur ne saurait justifier la barbarie.
les mutilations sexuelles féminines
Parmi les autres formes de violences vécues exclusivement par les femmes et les jeunes filles figurent en bonne place les mutilations sexuelles.
Celles-ci se définissent comme des interventions qui, dénuées de tout avantage pour la santé féminine, altèrent ou lèsent intentionnellement, pour des raisons non médicales, les organes génitaux de la femme provoquant ainsi de graves hémorragies, des problèmes urinaires et parfois des complications potentielles voire le décès de nouveau-nés, en sus de désastreuses séquelles psychologiques.
Les mutilations sexuelles sont dénoncées comme une violation des droits des jeunes filles et des femmes par de nombreux acteurs de la vie internationale, au premier chef dans le cadre des Nations Unies : O.M.S., U.N.I.C.E.F., F.N.U.A.P.
Encore trop répandues en Afrique, il apparaît en outre qu'en raison des flux migratoires, les mutilations sexuelles sont de plus en plus pratiquées dans les États membres du Conseil de l'Europe.
Aussi, en 2001, l'Assemblée Parlementaire a-t-elle recommandé aux États membres d'introduire une législation spécifique interdisant les mutilations sexuelles féminines, rejoignant ainsi nombre de pays africains qui ont décidé de s'attaquer à ces regrettables et inhumaines pratiques traditionnelles.
Le Comité des ministres a confirmé cette recommandation l'année suivante dans sa Recommandation (2002) 5, précitée.
Même si les annales judiciaires monégasques ne comportent présentement aucune condamnation pour des faits de cette nature, il est apparu au Gouvernement que, comme pour les crimes dits d'honneur, la Principauté se devait de participer à ce mouvement mondial.
Le fondement d'une telle démarche réside tout d'abord dans la Constitution tant au titre du respect des droits fondamentaux (article 2) que de la prohibition des traitements cruels, inhumains ou dégradants (article 20). Dans ce sillage, il est à noter qu'au plan européen, les mutilations sexuelles féminines sont regardées comme des atteintes à l'article 3 de la
Convention européenne des droits de l'homme selon laquelle « Nul ne peut être soumis à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ». Peuvent également être rappelées, à ce stade, les stipulations de l'article 24 de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989, exécutoire à Monaco depuis 1993, selon lesquelles « Les États parties prennent toutes les mesures efficaces appropriées en vue d'abolir les pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé des enfants ».
Sur cette base normative, le présent projet de loi introduit deux nouveaux articles au Code pénal portant respectivement les numéros 236-2 et 236-3.
Le premier définit l'infraction de mutilation sexuelle avec précision, savoir l'atteinte à l'intégrité des organes génitaux d'une femme, avec ou sans son consentement, par voie d'ablation, totale ou partielle, d'excision, d'insensibilisation, d'infibulation ou de toute autre pratique mutilante (article 5).
Cette définition est inspirée de la législation d'un pays africain laquelle a paru intéressante tant par la notion d'atteinte à l'intégrité des organes génitaux féminins que par la déclinaison générique des types principaux de mutilations sexuelles.
S'agissant de la répression, le parti pris par le projet tend à la criminalisation du fait de mutilation, par référence aux peines prévues par les deux derniers alinéas de l'article 236 du Code pénal.
Ainsi, celui-ci, à l'instar des violences ayant entraîné la mutilation ou la perte d'un membre ou d'un oeil, la cécité ou une autre infirmité permanente grave, est normalement puni de 5 à 10 ans de réclusion. Cependant, dans le cas où la mutilation a entraîné la mort ou si elle est pratiquée sur une mineure, ou encore dans un but purement lucratif, la réclusion est doublée et passe de 10 à 20 ans. L'alourdissement de la peine en raison de telles circonstances aggravantes figure dans d'autres législations européennes, le Code pénal belge notamment.
Pour le reste, et contrairement par exemple à la même loi belge qui incrimine également ceux qui « favorisent ou facilitent » la mutilation, le texte ne vise que la pratique de l'acte, tous ceux qui y concourent de quelque manière que ce soit s'exposant à la même condamnation que l'auteur au titre de la complicité, ce en vertu des articles 41 et 42 du Code pénal.
Est en revanche moindrement puni celui ou celle qui, informé de la préparation d'une mutilation sexuelle, s'abstient sciemment d'agir afin d'empêcher l'irréparable (article 6). Le dispositif projeté entend ainsi, à l'écoute là encore d'autres législations et déclinant le principe général inscrit à l'article 279 du Code pénal, tenir compte du fait que ces détestables pratiques sont bien souvent perpétrées au sein d'un groupe familial élargi dont il importe de briser l'omerta sans pour autant criminaliser le silence coupable, les peines correctionnelles étant dans ce cas 6 mois à 3 ans d'emprisonnement et/ou 9.000 à 18.000 euros d'amende.
Afin d'éviter toute contestation sur le plan de la responsabilité médicale, le projet exclut expressément du champ d'application de la répression les actes pratiqués par des médecins ou chirurgiens sur les organes génitaux féminins, dans le respect des règles de toute nature applicables à la profession. Cette précaution se retrouve dans d'autres législations, notamment en Afrique.
Suivant notamment les recommandations du C.A.H.V.I.O., le texte s'attache par ailleurs, dans l'intérêt de la victime, à la facilitation des poursuites.
À cette fin et s'inspirant de l'article 226-14 du Code pénal français, il délie, en premier lieu, du secret professionnel le médecin qui, avec l'accord de la victime, informe l'autorité judiciaire d'atteintes à l'intégrité d'organes génitaux féminins ; de même pour la personne, quelle que soit sa qualité, qui a eu connaissance de tels sévices infligés à un mineur ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique et ce, sans condition de consentement (article 15). Ces révélations ne peuvent en outre donner lieu ni à sanction disciplinaire, ni à sanction professionnelle à raison des règles statutaires ou autres gouvernant l'activité des intéressés.
En second lieu, tenant compte de ce que les mutilations des organes génitaux sont souvent pratiquées sur des mineures, le projet modifie une disposition édictée par la Loi n° 1.344 du 26 décembre 2007 relative au renforcement de la répression des crimes et délits contre l'enfant à l'effet d'adjoindre ces atteintes à la liste des crimes, énoncée à l'article 13 bis du Code de procédure pénale, pour lesquelles la prescription des poursuites de vingt ans commence à courir à compter de la majorité de la victime (article 20).
Considérant enfin que les mutilations sont parfois pratiquées, à l'occasion d'un déplacement dans le pays d'origine de leur famille, pour des vacances par exemple, sur des mineures résidant usuellement en Europe, le projet, à l'instar de l'article 222-16-2 du Code pénal français, ouvre la possibilité dérogatoire de poursuivre les faits incriminés à Monaco (article 7).
Le viol
La proposition de loi n° 190 a opportunément projeté de compléter l'article 262 du Code pénal aux fins de définir l'incrimination de viol. Celui-ci sera désormais constitué en cas pénétration sexuelle non consentie, de quelque nature qu'elle soit (article 12).
Une telle précision apportée à notre droit pénal s'avère à l'évidence être un progrès au regard du principe de la légalité des crimes, des délits et des peines, tout comme la mention de la possibilité de viol entre époux, avec une attention particulière portée au caractère effectif de la réparation allouée aux victimes (article 10, cf. supra).
Le Gouvernement a en outre souhaité parfaire cette définition en y ajoutant un alinéa spécifique traitant de la douloureuse question de l'inceste. Celle-ci a récemment fait l'objet, dans le pays voisin, d'une proposition de loi émanant de députés de toutes tendances politiques. Après avoir indiqué que ce fléau aurait touché plus de 3% de la population française, savoir plus de 2 millions de personnes, l'exposé des motifs de ce texte précise que selon les praticiens, l'inceste serait un facteur majeur de tentatives de suicide, d'addictions aux stupéfiants et à l'alcool, de troubles de la personnalité, de comportements à risque dont l'anorexie et d'autres psychopathologies, de l'échec scolaire, professionnel et relationnel ainsi que de l'exclusion sociale (cf. Proposition de loi n° 1.538 enregistrée à la présidence de l'Assemblée Nationale le 18 mars 2009).
C'est pourquoi, en s'inspirant de la proposition de loi française précitée, un troisième alinéa nouveau a été inséré à l'article 262 du Code pénal afin d'incriminer comme viol toute relation sexuelle avec un mineur, sans considération d'âge ou de consentement, dès lors que l'adulte qui en est l'auteur appartient à la famille biologique ou adoptive de la victime.
Le viol incestueux sera désormais puni comme le viol perpétré sur un mineur de moins de seize ans, les deux infractions étant de nature à se recouper, savoir par le maximum de la réclusion à temps (vingt ans).
Pour le reste, la teneur des dispositions de la proposition de loi française précitée relatives à la formation des personnels et des interlocuteurs concernés, à la prévention et à l'information ainsi qu'à l'accompagnement des victimes se retrouve dans les dispositions diverses du projet in fine (articles 42 et 43).
En revanche, il n'a pas été jugé utile de modifier parallèlement le régime de l'attentat à la pudeur. Il a en effet été considéré que la circonstance aggravante prévue par l'article 264 du Code pénal pour les auteurs « de la classe de ceux qui ont autorité » sur la victime d'un attentat à la pudeur incestueux permet de viser, outre les ascendants, expressément cités par ailleurs, les personnes énoncées aux chiffres 2° à 4° du nouvel article 262, ce sans préjudice des modifications des articles 265 et 266 auxquelles il a été procédé en 2007.
le harcèlement
La notion de violence particulière telle que définie ab initio ne saurait comprendre uniquement des violences physiques.
Outre l'évidence d'un tel point de vue, il appert en effet que l'extension du concept aux aspects psychiques ou psychologiques figure dans la plupart des textes européens et internationaux précités et dans bien d'autres comme, par exemple, la Déclaration des Nations Unies sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes de 1993.
Aussi, avec la création d'un nouvel article 236-1 du Code pénal, le projet introduit-il dans le droit monégasque la notion de harcèlement laquelle en était absente jusqu'alors (article 4).
De fait, le repérage du harcèlement est particulièrement difficile dans la mesure où, contrairement aux violences physiques, il ne laisse pas de trace aisément identifiable et médicalement objectivable.
Un choc émotionnel peut certes constituer l'élément matériel des violences. Il est néanmoins nécessaire de fixer les limites de ces traumatismes en ce sens que le comportement à incriminer doit avoir provoqué un minimum de perturbation émotive.
Tel peut être le cas des menaces, prévues aux articles 230 à 234 et à l'article 249-2 du Code pénal, en ce qu'elles peuvent être constituées sans violence physique, mais elles sont cependant insuffisantes pour caractériser le harcèlement.
En effet, ces infractions ne prennent pas en compte la diversité des faits ou ne peuvent s'appliquer à la sphère domestique. Or il apparaît essentiel de punir le harcèlement au moins pour deux raisons : tout d'abord parce qu'il est souvent la première étape conduisant à des violences physiques, et ensuite parce que le nommer et en faire un délit permettra aux personnes concernées de prendre conscience de leur statut de victime.
La définition retenue dans la rédaction du nouvel article 236-1 du Code pénal permet de prendre en compte l'ensemble des personnes pouvant être concernées par cette violence et en mentionne l'objectif. Sont ainsi visés la dégradation des conditions de vie et de travail, l'atteinte aux droits et à la dignité, l'altération de la santé physique et mentale et le fait de compromettre l'avenir et les projets de la victime.
La démarche retenue pour la rédaction de cet article ne consiste donc pas dans l'énumération des manifestations de ces violences, car la liste eut été trop longue sans pouvoir être exhaustive, d'autant plus que l'évolution constante des techniques est susceptible de créer des nouvelles manifestations de violences qui ne seront pas reconnues.
Une définition synthétique s'inspirant de la définition du harcèlement moral retenue dans le pays voisin à l'article 222-33-2 de son Code pénal a, en conséquence, été adoptée.
Le premier alinéa de l'article 236-1 du Code pénal concerne donc, de manière générale, toute personne pouvant être soumise à ces agissements, afin de pouvoir incriminer ce type de comportement dans toutes les sphères d'application possibles ; le deuxième alinéa, quant à lui, concerne spécifiquement la sphère domestique, et permet ainsi de sanctionner plus lourdement l'auteur du délit lorsque celui-ci intervient envers les personnes partageant ou ayant partagé avec lui un même toit.
les mariages forcés
La lutte contre les mariages forcés s'inscrit dans la politique de lutte contre les violences à l'égard des femmes notamment menée par le Conseil de l'Europe.
Ainsi, le mariage forcé est expressément cité comme un acte de violence envers les femmes par la Recommandation (2002) 5 du Comité des Ministres sur la protection des femmes contre la violence, précitée.
Comme pour les mutilations génitales sexuelles, le phénomène des mariages forcés a pris une dimension nouvelle du fait de la mondialisation des flux de population.
Là encore, si les différentes cultures et traditions méritent le respect, ne peut être admise, dans un État de droit, cette forme de violence particulière et dévastatrice faite aux femmes qui tend à les priver d'une liberté consubstantielle à la dignité humaine, celle de contracter – ou de ne pas contracter – mariage.
Certes, la Principauté n'est pas présentement démunie, de jure, pour faire face à un phénomène qui n'apparaît pas a priori l'avoir réellement touchée à ce jour. Mais il est essentiel, aux yeux du Gouvernement, que notre arsenal législatif soit, dans le sillon des standards européens, affiné de manière à apporter une réponse exemplaire propre à décourager les tentatives de contrainte au mariage qui croiraient pouvoir trouver à Monaco une place complaisante.
À cette fin, le présent projet modifie certaines dispositions du Code civil afférentes au mariage, notamment celle concernant l'âge minimum légal du mariage qui est porté à 18 ans pour la femme, ce qui permet, incidemment, d'unifier l'âge requis et donc de mettre fin à une discrimination fondée sur le sexe (article 34).
Ce relèvement de l'âge pour se marier, afin de le faire correspondre à celui de la majorité, entre dans le cadre de la politique de lutte contre les mariages forcés, traités comme « mariages précoces » dans la Recommandation (2002) 5 précitée, et satisfait aussi à l'un des desiderata de l'étude précitée du Conseil de l'Europe, à laquelle la plupart des États membres satisfont déjà, la France s'y étant par exemple conformée avec la loi n° 2006-399 du 4 avril 2006.
Cependant, à l'instar de dispositifs similaires existant dans de nombreux autres États membres, il sera toujours loisible au Prince d'accorder une dispense d'âge pour motifs graves.
Néanmoins, cette dérogation ne pourra désormais être octroyée que si le mineur est au moins âgé de seize ans, âge en deçà duquel il ne peut être réputé capable de consentir en toute maturité, connaissance de cause et indépendance au mariage.
Ces dispositions relatives à l'âge sont déplacées par le projet de loi de l'article 117 vers l'article 116 du Code civil, l'article 117 recelant à présent celles sur la nécessité du consentement au mariage auparavant situées à l'article 116 (article 35).
Cette interversion vise à souligner le fait que le consentement est à lui seul insuffisant à assurer la validité du mariage si l'intéressé n'a pas l'âge légal ou ne bénéficie pas d'une dispense d'âge.
Dans le même sens, le projet de loi reprend à l'article 117 du Code civil la règle fondamentale selon laquelle il ne peut y avoir mariage sans consentement et, il enrichit l'article 51 du Code civil d'un nouvel alinéa, essentiellement afin de clarifier la chronologie des formalités préalables à la célébration du mariage et, surtout pour conférer à l'officier de l'état civil le pouvoir de s'assurer, en procédant à une audition s'il l'estime nécessaire, de l'existence et de l'intégrité du consentement au mariage de chacun des futurs époux (article 33).
Le présent projet fixe et encadre de surcroît, dans un nouvel article 136-1 du Code civil, les pouvoirs de l'officier de l'état civil lorsque, à la suite notamment de l'audition des futurs époux, des indices sérieux lui permettent de présumer que le mariage projeté est susceptible d'annulation en raison d'une absence de consentement au mariage ou d'une violence viciant le consentement d'au moins l'un des époux (article 36).
Ainsi, s'il acquiert cette présomption, l'officier a l'obligation de ne pas procéder à la publication des bans ou, en cas de dispense, à la célébration du mariage. Son refus, motivé, doit être notifié aux intéressés par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postal et il doit en informer le procureur général.
Enfin, le présent projet de loi réécrit pour partie les articles 148 à 151 du Code civil afin de mieux distinguer les cas d'absence et de vice du consentement et de préciser les délais pour agir en nullité (articles 37 à 40).
Ainsi, alors que l'article 148 du Code évoquait tout à la fois la question de l'existence et de l'intégrité du consentement, il ne vise plus désormais que son intégrité, tout en distinguant clairement entre les deux vices du consentement traditionnellement retenus comme cause de nullité du mariage.
S'agissant de la violence, le mariage encourt dorénavant la nullité même lorsque la contrainte résulte d'une crainte révérencielle envers autrui, et notamment un ascendant, afin de faire échec à l'application de l'article 969 du Code qui, régissant le droit commun des vices du consentement, l'écarte expressément.
Toujours dans une optique de protection des victimes de mariage forcé, le projet permet au procureur général d'exercer l'action en nullité du mariage lorsque le consentement de la victime a été vicié par violence.
Le projet de loi abroge par ailleurs l'article 149 du Code civil, qui prévoyait spécifiquement les conditions d'exercice de l'action en nullité lorsque le mariage était célébré malgré le non respect de l'âge légal requis, puisqu'il regroupe à l'article 151 du Code tous les cas de nullité absolue du mariage.
Le texte modifie également la durée du délai de prescription de l'action en nullité fondée sur la violation des règles relatives au consentement des parents, qui demeure nécessaire lorsque le Prince accorde une dispense d'âge pour motifs graves. Ce délai est porté comme précédemment de six mois à cinq ans.
Le présent projet modifie de surcroît le premier alinéa de l'article 151 du Code civil qui vise les cas de nullité absolue en y intégrant l'absence de consentement et le non respect de l'âge légal, jusqu'alors respectivement prévus par les articles 148 et 149 du Code.
Il prévoit aussi expressément que l'action se prescrit par 30 ans et supprime la limite imposée au procureur général qui ne pouvait agir que du vivant des époux.
Enfin, au titre des mesures pénales et compte tenu de la gravité de l'atteinte aux droits fondamentaux de la personne que constitue le mariage forcé, le dispositif le correctionnalise en le sanctionnant en particulier d'une peine de trois à cinq ans d'emprisonnement (article 14).
II - Les victimes et les auteurs de violence, régimes spécifiques
Les régimes spécifiques mis en place par le présent projet s'adressent en premier lieu aux victimes auxquelles il importe d'apporter assistance et protection.
protection des victimes
Nombre d'instruments internationaux précités préconisent la mise en place de mesures adaptées à l'effet de soustraire les victimes de violences particulières à l'emprise de leurs bourreaux. C'est ainsi que le C.A.V.H.I.O. recommande la possibilité, pour l'autorité judiciaire, de prononcer des décisions de protection des victimes interdisant notamment aux auteurs d'entrer en relation avec elles ou de paraître en certains lieux.
En effet, le simple fait d'un contact avec l'auteur, fut-il simplement visuel ou électronique, peut, du fait du stress voire de la terreur en résultant, avoir pour conséquence une ggravation substantielle du traumatisme causé par un fait de violence particulière donnant lieu à des suites judiciaires. En outre, ce contact peut être suscité par l'intention d'amener la victime à abandonner ses poursuites ou ses démarches en vue de mettre un terme auxdites violences.
Aussi, le présent projet de loi confère-t-il à l'autorité judiciaire la possibilité de prononcer, à l'encontre des auteurs, sous peine d'un emprisonnement d'un à six mois et d'une amende de 9 à 18.000 € :
1°) l'interdiction, pour une durée déterminée, d'entrer, par quelque moyen que ce soit, y compris les communications électroniques, en relation avec les victimes ;
2°) l'interdiction pour une durée déterminée, de paraître en certains lieux.
Ce libellé donne toute latitude au juge de pouvoir prendre une décision correspondant aux besoins et à la situation des victimes concernées. Ainsi, l'auteur pourra se voir prohiber de paraître aux abords d'écoles, gymnases et tous autres lieux de travail, de loisir ou de vie, incluant bien entendu leur domicile, fréquentés par ceux ou celles qu'il a violentés.
Cette interdiction est déclinée tout au long des différentes phases procédurales susceptibles d'être consécutives à des faits de violences et plus particulièrement :
comme mesure d'urgence prise par le procureur au stade de l'enquête préliminaire, à charge pour celui-ci de solliciter, dans les quarante-huit heures, une ordonnance de protection de la part du Président du Tribunal de Première Instance (article 21) ;
comme mesure prise par le juge d'instruction à l'effet de mettre les victimes à l'abri pendant la durée de l'information (article 26), y compris dans le cadre du contrôle judiciaire (article 29) ;
comme peine complémentaire à une condamnation principale (article premier).
Compte tenu de l'entrave que la mesure de protection met à l'exercice de droits fondamentaux de la personne qui en fait l'objet (liberté d'aller et de venir, droit à la vie privée et familiale…), la compétence pour la prononcer revient naturellement au juge du siège sauf le cas de l'urgence permettant l'intervention du Parquet Général mais pour une durée très limitée, confirmation étant requise de la part du Président du Tribunal de Première Instance.
La mesure étant de durée déterminée, la victime dispose également du droit de solliciter de la juridiction compétente une prorogation dès lors qu'elle établirait que les circonstances ayant justifié le prononcé de la décision initiale persistent (article 31).
Le Président du Tribunal de Première Instance, s'il peut être saisi par le Procureur Général (cf. supra), peut également l'être par la victime ou, avec son accord, par une association ayant statutairement vocation à la défendre (article 32).
Du reste sur un plan plus général, le projet introduit avec la création de l'article 2-1 du Code de procédure pénale, une innovation notable dans la procédure pénale monégasque : la possibilité pour une association régulièrement déclarée et dont l'objet statutaire le permet, de se substituer à la victime pour l'exercice de ses droits. Cette disposition répond au paragraphe 38 de la recommandation (2002) 5, précitée, qui incite les États membres « à assurer la possibilité d'ester en justice à toutes les victimes de violences ainsi que, le cas échéant, aux organisations publiques ou privées de défense des victimes, dotées de la personnalité juridique, soit conjointement, soit à leur place. »
À cette fin le principe général selon lequel l'action en réparation du préjudice subi n'appartient qu'à la victime a été modifié afin d'ouvrir la possibilité d'un tel soutien associatif (articles 18 et 19).
Le magistrat, en sus des interdictions précitées, se voit également reconnaître par le dispositif la possibilité de régler des questions connexes mais essentielles tenant au logement familial, à l'exercice de l'autorité parentale ainsi qu'à la contribution aux charges du mariage (article 32).
Toujours dans un objectif de protection, le texte s'attache à mieux encadrer le droit de visite et d'hébergement dans des situations douloureuses en prévoyant que son exercice ne peut être refusé à l'un des père et mère que pour des motifs graves. Lorsque la continuité et l'effectivité des liens de l'enfant avec ce parent l'exigent, le tribunal de première instance peut suspendre l'exercice du droit d'hébergement et organiser le droit de visite dans un espace ad hoc assorti de mesures de soutien psychologique et de sécurité nécessaires (article 41).
Dans le cadre plus spécifique de la procédure pénale, il est à noter que le dispositif du présent projet s'attache à l'accompagnement de la victime dès la phase d'enquête et d'instruction en permettant soit au Procureur Général, soit au juge d'instruction, de faire procéder à une expertise médico-psychologique de manière à déterminer la nature du préjudice subi et la nécessité de mettre en oeuvre un programme de soins appropriés (articles 22 et 28).
Mais une réelle politique de protection suppose également, en particulier dans un contexte où la victime est soumise à la pression du milieu familial ou proche, que celle-ci puisse prendre conscience que son sort n'est pas inéluctable parce qu'il peut y être mis un terme et qu'elle dispose de droits.
Ainsi, une simple brochure d'information sur les violences domestiques trouvée chez un médecin ou dans une administration publique peut constituer un déclic susceptible d'amener la victime à agir pour mettre fin à son calvaire.
C'est pourquoi les standards internationaux accordent une place substantielle à la question de l'information. Parmi ceux-ci, peut être cité le point n° 26 de la recommandation (2002) 5, précitée, du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe selon lequel les États membres devraient diffuser des documents ciblant plus particulièrement les victimes afin de les informer de manière claire et compréhensible de leurs droits, des services dont elles peuvent bénéficier et des actions qu'elles peuvent envisager d'entreprendre, qu'elles portent plainte ou non, ainsi que des possibilités de bénéficier d'un soutien psychologique, médical et social ainsi que d'une assistance juridique.
La proposition de loi n° 190 n'avait du reste pas ignoré cette problématique puisque tel était l'objet de son article 13 dont la teneur se retrouve dans le projet (article 42).
Pour les mêmes raisons, il importe également que les victimes puissent disposer d'interlocuteurs qualifiés. Là encore, les standards internationaux recommandent que les professionnels qui travaillent sur le sujet puissent être formés de manière optimale à l'effet d'être à même de fournir aux victimes l'assistance la plus performante et adaptée à leur situation, compte tenu en particulier de la détresse psychologique qui est la leur.
Ainsi, à l'instar de l'article 14 de la proposition de loi n° 190, le dispositif projeté prévoit une formation spécifique pour tous les professionnels appelés à connaître de violences, qu'ils appartiennent à la justice, à la police, au corps médical ou à celui des travailleurs sociaux (article 43).
Notons enfin que la prévention des violences, objet du présent projet, passe aussi par l'éducation. À ce titre, il paraît utile au Gouvernement de citer l'extrait suivant du rapport du C.A.V.H.I.O. :
« Les activités éducatives devraient s'adresser à tous les membres de la société afin qu'ils assimilent une règle fondamentale dans une société civile selon laquelle tout être humain a le droit de vivre libre de toute forme de violence et que toute atteinte à ce principe constitue une violation des droits de l'Homme et un crime. Le respect entre les filles et les garçons et le principe de l'égalité entre les femmes et les hommes devraient être insérés dans les programmes éducatifs officiels et périscolaires ».
Cet objectif sera assuré par le projet de loi (article 42) lequel réitère, là encore, une disposition de la proposition de loi n° 190, et plus particulièrement son article 15.
des dispositions procédurales spécifiques aux mineurs et aux majeurs incapables
Comme rappelé à de nombreuses reprises, les enfants figurent au premier chef parmi les victimes de violences objet du présent projet. Or, le développement des nouvelles technologies permet désormais à des délinquants particulièrement vicieux et ingénieux d'utiliser des moyens électroniques à l'effet d'entrer en contact avec des mineurs en vue de les séquestrer et d'accomplir des actes particulièrement odieux, pédophilie et pédo-pornographie en particulier.
La gravité de ces atteintes aux conséquences irréparables et la nature des moyens technologiques mis en œuvre nécessitent une réponse adaptée de la part des autorités judiciaire et policière. C'est pourquoi le texte permet aux investigateurs, dans la phase de l'enquête préliminaire comme de l'instruction, d'entrer en contact, sous des pseudonymes, avec des auteurs d'infractions présumées de manière à pouvoir les confondre (articles 24 et 27).
Par ailleurs, le projet s'attache également à dispenser aux mineurs, victimes de violences, le meilleur traitement en termes de procédure pénale. À cet égard, il peut être rappelé que le C.A.V.H.I.O. préconise l'instauration ou le renforcement des conditions particulières d'audition des victimes ou des témoins, en particulier lorsqu'il s'agit d'enfants, afin qu'elle ne soit pas vécue comme une humiliation supplémentaire. À cette fin, le projet (article 30) met en place, au sein d'un nouveau titre du Livre premier du Code de procédure pénale, un train de mesures également applicables aux majeurs incapables.
Deux dispositions méritent plus spécifiquement d'être signalées.
La première, figurant au nouvel article 268-1 du Code de procédure pénale, tend à l'assistance obligatoire de la victime par un avocat lors de son audition par le juge d'instruction. Dans ce rôle plutôt inhabituel dès lors que le défenseur assiste généralement l'inculpé ou le prévenu, l'avocat exercera une mission de conseil et de protection à l'égard de justiciables qui, plus que d'autres, en ont particulièrement besoin en raison de leur vulnérabilité.
En outre, le Procureur Général et le juge d'instruction se voient reconnaître compétence pour prescrire la présence d'un psychologue ou d'un médecin, voire d'un membre de la famille du mineur victime, lors de ses auditions, notamment celle de confrontation avec les auteurs présumés.
La seconde, objet d'un nouvel article 268-4 du même Code, donne pouvoir au Procureur Général de désigner, pour les besoins de la protection des intérêts du mineur ou de l'incapable au cours de la procédure, consécutive aux faits dont il est la victime, un administrateur ad hoc, ce à l'effet de palier les carences de sa représentation légale.
traitement des coupables et prévention
Ainsi que le relève justement le C.A.H.V.I.O, les programmes destinés aux auteurs de violences visant à promouvoir les comportements non violents constituent une contribution importante à la politique de prévention.
Le Gouvernement, bien qu'adhérant pleinement à la thèse selon laquelle « la mise en place de soins adaptés constitue une dimension essentielle d'une politique de réinsertion et, partant, de la lutte contre la récidive », n'a pas estimé pouvoir reprendre ne varietur, dans le texte, les dispositions de la proposition de loi n° 190 relatives à l'injonction de soins.
Le champ d'application optimal d'une telle mesure s'avère en effet être plus vaste que celui des violences particulières, objet du présent projet de loi, dès lors qu'il est souhaitable que le suivi socio-judiciaire, dans le cadre duquel l'injonction de soins pourra être prononcée, concerne toutes personnes pour lesquelles il serait bénéfique, quand bien même ne seraient-elles pas forcément coupables de violences envers autrui (personnes suicidaires ou toxicomanes par exemple).
Restant dans le domaine médical, le texte vise à permettre aux officiers de police judiciaire, agissant sur les directives du Procureur Général ou du Juge d'instruction, de faire procéder sur des personnes soupçonnées d'avoir commis des violences sexuelles à des examens destinés à s'assurer, dans leur intérêt et dans celui de leurs victimes, de ce qu'ils sont, ou non, atteints de maladies sexuellement transmissibles (article 23).
En ce qui concerne plus spécifiquement la prévention – qu'il s'agisse de récidives ou de premières infractions – le texte (article 15), satisfaisant aux recommandations internationales qui incitent les législateurs nationaux à autoriser la levée du secret professionnel à l'effet de mettre les autorités compétentes à même d'avoir connaissance de situations de violences avérées ou potentielles, transpose dans notre droit la teneur de l'article 222-16-2 du Code pénal français, déjà cité au sujet des mutilations génitales féminines, à l'effet de permettre :
au médecin qui, avec l'accord de la victime, porte à la connaissance du procureur général les sévices ou privations qu'il a constatés dans l'exercice de sa profession, en particulier lorsque la victime est un mineur ou une personne qui n'est pas en mesure de se protéger ;
aux professionnels de la santé ou de l'action sociale qui informent l'autorité administrative de la dangerosité de personnes qui les consultent à raison d'une détention d'armes.
Un tel complément a paru au Gouvernement s'inscrire pleinement dans la thématique des dispositions projetées Le Gouvernement enfin n'a pas estimé devoir transposer, dans le corps du projet, les dispositions de la proposition de loi n° 190 imposant l'établissement d'un rapport triennal sur l'évolution de la situation des violences domestiques à Monaco portant entre autres sur la politique nationale de lutte contre ces violences, les conditions d'accueil, de soin et d'hébergement des victimes, leur réinsertion sociale, les modalités de la prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique, l'état des actions de prévention et d'information ainsi que l'application effective de la législation en vigueur.
La raison de ce choix tient à ce qu'existent d'ores et déjà nombre de supports d'information pertinents sur les politiques publiques, en l'occurrence en matière pénale et sociale, tant en direction des administrés que même d'organisations internationales. Il est bien entendu souligné que l'absence de disposition législative sur le sujet ne fait pas obstacle à ce que des actions d'information ciblées soient mises en oeuvre par les services compétents.
Tel est l'objet du présent projet de loi.
Dispositif🔗
Article préliminaire🔗
La présente loi a pour objet la lutte et la prévention de violences nécessitant ou justifiant des modes de répression ou de réparation spécifiques ou bien des sanctions aggravées ou adaptées, ce à raison de la vulnérabilité particulière des personnes qui en sont les victimes ou des situations dans lesquelles lesdites violences sont perpétrées.
Il en est notamment ainsi de toute forme de violence ou de menaces de violence, physique, psychique, sexuelle ou économique exercée par des personnes partageant ou ayant partagé une communauté de toit avec la victime.
Titre premier - Dispositions pénales🔗
Article 1er🔗
Est inséré au Code pénal un article 37-1 rédigé comme suit :
« Les coupables d'infractions prévues aux articles 230 à 234-1, 236 à 236-3, 237 à 239, 243 à 245 et 262 du Code pénal encourent les peines complémentaires suivantes :
1°) l'interdiction, pour une durée déterminée, d'entrer, par quelque moyen que ce soit, y compris les communications électroniques, en relation avec les victimes ;
2°) l'interdiction pour une durée déterminée, de paraître en certains lieux.
Le fait d'enfreindre sciemment l'une des interdictions mentionnée au précédent alinéa est puni d'une peine d'emprisonnement d'un à six mois et de l'amende prévue au chiffre 3 de l'article 26, ou de l'une de ces deux peines seulement. »
Article 2🔗
Est inséré dans le Code pénal un article 234-1 ainsi rédigé :
« Lorsque les menaces prévues aux articles 230 à 234 auront été proférées à l'encontre du conjoint de l'auteur ou bien de toute autre personne vivant avec lui sous le même toit ou y ayant vécu durablement, elles seront punies du double de la peine prévue auxdits articles. »
Article 3🔗
Le premier alinéa de l'article 236 du Code pénal est modifié comme suit :
« Tout individu qui, volontairement, aura occasionné des blessures ou porté des coups ou commis toute autre violence ou voie de fait, s'il en est résulté une maladie ou une incapacité temporaire de travail d'une durée excédant huit jours, sera puni d'un emprisonnement de un à cinq ans et de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26. »
Article 4🔗
Est inséré au Code pénal un article 236-1 rédigé comme suit :
« Le fait de soumettre toute personne à des agissements ou paroles répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de vie susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre ses projets et son avenir est puni de trois mois à un an d'emprisonnement et de l'amende prévue au chiffre 3 de l'article 26.
Le coupable qui a commis l'infraction envers son conjoint, ou bien envers toute autre personne vivant avec lui sous le même toit ou y ayant vécu durablement, est puni de un à trois ans d'emprisonnement et de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26. »
Article 5🔗
Est inséré au Code pénal un article 236-2 rédigé comme suit :
« Sera puni de la peine prévue au deuxième alinéa de l'article 236, quiconque aura pratiqué une atteinte à l'intégrité des organes génitaux d'une personne de sexe féminin, avec ou sans le consentement de cette dernière, par voie d'ablation, totale ou partielle, d'excision, d'insensibilisation, d'infibulation ou de toute autre pratique.
Lorsqu'une telle atteinte, pratiquée sans intention de donner la mort, l'aura néanmoins entraînée, la peine sera celle prévue au troisième alinéa de l'article 236. Il en sera de même si l'atteinte est pratiquée sur une mineure ou dans un but lucratif.
Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux interventions sur des organes génitaux féminins pratiquées conformément à la loi ainsi qu'aux règles professionnelles et aux principes déontologiques gouvernant les activités pharmaceutiques, médicales et chirurgicales. »
Article 6🔗
Est inséré au Code pénal un article 236-3 rédigé comme suit :
« Dès lors qu'elle est en mesure d'intervenir sans risque pour elle ou pour des tiers, toute personne qui, informée de la préparation d'une atteinte à l'intégrité des organes génitaux féminins sanctionnée conformément à l'article précédent, s'abstient volontairement d'agir afin d'empêcher que ladite atteinte soit pratiquée, sera punie des peines prévues à l'article 279 ».
Article 7🔗
Est inséré au Code pénal un article 236-4 rédigé comme suit :
« Les peines encourues en vertu des deux articles précédents sont applicables aux auteurs de crimes et délits prévus par ces articles lorsqu'ils ont été commis à l'étranger sur une victime mineure résidant habituellement dans la Principauté ».
Article 8🔗
Est inséré dans le Code pénal un article 238-1 rédigé comme suit :
« Tout individu qui a commis des violences légères sur son conjoint ou bien sur toute autre personne vivant avec lui sous le même toit ou y ayant vécu durablement, sera puni d'un emprisonnement de six mois à un an et de l'amende prévue au chiffre 2 de l'article 26. »
Article 9🔗
L'article 239 du Code pénal est modifié comme suit :
« Dans les cas énoncés par les articles 236, 236-2, 237 et 238 le coupable qui a commis l'infraction envers son conjoint ou bien envers toute autre personne vivant avec lui sous le même toit ou y ayant vécu durablement, est puni :
du maximum de la réclusion, si l'article prévoit la réclusion de dix à vingt ans ;
de la réclusion de dix à vingt ans, si l'article prévoit la réclusion de cinq à dix ans ;
d'un emprisonnement de dix ans, si l'article prévoit l'emprisonnement.
Encourt les mêmes peines le coupable qui a commis l'infraction envers toute autre personne dans l'intention de punir ou de réparer une inconduite prétendument liée à l'honneur. Il en est de même si la victime est atteinte d'un handicap physique ou mental avéré. »
Article 10🔗
Est inséré dans le Code pénal un article 239-1 rédigé comme suit :
« Dans le cadre de l'une des infractions prévues par les articles 234-1, 236-2, 238-1 et 239 et par le deuxième alinéa de l'article 236-1, la durée de l'emprisonnement et le montant de l'amende sont doublés, dans la limite du maximum de la peine encourue, ou, le cas échéant, la révocation du sursis ou de la liberté d'épreuve, lorsque l'auteur ne verse pas volontairement à la victime, dans les deux mois de leur allocation par décision de justice, les dommages et intérêts réparant le préjudice subi lors de la commission de ladite infraction.
Il en est de même en matière de viol lorsque la victime est le conjoint de l'auteur ou bien toute autre personne vivant avec lui sous le même toit ou y ayant vécu durablement. »
Article 11🔗
L'article 249-2 du Code pénal est modifié comme suit.
« Le fait d'obtenir d'une personne, dont la vulnérabilité ou l'état de dépendance sont apparents ou connus de l'auteur, la fourniture de services non rétribués ou en échange d'une rétribution manifestement sans rapport avec l'importance du travail accompli est puni de cinq ans d'emprisonnement et du double de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26.
Le fait de soumettre une personne dont la vulnérabilité ou l'état de dépendance sont apparents ou connus de l'auteur, à des conditions de travail ou d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine est puni de cinq ans d'emprisonnement et du double de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26.
L'infraction définie aux premier et deuxième alinéas est punie de sept ans d'emprisonnement et du triple de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 lorsqu'elle est commise :
1°) à l'égard de plusieurs personnes ;
2°) à l'égard d'un mineur.
Cette même infraction est punie de dix ans de réclusion et du triple de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 lorsqu'elle est commise :
1°) à l'égard de plusieurs personnes parmi lesquelles figurent un ou plusieurs mineurs ;
2°) en bande organisée. »
Article 12🔗
L'article 262 du Code pénal est remplacé par les dispositions suivantes :
« Le viol se définit comme tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit et par quelque moyen que ce soit, commis sur la personne d'autrui, par violence, contrainte, menace ou surprise.
Le viol est constitué lorsqu'il a été imposé à la victime dans les circonstances prévues par le précédent alinéa, quelle que soit la nature des relations existant entre l'agresseur et sa victime, y compris s'ils sont unis par les liens du mariage
Est en outre un viol tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit et par quelque moyen que ce soit, commis sur un mineur par :
1°) son ascendant légitime, naturel ou adoptif ;
2°) son oncle ou sa tante, légitime, naturel ou adoptif ;
3°) son frère ou sa soeur, légitime, naturel ou adoptif ;
4°) sa nièce ou son neveu, légitime, naturel ou adoptif.
Quiconque aura commis le crime de viol sera puni de la réclusion de dix à vingt ans.
Si le viol a été commis sur la personne d'un mineur au-dessous de l'âge de seize ans ou dans les conditions définies au troisième alinéa, le coupable encourra le maximum de la réclusion à temps ».
Article 13🔗
L'intitulé de la section V du chapitre premier du titre II du livre III du Code pénal « Arrestations illégales et séquestrations de personnes » est modifié comme suit :
« Section V
Des atteintes aux libertés de la personne »
Article 14🔗
Est inséré avant l'article 275 du Code pénal et au sein de cette section, un article 274-1 rédigé comme suit :
« Lorsque la nullité du mariage est prononcée sur le fondement du premier alinéa des articles 117 ou 148 du Code civil, toute personne qui par des violences ou des menaces a contraint l'un des époux à contracter ce mariage est punie de trois à cinq ans d'emprisonnement et de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26.
La tentative et la complicité sont punissables. »
Article 15🔗
Est inséré au Code pénal un article 308-1 bis rédigé comme suit :
« Outre les cas où la loi impose ou autorise la révélation d'un secret, l'article 308 n'est pas applicable :
1° à celui qui informe les autorités administratives ou judiciaires compétentes de privations ou de sévices, y compris lorsqu'il s'agit d'atteintes à l'intégrité d'organes génitaux féminins, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ;
2° au médecin qui, avec l'accord de la victime, porte à la connaissance du procureur général les sévices ou privations qu'il a constatés dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des infractions prévues aux sections II et IV du titre II du Livre III du Code pénal ont été commises ; lorsque la victime est un mineur ou une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique, son accord n'est pas nécessaire ;
3° aux professionnels de la santé ou de l'action sociale qui informent l'autorité administrative du caractère dangereux, pour elles-mêmes ou pour autrui, des personnes qui les consultent et dont ils savent qu'elles détiennent une arme ou qu'elles ont manifesté leur intention d'en acquérir une.
Le signalement aux autorités compétentes effectué dans les conditions prévues au présent article ne peut donner lieu au prononcé d'une sanction disciplinaire ou professionnelle ».
Article 16🔗
Est inséré un troisième alinéa à l'article 310 du Code pénal rédigé comme suit :
« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsque la soustraction entre époux porte sur des objets ou documents indispensables à la vie quotidienne de la victime ou des moyens de paiement donnant accès à des fonds lui appartenant. »
Article 17🔗
Le chiffre 1° de l'article 421 du Code pénal est modifié comme suit :
« 1°) Ceux qui se seront rendus coupables de violences légères, à l'exception de celles spécialement réprimées à l'article 238-1. »
Titre II - Dispositions de procédure pénale🔗
Article 18🔗
Le premier alinéa de l'article 2 du Code de procédure pénale est modifié comme suit :
« L'action pour la réparation du préjudice directement causé par un fait constituant une infraction appartient à tous ceux qui en ont personnellement souffert, sous réserves des dispositions particulières prévues à l'article suivant. »
Article 19🔗
Est inséré au Code de procédure pénale un article 2-1 rédigé comme suit :
« Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits et dont l'objet statutaire comporte la lutte contre les violences peut, avec l'accord de la victime, exercer des droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits réprimés par les articles 230 à 234-1, 236 à 236-3, 237 à 239, 243 à 245 et 262 du Code pénal. »
Article 20🔗
L'article 13 bis du Code de procédure pénale est remplacé par un article 13-1 ainsi rédigé :
« Nonobstant les dispositions des articles précédents, l'action publique relative aux crimes prévus ou réprimés par les articles 236-2, 249-1, 249-2, 261, 262, 263, 266 deuxième alinéa, 269 deuxième alinéa, 290 et 291 du Code pénal, lorsqu'ils ont été commis au préjudice d'un mineur, est prescrite après vingt années révolues à compter du jour où la victime est devenue majeure »
Article 21🔗
Est inséré au Code de procédure pénale un article 37-1 rédigé comme suit :
« Lorsqu'il est saisi, conformément à l'article 34, le procureur général peut, si l'urgence le justifie et sous les peines prévues à l'article 37-1 du Code pénal, interdire à l'auteur des faits prévus aux articles 230 à 234-1, 236 à 236-3, 237 à 239, 243 à 245 et 262 du Code pénal, d'entrer, par quelque moyen que ce soit, y compris les communications électroniques, en relation avec la victime desdits faits ou de paraître ou résider en certains lieux.
Le procureur général, après en avoir informé les intéressés, saisit dans les vingt-quatre heures le président du tribunal de première instance d'une demande d'ordonnance de protection conformément à l'article 24-1 du Code civil
La méconnaissance de cette ordonnance de protection par l'auteur est punie des mêmes peines. »
Article 22🔗
Est inséré au Code de procédure pénale un article 38-1 rédigé comme suit :
« Article 38-1 : Le Procureur Général peut ordonner, dès le stade de l'enquête, que les victimes de l'une des infractions prévues par les articles 236 à 239, 243 à 245, 261, 262 deuxième alinéa, 263 deuxième alinéa, 265, 266, 269 et 294-3 à 294-8 du Code pénal fassent l'objet d'une expertise médico-psychologique destinée à apprécier la nature du préjudice subi et à établir si celui-ci rend nécessaire des traitements ou des soins appropriés. »
Article 23🔗
Est inséré au Code de procédure pénale un article 49-1 rédigé comme suit :
« L'officier de police judiciaire, agissant au cours de l'enquête ou sur commission rogatoire, peut faire procéder sur toute personne contre laquelle il existe des indices graves ou concordants d'avoir commis un viol, une agression sexuelle ou une atteinte sexuelle prévus par les articles 261, 262 deuxième et troisième alinéas, 263 deuxième alinéa, 265, 266, 269-1 et 294-3 à 294-8 du Code pénal, à un examen médical et à une prise de sang afin de déterminer si cette personne n'est pas atteinte d'une maladie sexuellement transmissible.
Les mesures prévues au précédent alinéa ne peuvent être mises en œuvre qu'avec l'autorisation de l'intéressé sauf le cas où, à la demande de la victime ou lorsque son intérêt le justifie, des instructions écrites sont données à cette fin par le procureur général ou le juge d'instruction.
Le résultat du dépistage est porté, dans les meilleurs délais et par l'intermédiaire d'un médecin, à la connaissance de la victime ou, si celle-ci est mineure, d'une personne exerçant l'autorité parentale ou de l'administrateur ad hoc désigné conformément à l'article 268-1. »
Article 24🔗
Est inséré au Code de procédure pénale un article 49-2 rédigé comme suit :
« Dans le but de constater les infractions mentionnées aux articles 265 à 294-8 du Code pénal et, lorsque celles-ci sont commises par un moyen de communication électronique, d'en rassembler les preuves et d'en rechercher les auteurs, les officiers de police judiciaire, agissant au cours de l'enquête, peuvent procéder aux actes suivants :
1° participer sous un pseudonyme aux échanges électroniques ;
2° être en contact par ce moyen avec les personnes susceptibles d'être les auteurs de ces infractions ;
3° extraire, transmettre en réponse à une demande expresse, acquérir ou conserver des contenus illicites.
Le procès-verbal mentionne la date et l'heure à laquelle l'opération a commencé et celle à laquelle elle s'est terminée.
Les dispositions de l'article 106-10 sont applicables aux enregistrements et documents portant transcription de ces actes. »
Article 25🔗
L'article 62 du Code de procédure pénale est complété d'un second alinéa rédigé comme suit :
« Tout hôtelier qui acquiert, même en l'absence de tout signalement de la part de la victime, la connaissance d'un délit prévu aux articles 230 à 234, 236, 236-2, 238, 238-1, 239 et 249-2 du Code pénal et perpétré dans son établissement, est tenu d'en donner avis soit au Procureur Général, soit à un officier ou à un agent de police judiciaire. »
Article 26🔗
Est inséré au Code de procédure pénale un article 91-3 rédigé comme suit :
« Lorsque l'instruction porte sur l'une des infractions prévues aux articles 230 à 234-1, 236 à 236-3, 237 à 239, 243 à 245 et 262 du Code pénal, le juge d'instruction peut dans les conditions qu'il détermine et sous les peines prévues à l'article 37-1 du Code pénal, interdire à l'inculpé d'entrer, par quelque moyen que ce soit, y compris les communications électroniques, en relation avec la victime des faits ayant donné lieu à l'ouverture de l'information, ou de paraître ou résider en certains lieux. »
Article 27🔗
Est inséré au Code de procédure pénale un article 106-12 rédigé comme suit :
« Le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire commis par lui peut procéder aux actes mentionnés à l'article 49-2.
Le procès-verbal mentionne la date et l'heure à laquelle l'opération a commencé et celle à laquelle elle s'est terminée.
Les dispositions de l'article 106-10 sont applicables aux enregistrements et documents portant transcription de ces actes. »
Article 28🔗
Est inséré à l'article 107 du Code de procédure pénale un second alinéa rédigé comme suit :
« Le juge d'instruction peut également ordonner une expertise médicopsychologique dans les cas prévus à l'article 38-1 et dans les conditions fixées au précédent alinéa. »
Article 29🔗
Est inséré à l'article 182 du Code de procédure pénale un chiffre 15 rédigé comme suit :
« 15°) ne pas paraître ou résider en certains lieux ou ne pas entrer, par quelque moyen que ce soit, y compris les communications électroniques, en relation avec la victime des faits visés aux articles 230 à 234-1, 236 à 236-3, 237 à 239, 243 à 245 et 262 du Code pénal. »
Article 30🔗
Est inséré au Livre I du Code de procédure pénale un titre VIII intitulé « Dispositions particulières concernant les mineurs et les majeurs incapables » comprenant les articles suivants :
« Article 268-1 : Le Procureur Général saisi de faits commis volontairement à l'encontre d'un mineur ou d'un majeur incapable, désigne un administrateur ad hoc lorsque la protection des intérêts de celui-ci n'est pas complètement assurée par son ou ses représentants légaux.
L'administrateur ad hoc assure la protection des intérêts du mineur ou du majeur incapable et exerce, s'il y a lieu, au nom de celui-ci les droits reconnus à la partie civile.
L'administrateur ad hoc cesse ses fonctions dès lors qu'est légalement désigné un tuteur ou un curateur.
Article 268-2 : Tout mineur ou majeur incapable, victime d'une des infractions prévues par les articles 230 à 234-1, 236 à 239, 243 à 245, 249-2, 261, 262 deuxième alinéa, 263 deuxième alinéa, 265, 266, 269 et 294 à 294-8 du Code pénal, est assisté par un avocat lorsqu'il est entendu par le juge d'instruction. À défaut de désignation d'un avocat par les représentants légaux du mineur ou par l'administrateur ad hoc, le juge avise immédiatement le président du tribunal afin qu'il commette un avocat d'office.
Les dispositions des articles 168 et 169 du Code de procédure pénale sont applicables à cet avocat en cas d'auditions ultérieures.
Article 268-3: Au cours de l'enquête et de l'information, l'audition d'un mineur ou d'un majeur incapable, victime de l'une des infractions mentionnées à l'article précédent fait l'objet d'un enregistrement audiovisuel.
L'enregistrement peut être exclusivement sonore sur décision du Procureur Général ou du juge d'instruction, si l'intérêt du mineur le justifie.
Le Procureur Général, le Juge d'Instruction ou l'officier de police judiciaire chargé de l'enquête ou agissant sur commission rogatoire peut requérir toutes personnes qualifiées pour procéder à cet enregistrement.
Les dispositions de l'article 107 du Code de procédure pénale lui sont applicables, ainsi que celles de l'article 308 du Code pénal relatives au secret professionnel.
Il est par ailleurs établi une copie de l'enregistrement aux fins d'en faciliter la consultation ultérieure au cours de la procédure. Cette copie est versée au dossier. L'enregistrement original est placé sous scellés fermés. Sur décision du juge d'instruction, l'enregistrement peut être visionné ou écouté au cours de la procédure. La copie de ce dernier peut toutefois être visionnée ou écoutée par les parties, les avocats ou les experts, en présence du juge d'instruction ou d'un greffier.
Lorsque l'enregistrement ne peut être effectué en raison d'une impossibilité technique, il en est fait mention dans le procès verbal d'audition qui précise la nature de cette impossibilité. Si l'audition intervient au cours de l'enquête ou sur commission rogatoire, le Procureur Général ou le juge d'instruction en est immédiatement avisé.
Le fait pour toute personne, de diffuser un enregistrement ou une copie réalisée en application du présent article, est puni d'un an d'emprisonnement et de l'amende prévue au chiffre 3 de l'article 26 du Code pénal.
L'enregistrement et sa copie sont détruits dans le délai d'un mois à compter de la date d'extinction de l'action publique.
Article 268-4 : Au cours de l'enquête ou de l'information, les auditions ou confrontation d'un mineur victime de l'une des infractions mentionnées à l'article 37-1 du Code pénal sont réalisées sur décision du Procureur Général ou du juge d'instruction, le cas échéant à la demande du mineur ou de son représentant légal, en présence d'un psychologue ou d'un médecin spécialistes de l'enfance ou d'un membre de la famille du mineur ou de l'administrateur ad hoc. »
Article 31🔗
Sont insérés au Code de procédure pénale des articles 599-1 et 599-2 rédigés comme suit :
« Article 599-1 : La victime d'une infraction ayant entraîné une condamnation à l'une des interdictions prévues à l'article 37-1 du Code pénal peut requérir de la juridiction qui l'a prononcée une prolongation de la durée d'application de la mesure.
La requête doit être présentée dans les six mois qui précèdent le terme du délai pour lequel l'interdiction a été prononcée.
La requête est jugée en chambre du conseil, après audition du ministère public, du requérant, de la personne condamnée ou de leurs conseils, s'ils le demandent.
La décision est signifiée aux parties.
Article 599-2 : Sans préjudice des dispositions de l'article 599-1, la personne condamnée à l'une des interdictions prévues à l'article 37-1 du Code pénal peut solliciter du juge chargé de l'application des peines d'être exceptionnellement autorisée, pour un motif légitime, à entrer en relation avec la victime d'une infraction ayant entraîné la condamnation.
La décision du juge chargé de l'application des peines est motivée et peut assortir l'autorisation de conditions à respecter sous les peines prévues à l'article 37-1 du Code pénal. Elle est signifiée au demandeur et à la victime. »
Titre III - Dispositions civiles🔗
Article 32🔗
Est inséré au Code civil un article 24-1 rédigé comme suit :
« Dans les vingt-quatre heures de sa saisine, le président du tribunal de première instance peut rendre une ordonnance de protection interdisant à l'auteur des faits mentionnées aux articles 230 à 234-1, 236 à 236-3, 237 à 239, 243 à 245 et 262 du Code pénal, d'entrer, par quelque moyen que ce soit, y compris les communications électroniques, en relation avec la victime desdits faits ou de paraître ou résider en certains lieux.
Le président du tribunal de première instance ne peut être saisi que par la victime, par le procureur général lorsqu'il est saisi conformément à l'article 37-1 du Code de procédure pénale ou, avec l'accord de la victime, par une association de défense des victimes de violences.
Dans cette ordonnance, le juge peut, le cas échéant, autoriser la résidence séparée des époux et attribuer la jouissance du logement familial à la victime des violences au besoin en lui transférant, sous réserve de l'accord du bailleur et sauf si des dispositions législatives ou réglementaires ressortissant à des régimes particuliers de location y font obstacle, les droits et obligations résultant du contrat de bail. Dans ce cas, l'auteur des violences demeure soumis à toutes ses obligations contractuelles, sans pouvoir réclamer une quelconque contrepartie à la victime.
Le juge se prononce, s'il y a lieu, sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale et sur la contribution aux charges du mariage.
La durée de l'ordonnance de protection est de trente jours et peut être prorogée pour la même durée. »
Article 33🔗
L'article 51 du Code civil est complété d'un troisième alinéa rédigé comme suit :
« La publication prévue au premier alinéa ou, en cas de dispense de publication accordée conformément aux dispositions de l'article 54, la célébration du mariage est subordonnée :
à la remise des pièces exigées par l'article 55 et à la justification de l'identité de chacun des époux au moyen d'une pièce délivrée par une autorité publique ;
à l'indication des prénoms, nom, profession, âge et domicile des témoins ;
à l'audition commune des futurs époux, hors la présence de toute autre personne, par l'officier de l'état civil s'il l'estime nécessaire ; cette audition peut avoir lieu séparément, tel devant être le cas si l'un des futurs époux est mineur. »
Article 34🔗
L'article 116 du Code civil est modifié comme suit :
« L'homme et la femme ne peuvent se marier avant dix-huit ans.
Néanmoins, il est loisible au Prince d'accorder les dispenses d'âge pour motifs graves si le mineur a au moins seize ans. »
Article 35🔗
L'article 117 du Code civil est modifié comme suit :
« Il n'y a point de mariage sans consentement.
Le mariage d'un Monégasque, même contracté à l'étranger, requiert sa présence. »
Article 36🔗
Est inséré à la suite de l'article 136 du Code civil un article 136-1 rédigé comme suit :
« Lorsqu'il existe des indices sérieux laissant présumer, notamment au vu de l'audition prévue par l'article 51, que le mariage envisagé est susceptible d'être annulé au titre du premier alinéa des articles 117 ou 148, l'officier de l'état civil doit refuser de procéder à la publication prévue par l'article 51 ou, le cas échéant, à la célébration du mariage. Il notifie sans délai, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postal, son refus motivé aux intéressés. Il en informe sans délai le procureur général.
L'un ou l'autre des intéressés, même mineur, peut saisir le tribunal de première instance dans le mois suivant la présentation de ladite lettre.
Dans le mois suivant sa saisine, le tribunal de première instance doit statuer, en chambre du conseil, sur la demande. Passé ce délai, l'officier de l'état civil doit procéder au mariage.
L'officier de l'état civil qui ne se conforme pas aux prescriptions des alinéas précédents encourt la sanction prévue à l'article 42. »
Article 37🔗
Est inséré à la suite de l'article 136 du Code civil un article 136-1 rédigé comme suit :
« Lorsqu'il existe des indices sérieux laissant présumer, notamment au vu de l'audition prévue par l'article 51, que le mariage envisagé est susceptible d'être annulé au titre du premier alinéa des articles 117 ou 148, l'officier de l'état civil doit refuser de procéder à la publication prévue par l'article 51 ou, le cas échéant, à la célébration du mariage. Il notifie sans délai, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postal, son refus motivé aux intéressés. Il en informe sans délai le procureur général.
L'un ou l'autre des intéressés, même mineur, peut saisir le tribunal de première instance dans le mois suivant la présentation de ladite lettre.
Dans le mois suivant sa saisine, le tribunal de première instance doit statuer, en chambre du conseil, sur la demande. Passé ce délai, l'officier de l'état civil doit procéder au mariage.
L'officier de l'état civil qui ne se conforme pas aux prescriptions des alinéas précédents encourt la sanction prévue à l'article 42. »
Article 38🔗
L'article 149 du Code civil est abrogé.
Article 39🔗
Le deuxième alinéa de l'article 150 du Code civil est modifié comme suit :
« L'action n'est plus recevable lorsque le mariage a été expressément ou tacitement approuvé par ceux dont le consentement était nécessaire ou lorsqu'il s'est écoulé cinq années depuis qu'ils ont eu connaissance du mariage ou depuis que l'incapable a pu agir par lui-même. »
Article 40🔗
Le premier alinéa de l'article 151 du Code civil est modifié comme suit :
« L'action en nullité du mariage fondée sur les articles 116, 117, 125, 130, 131 et 147, alinéa 2, peut être exercée, dans un délai de trente ans à compter de sa célébration, par l'un des époux, par toute personne intéressée ou par le procureur général. »
Article 41🔗
Est inséré après le troisième alinéa de l'article 204-7 du Code civil deux alinéas rédigés comme suit :
« L'exercice du droit de visite et d'hébergement ne peut être refusé à l'un des père et mère que pour des motifs graves.
Lorsque la continuité et l'effectivité des liens de l'enfant avec ce parent l'exigent, le tribunal de première instance peut suspendre l'exercice du droit d'hébergement et organiser le droit de visite dans un espace de rencontre désigné à cet effet où toutes les mesures de soutien psychologique et de sécurité nécessaires seront prises. »
Titre IV - Dispositions diverses🔗
Article 42🔗
Les personnes victimes de violences visées à l'article premier ont droit à recevoir une information complète et à être conseillées en perspective de leur situation personnelle.
Les officiers et agents de police judiciaire informent oralement et par tout moyen les personnes victimes de ces violences de leur droit :
d'obtenir réparation du préjudice subi ;
de se constituer partie civile si l'action publique est mise en mouvement par le ministère public ou en citant directement l'auteur des faits devant la juridiction compétente ou en portant plainte devant le juge d'instruction ;
d'être aidées par les intervenants relevant des Services de l'État spécifiquement voués à cette mission ou par une association conventionnée d'aide aux victimes.
Ils leurs remettent en outre, à cet effet, une documentation dont le contenu est approuvé par arrêté ministériel.
L'ensemble des établissements d'hospitalisation, publics ou privés, et les cabinets médicaux sis dans la Principauté doivent disposer la documentation susmentionnée en accès libre et anonyme.
Les personnes handicapées victimes de ces violences disposent d'un droit d'accès intégral à l'information sous une forme adaptée à leur handicap.
Article 43🔗
Une formation à destination des professionnels appelés à être en contact avec des victimes de violences, notamment les magistrats, les professionnels de santé, les agents et officiers de police judiciaire, est mise en place afin de leur permettre, dans leurs domaines respectifs de compétence, de traiter au mieux la situation desdites victimes.
Les modalités de cette formation sont fixées par arrêté ministériel.
Article 44🔗
Tous les établissements scolaires dispensent, dans le cadre de la législation relative à l'enseignement, une information annuelle traitant de la prévention et de la détection précoce des violences visées à l'article préliminaire, ainsi que des actions susceptibles d'être menées en vue de venir en aide aux victimes de ces violences.
Ces séances peuvent associer les personnels contribuant à la
répression de ces violences et à l'aide aux victimes ainsi que d'autres intervenants extérieurs.