Projet de loi n° 842 relative au contrat d'apprentissage

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Exposé des motifs🔗

La politique de réforme sociale engagée par le Gouvernement Princier au lendemain de la seconde guerre mondiale connut assurément son point d'orgue en 1963 avec pas moins de sept lois adoptées en la matière.

Parmi ces textes, la loi n° 734 du 16 mars 1963 sur le contrat d'apprentissage constitua une réelle nouveauté dans le panorama législatif en venant réglementer spécialement une pratique contractuelle séculaire, couramment utilisée par les professionnels dans le cadre du droit commun.

Depuis plus de quarante ans, cette loi a permis d'assurer la formation de jeunes personnes ayant accompli leur obligation scolaire et désirant acquérir, pour leur intégration dans le monde du travail, une technicité dont seule la pratique en milieu professionnel permet la transmission. En outre, s'articulant avec ce dispositif, les lois protectrices de l'enfance, notamment en matière de scolarisation et d'âge légal d'admission au travail, autant que les textes régissant les aspects sociaux, comme la durée légale du travail, en ont assuré la cohérence et garanti la longévité.

Il n'en demeure pas moins que depuis 1963 l'évolution du monde du travail et du rôle de l'institution scolaire ont affecté l'apprentissage aussi bien en tant que mode de formation aux confins de l'éducation et du travail qu'en tant que contrat, à la fois dans son économie et sur le plan de l'intégration des principes fondamentaux.

En effet, et bien que la Principauté ait, antérieurement à l'adoption de la loi n° 734, posé le caractère fondamental de la liberté du travail et du droit à l'éducation dans les articles 25 et 27 de sa Constitution, affirmation renforcée par l'adhésion notamment à la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant et au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, l'apprentissage restait, comme dans la plupart des pays d'Europe, soumis à une perception contingente de ces principes universels.

C'est ainsi que sous l'impulsion des institutions européennes, de nombreux pays ont engagé une démarche de revalorisation et de modernisation de ce contrat.

Partant, l'apprentissage est désormais communément appréhendé comme un « partenariat tripartite », l'employeur, l'apprenti et le centre de formation s'engageant mutuellement dans un objectif de réussite éducative de l'apprenti et d'insertion professionnelle.

Sur cette identité de base, chaque nation a toutefois gardé ses spécificités, appréhendant diversement le statut de l'apprenti. Selon la perception locale de la notion d'alternance entre école et entreprise et les modes de financement des formations disponibles par cette voie, l'apprenti y est tantôt étudiant, tantôt salarié, ou cumule parfois comme en France le bénéfice de ces statuts.

De fait, en France, une campagne de promotion intense a été menée suite à la publication en 2004 du « Livre blanc sur l'apprentissage ». Par la voie d'une alternance entre la formation dispensée en entreprise et un enseignement à la fois technique et général dans un centre de formation, l'objectif est de faire coïncider, au terme de ces formations, les aptitudes des élèves et les impératifs de la vie active.

Dans la Principauté, les réflexions sur une réforme de l'apprentissage ont ponctué les années passées et, à ce titre, peuvent être cités la proposition de loi du 14 décembre 1977 de Monsieur Charles SOCCAL concernant l'apprentissage et le vœu relatif à la modernisation du contrat d'apprentissage adopté le 7 octobre 1998 par le Conseil Economique et Social qui, déjà, abordaient la notion d'alternance.

Pour autant, la loi n° 734 du 16 mars 1963 n'a fait l'objet, depuis sa promulgation, d'aucune modification substantielle. Seules les lois n° 1.005 du 14 juillet 1978 et n° 1.261 du 23 décembre 2002 sont intervenues pour, respectivement, adapter les pénalités sanctionnant les infractions prévues en son chiffre VI et abroger l'article 4 relatif à l'âge minimum de l'employeur.

C'est pourquoi le Gouvernement Princier a estimé opportun de reprendre l'étude de ce contrat de manière globale, en envisageant son utilité et son utilisation au regard du tissu économique du pays plutôt que d'apporter quelques touches de modernité à la loi existante.

Ainsi, la Cellule emploi-jeunes de la Direction du travail, créée en 1999, a notamment eu pour mission de favoriser le développement de l'apprentissage. En préalable nécessaire à la réalisation de cet objectif, elle a mené une réflexion approfondie sur les données sociales et économiques locales, croisées avec les données éducatives, qui a permis une mise en perspective des nécessités de formation de la jeunesse.

Au terme de cette analyse, le contrat d'apprentissage tel qu'organisé par le dispositif en vigueur est apparu comme ne répondant plus aux besoins de technicité et de qualification exprimés par les entreprises, ni aux attentes des jeunes en tant que mode de formation.

En conséquence était préconisée l'adoption d'une réglementation en adéquation avec la conception actuelle de l'apprentissage et garantissant un équilibre entre objectifs éducatifs et niveau de compétences professionnelles, rejoignant ainsi les attentes des professionnels et des institutions. En effet, la réforme du contrat d'apprentissage était l'objet d'un vœu du Conseil Economique et Social référencé sous le n° 2004-649, adopté en séance plénière le 14 juin 2004, puis de la proposition de loi n° 181 adoptée par le Conseil National lors de sa séance publique du 7 décembre 2005.

C'est en réponse à cette proposition de loi, à laquelle une suite favorable était accordée par lettre ministérielle du 6 janvier 2006 adressée à la Présidence de l'Assemblée, que le Gouvernement Princier a, en application de l'article 67 de la Constitution, déposé le présent projet de loi.

Le texte présenté tire ainsi son inspiration de cette proposition de loi qui avait pris l'option de réglementer de manière particulière ce contrat de travail, en prenant en compte la réalité de l'alternance.

Sur ces fondements, le Gouvernement a souhaité répondre à une double finalité : d'une part, réformer entièrement le dispositif en vigueur aux fins notamment de sécuriser juridiquement la relation de travail qu'il gouverne et, d'autre part, accorder au projet une portée suffisante pour que les objectifs sociaux en matière d'insertion professionnelle de la jeunesse soient satisfaits.

Concernant le premier objectif, la loi projetée procède à l'abrogation des textes en vigueur et met en place un dispositif innovant qui régit l'apprentissage de manière conforme aux standards actuels, depuis sa formation jusqu'à l'encadrement de son exécution et de ses modes d'extinction. L'apprenti bénéficie d'un véritable statut de salarié au sein de l'entreprise et l'employeur ainsi que le maître d'apprentissage qu'il peut désigner voient leurs missions clairement définies.

Le second est, quant à lui, assuré par la création d'un dispositif caractérisé par son équilibre mais aussi par sa souplesse.

Equilibre visant à la satisfaction des parties : ainsi, le contrat d'apprentissage fondé sur la notion d'alternance permet aux employeurs, dans la perspective d'une embauche future, d'évaluer les compétences, les capacités d'intégration et de responsabilisation de l'apprenti, tout en ayant la garantie d'une bonne formation théorique de ce dernier. Réciproquement, les apprentis qui peuvent désormais accéder par cette voie à des diplômes de tous niveaux, allant du Certificat d'Aptitude Professionnelle au diplôme d'ingénieur, acquièrent une expérience professionnelle qui valorise leur titre.

Souplesse, car tout en définissant les critères d'accessibilité et les conditions de la formation, le projet autorise, sous le contrôle de la Direction du travail, à titre subsidiaire et dérogatoire au schéma alternatif, la conclusion ponctuelle de contrats d'apprentissage dépourvus de l'aspect éducatif au profit de jeunes en situation d'échec.

Le dispositif projeté s'intègre ainsi parfaitement dans la politique sociale du Gouvernement et participe au positionnement de la Principauté en tant que bassin d'emploi d'une jeunesse nationale et environnante.

Sous le bénéfice de ces observations d'ordre général, le présent projet de loi appelle les commentaires particuliers ci-après.

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Le projet de loi comporte 47 articles, répartis en sept chapitres respectivement intitulés :

  • Chapitre I - De la nature du contrat d'apprentissage

  • Chapitre II - De la procédure d'établissement et de la forme du contrat d'apprentissage

  • Chapitre III - Des conditions de fond du contrat d'apprentissage

  • Chapitre IV - De l'exécution du contrat d'apprentissage

  • Chapitre V - De l'extinction du contrat d'apprentissage

  • Chapitre VI – Des pénalités

  • Chapitre VII - Dispositions diverses

Le Chapitre premier énonce les principes directeurs du contrat d'apprentissage, affirme sa spécialité et définit son régime au sein du droit du travail.

L'article premier qualifie le contrat d'apprentissage de contrat de travail en vertu de la réunion des critères habituellement admis pour ce faire : l'existence d'une prestation de travail de la part du salarié, d'une rémunération due par l'employeur et d'un lien de subordination juridique entre l'employeur et l'apprenti. Il affirme également sa spécialité au travers de la définition de son objet qui est la formation pratique de l'apprenti pour une durée déterminée, lequel doit en outre suivre une formation théorique.

Ainsi, par rapport à la loi n° 734, cet article introduit deux innovations majeures.

La première, qui induit la qualification de contrat de travail, est relative à la teneur des obligations des parties qu'elle modifie substantiellement par comparaison au dispositif actuellement en vigueur.

Concernant celles de l'employeur, son engagement d'apporter une formation pratique a été assorti de l'obligation de rémunérer l'apprenti. Cette obligation de rémunération jusqu'alors expressément mentionnée dans la seule Ordonnance Souveraine n° 3.154 du 28 mars 1964 déterminant la forme du contrat d'apprentissage et du certificat de fin d'apprentissage est désormais inscrite dans la loi et recouvre aussi bien le temps passé sur le lieu de travail que celui au sein de l'établissement d'enseignement.

Quant à l'apprenti, son obligation principale de fournir un travail pour lequel il est rémunéré a été assortie de celle de suivre d'une part, la formation délivrée en entreprise et, d'autre part, la formation théorique dispensée par l'établissement d'enseignement dont il relève.

La seconde innovation est la consécration de l'alternance entre la formation pratique - objet du contrat - et la formation théorique qui la complète. Elle offre aux employeurs l'opportunité de proposer directement aux jeunes l'expérience professionnelle qu'ils recherchent en ayant la garantie d'un bon niveau éducatif, tout en permettant aux apprentis de faire coïncider la poursuite de leurs études et l'acquisition d'une expérience professionnelle rémunérée au sein d'une entreprise monégasque.

Dans cette acception, le contrat d'apprentissage est un élément substantiel d'une relation tripartite qui lie l'apprenti, l'employeur et l'établissement d'enseignement.

L'article 2 détermine les conditions de dérogation aux principes définis à l'article premier en autorisant à titre exceptionnel le recours au contrat d'apprentissage sans concrétiser l'alternance. Dans ce cas, dénué de sa composante éducative, il se concentre sur la seule transmission du savoir-faire et du professionnalisme au sein de l'entreprise, pour la durée d'une année, sans possibilité de renouvellement.

Concrètement, tout candidat à un contrat d'apprentissage dans cette forme dérogatoire doit recueillir au préalable l'autorisation de la Direction du travail qui vérifie la satisfaction de la demande aux conditions projetées, à l'exception de celles concernant la scolarisation. Cette autorisation permet à l'administration du travail de garantir le caractère exceptionnel du recours à cette forme tout en appréhendant des situations de fait qui excluent certains jeunes de la Principauté du bénéfice des dispositions de l'article premier. Ainsi, des situations d'échec et de rejet du système scolaire seraient notamment prises en compte par cette mesure, octroyant au jeune la possibilité d'acquérir une première expérience professionnelle rémunérée dans des conditions légalement encadrées. Dans ce cas de figure, l'employeur n'est pas tenu aux obligations qui lui incombent normalement en vertu du suivi par l'apprenti des enseignements théoriques.

Enfin, l'article 3 précise, en résonance à la qualification de contrat de travail spécial, que l'apprenti est soumis - autant qu'il peut s'en prévaloir - aux dispositions générales du droit du travail, aux conventions collectives et aux usages en vigueur dans sa branche professionnelle.

Cet article garantit à l'apprenti son statut de salarié au même titre que les autres dans l'entreprise ce qui, subséquemment, implique que les seules dispositions dont il ne peut réclamer le bénéfice sont celles qui sont incompatibles avec sa situation de jeune en formation ou qui réservent spécifiquement un avantage déterminé à une catégorie particulière de salariés, pour lesquelles il ne remplit pas les conditions d'attribution.

Il découle également de la qualification de contrat de travail et de l'application de la réglementation afférente, que le Tribunal du travail est compétent pour connaître des litiges nés du contrat d'apprentissage.

Le Chapitre II regroupe au sein des articles 4 à 7, les conditions de forme auxquelles la conclusion du contrat est soumise et organise la procédure relative à son établissement, sous le contrôle de la Direction du travail.

Ainsi, en vertu de l'article 4 qui ouvre ce chapitre, la procédure d'embauchage de l'apprenti est initiée auprès de la Direction du travail par le dépôt d'une offre d'apprentissage de l'employeur dont la forme et les modalités seront déterminées par un arrêté ministériel.

Parce que le contrat d'apprentissage est un contrat de travail spécial, le texte prévoit une procédure d'embauchage autonome, encadrée par un délai préfix. Mais parce qu'il est avant tout un contrat de travail, cette procédure est fixée à l'identique de celle prévue par la loi n° 629 du 17 juillet 1957 tendant à réglementer les conditions d'embauchage et de licenciement en Principauté, modifiée.

Aussi, à l'instar de tout contrat de travail, l'employeur doit respecter un ordre de priorité dans la sélection des candidats et dispose de la faculté de proposer lui-même un postulant si les personnes qui lui sont présentées ne correspondent pas au profil recherché. Au terme de cette procédure d'offre conduisant à la sélection de l'apprenti, peut être établi l'instrument contractuel qui matérialise l'engagement.

L'article 5 reprend les conditions de forme posées par la loi n° 734 sur le contrat d'apprentissage et maintient, à peine de nullité, l'obligation de stipuler le contrat en la forme écrite ; impératif ad validitatem garantissant la sécurité de la relation juridique.

Quant à la détermination des conditions de forme et des modalités afférentes à la conclusion du contrat, celles-ci feront l'objet d'une ordonnance souveraine afin de faciliter, à travers une standardisation de l'acte, son établissement par les parties puis le contrôle exercé par la Direction du travail.

Enfin, l'article projeté maintient l'exemption de droit d'enregistrement.

L'article 6 dispose que le contrat d'apprentissage doit expressément comporter une date de début et de fin ce qui constitue une des innovations majeures en matière de sécurité juridique, rompant avec les dispositions en vigueur sous l'empire desquelles la détermination de la durée du contrat d'apprentissage relève des usages professionnels et est donc variable.

La détermination elle-même de ces dates est organisée par le texte dans le respect des principes affirmés en article premier qui font de l'alternance une des caractéristiques de l'apprentissage. Il s'ensuit que la période contractuelle doit correspondre à celle du cycle de la formation théorique dispensée par l'établissement d'enseignement dont relève l'apprenti. De plus, la finalité de l'apprentissage étant l'obtention par l'apprenti d'une qualification professionnelle sanctionnée par un diplôme ou un titre à finalité professionnelle, la date de fin du contrat d'apprentissage ne peut excéder de deux mois la date de fin des épreuves d'examen.

En toute logique, l'article prévoit in fine la sanction du défaut de mention des dates de début et de fin du contrat, qui consiste en une requalification en contrat de travail à durée indéterminée.

L'article 7 fixe le nombre d'exemplaires du contrat d'apprentissage et les documents annexes dont la Direction du travail doit être destinataire dans un délai déterminé.

La nouveauté formelle de cet article réside dans la remise des documents relatifs aux aptitudes et qualifications du maître d'apprentissage qui occupe un rôle clé dans l'exécution du contrat car c'est par lui que se réalise son objet savoir, la formation de l'apprenti.

Par ailleurs, la délivrance d'un visa, procédure déjà existante dans le dispositif en vigueur, est maintenue, mais réformée dans ses modalités et dans sa finalité. Si jusqu'alors le visa délivré par l'Inspection du travail visait sa connaissance de l'engagement et la fixation de la date de début du contrat, la nouvelle procédure qui découle automatiquement du dépôt à la Direction du travail des documents dont la liste est dressée à l'alinéa premier, positionne l'autorité publique dans le rôle essentiel de garant de la conformité des stipulations aux prescriptions légales.

Partant, le défaut de visa, formalité substantielle du contrat d'apprentissage entraîne son inexistence et par voie de conséquence, empêche son exécution. Il s'ensuit que si une relation de travail venait à se poursuivre en dépit du défaut de visa, un juge amené à se prononcer sur cette relation ne pourrait que constater la nullité du contrat d'apprentissage et requalifier le lien au regard des autres formes de contrat de travail.

Enfin, l'apprenti doit, sous peine de nullité du contrat, attester de son inscription dans un établissement d'enseignement auprès de la Direction du travail. S'il peut paraître surprenant que cette attestation soit requise postérieurement à la conclusion du contrat d'apprentissage plutôt qu'au moment du dépôt des exemplaires du contrat et autres documents joints, il s'avère que le motif en est d'ordre chronologique, car l'inscription définitive de l'apprenti dans un établissement d'enseignement est suspendue à la conclusion préalable du contrat d'apprentissage.

Ainsi, il n'obtient un certificat de scolarité qu'au terme d'une procédure initiée par la conclusion du contrat et clôturée par l'accomplissement des démarches d'inscription. L'objectif légal est alors d'éviter, lorsque l'inscription de l'apprenti n'est pas effective, qu'il soit excipé de la conclusion du contrat et de l'obtention du visa de la Direction du travail pour recourir, par défaut, au régime dérogatoire de l'article 2.

Est enfin à noter la précision incidemment apportée par cet article sur l'incapacité du mineur non émancipé qui, bien que dégagé de l'obligation scolaire, ne peut être engagé que par son représentant légal.

Après avoir édicté les règles qui en gouvernent la forme, le projet traite, dans son Chapitre III, des conditions de fond du contrat d'apprentissage savoir, celles tenant à la qualité des parties ainsi qu'aux conditions d'accueil de l'apprenti dans l'entreprise.

L'article 8 qui initie ce chapitre recense les conditions d'obtention de la qualité d'apprenti. Il s'agit d'être âgé de seize à vingt-six ans au début du contrat, chacune de ces limites d'âge, inférieure et supérieure, connaissant toutefois une dérogation.

Concernant la limite d'âge inférieure du candidat, cet article est conforme aux dispositions de la loi n° 719 du 27 décembre 1961 relative à l'âge d'admission au travail. Droit fondamental de l'enfance reconnu constitutionnellement comme déjà précisé, le droit à l'éducation et partant, l'obligation scolaire est une priorité dont le rappel ne saurait être superfétatoire. A titre dérogatoire, la conclusion d'un contrat d'apprentissage par un jeune dans sa seizième année est cependant autorisée à condition qu'il soit libéré de l'obligation scolaire. Cette dérogation permet de se conformer au calendrier scolaire, la terminaison du cycle de formation correspondant à la validation de cette même obligation mais pas toujours à l'âge de seize ans révolus.

Quant à l'existence d'une limite d'âge supérieure au-delà de laquelle ce mode de formation n'est plus accessible, elle est justifiée par l'objectif même du contrat d'apprentissage qui est d'initier ou d'amorcer l'entrée dans la vie active. Cette limite, établie à vingt-six ans, prémunit également contre un recours excessif à ce type de contrat pour pourvoir, à moindre coût, certains emplois. Elle peut toutefois, à titre dérogatoire, être repoussée d'une année afin d'autoriser les jeunes à réaliser un troisième cycle de l'enseignement dans le cadre de l'apprentissage.

Enfin, réitérant le principe de l'alternance, le dernier alinéa dispose que l'apprenti doit être inscrit dans un établissement d'enseignement.

S'agissant de l'employeur, l'article 9 lui impose, en préalable au recrutement d'un apprenti, de fournir la garantie que les conditions de son accueil seront optimales. Outre les normes habituelles de conformité de ses installations, il doit prendre les mesures que la présence d'un jeune inexpérimenté requiert notamment en matière de sécurité et établir les conditions spécifiques à l'apprentissage, en correspondance avec la formation suivie par l'apprenti. Il est en outre garant de son personnel impliqué dans la réalisation de ce projet.

En faisant de ces conditions matérielles préalables une obligation de garantie à la charge de l'employeur dont la Direction du travail est destinataire ab initio, le projet de loi donne à cette administration un moyen de contrôler efficacement le déroulement de la formation pratique.

L'article 10 envisage ensuite l'hypothèse de la stipulation d'un contrat d'apprentissage entre les membres d'une même famille. Bien que la procédure de recrutement des apprentis soit strictement encadrée, le contexte familial peut être propice à moins de formalisme et le respect des obligations légales, notamment en matière de formation et de rémunération, pourrait y être moins rigoureux que dans une relation de travail classique.

C'est pourquoi dans ce cas, la conclusion du contrat d'apprentissage est subordonnée à l'accord de la Direction du travail et de l'établissement d'enseignement.

La loi projetée s'attache en l'article 11 à poser les règles relatives aux compétences du maître d'apprentissage. Celui-ci peut être l'employeur lui-même ou une personne physique salariée de l'entreprise qu'il aura désignée.

Formateur de l'apprenti, il a pour mission de lui transmettre les connaissances pratiques correspondant à la qualification recherchée. Cette correspondance est favorisée par les liens qu'il peut être amené à nouer avec l'établissement d'enseignement, prérogative que la loi projetée lui accorde expressément. En outre, ces dispositions introduisent une nouveauté majeure en exigeant que toute personne désireuse d'acquérir la qualité de maître d'apprentissage satisfasse à un niveau de qualification et d'expérience professionnelle déterminé.

Ces conditions objectives, qui n'existent pas dans la loi n° 734, sont le gage d'une formation de qualité et s'ajoutent aux impératifs de moralité posés par l'article 12. Ces qualités morales auxquelles, comme l'employeur, le maître d'apprentissage doit répondre, sont la réitération des dispositions en vigueur.

L'importance du rôle tenu par le maître d'apprentissage justifie enfin que soit déterminé, par entreprise et par maître d'apprentissage, le nombre maximum d'apprentis pouvant être reçus. L'article 13 pose des limites qui sont pour ce qui concerne l'entreprise, proportionnelles au nombre de salariés et pour le maître d'apprentissage, de deux apprentis.

Le quota imposé aux entreprises empêche un recours au contrat d'apprentissage dans le seul but de disposer d'une main d'oeuvre certes peu qualifiée mais surtout peu onéreuse, sans que l'objectif de formation soit assuré. Quant à la limite qui affecte le maître d'apprentissage, elle constitue un gage de suivi de la formation des apprentis qui lui sont attachés, autant que d'accomplissement de sa propre prestation de travail qui pourrait pâtir du fait de son engagement envers un trop grand nombre d'apprentis.

Dès lors sont non seulement garantis des conditions de formation objectivement satisfaisantes mais également un équilibre dans la conduite de l'activité habituelle de l'employeur.

S'agissant de l'article 14 du projet, il réglemente la prise en compte de l'apprenti au sein du personnel de l'employeur. A ce titre, les apprentis sont comptabilisés dans l'effectif salarié de l'entreprise uniquement pour l'application des dispositions législatives ou réglementaires relatives à la protection des salariés qui se réfèrent à une condition d'effectif minimum.

Le projet de loi s'attache ensuite à régir les conditions de fond propres au contrat d'apprentissage et, en premier lieu, sa durée.

Ainsi, l'article 15 met en concordance la durée du contrat d'apprentissage et celle du cycle de formation théorique en raison de la complémentarité des connaissances que l'apprenti acquiert dans l'établissement d'enseignement et de leur application dans l'entreprise. La détermination de cette durée, qui varie selon la formation choisie par l'apprenti, est garantie par l'application conjointe du premier alinéa de cet article et des dispositions de l'article 6 qui fixent l'écart autorisé entre le cycle et les termes initial et extinctif du contrat.

Dans l'intérêt de l'apprenti, ce principe est toutefois assorti d'un tempérament pour tenir compte de son niveau initial de compétence. Il est alors pris en considération individuellement et, s'il est jugé capable d'obtenir le titre recherché dans un délai inférieur à celui habituellement prévu par le cycle, le temps d'apprentissage sera conséquemment réduit. A l'inverse, l'apprenti qui démontrerait un niveau particulièrement faible pourrait bénéficier d'un allongement de la durée du contrat, en concordance avec l'adaptation de la durée du cycle.

Cette décision appartient logiquement à la Direction du travail qui se prononce généralement après avis de l'établissement d'enseignement. Il est à noter que cette décision peut être prise tant en début de contrat qu' au cours de son exécution.

Bien que la réussite à l'examen ne figure pas parmi les obligations contractuelles qui incombent à l'apprenti et que celle-ci soit donc sans effet sur l'exécution et l'échéance normale du contrat, le projet introduit en article 16, dans le cas précis de l'échec, la possibilité de prolonger l'apprentissage soit par la prorogation du contrat initial, soit par la conclusion d'un nouveau contrat avec un autre employeur. L'apprenti garde ainsi le bénéfice de l'apprentissage accompli et il lui est permis de poursuivre l'expérience professionnelle pendant l'année qui suit, au terme de laquelle il peut à nouveau se présenter aux examens.

Cette faculté est strictement encadrée, d'abord dans son nombre, afin que l'apprenti ne se maintienne dans une filière qui ne correspondrait pas à ses capacités ; ensuite dans le temps, l'apprentissage ne pouvant être prolongé que pour une durée d'un an au plus et après accord écrit de la Direction du travail et de l'établissement d'enseignement.

Le projet de loi réglemente enfin la conclusion de contrats d'apprentissage successifs.

En premier lieu, l'article 17 suspend la conclusion de contrats d'apprentissage successifs à leur finalité éducative. Si la conclusion de contrats pour des formations de niveaux différents, projetant l'apprenti dans un processus progressif de qualification et d'expérience, est favorisée, en revanche, la conclusion de contrats pour des formations de même niveau est, au-delà de deux, soumise à l'autorisation de la Direction du travail et de l'établissement d'enseignement, quel que soit le délai existant entre la fin du contrat d'apprentissage et la nouvelle demande.

En second lieu, l'article 18 qui clôt ce chapitre consacré aux conditions de fond du contrat pose, dans la lignée du contrôle de la conclusion de contrats successifs instauré par l'article 17, la prohibition du cumul des contrats d'apprentissage. Cette interdiction vise à s'assurer que l'apprenti se consacre exclusivement à la formation qu'il a initialement choisie, par l'exécution des obligations qui lui incombent en vertu de l'engagement souscrit et ce, jusqu'à son terme.

L'exécution du contrat d'apprentissage est ensuite régie par les dispositions du Chapitre IV dont l'article initial, l'article 19, confère le contrôle à la Direction du travail, alors que le suivi pédagogique relève de l'établissement d'enseignement.

Ce chapitre est scindé en deux sections qui organisent les obligations de chacune des parties. Il peut être noté que la première section édicte les obligations de l'employeur mais traite également de celles du maître d'apprentissage. La seconde section régit le statut de l'apprenti.

L'article 20 s'applique à identifier les trois principales obligations de l'employeur.

Le premier alinéa traite ainsi de l'objet de l'obligation principale du contrat savoir, la formation de l'apprenti. Cette disposition innove en assortissant la réalisation de cet objet de spécifications qui lient l'employeur dès le début de la relation contractuelle en vertu de l'article 9. En outre, la prévision d'une consultation entre l'employeur et l'établissement assure à l'apprenti une coordination étroite entre le travail confié en entreprise et la formation théorique dispensée par l'établissement d'enseignement.

Quant au deuxième alinéa, il impose à l'employeur de laisser à l'apprenti une disponibilité suffisante pour le suivi de sa formation théorique.

Ce principe est fondé sur le respect des programmes d'apprentissage qui évaluent, selon la qualification recherchée, la répartition du quota d'heures entre l'entreprise et l'établissement d'enseignement. De fait, en moyenne, 75% du temps de formation est effectué en entreprise, les 25% restants étant consacrés au suivi des enseignements.

Enfin, l'employeur est tenu d'inscrire l'apprenti aux examens pour l'obtention de son diplôme. En mettant ladite obligation à la charge de l'employeur, le projet garantit que les conditions de durée spécifiées par ailleurs seront respectées, la Direction du travail et l'établissement étant informés de l'accomplissement de ces diligences.

Le jeune âge de l'apprenti motive ensuite les dispositions de l'article 21 qui procèdent d'un devoir de surveillance de l'employeur à son égard. A ce titre, il lui incombe de prévenir ses parents ou son représentant légal ainsi que l'établissement d'enseignement et la Direction du travail en cas d'évènement sérieux le concernant.

Le projet de loi poursuit par l'édiction des règles relatives à l'accomplissement de la mission du maître d'apprentissage, au premier rang desquelles figure, en article 22, l'obligation de former l'apprenti. Se distinguant de l'article 20 qui définit les devoirs de l'employeur au regard de cette même obligation, cet article appréhende le fait que l'employeur n'est pas systématiquement la personne qui l'exécute notamment lorsque celui-ci est une personne morale qui désigne nécessairement un salarié pour l'accomplissement de la formation de l'apprenti.

La souplesse du contrat qui autorise l'employeur à désigner un maître d'apprentissage pour l'accomplissement de cette mission implique, selon que cette délégation existe ou non, le respect par l'employeur des dispositions de cet article et, a contrario, une application distributive s'il ne cumule pas ces qualités.

Quant au second alinéa, il encadre le lien d'autorité existant entre l'apprenti et son maître d'apprentissage en posant la nécessaire coïncidence entre les tâches confiées et les objectifs professionnalisants.

L'importance de la protection instaurée par l'article 23 constitue une avancée considérable en faveur de l'apprenti qui ne peut se voir confier par son maître d'apprentissage que des activités dont la nature est strictement définie.

Cet article pose ainsi une double interdiction.

En vertu de la première, le maître d'apprentissage ne peut lui confier des travaux qui excèderaient ses capacités ou pourraient lui nuire de quelque manière que ce soit. Son rôle de tuteur lui impose d'apprécier les tâches qu'il peut attribuer à l'apprenti, d'une part, au regard de son inexpérience et de son éventuelle vulnérabilité et, d'autre part, de la finalité professionnelle pour laquelle celui-ci a été recruté.

Quant à la seconde interdiction, elle est directement faite à l'apprenti d'accomplir les travaux dangereux - et donc incompatibles avec son statut d'apprenti – dont la liste est dressée par un arrêté ministériel. Cette interdiction est néanmoins tempérée par la fixation d'une dérogation dont la mise en oeuvre est conditionnée par l'utilité de l'accomplissement de ces travaux pour la formation suivie par l'apprenti et par la délivrance d'une autorisation de l'Inspection du travail qui en détermine la portée. Cette dérogation intervient également afin de ne pas exclure des secteurs privilégiés pour la conclusion de ce contrat, telles les professions artisanales ou industrielles notamment qui, par nature, impliquent une certaine manualité ou l'utilisation de machines-outils auxquelles est attachée une potentielle dangerosité.

En complément des protections mises en oeuvre pour cette dérogation notamment, mais pas exclusivement, le texte enjoint à l'apprenti et parfois au maître d'apprentissage de suivre une formation spécifique à la sécurité.

En vertu de l'article 24, le maître d'apprentissage doit également surveiller l'apprenti. Ce devoir porte sur l'appréciation du comportement du jeune au sein de l'entreprise et s'articule avec l'obligation de l'employeur définie à l'article 21. Cette disposition réitère en les modernisant les conceptions exprimées par l'article 10 de la loi n° 734 qui lui-même procède de l'article 1231 du Code civil relatif à la responsabilité des artisans (employeurs) quant au dommage causé par leurs apprentis « pendant le temps qu'ils sont sous leur surveillance ».

Enfin, les articles 25, 26 et 27, qui clôturent cette première section, gouvernent la procédure de contrôle des conditions d'apprentissage dont l'employeur a la responsabilité.

A ce titre, l'article 25 instaure à la charge de l'employeur une obligation de communication à la Direction du travail de toute pièce justificative. Dès lors, à la première demande du Service de l'emploi ou de l'Inspection du travail, celui-ci est tenu de fournir les éléments d'information requis, en relation avec le contrat d'apprentissage, qui doivent correspondre à la garantie des conditions d'apprentissage dont la Direction du travail est dépositaire en vertu de l'article 9.

En cas de défaillance de l'employeur dans l'exécution du contrat, que celle-ci résulte des éléments d'information communiqués ou de leur absence de communication, mais également de toute situation pouvant mettre en péril le contrat ou l'apprenti, l'article 26 habilite l'inspecteur du travail – conformément aux dispositions de la loi n° 537 du 12 mai 1951 relative à l'Inspection du travail - à suspendre le contrat d'apprentissage. Il rappelle également que, sauf en cas d'urgence, le principe du contradictoire doit être respecté.

Le dispositif prend enfin la précaution d'assortir la suspension du contrat du maintien de la rémunération de l'apprenti à laquelle l'employeur ne saurait surseoir au motif de sa propre défaillance.

L'article 27 conditionne la cessation de la période de suspension à la disparition de son fait générateur. Ainsi, l'article envisage les hypothèses conduisant à la décision de suspension et impose à l'employeur de prendre toute mesure pour faire cesser la situation anormale de travail, sous le contrôle de l'inspecteur du travail qui évalue les conditions d'apprentissage au regard des engagements garantis. L'issue de ce contrôle est ainsi alternativement, la reprise de l'exécution du contrat d'apprentissage ou, si les manquements de l'employeur continuent de compromettre la formation de l'apprenti, la résiliation du contrat. La rupture du contrat d'apprentissage étant dans ce dernier cas, pleinement imputable à l'employeur, celui-ci est tenu au paiement de la totalité des salaires dus à l'apprenti comme si le contrat s'était poursuivi jusqu'au terme contractuellement prévu.

Cette mesure peut être qualifiée de « mesure de sauvegarde » en faveur de l'apprenti qui, d'une part, n'est pas financièrement lésé de l'extinction anticipée de son contrat d'apprentissage et, d'autre part, dispose dès cette date du soutien de l'établissement d'enseignement pour la recherche d'un nouvel employeur.

Enfin, il doit être souligné que la décision de l'inspecteur du travail de refuser la reprise de l'exécution du contrat peut être assortie d'une interdiction plus générale de procéder à de nouveaux recrutements d'apprentis. Cette interdiction n'est levée qu'au jour du retour à la normale des conditions de travail proposées par l'employeur.

Les décisions de l'Inspecteur du travail prises sur la base des articles 26 et 27 peuvent faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.

La section 2 détermine ensuite, par les sept articles qui la composent, le statut de l'apprenti au sein de la relation de travail, en définissant ses droits et obligations.

L'article 28 s'attache ainsi à poser le cadre juridique dans lequel l'apprenti doit être considéré. Son statut de salarié lui est conféré par la conclusion du contrat d'apprentissage qui lui ouvre tous les droits liés à ce statut.

En outre, par la spécificité de l'apprentissage, l'apprenti se distingue des autres salariés en bénéficiant de ce statut en dehors du contexte de travail, celui-ci lui étant également acquis pendant les heures de formation théorique.

Les règles fondamentales du rapport de travail sont édictées par l'article 29, au premier rang desquelles figure le lien de subordination juridique qui le caractérise. Suit l'obligation d'effectuer le travail pour lequel il a été recruté, obligation de prestation classique du contrat de travail, qui doit en outre coïncider avec la qualification professionnelle recherchée.

Le projet prend soin de rappeler que si l'apprenti bénéficie des droits reconnus aux autres salariés auxquels s'ajoutent les particularités de son statut, il ne peut exciper de celui-ci pour se soustraire aux règles et usages en vigueur au sein de l'entreprise. L'employeur est ici assuré d'un équilibre entre ses engagements et ceux, réciproques, de l'apprenti, ainsi que de la protection du fonctionnement habituel de son activité.

L'article 30 comporte un objectif pédagogique novateur en faisant de l'obligation éducative la contrepartie du statut salarié dont l'apprenti bénéficie durant ce suivi éducatif. Par conséquent, l'apprenti qui ne satisferait pas cette obligation pourrait se voir opposer la mise en oeuvre de l'article 41. Il ressort ainsi des articles 29 et 30, que le dispositif projeté laisse à l'apprenti la responsabilité de ses propres défaillances, qu'elles interviennent dans l'accomplissement de son travail, dans le suivi de sa formation théorique ou sa présentation aux épreuves du diplôme.

Les articles 31 et suivants caractérisent, en application des principes posés au Chapitre premier, les droits de ce salarié spécial. Dans un souci de clarté, le dispositif projeté rappelle les textes essentiels du droit social auxquels il est soumis.

L'avancée sociale majeure consacrée par l'article premier qui érige en obligation légale le principe de rémunération de l'apprenti et fait du contrat qui le lie à son employeur un contrat à titre onéreux est organisée par l'article 31. Celui-ci précise que les modalités d'établissement de cette rémunération doivent répondre aux exigences de la loi n° 739 du 16 mars 1963 sur le salaire, modifiée.

Aussi, l'article 11 de cette loi, relatif au montant du salaire, est applicable ; salaire qui, en l'occurrence, varie selon le niveau de formation suivie et l'âge de l'apprenti.

Autre conséquence de la soumission à ladite loi, l'apprenti bénéficie de l'application des textes qui en organisent la mise en oeuvre et en particulier des dispositions de l'arrêté ministériel n° 63-131 du 21 mai 1963 fixant les taux minima des salaires qui prévoit au profit des salariés de la Principauté une indemnité exceptionnelle de 5%.

Cet encadrement légal n'est pas seulement protecteur des droits du salarié, il garantit également l'employeur qui demeure, bien entendu, libre de fixer sur cette base la rémunération en rapport avec le travail effectif fourni par l'apprenti. En outre, les heures consacrées par l'apprenti à la formation théorique étant comptabilisées dans le temps de travail, l'employeur est investi d'un pouvoir de contrôle de l'assiduité et de l'effectivité du suivi des enseignements par l'apprenti.

Par ailleurs, comme tout salarié, l'apprenti bénéficie des dispositions de la loi n° 800 du 18 février 1966 régissant la rémunération et les conditions de travail relatives aux jours fériés légaux, modifiée, dispositions qui relèvent aussi bien du droit à rémunération traité par l'article considéré que de la notion de durée du travail envisagée au suivant.

Est in fine abordée la question de la rémunération de l'apprentissage accompli dans le cadre dérogatoire fixé par l'article 2. L'employeur doit, en ce cas, payer à l'apprenti un salaire déterminé par équivalence à la somme habituellement attribuée pour l'accomplissement d'une deuxième année d'apprentissage. Il est à noter que l'apprenti, dans cette hypothèse, bénéficie comme les autres de toutes les dispositions de la loi projetée qui ne sont pas en contradiction avec sa spécificité.

L'article 32 rappelle que les règles gouvernant la durée du travail de l'apprenti sont édictées par l'ordonnance-loi n° 677 du 2 décembre 1959 sur la durée du travail, modifiée, dont relève tout salarié.

Il est à noter que ce texte comporte des dispositions spécifiques au temps de travail des apprentis, les articles 13 bis à 13 quinquies introduits par la loi n° 844 du 27 juin 1968, qui demeurent applicables, pour autant qu'elles soient compatibles avec le présent dispositif. Enfin, comme déjà mentionné, les heures de formation pratique et théorique entrent dans le décompte de la durée hebdomadaire de travail de l'apprenti.

L'article 33 qui traite de la fixation des congés, renvoie pour ce faire directement à la loi n° 619 du 26 juillet 1956 fixant le régime des congés payés annuels, modifiée. Il réserve toutefois à l'apprenti le droit à un congé rémunéré supplémentaire de cinq jours ouvrables dont la mise en oeuvre est strictement encadrée, ce congé devant obligatoirement précéder les épreuves d'examen et être utilisé en vue de leur préparation.

Enfin, l'article 34 envisage, au terme de l'apprentissage, la conclusion d'un contrat de travail avec le même employeur. Il coordonne les dispositions projetées avec celles de la loi n° 729 du 16 mars 1963 concernant le contrat de travail, afin d'aménager la modification du lien contractuel sans occasionner de rupture dans la relation de travail. De fait, il instaure une dérogation à l'article 4 de ladite loi, relatif à l'accomplissement d'une période d'essai, laissant toutefois la possibilité aux parties d'aménager conventionnellement ce principe.

Cette dérogation se fonde sur une jurisprudence établie selon laquelle, dans l'hypothèse de contrats de travail successifs, aucune période d'essai ne peut être stipulée dans le second contrat lorsque l'objet de ce dernier est identique au premier.

Bien que l'identité d'objet ne soit pas parfaite en l'occurrence, le second contrat ne reprenant pas les aspects liés à la formation de l'apprenti, cette faculté est en cohérence avec la finalité du contrat d'apprentissage qui est l'insertion professionnelle au terme d'une première expérience de travail. C'est donc logiquement que le texte projeté prend également en considération la durée du contrat d'apprentissage pour le calcul de la rémunération et de l'ancienneté du salarié.

Le Chapitre V réglemente l'extinction du contrat d'apprentissage en envisageant successivement sa terminaison naturelle et son extinction anticipée, avant d'organiser les conséquences de la fin du contrat.

En liminaire, l'article 35 astreint l'employeur à délivrer à l'apprenti, au terme du contrat, un certificat d'apprentissage dont la forme et les mentions seront déterminées par un arrêté ministériel. Ce certificat d'apprentissage est un acte à fonction probatoire qui, sur le modèle du certificat de travail, constate l'exécution du contrat d'apprentissage, quelle qu'en soit la durée et indépendamment des motifs de son extinction.

L'article 36 est relatif à la cessation du contrat d'apprentissage par la simple survenue de son terme extinctif. En pratique, ce terme fait l'objet d'une stipulation qui correspond à l'aboutissement du cycle de formation théorique et coïncide, dans la limite de la variation autorisée par l'article 6, avec la date des épreuves d'examen.

S'agissant de la suspension du contrat, elle est, comme pour les autres contrats de travail, sans effet sur sa durée.

Les articles 37 à 42 gouvernent ensuite la résiliation anticipée du contrat d'apprentissage.

En préalable à l'énoncé des hypothèses de résiliation, le texte projeté pose en article 37 une obligation d'information de la Direction du travail de toute résiliation du contrat. Cette formalité, qui doit être accomplie par l'employeur dans les formes définies par voie réglementaire, laisse à l'administration du travail la possibilité de superviser l'exécution du contrat jusqu'à son terme.

L'article 38 accorde à chaque partie un droit de résiliation unilatéral du contrat d'apprentissage au cours d'une période de deux mois suivant la conclusion dudit contrat. Cette période permet notamment à l'employeur d'évaluer les aptitudes de l'apprenti et à ce dernier de s'assurer que les travaux qui lui sont confiés correspondent à l'objectif défini lors de son embauchage. Chaque partie peut apprécier l'opportunité de poursuivre ou non la relation contractuelle, sans être tenue de justifier son choix et ce, dans la limite de l'abus de droit. Le principe de l'absence d'indemnisation de l'autre partie est affirmé, laissant toutefois la possibilité de stipuler en sens contraire.

Ces dispositions réitèrent pour l'essentiel celles de l'article 16 de la loi n° 734, sauf pour les conséquences de la volonté de rupture qui aujourd'hui emportent l'annulation de l'acte, alors que le projet en organise la résiliation qui laisse à l'apprenti le bénéfice du temps d'apprentissage accompli dans ce délai et des droits afférents.

Une fois le délai de deux mois écoulé, les parties ne peuvent rompre le lien contractuel que dans les cas légalement prévus. Parmi ceux-ci, l'article 39 pose le principe selon lequel la résiliation du contrat ne peut intervenir que sur accord exprès des cocontractants, ou à défaut, dans les hypothèses déterminées aux articles 40 et 41.

Cette faculté de résiliation par accord mutuel s'extrait des règles de droit commun qui, au-delà de la spécialité des relations de travail, restent applicables. Or, la formation du contrat d'apprentissage résultant comme tout contrat, au premier chef, de la rencontre des consentements des parties, il est logique d'instaurer comme principal motif de sa rupture, la reconnaissance du dissentiment mutuel.

L'article 40 énumère ensuite limitativement les cas permettant d'obtenir de plein droit la résiliation anticipée du contrat, réitérant les motifs édictés par l'actuel article 17, à l'exception de ceux liés à la vie privée de l'employeur ou du maître d'apprentissage. Ont en outre été ajoutés au sein de cette disposition certains faits ou actes qui jusque là devaient résulter d'une demande de l'une des parties, comme la condamnation de l'employeur à une peine d'emprisonnement, ainsi que le cas d'inaptitude médicalement constatée empêchant l'apprenti de se former à la profession pour laquelle le contrat a été conclu, son objet ne pouvant plus être réalisé.

L'article 41 actualise l'essentiel des hypothèses envisagées par l'article 18 de la loi n° 734 régissant la résiliation du contrat à la demande de l'une des parties et innove par la création d'une commission spéciale amenée à donner son avis sur la demande de résiliation formulée par l'une des parties auprès du Directeur du Travail, ce après avoir procédé à une vérification des motifs invoqués, au regard de la liste dressée au présent article.

Par ailleurs, si la composition et le mode de fonctionnement de cette commission sont fixés par ordonnance souveraine, le texte prend soin d'affirmer légalement le droit des parties de démontrer contradictoirement au cours de la procédure, la matérialité et la validité des motifs invoqués, garantissant ainsi l'objectivité de l'avis donné par la commission.

La procédure ainsi mise en place est obligatoire à peine de nullité de la résiliation du contrat qui, par voie de conséquence, se poursuivrait jusqu'à son terme.

Quant à l'article 42, il prévoit les conséquences de la résiliation du contrat, disposant que le temps accompli par l'apprenti lui demeure acquis, de même que les droits nés de cet accomplissement et, en particulier, celui d'être rémunéré jusqu'à la date de prise d'effet de la résiliation, quand bien même cette dernière résulte de son propre fait.

Enfin, dans le but d'éviter que la rupture du contrat ne pénalise l'apprentissage dans son aspect éducatif, le second alinéa autorise la conclusion d'un nouveau contrat pour finaliser la période d'apprentissage. Une telle faculté n'est toutefois pas inconditionnelle puisque suspendue à l'acceptation préalable de l'établissement d'enseignement et de la Direction du travail. Il est à noter que cette hypothèse se distingue des prévisions des articles 16, 17 et 18 du projet, ne relevant ni d'un échec à l'épreuve diplômante, ni de la recherche d'une nouvelle formation et, le contrat originellement conclu étant en cette occurrence valablement terminé.

Consacré aux pénalités, le Chapitre VI débute par l'article 43 qui identifie les agents habilités à constater les faits qualifiables d'infractions.

L'article 44 s'attache à prévoir la sanction pénale des infractions à certaines dispositions de la loi, de même que celle des comportements récidivistes. Il peut s'agir d'une condamnation au paiement d'une amende ou de l'accomplissement d'une peine d'emprisonnement.

Quant aux infractions elle-mêmes, le projet réitère les dispositions de la loi en vigueur en matière de moralité de l'employeur et du maître d'apprentissage, avant d'ériger au rang de délit le non-respect des nouvelles dispositions suivantes :

  • les dispositions garantissant à l'apprenti le bénéfice des lois sociales auxquelles tout salarié est soumis ;

  • la réglementation relative à l'accomplissement de travaux dangereux.

L'auteur de fausses déclarations est également sanctionné pénalement mais dans une proportion moindre que celle prévue pour la même infraction par le Code pénal.

Enfin, le Chapitre VII consacré aux dispositions diverses traite du financement de l'apprentissage avant d'organiser l'entrée en vigueur du nouveau dispositif et d'abroger les textes existants en la matière.

L'article 45 inscrit dans la loi le financement de l'apprentissage dont il laisse à une ordonnance souveraine le soin de fixer les conditions et les modalités. Il peut d'ores et déjà être avancé que le dispositif de financement prendra corps progressivement. Des discussions devront être menées avec les partenaires sociaux afin de mettre en place un système de mutualisation de la prise en charge des coûts de formation. Il pourra dès lors être envisagé et d'instaurer un accompagnement financier de l'Etat en faveur des entreprises accueillant des apprentis ayant des liens avec la Principauté.

Ces mesures étant susceptibles d'évoluer régulièrement, il est apparu opportun qu'elles soient fixées réglementairement. Ainsi, par la même voie seront définies les conditions dans lesquelles l'Etat pourra mettre en place des mesures financières incitatives accordées aux employeurs embauchant des jeunes de résidants ou ayant des liens étroits avec la Principauté afin de leur permettre d'accéder à ces filières de formation.

L'article 46 prévoit une application immédiate de la loi projetée, savoir, à la conclusion de tout nouveau contrat d'apprentissage. Une telle rédaction écarte les contrats conclus antérieurement à l'entrée en vigueur de ce dispositif et permet subséquemment aux relations contractuelles en cours à ladite date de se poursuivre jusqu'à leur terme aux conditions initialement convenues.

Le texte s'achève par l'article 47 qui procède aux abrogations des textes antérieurs ou contraires au dispositif projeté et, notamment, à celle de la loi n° 734 du 16 mars 1963 sur le contrat d'apprentissage.

Tel est l'objet du présent projet de loi.

Dispositif🔗

Chapitre I - De la nature du contrat d'apprentissage🔗

Article premier🔗

Le contrat d'apprentissage est un contrat de travail spécial par lequel un employeur s'oblige à donner ou à faire donner une formation professionnelle rémunérée à un apprenti qui s'oblige en retour, pendant la durée du contrat, à travailler pour lui et à suivre la formation pratique dispensée dans l'entreprise en parallèle de la formation théorique dispensée dans l'établissement d'enseignement dont il relève.

Article 2🔗

Par dérogation aux dispositions de l'article précédent et du quatrième alinéa de l'article 8, la Direction du travail peut autoriser la conclusion d'un contrat d'apprentissage, d'une durée d'un an, non renouvelable, pour la seule formation pratique dispensée en entreprise. Les dispositions relatives au suivi de la formation théorique en établissement d'enseignement ne sont pas applicables.

Article 3🔗

Le contrat d'apprentissage est régi par les dispositions du droit du travail, les conventions collectives et les usages de la Principauté en vigueur dans la profession ou au sein de l'entreprise, sous réserve qu'ils ne soient pas contraires à la présente loi et aux textes pris pour son application.

Chapitre II - De la procédure d'établissement et de la forme du contrat d'apprentissage🔗

Article 4🔗

Toute offre d'apprentissage est déclarée par l'employeur à la Direction du travail dans les formes prévues par arrêté ministériel. La Direction du travail lui adresse, dans les huit jours ouvrables, les candidats apprentis selon l'ordre de priorité suivant :

  • 1° - personnes de nationalité monégasque ;

  • 2° - personnes de nationalité étrangère mariées à un ou une monégasque et non légalement séparées et personnes nées d'un auteur direct monégasque ;

  • 3° - personnes de nationalité étrangère, domiciliées à Monaco ;

  • 4° - personnes de nationalité étrangère, domiciliées dans les communes limitrophes.

A défaut de présentation des candidats dans ce délai ou à la suite d'un refus motivé par l'employeur, celui-ci peut soumettre une autre candidature à la Direction du travail.

Article 5🔗

A peine de nullité, le contrat d'apprentissage est établi par écrit.

Sa forme, ses mentions et les modalités autres que celles prévues aux articles 6 et 7 sont déterminées par ordonnance souveraine.

Il est exempté de droit d'enregistrement.

Article 6🔗

Le contrat d'apprentissage stipule les dates de début et de fin de l'apprentissage conformément aux dispositions de l'article 15 et selon les modalités suivantes :

  • 1° - la date de début ne peut être antérieure de plus d'un mois, ni postérieure de plus de deux mois au début du cycle de formation théorique dispensée au sein de l'établissement d'enseignement ;

  • 2° - la date de fin ne peut excéder de deux mois la date de fin des épreuves d'examen.

La méconnaissance de cette disposition entraîne de plein droit la requalification du contrat en un contrat à durée indéterminée.

Article 7🔗

L'employeur et l'apprenti, ou son représentant légal s'il est mineur, établissent le contrat d'apprentissage en quatre exemplaires, accompagné de :

  • 1° - la copie d'une pièce d'identité de l'apprenti ;

  • 2° - la copie des documents justifiant que le maître d'apprentissage remplit les conditions prévues à l'article 11.

Le contrat d'apprentissage et les documents mentionnés ci-dessus sont déposés à la Direction du travail, au plus tard quinze jours ouvrables avant la date de début de l'apprentissage prévue au contrat, aux fins d'obtention d'un visa.

La Direction du travail, après avoir vérifié la conformité du contrat d'apprentissage aux prescriptions légales et s'être prononcée, le cas échéant, sur les demandes de dérogation qu'il contient, délivre son visa dans les dix jours ouvrables du dépôt. A défaut de réponse dans ce délai, le visa est réputé obtenu.

Le refus de délivrance du visa par la Direction du travail ou l'absence du dépôt prévu au deuxième alinéa fait obstacle à l'exécution du contrat d'apprentissage.

Conformément à l'article 8 et sous peine de nullité du contrat d'apprentissage, l'apprenti est tenu de remettre à la Direction du travail un certificat d'inscription dans un établissement d'enseignement dans les quinze jours du début du cycle de formation théorique mentionné au contrat d'apprentissage.

Chapitre III - Des conditions de fond du contrat d'apprentissage🔗

Article 8🔗

Pour être engagé, l'apprenti doit être âgé de seize ans au moins et de vingt-six ans au plus au début de l'apprentissage.

Les jeunes âgés d'au moins quinze ans peuvent toutefois être liés par un contrat d'apprentissage, s'ils justifient avoir effectué la scolarité du premier cycle de l'enseignement secondaire.

La limite d'âge supérieure peut être repoussée d'une année en cas de préparation d'un diplôme de troisième cycle de l'enseignement supérieur.

L'apprenti doit être inscrit ou en instance d'inscription dans un établissement d'enseignement pour y suivre le cycle de formation théorique mentionné au contrat d'apprentissage.

Article 9🔗

Tout employeur peut engager un apprenti s'il garantit que les conditions d'organisation de l'apprentissage, l'équipement de l'entreprise, les techniques utilisées, les conditions de travail, d'hygiène et de sécurité, les compétences professionnelles ainsi que la moralité des personnes responsables de la formation sont de nature à permettre une formation satisfaisante.

Ces garanties accompagnent l'offre d'apprentissage faite à la Direction du travail en application de l'article 4.

Article 10🔗

Les membres d'une même famille ne peuvent conclure un contrat d'apprentissage qu'avec l'accord écrit de la Direction du travail et de l'établissement d'enseignement.

Article 11🔗

La personne directement responsable de la formation pratique de l'apprenti est dénommée « maître d'apprentissage ».

Le maître d'apprentissage a pour mission de contribuer à l'acquisition par l'apprenti des compétences correspondant à la qualification recherchée et au titre ou diplôme préparé, en liaison avec l'établissement d'enseignement.

Seules peuvent être désignées en qualité de maître d'apprentissage, les personnes répondant à l'une des deux conditions suivantes :

  • 1° - être titulaire d'un diplôme ou d'un titre au moins équivalent à celui préparé par l'apprenti et relevant du même domaine professionnel et justifier d'une expérience professionnelle d'au moins trois ans dans ce domaine ;

  • 2° - justifier d'au moins cinq années d'expérience professionnelle en relation avec la qualification visée par le contrat d'apprentissage.

Article 12🔗

Ne peuvent avoir la qualité d'employeur ou de maître d'apprentissage, au sens de la présente loi, les personnes, non réhabilitées, ayant été condamnées pour crime ou attentat aux mœurs ou, au cours des cinq années qui précèdent, à une peine d'emprisonnement ferme de plus de trois mois, à Monaco ou à l'étranger.

Article 13🔗

Sauf dérogation accordée par la Direction du travail, le nombre d'apprentis ne peut dépasser :

  • 1° - pour les entreprises de 1 à 10 salariés : 1;

  • 2° - pour les entreprises de 11 à 20 salariés : 2;

  • 3° - pour les entreprises de 21 à 50 salariés : 3;

  • 4° - pour les entreprises de plus de 50 salariés : 10 % de l'effectif total habituel de l'entreprise.

Un maître d'apprentissage ne peut assurer simultanément la formation de plus de deux apprentis.

Article 14🔗

L'employeur fait mention du contrat d'apprentissage sur le registre des entrées et sorties du personnel. Toutefois, les apprentis ne sont pas pris en compte dans le calcul de l'effectif du personnel des entreprises dont ils relèvent pour l'application à ces entreprises des dispositions législatives ou réglementaires qui se réfèrent à une condition d'effectif minimum de salariés, exception faite de celles qui concernent l'hygiène, la sécurité et la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles.

Article 15🔗

La durée du contrat d'apprentissage est au moins égale à celle du cycle de formation théorique.

La Direction du travail peut autoriser que la durée du contrat d'apprentissage soit distincte de la durée normale du cycle de formation, lorsque l'établissement d'enseignement préconise d'adapter la durée de ce cycle au niveau de compétence de l'apprenti.

Article 16🔗

En cas d'échec à l'examen, le contrat d'apprentissage peut être prorogé ou un nouveau contrat d'apprentissage peut être conclu avec un autre employeur, pour une durée d'un an au plus, après accord écrit de la Direction du travail et de l'établissement d'enseignement.

Article 17🔗

Des contrats d'apprentissage successifs peuvent être conclus pour préparer des diplômes ou titres sanctionnant des qualifications professionnelles différentes.

Lorsque l'apprenti a déjà conclu deux contrats successifs de même niveau, l'accord de la Direction du travail pour conclure tout nouveau contrat d'apprentissage de même niveau est subordonné à la présentation de l'autorisation de l'établissement d'enseignement dont il relève.

Il n'est exigé aucune condition de délai entre deux contrats.

Article 18🔗

Tout nouveau contrat d'apprentissage conclu sans que toutes les obligations du précédent contrat aient été exécutées ou sans qu'il ait valablement pris fin est nul de plein droit.

Chapitre IV - De l'éxecution du contrat d'apprentissage🔗

Article 19🔗

Le contrôle de l'exécution du contrat d'apprentissage et le suivi pédagogique sont assurés, chacun pour ce qui les concerne, par la Direction du travail et l'établissement d'enseignement.

Section I - De l'éxecution du contrat d'apprentissage🔗

Article 20🔗

L'employeur est tenu d'assurer dans l'entreprise la formation pratique de l'apprenti. Il lui confie notamment des tâches ou des postes permettant d'exécuter des opérations ou travaux conformes à une progression annuelle définie en concertation avec l'établissement d'enseignement.

L'employeur s'engage envers l'apprenti à lui laisser suivre la formation dispensée par l'établissement d'enseignement et à prendre part aux activités destinées à coordonner celle-ci et la formation en entreprise.

Il doit procéder à son inscription aux examens et lui permettre de participer aux épreuves du diplôme ou du titre sanctionnant la qualification professionnelle prévue par le contrat. Une copie des documents relatifs à l'inscription aux examens est adressée à l'établissement d'enseignement et à la Direction du travail.

Article 21🔗

Si l'apprenti est mineur, l'employeur est tenu de prévenir ses parents ou son représentant légal en cas de maladie, d'absence ou de tout autre fait de nature à motiver leur intervention. Ces faits sont également signalés à l'établissement d'enseignement et à la Direction du travail.

Article 22🔗

Conformément aux dispositions de l'article 11, le maître d'apprentissage est tenu de former progressivement et complètement l'apprenti.

Il ne doit l'employer, sauf clause contraire stipulée dans le contrat, qu'aux travaux et services qui se rattachent à la qualification professionnelle recherchée.

Article 23🔗

Le maître d'apprentissage veille à ne pas affecter l'apprenti à des travaux insalubres, au-dessus de ses forces ou susceptibles de porter atteinte à sa bonne santé morale ou physique.

Aucun apprenti n'est autorisé à effectuer des travaux dangereux figurant sur la liste établie par arrêté ministériel. Par dérogation, l'apprenti peut les accomplir si sa formation le requiert et sur autorisation écrite préalable de l'inspecteur du travail qui en précise les conditions de réalisation.

Si sa formation le requiert, l'apprenti et, le cas échéant, le maître d'apprentissage doivent suivre des formations spécifiques à la sécurité.

Article 24🔗

Le maître d'apprentissage surveille le comportement de l'apprenti dans l'entreprise et avertit l'établissement d'enseignement des faits et actes d'indiscipline qu'il pourrait commettre.

Si l'apprenti est mineur, le maître d'apprentissage informe également ses parents ou son représentant légal desdits faits et actes d'indiscipline.

Article 25🔗

L'employeur est tenu de fournir à la demande des agents de la Direction du travail, toute pièce permettant de justifier du bon déroulement de la formation pratique et de la conformité aux garanties prévues à l'article 9.

Article 26🔗

En cas de risque sérieux d'atteinte à la santé ou à l'intégrité physique ou morale de l'apprenti, ou lorsque la formation professionnelle est manifestement insuffisante, l'inspecteur du travail peut prononcer la suspension du contrat d'apprentissage, après avoir, si les circonstances le permettent, procédé à une enquête contradictoire.

La Direction du travail en informe sans délai l'employeur et l'établissement d'enseignement.

Cette suspension s'accompagne du maintien par l'employeur de la rémunération de l'apprenti.

Article 27🔗

Dans le cas prévu à l'article précédent, l'employeur est tenu de prendre au plus tôt, toutes les mesures nécessaires pour écarter le risque d'atteinte à la santé ou à l'intégrité physique ou morale de l'apprenti, ou pour remédier à l'insuffisance de la formation professionnelle dispensée à l'apprenti dans l'entreprise. Le cas échéant, il peut confier la formation pratique de l'apprenti à un nouveau maître d'apprentissage satisfaisant aux conditions de l'article 11, sous réserve d'en faire la déclaration à la Direction du travail qui en avise l'établissement d'enseignement.

Après avoir effectué un nouveau contrôle, l'inspecteur du travail se prononce sur la reprise de l'exécution du contrat d'apprentissage.

Le refus par l'inspecteur du travail d'autoriser la reprise de l'exécution du contrat d'apprentissage entraîne la rupture dudit contrat à la date de notification de ce refus aux parties. Dans ce cas, l'employeur est tenu de verser à l'apprenti les sommes dont il aurait été redevable si le contrat s'était poursuivi jusqu'à son terme.

La décision de refus peut s'accompagner de l'interdiction faite à l'employeur concerné de recruter de nouveaux apprentis jusqu'à ce qu'il satisfasse à nouveau aux conditions de formation, de salubrité et de sécurité. Elle est portée à la connaissance de l'établissement d'enseignement.

Section II - Des droits et des obligations de l'apprenti🔗

Article 28🔗

Dès la conclusion du contrat d'apprentissage, l'apprenti acquiert la qualité de salarié tant sur son lieu de travail qu'au sein de l'établissement d'enseignement dont il relève et bénéficie des droits et protections liés à son statut, notamment en matière de protection sociale et d'assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Article 29🔗

L'apprenti est soumis au pouvoir de direction et de contrôle de son employeur.

Il est tenu d'effectuer le travail confié qui doit, sauf clause contraire stipulée dans le contrat, être en relation directe avec la qualification professionnelle recherchée.

Il doit respecter les règles et usages en vigueur au sein de l'entreprise.

Article 30🔗

L'apprenti est tenu de suivre la formation théorique dispensée dans l'établissement d'enseignement dont il relève.

Il est également tenu de se présenter aux épreuves du diplôme ou du titre prévu par le contrat d'apprentissage.

Article 31🔗

Sous réserve de dispositions contractuelles ou conventionnelles plus favorables, l'apprenti est soumis aux dispositions de la loi n°739 du 16 mars 1963 sur le salaire, modifiée et de la loi n° 800 du 18 février 1966 régissant la rémunération et les conditions de travail relatives aux jours fériés légaux, modifiée.

Les heures de formation effectuées par l'apprenti au sein de l'établissement d'enseignement sont considérées comme temps de travail effectif et rémunérées comme telles par l'employeur. A ce titre, l'employeur peut demander un relevé mensuel des heures de formation théorique suivies par l'apprenti.

Pour l'application de l'article 2, l'apprenti bénéficie de la législation mentionnée à l'alinéa premier. Il est rémunéré sur la base d'une deuxième année d'apprentissage.

Article 32🔗

Les dispositions de l'ordonnance-loi n° 677 du 2 décembre 1959 sur la durée du travail, modifiée sont applicables à l'apprenti.

Article 33🔗

L'apprenti bénéficie des congés prévus par la loi n° 619 du 26 juillet 1956 fixant le régime des congés payés annuels, modifiée.

Il a droit à un congé supplémentaire de cinq jours ouvrables pour la préparation du diplôme ou du titre prévu par le contrat d'apprentissage. Ce congé, qui donne droit au maintien du salaire, intervient dans le mois qui précède les épreuves. Il s'ajoute au congé prévu à l'alinéa précédent.

Article 34🔗

Lorsque le contrat d'apprentissage se poursuit par la conclusion d'un contrat de travail dans la même entreprise, les dispositions de l'article 4 de la loi n° 729 du 16 mars 1963 concernant le contrat de travail prévoyant une période d'essai ne sont pas applicables, sauf dispositions conventionnelles contraires.

La durée du contrat d'apprentissage est prise en compte pour le calcul de la rémunération et de l'ancienneté du salarié. 42

Chapitre V - De l'extinction du contrat d'apprentissage🔗

Article 35🔗

A l'expiration du contrat d'apprentissage, l'employeur délivre à l'apprenti un certificat dont la forme et les mentions sont déterminées par arrêté ministériel.

Article 36🔗

Le contrat d'apprentissage cesse de plein droit à l'échéance du terme.

La suspension dudit contrat est sans effet sur cette échéance.

Article 37🔗

Toute résiliation anticipée du contrat d'apprentissage, quel qu'en soit le motif, est notifiée à la Direction du travail, dans les formes déterminées par arrêté ministériel.

Article 38🔗

Pendant les deux premiers mois, le contrat d'apprentissage peut être résilié, par la seule volonté de l'une des parties, sans indemnité à moins de convention expresse.

Article 39🔗

A l'expiration du délai de deux mois visé à l'article précédent, la résiliation du contrat d'apprentissage ne peut intervenir que sur accord exprès des cocontractants ou dans les cas prévus aux articles 40 et 41.

Article 40🔗

Le contrat d'apprentissage est résilié de plein droit :

  • 1° - lorsque l'une des parties vient à être frappée d'une des condamnations prévues à l'article 12 ;

  • 2° - en cas de jugement constatant la cessation des paiements de l'employeur ;

  • 3° - par le décès de l'apprenti ;

  • 4° - par le décès de l'employeur ou du maître d'apprentissage et si l'entreprise est incapable de poursuivre l'exécution du contrat dans les conditions énoncées par la présente loi ;

  • 5° - lorsque l'employeur n'est plus autorisé à exercer ou quitte le territoire monégasque ;

  • 6° - par application du troisième alinéa de l'article 27 ;

  • 7° - en cas d'inaptitude médicale définitive de l'apprenti à exercer le métier auquel il voulait se préparer ;

  • 8° - lorsque l'une des parties au contrat est mobilisée dans le pays dont elle est ressortissante et ne peut plus, de ce fait, remplir ses obligations au titre du contrat d'apprentissage.

Article 41🔗

Le contrat peut être résilié à la demande de l'une ou l'autre des parties pour les motifs suivants :

  • 1° - en cas de faute grave ou de force majeure ;

  • 2° - en cas de manquements répétés de l'une des parties aux stipulations du contrat, à ses obligations légales ou aux règles applicables aux conditions de travail ;

  • 3° - en cas de grossesse, sur demande de l'apprentie ;

  • 4° - en cas de mariage de l'apprenti, à sa demande ;

  • 5° - à la demande de l'apprenti, en cas d'obtention du diplôme ou du titre préparé.

A peine de nullité, la résiliation du contrat d'apprentissage doit être autorisée par le Directeur du travail, après consultation d'une commission dont la composition et le mode de fonctionnement sont fixés par ordonnance souveraine.

Aucun avis ne peut être émis par cette commission sans que les parties aient été préalablement entendues en leurs explications ou dûment appelées à les fournir.

Article 42🔗

En cas de résiliation du contrat dans les conditions prévues aux articles 38, 39, 40 et 41, le temps d'apprentissage accompli demeure acquis à l'intéressé et lui est rémunéré à due proportion.

Dans l'hypothèse prévue à l'alinéa précédent, l'apprenti peut conclure un nouveau contrat d'apprentissage avec un autre employeur dans les mêmes conditions et pour le temps restant à courir jusqu'au terme extinctif stipulé au précédent contrat, sous réserve de l'acceptation de l'établissement d'enseignement et de la Direction du travail.

Chapitre VI - Des pénalités🔗

Article 43🔗

Les inspecteurs du travail, concurremment avec les officiers de police judiciaire, sont chargés de constater les infractions aux dispositions de la présente loi et des textes pris pour son application.

Article 44🔗

  • 1° - Toute infraction aux dispositions des articles 12, 31, 32, 33 et du second alinéa de l'article 34 est punie de l'amende prévue au chiffre 2 de l'article 29 du Code pénal.

  • En cas de récidive dans le délai d'une année, ces infractions sont punies de l'amende prévue au chiffre 1 de l'article 26 du Code pénal.

  • 2° - Toute infraction aux dispositions de l'article 23 est punie d'un emprisonnement de six jours à un mois et de l'amende prévue au chiffre 1 de l'article 26 du Code pénal ou de l'une de ces deux peines seulement.

    En cas de récidive cette infraction est punie d'un emprisonnement d'un à six mois et de l'amende prévue au chiffre 2 dudit article 26.

  • 3° - Le ou les auteurs d'une fausse mention sur le contrat l'apprentissage sont punis de l'amende prévue au chiffre 1 de l'article 26 du Code pénal.

Chapitre VII - Dispositions diverses🔗

Article 45🔗

Les conditions et les modalités de financement de l'apprentissage sont déterminées par ordonnance souveraine.

Article 46🔗

Les dispositions de la présente loi sont applicables aux contrats d'apprentissage conclus à compter de sa promulgation.

Article 47🔗

Sont abrogées la loi n° 734 du 16 mars 1963 sur le contrat d'apprentissage et toutes dispositions contraires à la présente loi.

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