Projet de loi n° 835 modifiant les dispositions du Code Civil relatives au divorce et à la séparation de corps

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Exposé des motifs🔗

La famille, conçue comme l'union entre l'homme et la femme en vue de la procréation, est la cellule naturelle fondamentale qui, depuis le fond des âges, structure la communauté humaine et est indispensable à sa pérennité.

Sacralisée par le mariage, les religions y accordent une valeur primordiale et notamment le Christianisme. Mais l'importance capitale du mariage pour la société n'a bien évidemment pas échappé au droit et, en particulier, à cette branche essentielle du droit civil que constitue le droit de la famille. De fait, et suivant l'adage ubi societas, ibi jus, les hommes de loi se sont, au fil des siècles, attachés à définir des règles encadrant l'institution du mariage.

Dans ce domaine plus que d'autres, il a importé de déterminer la part respective du sacré et du profane. C'est ainsi qu'aujourd'hui, le mariage peut s'analyser comme un sacrement pour le clerc, et comme un contrat pour le civiliste. Cette césure n'est au demeurant pas absolue. En effet, le mariage religieux n'est pas exempt de règles de droit et parallèlement, le mariage civil est un contrat qui, en raison de l'importance que sa conclusion revêt dans la vie d'un individu, est assorti d'une solennité à nulle autre pareille.

Dans la Principauté, le mariage est et demeure, à de très nombreux égards, l'un des pivots spécifiques de l'organisation sociale monégasque. Dans ce sillon, le Gouvernement Princier entend, dès à présent, affirmer formellement et solennellement l'attachement qu'il porte au principe du mariage.

Cependant et quelle que soit la force - tant juridique que morale ou personnelle - de l'engagement des époux au moment de l'échange de leurs consentements, les légistes ont, de longue date, eu à s'interroger sur la rupture du lien matrimonial et ce, au travers de divers concepts tels le divorce ou la séparation de corps.

La question se pose avec d'autant plus d'acuité dans le monde occidental contemporain. Il serait vain, en effet, de nier que nonobstant l'attrait effectif que le mariage revêt toujours pour les couples - jeunes et moins jeunes - la stabilité des unions n'est plus aujourd'hui, sous l'angle statistique à tout le moins, aussi constante que jadis.

De fait, le divorce, savoir la dissolution judiciaire du mariage civil, de même que la séparation de corps, sont depuis longtemps admis dans notre droit. A ce jour, ils sont plus précisément régis par les articles 197 et suivants du Code civil, dans leur rédaction issue de la loi n°1.089 du 21 novembre 1985.

S'agissant du divorce, hors le cas exceptionnel de la maladie, il ne peut normalement être prononcé que pour une faute déterminée du conjoint, savoir l'adultère ainsi que les excès, sévices ou injures graves ou encore les condamnations pénales. L'approche de la rupture du lien matrimonial, qui est actuellement celle de notre droit positif, procède donc d'un contexte dans lequel les conjoints sont en litige au motif de la méconnaissance, réelle ou supposée, d'une obligation substantielle du contrat de mariage.

Il est néanmoins des situations dans lesquelles les époux souhaitent mettre un terme à leur union sans pour autant que cette commune intention soit révélatrice d'un différend, plus ou moins envenimé, mais tout simplement d'une orientation divergente de vie.

Face à cette demande sociale, s'est forgée une pratique en quelque sorte praeter legem, consistant, pour le mari et la femme, à faire valoir, de manière concertée, des griefs réciproques analysés, par les juridictions, comme des fautes mutuelles justifiant, de jure, la rupture du lien matrimonial.

Quelle que soit la fonctionnalité de ce système, il est clair qu'il n'est pas satisfaisant sur le plan conceptuel puisqu'il contraint chaque membre du couple à s'attribuer des fautes dans le but, en réalité, de dissoudre le mariage par voie consensuelle. A l'effet d'atteindre cet objectif de manière claire et transparente, le Conseil National a adopté, lors de la séance publique du 27 juin 2005, une proposition de loi portant le n° 177.

Le Gouvernement Princier a considéré cette démarche avec l'attention légitime qu'elle mérite et regarde, après examen, comme une évolution positive du droit monégasque de la famille le fait de pouvoir satisfaire, sans détours ni artifices, la volonté de conjoints, déterminés à mettre un terme amiable à leur relation matrimoniale. Il y a lieu toutefois, dès ce stade, de souligner que, dans l'esprit du Gouvernement, un changement législatif en la matière ne saurait en aucun cas avoir pour conséquence de faire du divorce un acte anodin, banal même, déconsidérant le lien matrimonial pour aboutir à ce que l'on nomme parfois familièrement le « mariage jetable ».

Cela étant, il a été indiqué à la présidence de l'Assemblée que la proposition peut être transformée en projet de loi, sous réserve d'adaptations juridiques et techniques jugées opportunes, sans dénaturer le texte pour autant. Dans ces conditions, en application de l'article 67 de la Constitution, engagement a été pris de déposer un tel projet dans un délai d'un an à compter du 4 janvier 2006.

Bien qu'ambitieuse, la réforme envisagée n'en reste pas moins modérée. Il s'agit, en effet de ne pas remettre en cause les acquis de la pratique actuelle pour autant qu'ils restent compatibles avec les nouveaux principes consacrés par le projet de loi, lesquels se déclinent en deux volets.

Le premier vise à permettre le passage d'un « divorce sanction » à un « divorce remède » ou « divorce constat » en reconnaissant à la volonté des époux la place qui lui revient, sans pour autant faciliter les séparations.

Pour ce faire, la loi projetée instaure la possibilité d'un divorce consensuel, sur requête conjointe des époux ou sur requête unilatérale acceptée. Elle reconnaît également un droit au divorce au conjoint séparé de fait depuis trois ans.

Le projet de loi s'attache parallèlement à ne pas complexifier la procédure de divorce, compte-tenu des nouveaux cas d'ouverture qu'il consacre, en instaurant un tronc commun applicable à l'ensemble des instances initiées sur requête d'un époux.

Il introduit enfin divers dispositifs visant, dans les cas d'un divorce pour faute ou lorsque les époux ne s'entendent pas sur le principe de la séparation, à dédramatiser le divorce et à pacifier les rapports entre époux en apaisant les conflits en cours de procédure. Le recours à la médiation familiale est ainsi rendu possible et encouragé ; un mécanisme souple est en outre institué permettant aux époux d'opter à tout moment et quel que soit le fondement de leur demande initiale pour un divorce consensuel.

Le second entend moderniser les conséquences du divorce en privilégiant un règlement rapide de celui-ci à travers une efficacité accrue des procédures.

Sur ce point, le système de la pension alimentaire est supprimé et remplacé par un système de prestation compensatoire inspiré du dispositif français qui présente l'avantage d'être à la fois plus pertinent sur le plan juridique et plus équitable au plan de ses conséquences.

Les effets du divorce sont harmonisés, sauf dans l'hypothèse où le divorce est prononcé aux torts exclusifs d'un époux, auquel cas des dispositions spécifiques sont consacrées en matière financière pour tenir compte du fait que le divorce est entièrement imputable, dans ce cas de figure, à l'un des époux.

Enfin, diverses mesures sont introduites aux fins de permettre à la fois aux époux de régler conventionnellement les conséquences du divorce et à la juridiction saisie de préparer et de suivre plus efficacement la liquidation et le partage du régime matrimonial.

Sous le bénéfice de ces observations d'ordre général, le présent projet de loi appelle les commentaires particuliers ci-après.

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Le présent projet de loi est composé de six articles.

L'article premier réalise l'essentiel de l'actualisation du droit positif en modifiant le titre VI du livre I du Code civil relatif au divorce et à la séparation de corps tout en conservant son architecture. Ainsi, aux quarante-sept articles existants qui composent les chapitres I et II dudit titre, l'article premier procède à de nécessaires adaptations, abroge des dispositions devenues obsolètes et ajoute de nouveaux articles dont l'ensemble a conduit à une inévitable renumérotation.

Cette méthode de travail a été privilégiée dans le but de fournir aux justiciables et aux professionnels qui les conseillent un texte consolidé, leur assurant les moyens d'une connaissance rapide et globale de la loi, de manière à ne pas retarder la mise en oeuvre effective des nouvelles possibilités ouvertes par celle-ci.

Le chapitre premier, toujours intitulé « Du divorce », se subdivise non plus en trois mais en quatre sections, respectivement intitulées :

  • Section I – Des cas de divorce ;

  • Section II – De la procédure du divorce ;

  • Section III – Du prononcé du divorce ;

  • Section IV – Des conséquences du divorce.

Chacune de ces sections va donner lieu à des développements particuliers du présent exposé des motifs étant précisé que l'option a été prise de ne pas, sauf exception, commenter les dispositions dont le fond demeure ne varietur par rapport à celles en vigueur.

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La section I comprend les articles 197 à 199, projetés, du Code civil. Nouvellement intitulée « Des cas de divorce », elle constitue le coeur même de la réforme envisagée dès lors qu'elle substitue au régime monolithique existant un régime pluraliste en distinguant désormais deux grandes catégories de divorces savoir, les divorces conflictuels et les divorces consensuels.

Les premiers sont regroupés au sein de l'article 197 nouveau qui reprend les causes de divorce visées aux articles 197 et 198 actuels en y ajoutant toutefois le divorce « pour rupture de la vie commune ». Souhaité par un seul des époux et exclusivement fondé sur le constat objectif de la désunion, ce divorce est prononcé dès qu'il a été démontré que les époux vivent séparés de fait depuis trois ans à compter de la date de l'assignation en divorce. Il est à relever par ailleurs que les notions « d'adultère », « d'excès, de sévices ou d'injures graves », qui sont actuellement énumérées aux chiffres premier et deuxième de l'article 197 du Code civil, disparaissent au profit de la notion générale de « faute » aux fins de garantir au texte de loi une plus grande souplesse d'application.

Si l'emploi d'une formule générale au lieu et place d'une énumération limitative de faits élargit indiscutablement l'éventail des motifs susceptibles de justifier une demande en divorce pour faute, cet élargissement n'en reste pas moins modéré dans la mesure où le texte précise, dans le souci d'écarter toute demande futile ou inconsidérée, que la faute est caractérisée uniquement si le fait invoqué constitue « une violation grave ou renouvelée des devoirs du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune ». Il va sans dire que l'adultère comme les sévices et injures, présentement visés par le Code, demeureront des fautes au sens de la disposition projetée.

Les seconds savoir, le divorce sur requête conjointe, communément appelé dans les Etats qui connaissent cette institution « divorce par consentement mutuel », et le divorce accepté constituent l'une des innovations majeures de cette réforme et sont introduits aux articles 198 et 199 modifiés. Ainsi les époux peuvent désormais divorcer lorsqu'ils s'accordent sur le principe du divorce, que la requête initiale ait été déposée par l'un d'eux seulement ou conjointement.

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La section II est toujours intitulée « De la procédure du divorce ». En revanche elle s'articule désormais autour de trois nouveaux paragraphes. Ce nouvel agencement s'est avéré nécessaire pour tenir compte de l'introduction du divorce sur requête conjointe qui, parce qu'il procède dès l'origine d'un consentement mutuel des époux au divorce, obéit à des règles de procédure spécifiques.

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Le paragraphe I, intitulé « De la procédure sur requête d'un des époux », se compose des articles 200-1 à 200-16, projetés, du Code civil. Il conserve, pour l'essentiel, les dispositions du texte existant dans le souci de ne pas bouleverser la pratique judiciaire du divorce à Monaco. Ainsi, les articles 202, 204, 205 et 206-7 actuels sont repris, sur le fond, respectivement aux articles 200-4, 200-7, 200-8 et 200-16 projetés. Les autres dispositions modifient ou précisent la législation en vigueur de la manière suivante.

L'article 200-1 du présent projet de loi reprend les dispositions de l'article 199 actuellement en vigueur sans maintenir toutefois l'obligation de motiver la demande en divorce. L'absence d'indication, dans la requête initiale, quant au type de divorce visé et aux motifs qui conduisent à celui-ci, a pour dessein de permettre à l'époux demandeur, qui le souhaite, de réserver sa position jusqu'à l'audience de conciliation et de favoriser le dialogue lors de celle-ci dans la tentative de sauvegarde du mariage. En revanche l'obligation de motivation est expressément maintenue lorsque le requérant sollicite l'autorisation de résider seul au domicile conjugal puisque, dans cette hypothèse, le caractère non contradictoire de la décision ainsi que ses effets immédiats sur le conjoint et la famille requièrent que le juge puisse apprécier en toute connaissance de cause les faits, par nature d'une particulière gravité, justifiant une telle demande.

L'article 200-2 nouveau reprend sur le fond les dispositions de l'actuel article 200. Il opère cependant un ajout au deuxième alinéa afin de résoudre notamment la question du sort des enfants mineurs vivant au foyer lorsque l'un des parents est autorisé à avoir une résidence séparée ou à résider seul au domicile conjugal. En effet, jusqu'à présent, il ne ressort pas de la loi que le juge ait le pouvoir de statuer, dans la décision d'autorisation, sur la question de la résidence habituelle des enfants. L'option a donc été prise de conférer clairement ce pouvoir au juge, eu égard notamment aux faits de violences qui justifient que les enfants puissent, lorsque cela est requis dans l'intérêt de leur équilibre ou de leur sécurité, être confiés à la garde de l'un des parents et ce, dans l'attente de la décision contradictoire à intervenir sur les mesures provisoires et sous réserve de référé dans les conditions de droit commun.

Parallèlement, dans un souci de protection des personnes vulnérables, le dernier alinéa étend la possibilité d'octroyer judiciairement un curateur aux époux défendeurs incapables de manifester leur volonté et non plus seulement à ceux présentant une maladie mentale.

L'article 200-3 reprend à l'identique les dispositions de l'actuel article 201 en le complétant, par souci d'exhaustivité, d'une référence aux biens indivis dont, à défaut de disposition expresse, il semblait que le juge n'ait pas eu jusqu'alors la possibilité d'ordonner, à titre conservatoire, la mise sous scellés comme il peut le faire s'agissant des biens de la communauté ou des biens personnels d'un époux.

Les articles 200-5 et 200-6 nouveaux relatifs à l'audience de conciliation reprennent les dispositions de l'article 203 actuellement en vigueur tout en y apportant des modifications de formes rendues nécessaires à raison de la modernisation du régime du divorce. L'objectif premier reste toujours la réconciliation des époux et à défaut, une responsabilisation de ceux-ci sur le déroulement de la procédure.

Ainsi, le texte projeté apporte une précision d'ordre sémantique à la rédaction du quatrième alinéa de l'article 203 actuel en prévoyant que l'ordonnance dite « de non-conciliation » constate, non plus le défaut de conciliation, mais « le maintien de la demande en divorce », dans la mesure où les époux peuvent désormais se concilier sur le principe du divorce (cf. infra article 200-9).

Dans le souci de préserver l'intérêt des parties, le principe de la présence possible des conseils lors de la phase de conciliation est affirmé, ainsi que celui de leur audition par le juge. Dans le même ordre d'idées, le délai pour interjeter appel de la décision du Président du Tribunal de première instance sur les mesures provisoires est prorogé de 8 à 15 jours à compter de la signification de celle-ci.

L'article 200-9 nouveau constitue l'une des innovations majeures de cette réforme dès lors qu'il a pour objectif de dépassionner la procédure de divorce en donnant la possibilité aux époux, à tout moment, de s'orienter d'un divorce conflictuel vers un divorce consensuel à savoir, le divorce accepté défini à l'article 198 projeté. L'acceptation, une fois donnée dans les formes légales, revêt un caractère définitif et ne peut être ultérieurement rétractée, ceci afin d'éviter qu'il en soit fait un usage dilatoire pour tenter de faire échec au prononcé du divorce. Toutefois, l'action en divorce peut toujours s'éteindre par la réconciliation des époux, le but étant de sauvegarder les liens lorsque cela s'avère encore possible. Il est enfin à préciser que pour inciter les parties à opter pour cette forme de divorce plus consensuelle, l'article 200-10 projeté organise l'immunité de l'époux à l'origine de la demande dans le cas où il se voit opposer le refus de son conjoint.

L'article 200-11 du projet de loi reprend les dispositions des articles 206-4 et 206-5 actuellement en vigueur. Il apporte cependant diverses adaptations procédurales, rendues nécessaires par l'augmentation des cas de divorce, en ajoutant deux nouveaux alinéas.

Le premier précise qu'une demande reconventionnelle ne peut tendre qu'au divorce lorsque la demande principale est fondée sur la rupture de la vie commune. Cette disposition pose ainsi le principe novateur selon lequel le prononcé du divorce est désormais de droit lorsque les époux vivent séparés de fait depuis trois ans au moins.

Le second règle les cas de concours de demandes en divorce lorsque l'une d'elles est fondée sur la faute. Il prévoit ainsi que la juridiction saisie examine en priorité la demande pour faute et, en cas de rejet de celle-ci, statue sur la demande concurrente.

L'article 200-12 nouveau écarte, pour des raisons évidentes de protection, le conjoint incapable de toute procédure consensuelle de divorce.

L'article 200-13 projeté, reprend les dispositions de l'article 206-14 actuel, en précisant que le demandeur en divorce incapable est, à défaut de tuteur, assisté dans tous les actes de procédure par son administrateur de tutelle et ce, afin d'appréhender les tutelles qui, bien que déjà ouvertes, ne sont toujours pas, pour des raisons d'opportunité, organisées par le tribunal.

Sur un plan formel, le présent article corrige une erreur matérielle en modifiant la référence du Code pénal.

Par parallélisme avec l'article précédent, l'article 200-14, qui réitère les dispositions de l'article 206-15 en vigueur relatif à l'incapable majeur défendeur dans une procédure de divorce, prévoit expressément l'intervention de l'administrateur de tutelle.

Enfin, l'article 200-15 projeté complète les dispositions de l'article 206-6 actuel relatives à l'enquête, en conférant au juge la faculté d'entendre toute personne, et non plus les seuls parents. Toutefois, afin de ne pas impliquer directement les descendants dans les conflits familiaux, et préserver ainsi une certaine paix familiale, il est expressément prévu que les enfants ne peuvent être entendus sur les griefs invoqués par les parents.

Pour être complet, il est à relever que l'article 206-1 en vigueur, visant à informer le défendeur de l'instance introduite à son encontre lorsque l'assignation n'a pu lui être délivrée, est supprimé au vu de son caractère obsolète, la loi encadrant suffisamment les conditions de délivrance de l'assignation et l'hypothèse d'un défaut du défendeur.

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Le Paragraphe II, intitulé « De la procédure sur requête conjointe », se compose des articles 201-1 à 201-4, projetés, du Code civil. Il s'attache à définir un cadre procédural qui soit à la fois souple et respectueux de la volonté des parties, pour tenir compte du caractère consensuel, dès l'origine, de ce cas de divorce, tout en maintenant l'aspect judiciaire au premier plan, afin d'éviter de tomber dans les excès d'un divorce à l'amiable banalisé, peu respectueux de l'institution du mariage et peu à même de présenter les garanties d'un processus juste et équitable.

Pour ce faire, l'article 201-1 oblige les époux à s'accorder, non seulement sur le principe du divorce, mais également sur ses conséquences. Ainsi les parties doivent-elles indiquer, dès la remise de la requête initiale, les mesures destinées à assurer l'existence de la famille durant la procédure de divorce telles que l'organisation de la vie du couple au plan matériel et financier ou encore la charge, l'entretien et l'éducation des enfants, et déposer une convention qui règle dans son ensemble les effets du divorce.

Par ailleurs, pour éviter toute demande en divorce inconsidérée qui reposerait sur un constat prématuré, le choix a été pris d'écarter toute requête conjointe durant les six premiers mois de mariage.

Conformément à l'article 201-2 nouveau, la procédure au fond a lieu, à l'instar des autres cas de divorce, devant le tribunal de première instance. Cependant, contrairement à la procédure sur requête unilatérale, la formalité de l'assignation n'est pas requise du fait du caractère conjoint de la demande qui rend cette formalité peu appropriée.

En revanche, l'article 201-3 projeté conserve une phase de conciliation obligatoire mais destinée avant tout, dans ce cas de figure, à permettre au juge de constater que chacun des époux est éclairé quant au sens de la procédure qu'il entame et qu'il consent librement à s'y engager.

Le rôle du juge lors de la phase de conciliation est des plus important car il exerce en outre un contrôle sur les mesures provisoires proposées par les époux, afin de s'assurer que l'accord amiable auquel sont arrivés ces derniers est équilibré et respecte les intérêts de chacun d'eux ainsi que celui des enfants. Ainsi, le magistrat conserve-t-il la faculté, en statuant sur ces mesures, d'entériner les propositions des époux ou de les modifier lorsque cela s'avère nécessaire dans l'intérêt de la famille.

Compte tenu du caractère consensuel de ce divorce et afin de ne pas alourdir la procédure inutilement, la saisine du tribunal résulte du renvoi de l'ordonnance constatant le maintien de la demande en divorce, l'enrôlement étant effectué directement par le greffe.

Enfin, en vue d'imposer aux parties un délai de réflexion minimal de nature à garantir leur parfait consentement, le texte prévoit que la première audience au fond ne peut se tenir avant un mois suivant la date de l'audience de conciliation.

Un délai de réflexion plus long peut être aménagé au bénéfice des parties avant que le divorce soit prononcé. Toutefois, afin de ne pas allonger inutilement la durée de la procédure sur requête conjointe, ce nouveau délai de réflexion ne peut intervenir qu'à la demande conjointe des parties et ne peut excéder six mois, sous peine de péremption de l'instance. Tel est l'objet de l'article 201-4.

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Les dispositions procédurales appelées à s'appliquer à toutes les catégories de divorce sont regroupées au sein du paragraphe III, intitulé « Dispositions générales ». Il comporte les articles 202-1 à 202-10, projetés, du Code civil. Conformément à l'objectif poursuivi par le présent projet, il reprend sur le fond, autant que faire se peut, les dispositions du texte existant. Ainsi les articles 206-3, 206-13, 206-16 et 206-8 actuels sont respectivement renumérotés 202-6, 202-8, 202-9 et 202-10. Les autres dispositions précisent ou complètent la législation en vigueur de la manière suivante.

L'article 202-1 projeté relatif aux « mesures provisoires » regroupe celles visées actuellement au cinquième alinéa de l'article 203. Le projet de loi ajoute cependant la faculté pour le juge, dès le stade de la conciliation, de procéder d'office ou à la demande des parties à la désignation d'un professionnel, notaire ou avocat la plupart du temps, chargé de dresser un inventaire estimatif des biens du ménage. Cette mesure paraît en effet souhaitable dans l'optique d'une diminution de la durée des procédures, en favorisant la constitution rapide des éléments qui permettront au tribunal saisi au fond de se prononcer sur les conséquences financières du divorce.

Dans le même ordre d'idées, partant du constat qu'un laps de temps souvent long peut s'écouler avant le règlement complet des conséquences patrimoniales du divorce, l'article 202-2 nouveau, qui reprend le fond de l'article 206-2 actuel, se voit compléter d'un nouvel alinéa permettant au tribunal de désigner, avant dire droit, un notaire chargé d'élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial et de formation des lots à partager, en vue de faciliter les opérations de liquidation et de partage à intervenir à l'issue de la procédure de divorce.

L'article 202-3 présente un intérêt tout particulier puisqu'il est l'occasion de mettre notre droit en conformité avec la Convention Internationale des Droits de l'Enfant. Rendue exécutoire à Monaco par l'Ordonnance Souveraine n° 11-003 du 1er septembre 1993, elle impose aux parties contractantes de disposer, dans leur corpus législatif, d'un mécanisme juridique donnant la possibilité à l'enfant mineur « d'être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative l'intéressant, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un représentant ou d'un organisme approprié ».

Pour ce faire, il est prévu que l'enfant peut, d'office ou à la demande du juge, exprimer ses « sentiments ». Terme choisi, il s'agit de l'écouter parler de ses problèmes, de ses craintes, de ses affections, de ses ressentiments, d'être attentif à tout ce que l'enfant veut livrer de son univers affectif. En aucun cas, la délivrance de cette confidence ne doit être interprétée comme un consentement ou une opinion. C'est d'ailleurs pour éviter cette dérive et garantir une certaine distance entre l'enfant et la procédure en cours que le texte précise expressément que l'audition de l'intéressé ne fait de lui ni un partenaire, ni un adversaire, ni un témoin, ni a fortiori l'arbitre ou le juge de ses parents.

Dans la tentative de pacification du divorce, les dispositions projetées de l'article 202-4 constituent une autre innovation majeure, en posant le principe du recours à la médiation familiale. Ainsi les époux peuvent-ils, à tout moment de la procédure, c'est-à-dire tant devant le tribunal qu'en amont pendant la phase de conciliation, se voir proposer de rencontrer un médiateur familial ou, à défaut, se voir enjoindre de le faire lorsqu'il s'avère opportun de tenter de les rapprocher sur certains points plus sereinement que dans le cadre judiciaire.

La médiation étant un processus par essence volontaire, l'aboutissement favorable de cette mesure à travers une conciliation relève bien entendu du seul ressort des parties. Celles-ci sont ainsi responsabilisées et incitées à dégager ensemble, dans le cadre d'un processus amiable mais néanmoins encadré, des solutions viables dont ils sont eux-mêmes, plutôt que l'organe judiciaire, les auteurs.

Dans une même optique de responsabilisation, l'article 202-5 nouveau reconnaît aux époux, en dehors du divorce sur requête conjointe, la possibilité, et non l'obligation, de soumettre à la juridiction saisie une convention destinée à régler de façon amiable, en tout ou en partie, les conséquences du divorce. Cette convention doit respecter suffisamment l'intérêt des enfants et celui de chaque époux et n'a force exécutoire qu'à compter de son homologation par le tribunal.

Enfin, l'article 202-7 projeté limite les possibilités d'appel des jugements de divorces consensuels. Ces derniers étant prononcés du fait de l'accord des époux, il convient d'éviter qu'ils rétractent leur consentement en cause d'appel sous peine de compromettre leur efficacité.

Dès lors, seules les conséquences du divorce peuvent dans un souci de souplesse, être réformées, sauf lorsqu'elles résultent d'une convention passée entre époux et homologuée par le juge. Les parties n'ayant dans ce cas plus d'intérêt à agir.

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Pour permettre une meilleure lisibilité de la future loi une nouvelle section III, intitulée « Du prononcé du divorce », est insérée au chapitre premier. Elle comporte les articles 203-1 à 203-4, projetés, du Code civil.

L'article 203-1 nouveau est particulièrement intéressant puisqu'il complète le droit positif en énonçant expressément les conditions légales qui subordonnent le prononcé du divorce tout en asseyant légalement le pouvoir souverain des juges du fond en la matière. Ainsi, pour exemple, le divorce sur requête conjointe (article 199) ne peut être prononcé que si le tribunal a préalablement acquis la conviction que le consentement des parties est éclairé, que leur volonté de s'affranchir du lien conjugal est réelle, et que la convention tendant à régler l'ensemble des conséquences du divorce est conforme à leur intérêt et celui des enfants. Il convient de préciser que la non homologation de ladite convention, en raison de dispositions jugées inadaptées ou non conformes à l'intérêt de la famille, n'interdit pas le prononcé des autres cas de divorce. Elle constituera, à tout le moins, une base dont la juridiction saisie pourra tenir compte pour statuer sur les conséquences du divorce, l'objectif étant de concilier l'expression de la volonté des époux avec les impératifs de défense et de protection de la partie la plus faible.

Pour le reste, cette nouvelle section reprend, dans le fond et la forme, les articles 206-10, 206-11 et 206-18 existants lesquels sont renumérotés respectivement 203-2, 203-3 et 203-4.

En revanche, l'actuel article 206-17, prévoyant que la décision prononçant le divorce n'est pas susceptible d'acquiescement, est supprimé en vue de favoriser le cas échéant une transcription plus rapide du jugement de divorce.

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La section traitant des effets du divorce est non seulement intitulée « Des conséquences du divorce », en raison de l'emploi répété de cette expression dans les nouvelles dispositions introduites par le présent projet mais également renuméroté section IV compte tenu de l'adjonction de la nouvelle section III présentée ci-avant. La section IV s'articule autour de deux nouveaux paragraphes contenant respectivement les dispositions communes à tous les types de divorce et les dispositions propres au divorce pour faute. En effet, pour ce cas de divorce, l'attribution des torts emportent des conséquences patrimoniales spécifiques qui justifient qu'il en soit traité séparément. Cette section est majeure en ce qu'elle constitue le second volet de la réforme qui remodèle profondément les conséquences patrimoniales du divorce.

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Le paragraphe I, intitulé « Dispositions générales », se compose des articles 204-1 à 204-7, projetés, du Code civil, dont quatre ont pour objectif de compléter ou de moderniser le droit positif.

L'article 204-1 nouveau maintient, sur le fond et la forme, les dispositions de l'article 206-19 actuellement en vigueur.

En revanche, les articles 204-2 et 204-3 projetés reprennent respectivement les dispositions des articles 206 et 206-21 sous réserve des modifications suivantes.

Dans un souci de cohérence, l'article 204-2 dispose que les actes portant sur des biens communs et conclus par un seul des époux sont déclarés inopposables à l'autre, non plus au jour de la présentation de la requête initiale, mais uniquement à compter de l'ordonnance constatant le maintien de la demande en divorce, seul moment à partir duquel les parties expriment formellement leur volonté de mettre fin au lien conjugal.

Par ailleurs, en vue d'une plus grande souplesse, l'article 204-3 donne quant à lui, en sus d'un éventuel accord des parties, la faculté pour la juridiction saisie d'autoriser un époux à continuer de faire usage de son nom marital lorsqu'il justifie d'un intérêt pour lui ou pour ses enfants.

L'article 204-4 nouveau est intéressant à double titre puisqu'il met fin non seulement à un vide législatif, en transposant expressis verbis une pratique judiciaire qui jusqu'ici n'était encadrée par aucun texte de loi, et qu'il assoit légalement la compétence du tribunal de première instance pour statuer sur les litiges relatifs à la liquidation du régime matrimonial, y compris lorsque le divorce a été prononcé en appel.

L'article 204-5 projeté constitue une autre innovation et non des moindres dès lors qu'il entend moderniser les conséquences du divorce à travers un règlement rapide en substituant au régime de la pension alimentaire, prévue actuellement à l'article 206-23, le régime de la prestation compensatoire inspiré en grande partie de la législation du pays voisin.

Pour comprendre les raisons de cette substitution, il convient de rappeler que la pension après divorce n'est ni plus ni moins que la survivance du devoir de secours né du mariage. Toutefois, la vocation alimentaire de cette indemnité a pour effet d'obliger l'époux débiteur à assurer la subsistance de son ancien conjoint, le plus souvent pendant une durée indéterminée, alors même que le divorce a pour finalité première de rompre définitivement les liens du mariage.

Tout en reprenant l'idée globale d'une compensation représentative de la perte du devoir de secours, le projet de loi cherche à gommer les conséquences techniques discutables de cette idée généreuse en introduisant un mécanisme terminal de règlement définitif après divorce.

Pour ce faire, le texte dispose sans ambiguïté « que le divorce met fin au devoir de secours » mais précise immédiatement, dans le souci de ne pas rajouter au traumatisme que représente toujours une séparation, qu'une indemnité peut être accordée en vue de compenser la disparité financière immédiate que peut occasionner le divorce, même prononcé à titre consensuel.

Dans le but d'éviter que les effets du divorce se perpétuent dans le temps, comme cela est le cas pour la pension alimentaire, le texte projeté précise que la prestation compensatoire est acquittée à titre définitif sous la forme d'un capital, en un maximum de cinq versements annuels ou, le cas échéant, par attribution de biens en propriété ou d'un droit temporaire d'usage, d'habitation ou d'usufruit. Dans ce dernier cas, pour tenir compte du caractère affectif de certains biens, l'accord de l'époux débiteur est néanmoins nécessaire lorsque ceux-ci lui sont transmis par donation ou succession. Naturellement, et conformément aux dispositions du présent projet, les époux peuvent toujours convenir d'autres modalités de versement, pour autant que l'intérêt des époux et des enfants soit préservé.

Dans le souci de guider le magistrat en charge de fixer le montant de l'indemnisation, l'article énumère, à titre indicatif, les critères qui servent de base au calcul de celle-ci. Figurent ainsi, la durée du mariage, l'âge et l'état de santé des époux, leur situation professionnelle respective et leur patrimoine estimé ou prévisible en capital et revenus.

Enfin, pour garantir le paiement de la prestation compensatoire, la juridiction qui prononce le divorce peut exiger de l'époux débiteur qu'il constitue des garanties au service de la prestation.

Nonobstant cette substitution, le versement d'une pension après divorce est maintenu dans deux cas de figure.

Le premier a trait au divorce prononcé pour maladie du conjoint : dans cette hypothèse, l'article 206-25 actuel prévoit que le tribunal peut mettre à la charge du conjoint ayant pris l'initiative du divorce une pension destinée à l'époux malade. Cette disposition est reprise à l'article 204-6 nouveau, le projet de loi ayant entendu, par exception à ce qui a été développé précédemment, maintenir expressément le devoir de secours entre époux lorsque la maladie dont le conjoint est victime est la cause unique du divorce. La nécessité de pourvoir à l'entretien et aux soins de l'époux malade, dont l'état est par définition d'une particulière gravité, justifie que l'autre époux continue d'assumer cette charge même si la loi lui reconnaît parallèlement la possibilité de refaire sa vie, dans la mesure où le lien conjugal est définitivement altéré du fait de cette maladie.

Le second concerne les enfants, puisque l'article 204-7 nouveau, qui reprend sur le fond les dispositions de l'article 206-20 actuel, dispose que l'époux chez qui l'enfant n'a pas sa résidence habituelle est tenu de contribuer à son entretien.

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Le paragraphe II, intitulé « Dispositions propres au divorce pour faute », est composé des articles 205-1 à 205-3, projetés, du Code civil. Il vise le cas de figure dans lequel le divorce est entièrement imputable à l'un des conjoints. Les dispositions du présent paragraphe ont pour objet de sanctionner l'époux par la faute duquel intervient le divorce et de réparer le préjudice subi par son conjoint du fait des comportements ayant conduit à la rupture du lien conjugal.

A ce stade, une précision mérite d'être apportée. Ces dispositions ne s'appliquent pas au divorce prononcé pour condamnation pénale, car même si le divorce est imputable à l'époux condamné du fait d'agissements répréhensibles rendant intolérable pour le conjoint le maintien de la vie commune, ce divorce ne résulte généralement pas directement d'une violation des devoirs et obligations du mariage méritant, à ce titre, d'être sanctionnée dans le cadre de la procédure de divorce, sauf à ce que la condamnation soit prononcée à raison de la commission d'une infraction grave à l'encontre du conjoint ou des enfants, une telle hypothèse ouvrant alors tout logiquement la voie du divorce pour faute.

L'article 205-1 du présent projet reprend les dispositions de l'article 206-22 existant qui prévoit que le divorce emporte révocation de plein droit des avantages matrimoniaux consentis pendant le mariage à l'époux contre lequel le divorce a été obtenu ; a contrario et à moins que l'un des époux en fasse la demande, le divorce est sans effet sur le sort des donations et avantages matrimoniaux consentis pendant le mariage lorsque le divorce est prononcé pour toute autre raison que la faute exclusive d'un époux.

L'article 205-2, qui constitue une nouveauté, prive du droit à prestation compensatoire, pour autant qu'il ait pu y prétendre, l'époux aux torts exclusifs duquel le divorce est prononcé. Néanmoins, lorsque cette disposition est susceptible d'être trop pénalisante ou d'entraîner des conséquences manifestement inéquitables, au regard de la longévité du mariage et des sacrifices consentis par l'époux concerné pour l'éducation des enfants ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, la juridiction a la faculté d'allouer à ce dernier une compensation pécuniaire exceptionnelle.

Enfin, et comme c'est déjà le cas aujourd'hui au regard de l'article 206-24, il est toujours possible, conformément à l'article 205-3 projeté, d'allouer des dommages-intérêts à l'époux au profit duquel le divorce est prononcé en vue de contribuer, dans ces circonstances où l'imputation des torts au conjoint est totale, à la reconnaissance des fautes commises et à la réparation de la souffrance endurée au travers d'une procédure spécifique d'indemnisation.

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Le chapitre II, intitulé « De la séparation de corps », comprend les articles 206-1 à 206-12, projetés, du Code civil. Il reprend, autant que faire se peut, la législation en vigueur. Ainsi, les articles 206-26, 206-27, 206-29, 206-31 et 206-32 actuels sont transposés respectivement aux articles 206-1, 206-2, 206-4, 206-6 et 206-9. Les autres dispositions sont complétées ou modifiées en vue de les adapter à celles du chapitre premier puisque le régime de la séparation de corps suit traditionnellement, sauf exception, celui du divorce.

L'article 206-3 reprend ainsi les dispositions de l'actuel article 206-28. Toutefois, eu égard à son caractère inutilement rigide, l'interdiction faite à l'époux défendeur de former une demande reconventionnelle en divorce est supprimée et remplacée par un nouvel alinéa particulièrement utile sur le plan pratique, puisqu'il a vocation à régler le cas où une demande en divorce et une demande en séparation de corps sont concurremment présentées. En cette occurrence, la rivalité des deux régimes se résout en faveur du divorce, le but étant de ne pas priver l'époux fondé dans sa demande au droit de se remarier. Plus particulièrement, lorsque les demandes sont toutes les deux fondées sur la faute, il est alors précisé que le divorce est prononcé, dans un souci d'équité, aux torts partagés des époux.

L'article 206-5 projeté apporte une plus grande souplesse puisque l'interdiction susceptible d'être faite à un époux d'utiliser le nom de son conjoint n'est plus, comme le prévoit actuellement l'article 206-30, fonction de l'imputation des torts mais des intérêts en présence.

L'article 206-7 maintient le régime de la pension alimentaire au profit du conjoint dans le besoin car contrairement au divorce, les époux séparés de corps demeurent toujours dans l'état de mariage. De par sa vocation alimentaire, cette indemnité continue donc à être versée pour une durée déterminée ou indéterminée et peut être révisable en fonction des ressources de chacun des époux.

En revanche, et à l'instar de la prestation compensatoire mise en place pour le divorce, il est précisé que dans l'hypothèse où la séparation est prononcée aux torts exclusifs, l'époux appelé à en bénéficier se voit privé de son droit à indemnisation sauf si, compte tenu de la durée du mariage et des soins apportés à l'éducation des enfants ou à la profession de l'autre époux, il apparaît manifestement inéquitable de lui refuser toute compensation pécuniaire.

L'article 206-8 nouveau pose le principe selon lequel les effets de la séparation de corps s'alignent sur ceux du divorce, sous réserve des dispositions contraires du présent chapitre tel que l'article 206-7 susvisé relatif au versement de la pension alimentaire. Si ce principe existe déjà en droit positif, il se déduit malheureusement à travers des renvois d'articles. Le présent texte a donc pour seul objectif, mais non des moindres, d'améliorer la lisibilité de la loi projetée.

Les articles 206-10 et 206-11 organisent la conversion du jugement de séparation de corps en jugement de divorce. Prévu actuellement à l'article 206-33, le projet de loi a néanmoins apporté des modifications et précisions majeures.

Ainsi, la période d'attente nécessaire pour qu'une demande de conversion soit déclarée recevable passe de trois à deux ans, le délai légal actuel ayant été jugé de nature à pouvoir être raccourci, tout particulièrement quant les conditions d'obtention du divorce et de séparation de corps sont identiques.

Parallèlement, la référence à la faculté d'acquiescement de la décision de conversion, visée au troisième alinéa de l'article 206-33 susvisé, est supprimée dès lors que cette possibilité se déduit suffisamment du droit commun en l'absence de dispositions expresses.

Enfin, les effets de la conversion sont désormais expressément encadrés par la loi, ce qui faisait jusqu'à présent défaut.

L'article 206-12 nouveau aligne la procédure de séparation de corps sur celle du divorce. A titre d'exemple, le tribunal peut donc ajourner les parties s'il entrevoit la possibilité d'une réconciliation. Cette possibilité avait été écartée par le législateur de 1985 au motif qu'il n'existait pas de raison de freiner la procédure de séparation de corps, compte-tenu de ses effets limités. Toutefois, afin d'éviter qu'une procédure ne soit privilégiée au détriment de l'autre pour des motifs de rapidité, le choix a été pris de les harmoniser.

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L'article 2 du projet de loi modifie l'article 303 actuel du Code civil en vue d'accroître les prérogatives du juge tutélaire.

Avec l'entrée en vigueur de la Loi n° 1.278 du 29 décembre 2003 modifiant certaines dispositions du Code civil, du Code de procédure civile et du Code de commerce, le juge tutélaire s'est vu conférer la possibilité de proposer aux parents une mesure de médiation aux fins de dégager de manière consensuelle les modalités d'exercice de l'autorité parentale. Il est apparu opportun de lui octroyer, en complément, la faculté d'enjoindre une telle mesure, comme la juridiction saisie du divorce ou de la séparation de corps en a désormais la possibilité.

Les articles 3 à 5 du présent projet consacrent les mesures transitoires destinées à régler le conflit des lois relatives au divorce et à la séparation de corps lors de l'entrée en vigueur du texte projeté.

Le principe posé est que la loi ancienne continue de régir les procédures de première instance en cours pour lesquelles l'assignation a été délivrée antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi nouvelle. Par exception, une passerelle est mise en place au profit d'un divorce accepté ou d'un divorce pour rupture de la vie commune, afin de ne pas enfermer les époux dans un divorce pour faute dès lors que sont réunies les conditions permettant le prononcé d'un divorce sur un fondement plus consensuel ou lorsqu'il est de droit en vertu de la loi nouvelle. En ce cas, la loi nouvelle et la décision rendue produit les effets prévus par le présent projet.

En appel, la loi applicable est celle en vertu de laquelle le divorce ou la séparation de corps a été prononcé.

S'agissant des demandes de conversion, le dispositif applicable est celui en vertu duquel a été rendue la décision de séparation de corps. Toutefois, afin de ne pas pénaliser inutilement les époux séparés, ceux-ci ont la faculté de se prévaloir de la diminution du délai de trois à deux ans pour demander la conversion de la décision de séparation de corps prononcée sous l'empire de la loi ancienne.

Enfin, l'article 6 de la loi projetée prévoit un délai d'entrée en vigueur de la loi différé de deux mois par rapport à sa promulgation, afin de permettre notamment aux juridictions et aux professionnels du droit de se familiariser avec les nouvelles dispositions qu'elle consacre.

Tel est l'objet du présent projet de loi.

Dispositif🔗

Article premier🔗

Le titre VI du livre I du code civil est remplacé par les dispositions suivantes :

«

TITRE VI

DU DIVORCE ET DE LA SEPARATION DE CORPS

CHAPITRE I

DU DIVORCE

Section I

Des cas de divorce

Article 197. – Le divorce peut être prononcé à la demande de l'un des époux :

  • 1° pour faute, lorsque les faits imputés au conjoint constituent une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune ;

  • 2° pour rupture de la vie commune, lorsque les époux vivent séparés de fait depuis trois ans lors de l'assignation en divorce ;

  • 3° pour condamnation pénale du conjoint sanctionnant une infraction qui rend intolérable le maintien du lien conjugal, à moins que l'époux demandeur n'ait connu l'infraction avant le mariage ;

  • 4° pour maladie du conjoint dont la gravité et la durée sont de nature à compromettre dangereusement l'équilibre de la famille.

Article 198. – Le divorce peut également être prononcé à la demande de l'un des époux, lorsque lui-même et son conjoint acceptent le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l'origine de celle-ci.

Article 199. - Le divorce peut être prononcé à la demande conjointe des époux lorsqu'ils consentent d'un commun accord au divorce.

Section II

De la procédure du divorce

Paragraphe I

De la procédure sur requête d'un des époux

Article 200-1. – L'époux demandeur en divorce présente en personne au président du tribunal de première instance une requête. En cas d'empêchement, le président se transporte, pour recevoir la requête, à la résidence de l'époux demandeur.

L'époux demandeur qui entend solliciter l'autorisation de résider seul au domicile conjugal doit exposer les motifs justifiant sa demande.

Article 200-2. – Après avoir entendu l'époux demandeur et lui avoir fait les observations qu'il croit convenables, le président du tribunal de première instance ordonne, à la suite de la requête, que les parties comparaîtront devant lui aux fins de conciliation, aux jour et heure qu'il indique.

Par la même ordonnance, le président du tribunal de première instance peut, sous réserve de référé, autoriser l'époux demandeur à avoir une résidence séparée ou à résider seul au domicile conjugal, le cas échéant avec ses enfants mineurs.

S'il apparaît que l'époux qui n'a pas formé la demande est atteint d'une maladie mentale ou se trouve hors d'état de manifester sa volonté, le président du tribunal de première instance, en l'absence de tutelle organisée, désigne d'office un curateur chargé d'assister l'époux défendeur.

Article 200-3. – Dès l'ordonnance prévue à l'article précédent, chaque époux peut obtenir du président du tribunal de première instance, statuant sur requête, toutes mesures conservatoires, notamment l'apposition des scellés sur les biens de la communauté, les biens indivis ou les biens personnels du conjoint.

Les scellés sont levés à la requête de la partie la plus diligente ; les objets et valeurs sont inventoriés. L'époux qui est en possession est constitué gardien judiciaire, sauf décision contraire.

Article 200-4. – La requête et l'ordonnance sont signifiées par huissier, en tête de la citation délivrée à l'époux défendeur ; le délai fixé pour la comparution des parties est de huit jours au moins à compter de la citation qui précise que l'époux défendeur doit comparaître en personne ; le tout à peine de nullité de la citation.

Article 200-5. – Au jour indiqué, les parties sont tenues de comparaître en personne.

Si l'une d'elles se trouve dans l'impossibilité de se rendre auprès du président du tribunal de première instance, celui-ci détermine le lieu où sera tentée la conciliation.

Lorsque le président du tribunal de première instance cherche à concilier les époux, il doit s'entretenir personnellement avec chacun d'eux séparément avant de les réunir en sa présence. Il entend ensuite le ou les avocats, lorsque les parties sont assistées.

Article 200-6. – En l'absence de réconciliation ou en cas de défaut, le président du tribunal de première instance rend une ordonnance qui constate le maintien de la demande en divorce et autorise l'époux demandeur à assigner devant le tribunal de première instance.

Par la même ordonnance, sauf à renvoyer à date fixe les parties devant le tribunal de première instance, il statue sur les mesures provisoires prévues à l'article 202-1.

La décision sur ces mesures est exécutoire par provision; elle n'est pas susceptible d'opposition; elle peut être frappée d'appel dans les quinze jours de sa signification.

Lorsqu'il existe des enfants mineurs, le greffier en chef transmet copie de la décision au juge tutélaire.

Article 200-7. – Avant d'autoriser l'époux demandeur à assigner, le président du tribunal de première instance peut, s'il estime nécessaire de donner aux parties un temps de réflexion supplémentaire, ajourner les parties à une date qui n'excède pas six mois.

Le président du tribunal de première instance ordonne, s'il y a lieu, les mesures provisoires nécessaires.

Article 200-8. – L'époux demandeur qui n'assigne pas dans le mois de l'ordonnance constatant le maintien de la demande en divorce est forclos et les mesures provisoires cessent de plein droit.

Article 200-9. – Les époux peuvent, à tout moment de la procédure, sauf dans le cas prévu à l'article 200-12, demander au tribunal de première instance de constater leur accord pour voir prononcer le divorce sur le fondement de l'article 198.

L'acceptation des époux n'est pas susceptible de rétractation.

Article 200-10. – Il ne peut être fait grief à un époux d'avoir introduit ou accepté une demande en divorce sur le fondement de l'article 198.

Article 200-11. – Une demande reconventionnelle en divorce ou en séparation de corps peut être introduite par simples conclusions.

Lorsque la demande principale en divorce est fondée sur la rupture de la vie commune, la demande reconventionnelle ne peut tendre qu'au divorce.

Lorsqu'une demande en divorce pour faute et une demande en divorce sur un autre fondement sont concurremment présentées, le tribunal de première instance examine en premier lieu la demande pour faute. S'il rejette celle-ci, il statue sur la demande en divorce concurrente.

Les parties peuvent, en tout état de cause, transformer leur demande en divorce en demande en séparation de corps.

Article 200-12. – Lorsque l'un des époux est placé sous tutelle en application de l'article 410-10, le divorce ne peut être prononcé que sur le fondement de l'article 197.

Article 200-13. – Lorsque l'époux demandeur est placé sous tutelle en application de l'article 410-10 ou lorsqu'il est légalement interdit conformément aux dispositions de l'article 16 du code pénal, il accomplit lui-même les actes de procédure, assisté de son tuteur ou de son administrateur de tutelle.

Si la tutelle est exercée par le conjoint, le conseil de famille désigne un nouveau tuteur.

Article 200-14. – Lorsque le divorce est demandé contre un majeur en tutelle ou un interdit légal, son tuteur ou son administrateur de tutelle est mis en cause.

Si le tuteur est le conjoint de ce majeur, le subrogé tuteur est mis en cause.

Article 200-15. – Lorsqu'il y a lieu à enquête toute personne peut être entendue.

Toutefois, les enfants ne peuvent jamais être entendus sur les griefs invoqués par les époux.

Article 200-16. – L'action en divorce s'éteint par la réconciliation des époux survenue soit depuis les faits allégués dans la demande, le cas échéant, soit depuis cette demande.

Dans l'un et l'autre cas, l'époux demandeur est déclaré non recevable dans son action ; il peut néanmoins en intenter une nouvelle pour des faits survenus ou découverts depuis la réconciliation et se prévaloir des anciens faits à l'appui de sa nouvelle demande.

Paragraphe II

De la procédure sur requête conjointe

Article 201-1. – Les époux qui forment conjointement une demande en divorce présentent au président du tribunal de première instance une requête dans laquelle ils sollicitent le prononcé du divorce sur le fondement de l'article 199.

La requête, qui n'indique pas les faits à l'origine de la demande, comprend les demandes formées au titre des mesures provisoires nécessaires pour assurer l'existence des époux et des enfants durant l'instance ainsi qu'une convention réglant les conséquences du divorce.

Cette requête est irrecevable durant les six premiers mois du mariage.

Article 201-2. – Lorsque les conditions prévues à l'article précédent sont réunies le président du tribunal de première instance ordonne que les parties comparaîtront devant lui, aux jour et heure qu'il indique.

Article 201-3. – Au jour indiqué, le président du tribunal de première instance examine la demande avec chacun des époux séparément, avant de les réunir. Il appelle ensuite, le cas échéant, le ou les avocats.

Si les époux persistent dans leur demande, le président du tribunal de première instance rend une ordonnance qui constate le maintien de la demande en divorce et qui renvoie la cause devant le tribunal de première instance. Par dérogation aux articles 163 et suivants du code de procédure civile, l'inscription de la cause est effectuée par le greffe. La date fixée pour l'audience au fond ne peut être antérieure à un mois suivant le prononcé de l'ordonnance.

Par la même ordonnance, le président du tribunal de première instance statue sur les mesures provisoires prévues à l'article 202-1. Dans l'intérêt des enfants et de chacun des époux, il peut apporter toute modification aux mesures provisoires proposées par les époux.

La décision sur ces mesures est exécutoire par provision ; elle peut être frappée d'appel par les époux dans les quinze jours de la notification à parties faite par le greffe par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postal.

Article 201-4. – A l'audience du tribunal de première instance, les époux peuvent, d'un commun accord, solliciter le renvoi de la cause s'ils estiment nécessaire de disposer d'un délai de réflexion.

Ce délai de réflexion ne peut excéder six mois suivant la date de la première audience.

Paragraphe III

Dispositions générales

Article 202-1. – Les mesures provisoires concernent notamment :

  • 1° les modalités de la résidence des époux pendant l'instance ;

  • 2° la remise des effets personnels ;

  • 3° les demandes de provision pour les frais d'instance ;

  • 4° les demandes d'aliments ;

  • 5° la désignation de tout professionnel qualifié en vue de dresser un inventaire estimatif du patrimoine des époux ;

  • 6° en cas de résidence séparée, les modalités de l'exercice de l'autorité parentale, la fixation de la résidence habituelle, le droit de visite et d'hébergement ainsi que la contribution due pour l'entretien et l'éducation des enfants par le parent qui n'exerce pas l'autorité parentale ou chez lequel ils ne résident pas habituellement.

Article 202-2. – Le tribunal de première instance peut prendre des mesures provisoires autres que celles énumérées à l'article 202-1 ou modifier toutes mesures.

Il peut également désigner un notaire en vue d'élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial et de formation des lots à partager.

Article 202-3. – Le tribunal de première instance peut entendre ou faire recueillir par une tierce personne les sentiments exprimés par les enfants mineurs. Ceux-ci peuvent être entendus seul ou, si leur intérêt le commande, avec une personne désignée à cet effet par le tribunal de première instance.

L'audition des enfants mineurs ne leur confère pas la qualité de partie à la procédure.

Article 202-4. – A tout moment de la procédure, il peut être proposé ou enjoint aux époux de se soumettre à une mesure de médiation familiale.

Article 202-5. – Sans préjudice de l'application de l'article 201-1, les époux peuvent soumettre au tribunal de première instance une convention réglant tout ou partie des conséquences du divorce.

Article 202-6. – La cause est débattue hors la présence du public.

La reproduction des débats est interdite sous peine de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 du code pénal.

Article 202-7. – L'appel d'une décision du tribunal de première instance prononçant le divorce sur le fondement de l'article 198 ou 199 ne peut jamais tendre à l'infirmation du divorce ou au prononcé de divorce sur un autre fondement. Aucun appel ne peut être formé à l'encontre d'une décision du tribunal de première instance qui homologue la convention des époux.

Article 202-8. – Les demandes reconventionnelles peuvent être formées en appel sans être considérées comme des demandes nouvelles.

Article 202-9. – Le pourvoi en révision formé contre l'arrêt prononçant le divorce et le délai de ce pourvoi sont suspensifs.

Article 202-10 – Le décès de l'un des époux survenu en cours d'instance entraîne l'extinction de l'action.

Si le décès survient après le prononcé du divorce mais avant que la décision soit devenue irrévocable, celle-ci est non avenue.

Mention en est portée sur la minute de la décision par le greffier en chef à la requête du procureur général.

Section III

Du prononcé du divorce

Article 203-1. – Lorsque le divorce est demandé sur le fondement de l'article 197, le tribunal de première instance prononce le divorce s'il constate que les circonstances invoquées pour le justifier sont avérées.

Lorsque le divorce est demandé sur le fondement de l'article 198 ou 199, le tribunal de première instance prononce le divorce s'il a acquis la conviction que la volonté des époux est réelle ou que leur acceptation est libre et éclairée.

Le tribunal de première instance statue sur les conséquences du divorce.

Il homologue la convention soumise par les époux conformément aux articles 201-1 et 202-5, sous réserve qu'elle soit conforme à leur intérêt et celui des enfants.

Le prononcé du divorce sur le fondement de l'article 199 est subordonné à l'homologation de la convention.

Article 203-2. – Le dispositif de la décision qui prononce le divorce énonce, le cas échéant, la date de la décision ayant autorisé les époux à résider séparément. Cette date doit alors figurer dans les mentions en marge et dans la transcription faites en application de l'article 203-4.

Article 203-3. – Lorsque le divorce a été prononcé par défaut, si la décision a été signifiée à personne, l'opposition est faite dans le mois, à peine d'irrecevabilité.

Si la décision n'a pas été signifiée à personne, le président du tribunal de première instance ordonne, sur requête, qu'un extrait soit publié au « Journal de Monaco » et affiché à la mairie. L'opposition est recevable dans les six mois de la dernière mesure de publicité.

Article 203-4. – Dès que la décision est devenue irrévocable son dispositif est, à la requête de la partie la plus diligente, transcrit sur les registres de l'état civil et mentionné en marge de l'acte de mariage et de l'acte de naissance de chacun des époux.

Section IV

Des conséquences du divorce

Paragraphe I

Dispositions générales

Article 204-1. – Le divorce rompt le lien conjugal. Entre les époux, le divorce produit effet, quant à leurs biens, au jour de la demande en divorce. Il n'est opposable aux tiers qu'à compter de la transcription sur les registres de l'état civil conformément aux dispositions de l'article 203-4.

Article 204-2. – Toute obligation contractée par un époux à la charge de la communauté, toute aliénation de biens communs par lui faite dans la limite de ses pouvoirs, postérieurement à l'ordonnance constatant le maintien de la demande en divorce, est inopposable au conjoint si le tiers n'a pas été complice de la fraude ; en cas de complicité, l'acte est nul.

Article 204-3. – Par l'effet du divorce, chaque époux cesse d'avoir l'usage du nom de son conjoint, sauf convention contraire ou autorisation judiciaire si l'époux qui souhaite conserver l'usage du nom de l'autre justifie d'un intérêt pour lui ou pour les enfants.

Article 204-4. – Le tribunal de première instance ordonne la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux communs ayant pu exister entre les époux et commet un notaire pour y procéder.

Il peut également accorder à l'un des époux ou aux deux une avance sur sa part de communauté ou de biens indivis.

En cas de difficultés rencontrées lors des opérations de liquidation et de partage, le notaire désigné dresse, d'office ou à la demande de l'une des parties, un procès-verbal de difficultés. Le tribunal de première instance, saisi à la demande de la partie la plus diligente, statue sur les contestations subsistant entre les parties au vu du procès-verbal de difficultés et les renvoie devant notaire afin d'établir l'état liquidatif.

Article 204-5. – Sauf lorsqu'il est prononcé pour maladie, le divorce met fin au devoir de secours prévu par l'article 181.

L'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives. Cette prestation a un caractère forfaitaire et définitif. Elle prend la forme d'un capital dont le montant est fixé en fonction des besoins de l'époux à qui elle est versée et des ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution prévisible de celle-ci.

A cet effet, sont notamment pris en considération :

  • la durée du mariage ;

  • l'âge et l'état de santé des époux ;

  • leur qualification et leur situation professionnelles ;

  • les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer, ou pour favoriser la carrière du conjoint au détriment de la sienne ;

  • le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ;

  • leurs droits existants et prévisibles notamment en matière de couverture sociale et de pension de retraite.

Le tribunal de première instance décide des modalités selon lesquelles s'effectuera la prestation compensatoire, en totalité ou en partie, par versement d'une somme d'argent en un maximum de cinq annuités ou par attribution de biens en propriété ou d'un droit temporaire d'usage, d'habitation ou d'usufruit. Dans ces derniers cas, la décision prononçant le divorce opère cession forcée en faveur du conjoint créancier. Toutefois, l'accord de l'époux débiteur est exigé pour l'attribution en propriété de biens qu'il a reçus par succession ou donation.

La décision prononçant le divorce peut ordonner la constitution de garanties au service de la prestation compensatoire.

Article 204-6. – Lorsque le divorce est prononcé sur le fondement du chiffre 4 de l'article 197, le tribunal de première instance décide s'il convient de mettre à la charge de l'époux demandeur une pension destinée à l'époux malade ; il détermine de quelle manière il est pourvu à l'entretien de celui-ci.

Article 204-7. – Les père et mère conservent l'exercice conjoint de l'autorité parentale.

Le tribunal de première instance peut également confier l'exercice de l'autorité parentale à un seul des père et mère, si l'intérêt des enfants le commande.

A défaut de convention homologuée, il détermine le droit de visite et d'hébergement ainsi que la part contributive à leur entretien et éducation et désigne celui des père et mère auprès duquel les enfants auront leur résidence habituelle.

Le tribunal de première instance peut, cependant, fixer la résidence des enfants auprès d'une autre personne ou institution qui accomplit à leur égard tous les actes usuels relatifs à leur surveillance et à leur éducation.

Quelle que soit la décision rendue, le père et la mère conservent le droit de surveiller l'entretien et l'éducation de leurs enfants et sont tenus d'y participer en fonction de leurs ressources.

Paragraphe II

Dispositions propres au divorce pour faute

Article 205-1. – Le divorce est prononcé contre un époux s'il a lieu à ses torts exclusifs.

L'époux contre lequel le divorce est prononcé perd tous les avantages que son conjoint lui avait consentis par contrat de mariage ou autrement.

L'autre époux conserve les avantages accordés par son conjoint, même si ces derniers avaient été stipulés réciproques.

Article 205-2. – L'époux contre lequel le divorce a été prononcé n'a droit à aucune prestation compensatoire.

Toutefois, il peut obtenir une indemnité à titre exceptionnel si, compte tenu de la durée de la vie commune et des choix professionnels qu'il a faits pendant celle-ci pour l'éducation des enfants ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, il apparaît manifestement contraire à l'équité de lui refuser toute compensation pécuniaire à la suite du divorce.

Article 205-3. – Indépendamment de toutes autres compensations dues par lui au titre de l'application des articles précédents, l'époux contre lequel le divorce a été prononcé peut être condamné à des dommages-intérêts en réparation du préjudice que fait subir à son conjoint la dissolution du mariage.

CHAPITRE II

DE LA SEPARATION DE CORPS

Article 206-1. – La séparation de corps peut être prononcée dans les mêmes cas et aux mêmes conditions que le divorce.

Article 206-2. - Un époux ne peut transformer une demande en séparation de corps en demande en divorce.

Article 206-3. – Une demande reconventionnelle en séparation de corps ou en divorce peut être introduite par simples conclusions.

Lorsqu'une demande en divorce et une demande en séparation de corps sont concurremment présentées, le tribunal de première instance examine en premier lieu la demande en divorce. Il prononce le divorce si les conditions en sont réunies. A défaut, il statue sur la demande en séparation de corps. Toutefois, lorsque ces demandes sont fondées sur la faute, le tribunal de première instance les examine simultanément et, s'il les accueille, prononce à l'égard des deux conjoints le divorce aux torts partagés.

Article 206-4. – La séparation de corps supprime le devoir de cohabitation.

Elle met fin aux pouvoirs résultant des articles 182 et 184.

Elle laisse subsister les devoirs de fidélité, de secours et d'assistance.

Article 206-5. – A la demande de l'un des époux, la décision de séparation de corps ou une décision postérieure peut, compte tenu des intérêts respectifs des époux, interdire à l'un l'usage du nom de l'autre.

Si la demande donne lieu à une décision particulière, celle-ci est transcrite conformément aux dispositions de l'article 203-4.

Article 206-6. – La séparation de corps emporte séparation de biens.

La date à laquelle la séparation de corps produit ses effets, quant aux biens des époux, est déterminée conformément aux dispositions de l'article 204-1.

Article 206-7. – La décision qui prononce la séparation de corps ou une décision postérieure fixe la pension alimentaire qui est due à l'époux dans le besoin. Cette pension est soumise aux règles des obligations alimentaires.

L'époux contre lequel la séparation de corps a été prononcée ne peut prétendre à pension, sauf à titre exceptionnel si, compte tenu de la durée de la vie commune et des choix professionnels qu'il a faits pendant celle-ci pour l'éducation des enfants ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, il apparaît manifestement contraire à l'équité de lui refuser tout secours à la suite de la séparation de corps.

Article 206-8. – Sous réserve des dispositions du présent chapitre, les conséquences de la séparation de corps obéissent aux mêmes règles que les conséquences du divorce énoncés au chapitre I ci-dessus.

Article 206-9. – Si la séparation de corps prend fin par la réconciliation des époux, ceux-ci demeurent soumis à la séparation de biens, sauf application de l'article 1243.

La réconciliation n'est opposable aux tiers que si la reprise de la vie commune a donné lieu à une déclaration devant notaire transcrite conformément aux dispositions de l'article 203-4.

Article 206-10. – Lorsqu'elle a duré deux ans, la séparation de corps est, à la demande d'un époux, convertie de droit en divorce.

Cette demande, introduite en la forme ordinaire, peut être portée devant le tribunal de première instance lorsque la séparation de corps a été prononcée à Monaco. Elle est débattue hors la présence du public.

Lorsqu'elle est devenue irrévocable, la décision de conversion est transcrite conformément aux dispositions de l'article 203-4 ; elle est, en outre, mentionnée en marge de la décision ayant prononcé la séparation.

Article 206-11. – En cas de conversion de la séparation de corps en divorce, la cause de la séparation de corps devient la cause du divorce ; l'attribution des torts n'est pas modifiée.

Le tribunal de première instance fixe les conséquences du divorce et statue sur la charge des dépens relatifs à la conversion de la séparation de corps en divorce. Les prestations et pensions entre époux sont déterminées selon les règles propres au divorce.

Article 206-12. – Les règles contenues aux sections II et III du chapitre I ci-dessus, à l'exception du quatrième alinéa de l'article 200-11, sont applicables à la séparation de corps. »

Article 2🔗

Le deuxième alinéa de l'article 303 du code civil est remplacé par les dispositions suivantes :

« A l'effet de faciliter la recherche par les parents d'un exercice consensuel de l'autorité parentale, le juge tutélaire peut leur proposer ou leur enjoindre de se soumettre à une mesure de médiation familiale. »

Article 3🔗

La chose jugée sous l'empire de la loi ancienne ne peut être remise en cause par l'application de la loi nouvelle.

Article 4🔗

Les instances pendantes devant le tribunal de première instance sont poursuivies et jugées en conformité avec la loi ancienne lorsque l'assignation a été délivrée antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi.

Par dérogation à l'alinéa précédent, les époux peuvent se prévaloir des dispositions de l'article 200-9 du code civil. Le divorce peut également être prononcé pour rupture de la vie commune si les conditions du chiffre 2 de l'article 197 du code civil sont réunies, sous réserve du respect des dispositions du troisième alinéa de l'article 200-11 du même code.

La décision rendue produit alors les effets prévus par la présente loi.

Article 5🔗

L'appel et le pourvoi en révision sont formés, instruits et jugés selon les règles applicables lors du prononcé de la décision de première instance.

Les demandes de conversion sont formées, instruites et jugées selon les règles applicables lors du prononcé de la séparation de corps. Par dérogation, les époux peuvent se prévaloir des dispositions de l'article 206-10 du Code civil.

Article 6🔗

La présente loi entrera en vigueur dans un délai de deux mois suivant sa publication.

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