Projet de loi n° 830 modifiant le Code pénal en matière de fausse monnaie
Exposé des motifs🔗
La loi n° 1.274 du 25 novembre 2003 modifiant les dispositions du Code pénal et du Code de procédure pénale relatives à la fausse monnaie a permis d'introduire un certain nombre de dispositions nouvelles relatives à la contrefaçon des billets et des pièces lesquelles poursuivaient alors un double objectif : moderniser les dispositions sur la fausse monnaie et remplir concomitamment les engagements internationaux de la Principauté issus de la Convention monétaire consacrant l'entrée de Monaco dans la zone euro et rendue exécutoire par Ordonnance Souveraine n° 15.185 du 14 janvier 2002.
Plus particulièrement, l'article 9 de la Convention monétaire prévoit, en matière de lutte contre la contrefaçon monétaire, la mise en place d'une collaboration étroite avec la France, agissant au nom de la Communauté européenne, en accord avec la Commission et la Banque Centrale européenne, ce sur le fondement de deux textes fixant les grandes orientations de la lutte contre la fausse monnaie :
la décision-cadre du 29 mai 2000 visant à renforcer par des sanctions pénales et autres la protection contre le faux monnayage en vue de la mise en circulation de l'euro ;
le règlement (CE) n° 1338/2001 du Conseil du 28 juin 2001 définissant les mesures nécessaires à la protection de l'euro contre le faux-monnayage.
Dans cette perspective, le Comité mixte, institué par l'article 14 de la Convention monétaire pour en assurer le suivi, a suggéré d'introduire de nouvelles dispositions, dans la perspective d'une incorporation efficiente de la décision cadre et en conformité avec l'article 9 de la Convention monétaire. Ainsi, ces dispositions, qui font l'objet du présent projet, tendent à harmoniser notre droit interne avec les orientations énoncées dans la décision-cadre et le règlement précités, ce dans l'objectif commun aux pays membres de la zone euro d'uniformiser les normes répressives et d'accroître la coopération internationale face à la recrudescence constatée du trafic international de fausses pièces et faux billets depuis la mise en circulation de la monnaie unique.
A cet effet, il est proposé d'introduire dans notre Code pénal deux nouvelles incriminations relatives à la contrefaçon monétaire : la faute d'imprudence et de négligence, et la récidive internationale.
Sous le bénéfice de ces observations d'ordre général, les dispositions projetées appellent les précisions ci-après.
L'article premier introduit la faute d'imprudence et de négligence en matière de fausse monnaie. Il s'agit, dans une matière d'une particulière dangerosité puisqu'elle porte atteinte aux intérêts financiers et économiques de l'Etat monégasque et de tous ceux de la zone euro, de sanctionner des comportements non intentionnels à condition que leur auteur, qui par définition n'a pas voulu violer la loi pénale, puisse se voir reprocher une faute de négligence ou d'imprudence. Cette disposition a principalement pour conséquence d'engager la responsabilité des personnes morales, telle que prévue aux paragraphes 1 et 2 de l'article 8 de la décision-cadre du 29 mai 2000 pour défaut de surveillance ou défaut de contrôle. Elle tient compte des normes européennes, par ailleurs proches de la tendance doctrinale et jurisprudentielle française, elle-même fondée sur des principes juridiques transposables dans notre droit du fait de la similitude des principes fondateurs en droit pénal et en droit de la responsabilité.
Désormais, en cas de commission d'une infraction de fausse monnaie, l'auteur d'une faute d'imprudence ou de négligence pourra donc être poursuivi. Traditionnellement, une telle faute est considérée comme constituée si son auteur a fait preuve d'une imprévoyance ayant entraîné la réalisation d'un dommage, soit qu'il n'ait pas accompli les diligences normales eu égard à sa fonction, ses compétences, son pouvoir et ses moyens, ou qu'il n'ait pas fait preuve de la prudence qui s'imposait, ou encore qu'il ait négligé de prendre les précautions qui auraient dû être respectées par une personne normalement prudente et diligente.
L'article 2 innove en introduisant une nouvelle infraction de récidive internationale en matière de fausse monnaie. Il permet ainsi de prendre en compte, comme premier élément constitutif de la récidive, une condamnation antérieurement prononcée à l'étranger en matière de fausse monnaie. Cette disposition, dérogatoire au principe général selon lequel une condamnation pénale ne compte pour la récidive que si elle émane d'une juridiction monégasque, conformément au principe de la territorialité de la loi pénale, se justifie par la nuisibilité particulière de la contrefaçon d'une monnaie commune à de nombreux Etats européens, tout en répondant aux exigences de l'article 9 a) de la décision-cadre du 29 mai 2000.
Pour autant, la condamnation antérieure n'est prise en compte que si elle remplit les conditions habituellement requises pour la récidive par les articles 38 à 40 de notre Code pénal. Ainsi, seule une condamnation pénale définitive peut valoir comme premier terme de la récidive, ce qui exclut, par exemple, de prendre en considération les mesures de sûreté prononcées par le juge au titre des antécédents du récidiviste, ou les condamnations susceptibles de voies de recours au jour où la seconde infraction (voire plus, en cas de multi-récidive) est commise.
Les termes de la récidive devront également correspondre aux
conditions fixées par ces mêmes articles, en termes de délais écoulés entre les infractions successives, et de quantum des peines considérées.
Tel est l'objet du présent projet de loi.
Dispositif🔗
Article premier🔗
L'article 83-2 du Code pénal est modifié comme suit :
« Quiconque commet, par imprudence, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par les dispositions législatives ou réglementaires relatives à la fabrication et à la mise en circulation de la monnaie ayant cours légal, une des infractions prévues aux articles 77 à 83-1 est puni d'un emprisonnement de six mois à un an et de l'amende prévue au chiffre 3 de l'article 26 ».
Article 2🔗
L'article 83-4 du Code pénal est modifié comme suit :
« Lorsqu'une personne engage sa responsabilité pénale pour une des infractions prévues aux articles 77 à 83-2, la récidive est constituée dans les conditions des articles 38 à 40, si la personne a déjà été condamnée définitivement pour un crime ou un délit ayant les mêmes éléments constitutifs hors du territoire de la Principauté ».
Article 3🔗
L'article 83-5 devient l'article 83-7. Son premier alinéa est modifié comme suit :
« Toute personne physique condamnée pour l'une des infractions prévues aux articles 78, 80 à 83, et 83-3 encourt également les peines d'interdiction des droits civiques, civils et de famille dans les conditions prévues à l'article 27 ».
Article 4🔗
L'article 83-8 devient l'article 83-10. Il est modifié comme suit :
« Les dispositions des articles 77, 78, et 82 à 83-9 sont applicables lorsque sont en cause les billets de banque et pièces de monnaie qui, bien que destinés à être mis en circulation, n'ont pas été encore émis par les institutions habilitées à cette fin ou n'ont pas encore cours légal ».
Article 5🔗
Les articles numérotés 83-2, 83-3, 83-4, et 83-6 à 83-8 prennent respectivement les numéros 83-3, 83-5, 83-6, et 83-8 à 83-10.