Projet de loi n° 816 portant modification des articles 218-1 à 218-3 du Code Pénal
Exposé des motifs🔗
La lutte contre le blanchiment de capitaux illicites en Principauté repose sur les lois nos 1.161 et 1.162 du 7 juillet 1993, lesquelles ont mis en place un arsenal répressif et procédural opérationnel sanctionnant les opérations d'activités financières criminelles et assuré la promotion du rôle des professionnels dans la détection du blanchiment et du financement du terrorisme.
A l'appui des deux lois susmentionnées, le Gouvernement Princier a poursuivi un objectif d'efficience de la répression, laquelle se pose actuellement en termes d'obligation de déclaration, de textes d'incriminations (Code pénal), de mesures d'investigations (Code de procédure pénale), et de mesures conservatoires et confiscations.
Cette délinquance financière rend nécessaire le renforcement de l'arsenal réglementaire et juridique existant pour lutter contre le blanchiment des capitaux. Vu la vaste ampleur de cette forme de criminalité – au demeurant exponentielle depuis une dizaine d'années – il est de surcroît essentiel que les organismes de réglementation et de répression coopèrent au niveau international en vue de découvrir l'origine et la source des fonds illicites et de saisir les avoirs des criminels.
De multiples initiatives internationales ont vu le jour, dans la perspective de juguler ces activités délictueuses. Ces initiatives s'articulent, d'une part, autour d'instruments conventionnels, et, d'autre part, d'instruments organisationnels, au premier rang desquels le G.A.F.I. et le Comité MONEYVAL.
Au niveau international, outre la Convention des Nations Unies du 20 décembre 1988 contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes, la Convention contre la criminalité transnationale organisée adoptée en décembre 2000, ratifiée ainsi que deux de ses protocoles additionnels par la Principauté le 5 juin 2001, fait obligation aux États parties d'instituer, dans leur droit pénal national, une infraction de blanchiment d'argent. De son côté, l'Office des Nations Unies Contre la Drogue et le Crime (O.D.C.) a développé un programme mondial d'assistance technique à la lutte contre le blanchiment, auquel de nombreux Etats contribuent.
Au niveau européen, il importe de mentionner la Convention du Conseil de l'Europe de 1990 relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime. Ratifiée par tous les États membres du Conseil de l'Europe, ce dispositif conventionnel s'avère être un outil efficace pour la coopération internationale du fait de ses multiples dispositions sur l'entraide. Le Comité des Ministres a initié une révision de cette Convention, processus qui s'est terminé en 2005, avec l'adoption, le 3 mai, de la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime et au financement du terrorisme. Lors de son adhésion au Conseil de l'Europe le 5 octobre 2004, la Principauté s'est engagée par ailleurs à signer et à ratifier la Convention pénale sur la Corruption.
Le Groupe d'action financière (G.A.F.I.) : Cet organisme intergouvernemental a pour objectif de concevoir et de promouvoir, aussi bien à l'échelon national qu'international, des stratégies de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Ce Groupe d'action est donc un organe de décision qui s'efforce de susciter la volonté politique nécessaire pour réformer au plan national les lois et réglementations dans les domaines de sa compétence. L'une des premières tâches du G.A.F.I. a consisté à élaborer des Recommandations, quarante au total, qui énoncent les mesures que les gouvernements nationaux doivent prendre pour appliquer des plans efficaces de lutte contre le blanchiment de capitaux. Il est par ailleurs pertinent de mentionner que le mandat du G.A.F.I a été élargi lors de la réunion de Washington du 29 et 30 octobre 2001, afin d'inclure formellement la lutte contre le financement du terrorisme, à travers plusieurs Recommandations spéciales. Ces dernières, élaborées suite aux attentats du 11 septembre 2001, étaient au nombre de huit lors de leur publication en octobre 2001, et ont été portées à neuf lors de leur dernière mise à jour en octobre 2004.
Les quarante Recommandations du G.A.F.I. offrent un ensemble complet de contre-mesures couvrant le système de justice pénale et l'application des lois, le système financier et sa réglementation ainsi que la coopération internationale. Elles ont été reconnues, ratifiées ou adoptées par de nombreux organismes internationaux. Les Recommandations ne sont ni complexes, ni difficiles, pas plus qu'elles n'entravent la liberté d'effectuer des transactions légitimes, ni ne menacent le développement économique. Elles fixent des principes d'action et laissent aux pays une certaine marge de manœuvre dans l'application de ces principes en fonction de leurs circonstances particulières et de leur cadre constitutionnel. Bien qu'il ne s'agisse pas d'une convention internationale contraignante, beaucoup de pays se sont engagés à lutter contre le blanchiment de capitaux en appliquant les quarante Recommandations.
Élaborées initialement en 1990, les Recommandations ont été révisées une première fois en 1996 pour tenir compte des changements de tendances en matière de blanchiment et pour anticiper d'éventuelles menaces futures et plus récemment en 2003. Le G.A.F.I. a aussi rédigé quelques notes interprétatives destinées à clarifier l'application de certaines Recommandations et à fournir des indications complémentaires.
Le G.A.F.I. assure ainsi le suivi régulier de l'application de mesures nationales et internationales, contribuant ainsi à la mise en place d'un système efficace de lutte contre le blanchiment de l'argent. Ce suivi, qui suppose une évaluation mutuelle des performances au sein de «groupes de pairs», permet d'améliorer considérablement la compatibilité entre les normes nationales et les principes internationaux applicables aux activités financières et à l'action des forces publiques et de la justice.
Le Comité restreint d'experts sur l'évaluation des mesures de lutte contre le blanchiment des capitaux – MONEYVAL, au sein du Conseil de l'Europe : (anciennement PC-R-EV) a été mis en place en 1997. Ce mécanisme d'évaluation mutuelle et de pression par les pairs examine les mesures contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme adoptées dans les États membres du Conseil de l'Europe (et les pays désireux d'adhérer au Conseil qui décident de souscrire au mandat du Comité) n'appartenant pas au Groupe d'Action en matière Financière (G.A.F.I.). Le mandat donné à MONEYVAL comprend également la vérification de la conformité aux Autorités parlementaires de l'Union Européenne relatives au blanchiment. Le mécanisme a pour objectif d'assurer que les pays ont mis en place un système efficace pour contrer le blanchiment et le financement du terrorisme.
Ses rapports comportent des recommandations très détaillées concernant les moyens de renforcer l'efficacité des dispositifs nationaux pour combattre le blanchiment et le financement du terrorisme, et les capacités des États à coopérer au plan international dans ces domaines. Ce travail est notamment fondé sur la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime (STE N° 141).
En outre, le système d'évaluation est basé sur des cycles: premier cycle d'évaluation (1998-2000) et second cycle d'évaluation (2001-2003). Un troisième cycle d'évaluations mutuelles des pays impliqués dans le MONEYVAL a commencé en 2004 pour se terminer en 2007. Toutes ces évaluations couvriront à la fois le blanchiment et le financement du terrorisme. Elles sont menées sur la base de la nouvelle méthodologie d'ensemble décidée avec le G.A.F.I., le F.M.I. et la Banque Mondiale.
Parallèlement aux rapports d'évaluation des pays, le Comité examine également d'autres types de rapports dans le cadre de son travail de monitorage:
– rapport de progrès: un an après l' adoption du rapport d'évaluation, chaque pays soumet un rapport de progrès décrivant les nouvelles mesures qu'il a adoptées dans l'intervalle. Ce rapport met l'accent sur la mise à œuvre du contenu du rapport d'évaluation ;
– des rapports ad hoc, dans le cadre de la procédure de conformité renforcée, lorsque des insuffisances importantes ont été détectées comme résultat du processus d'évaluation et du mécanisme des rapports de progrès. Le pays concerné se voit alors donné un délai pour la mise en œuvre des recommandations, avant que d'autres mesures ne soient prises pour l'obliger à se conformer aux recommandations de MONEYVAL.
La Principauté de Monaco est l'un des 27 membres permanents du Comité MONEYVAL.
Une coopération étroite existe en particulier avec le G.A.F.I. : MONEYVAL est associé en tant qu'observateur aux travaux du G.A.F.I.. Une relation de partenariat s'est développée du fait de certains exercices conjoints (ex : formation des évaluateurs et réunion de typologie en 2004).
En 2002, Monaco a sollicité du Comité Moneyval une évaluation globale de son système de veille et de détection anti-blanchiment. À cette occasion, une équipe de six experts, composée entre autres de deux spécialistes du G.A.F.I., s'est rendue en Principauté. Dans leur rapport d'évaluation, adopté par le Comité Moneyval en décembre 2003, ces derniers ont notamment indiqué que Monaco répondait aux critères posés par le GAFI, avec une législation et des pratiques conformes aux normes internationales. Toutefois, ils recommandaient fortement aux autorités monégasques d'introduire dans leur système législatif une approche généralisant l'infraction sous-jacente à tout crime sérieux.
Le Gouvernement Princier a souhaité inscrire la législation monégasque dans le sillon de ces différents référentiels internationaux et européens, conventionnels et institutionnels.
Aussi, l'élaboration du présent projet de loi tend précisément à poursuivre l'adéquation du dispositif répressif, et plus particulièrement à la lumière de la Recommandation 1 élaborée par le G.A.F.I. Parce que cette Recommandation a donc vocation à configurer et apprécier les textes d'incriminations en matière de blanchiment, il importe d'en rappeler ici la substance.
Aux termes de cette Recommandation :
« Les pays devraient incriminer le blanchiment de capitaux sur la base de la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes, 1988 (Convention de Vienne) et de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, 2000 (la Convention de Palerme).
De plus, les pays devraient appliquer l'infraction de blanchiment de capitaux à toutes les infractions graves, afin de couvrir la gamme la plus large possible d'infractions sous-jacentes. Les infractions sous-jacentes peuvent être définies par rapport à l'ensemble des infractions, ou par rapport à un seuil lié soit à une catégorie d'infractions graves, soit à la peine privative de liberté dont est passible l'infraction sous-jacente (méthode du seuil), ou par rapport à une liste d'infractions sous-jacentes ou par rapport à une combinaison de ces méthodes […].
Les infractions sous-jacentes du blanchiment de capitaux devraient couvrir les actes commis dans un autre pays, qui constituent une infraction dans ce pays, et qui auraient constitué une infraction sous-jacente s'ils avaient été commis sur le territoire national. Les pays peuvent prévoir que la seule condition requise est que les actes auraient été qualifiés d'infractions sous-jacentes s'ils avaient été commis sur le territoire national […] » .
Il convient au surplus de rappeler qu'en application des définitions données par le G.A.F.I., doivent être entendues comme « catégories désignées d'infractions » : la participation à un groupe criminel organisé et à un racket ; le terrorisme, y compris son financement ; la traite d'êtres humains et le trafic illicite de migrants ; l'exploitation sexuelle, y compris celle des enfants ; le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes ; le trafic d'armes ; le trafic illicite de biens volés et autres biens ; la corruption ; la fraude et l'escroquerie ; la contrefaçon de monnaie ; la contrefaçon et le piratage de produits ; les crimes contre l'environnement ; les meurtres et les blessures corporelles graves ; l'enlèvement, la séquestration et la prise d'otages ; le vol ; la contrebande ; l'extorsion ; le faux ; la piraterie et les délits d'initiés et la manipulation de marchés.
Lorsqu'il détermine l'éventail des infractions constituant des infractions sous- jacentes dans chacune des catégories énumérées ci-dessus, chaque Etat peut décider, en conformité avec son droit interne, comment il définira ces infractions et la nature de tout élément de ces infractions qui en fait une infraction grave.
Le présent projet de loi tend donc :
principalement, à modifier l'appréhension pénale de la liste des infractions sous-jacentes, telle qu'actuellement établie à l'article 218-3 du Code pénal ;
incidemment, à procéder aux réajustements législatifs que nécessiteraient, à terme, la recherche et le maintien d'un arsenal répressif cohérent face au phénomène de blanchiment de capitaux illicites.
Enfin, il convient de préciser que, matériellement, le texte projeté est le fruit d'une concertation entre les Départements et services gouvernementaux et les principaux acteurs du secteur concerné, au premier rang desquels l'Association Monégasque des Banques (A.M.B.).
Sous le bénéfice de ces observations d'ordre général, le présent projet de loi appelle les commentaires particuliers ci-après.
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L'article premier tend à modifier l'actuel article 218-1 du Code pénal, en introduisant le principe de la double incrimination. Quoique infractions connexes, les infractions de conséquences, d'une part, et les infractions sous-jacentes, d'autre part, demeurent distinctes. Dès lors, conformément aux dispositions actuellement en vigueur, pour être punissable, le blanchiment, caractérisé en Principauté, n'exige pas, au titre des conditions préalables, que l'infraction sous-jacente ait également été commise sur le territoire de la Principauté.
L'article 218-1 projeté du Code pénal introduit cependant une condition à la répression du blanchiment, en ce qu'il prévoit que l'infraction sous-jacente commise à l'étranger soit également punissable à Monaco.
L'encadrement ainsi projeté a vocation à régir la situation particulière et problématique d'une infraction sous-jacente « complexe », lorsqu'elle fait a fortiori l'objet d'une commission rogatoire internationale.
L'infraction complexe est celle dont la réalisation nécessite l'accomplissement de plusieurs actes de nature différente, concourant tous à une fin unique. Elle se différencie ainsi de l'infraction « simple », dont la consommation suppose l'accomplissement d'un acte unique.
L'infraction génératrice de fonds blanchis et commise à l'étranger peut donc être complexe. Or, certaines des infractions relevant de cette dernière catégorie ne constituent pas des incriminations selon la Loi monégasque (à titre d'exemple l'abus de biens sociaux), mais supposent l'accomplissement d'actes qui eux-mêmes peuvent être, en fonction des cas d'espèce, qualifiés d'infractions simples (le faux).
La problématique ainsi posée – au demeurant mise en exergue par l'Association Monégasque des Banques – infèrerait le risque de voir, dans le cadre d'une commission rogatoire internationale basée sur la répression d'une infraction simple punissable à Monaco, une demande d'information concernant une infraction complexe, non sanctionnée à Monaco.
Ainsi, le principe conditionnant de la double incrimination tend à éviter cet écueil.
S'agissant du référentiel constitué par les commissions rogatoires internationales, et la logique d'entraide judiciaire qui les sous-tend, il s'avère opportun de mentionner la Convention Européenne d'entraide judiciaire en matière pénale, du 20 avril 1959. En effet, en application des stipulations de l'article 5.1.a de ladite convention, toute partie contractante peut se réserver la faculté de soumettre l'exécution des commissions rogatoires au fait que « l'infraction motivant la commission rogatoire [soit] punissable selon la loi de la partie requérante et de la partie requise ». Ainsi, l'exigence de la double incrimination s'inscrit-elle dans le respect de ces prévisions conventionnelles et, au surplus, à l'instar des solutions adoptées par d'autres Etats signataires de ladite Convention, comme la Suisse, l'Autriche ou la Principauté d'Andorre.
De plus, il convient d'observer que la règle ainsi posée vient en contrefort du principe de spécialité des commissions rogatoires – notamment internationales – tel que mis en œuvre par les Services judiciaires. Aussi apparaît-il pertinent de rappeler qu'en application de cette règle, l'État requérant ne saurait utiliser les renseignements obtenus par le truchement d'une commission rogatoire internationale, ni aux fins d'investigations, ni aux fins de leur production comme moyen de preuve dans une procédure pénale, autre que celle pour laquelle cette forme d'entraide aurait été accordée.
Il appert une nouvelle fois que cette procédure s'inscrit en adéquation avec la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (article 2), laquelle peut justifier et permettre – sous conditions – un refus de l'entraide judiciaire. À titre d'exemple comparatiste, il peut être notamment observé que la Suisse a adopté une position similaire : ainsi a-t-il été indiqué par les autorités fédérales – à l'appui d'une réserve – que cet Etat se réservait « en outre le droit de n'accorder l'entraide judiciaire en vertu de la Convention qu'à la condition expresse que les résultats des investigations faites […] et les renseignements contenus dans les documents ou dossiers transmis soient utilisés exclusivement pour instruire et juger les infractions à raison desquelles l'entraide est fournie ». La Principauté d'Andorre a formulé une réserve analogue.
L'article 2 s'inscrit dans le sillon des modifications explicitées ci-dessus : ainsi, dans une perspective de cohésion rédactionnelle et légistique, le second alinéa de l'article 218-2, aux termes duquel « l'infraction est constituée alors même que l'infraction génératrice des fonds blanchis a été commise à l'étranger, si elle est punissable dans l'état où elle a été perpétrée », est supprimé.
Il suffira, conformément au droit en vigueur, que soit rapportée la preuve d'une « méconnaissance des obligations professionnelles », telles que précisées par la Loi n° 1.162 du 7 juillet 1993 modifiée par la Loi n° 1.253 du 12 juillet 2002, à savoir, outre l' obligation générale de vigilance et de mise en œuvre de procédure de contrôle interne : vérification préalable de l'identité du client avant ouverture de compte ; examens particuliers relatifs à toutes opérations portant sur les sommes d'un certain montant et caractérisé par une complexité certaine ; obligation de collecte d'informations relatives aux origines et destinations de sommes, à l'objet de l'opération et au bénéficiaires, etc. Cela s'entend non pas d'un simple défaut de vigilance mais bien d'une violation délibérée des obligations professionnelles susvisées.
L'article 3 constitue l'apport majeur du présent projet de loi, en ce qu'il modifie la liste des infractions sous-jacentes actuellement établie par l'article 218-3 du Code pénal, à la lumière des prescriptions normatives contenues dans la Recommandation 1 du G.A.F.I. . En contrepoint des développements précédents aux termes desquels les infractions primaires peuvent être déterminées, d'une part, par seuil de juridicité pénale, et d'autre part, cumulativement ou alternativement, par énumération, l'ensemble des comportements infractionnels susceptibles de constituer désormais la condition préalable à l'infraction de blanchiment, est significativement étendue.
Il convient d'observer, au titre des éléments de droit comparé pouvant revêtir un intérêt significatif, que la rédaction projetée de l'article 218-3 s'inspire de la définition retenue par la Suisse, que le G.A.F.I. a jugé « largement conforme » à ses Recommandations dans le 3ème Rapport d'Evaluation Mutuelle sur ce pays.
Ce rapport d'évaluation expose notamment que la définition retenue par l'article 305 bis du Code pénal suisse (C.P.S.) considère tous les crimes comme étant des infractions préalables au blanchiment de capitaux.
Selon la législation suisse actuelle, la notion de crime regroupe toutes les infractions passibles de la réclusion (article 9, al. 1er C.P.S.). Après l'entrée en vigueur de la révision du C.P.S., cette notion sera redéfinie. Elle englobera désormais toutes les infractions passibles d'une peine privative de liberté de plus de trois ans (Art . 10, al. 2, nouveau C.P.S.).
Le droit suisse est en un sens comparable à celui de la Principauté d'Andorre. L'article 409 du Code pénal andorran entré en vigueur récemment étend le champ d'application de la législation contre le blanchiment aux biens et capitaux « provenant d'un quelconque délit majeur qui est assigné d'une peine d'emprisonnement dont la limite maximale soit supérieure à 3 ans ».
Le seuil de trois ans retenu par la Suisse et la Principauté d'Andorre recouvre notamment des infractions telles que l'escroquerie, l'abus de confiance, la banqueroute frauduleuse et le faux dans les titres.
À ce propos, il est également intéressant de relever que la Loi luxembourgeoise du 12 novembre 2004 relative à la lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme « a encore élargi le champ des infractions primaires aux fraudes aux subventions, incriminées par les articles 496-1 à 496-4 du Code pénal et qui consistent, en toute déclaration fausse ou incomplète en vue d'obtenir ou de conserver une subvention, indemnité ou autre allocation qui serait, en tout ou partie, en charge de l'état, d'une autre personne morale de droit public ou d'une institution internationale ».
Enfin, il apparaît pertinent de mentionner l'évolution récente des textes français. En effet, en France, la Loi n° 204-130 du 11 février 2004 a étendu le champ de la déclaration de soupçon adressée à Tracfin à la corruption et à la fraude aux intérêts financiers des communautés européennes, étant entendu que les articles du Code pénal relatifs au blanchiment visent le produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit.
En définitive, et suivant les différentes subdivisions du Code pénal, le spectre normatif recouvre, notamment, désormais les infractions sous-jacentes suivantes : crimes et délits contre la sûreté de l'État ; crimes et délits contre la paix publique ; crimes et délits des fonctionnaires dans l'exercice de leurs fonctions ; attroupement, résistance et autres manquements envers l'autorité publique ; association de malfaiteurs ; crimes et délits contre les personnes ; faux témoignage ; crimes et délits contre les propriétés ; infractions à la législation sur les brevets d'inventions ; infractions à la législation sur marques de fabrique, de commerce ou de service ; infractions à la législation sur la gestion de portefeuilles et aux activités boursières assimilées.
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Tel est l'objet du présent projet de loi.
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Article premier🔗
L'article 218-1 du Code pénal est modifié, et ainsi rédigé :
« Article 218-1 : Les infractions visées à l'article précédent sont constituées alors même que l'infraction génératrice des fonds blanchis a été commise à l'étranger si elle est punissable en Principauté et dans l'état où elle a été perpétrée.
La tentative des infractions précitées sera punie des mêmes peines que le délit consommé.
Il en sera de même que l'entente ou de l'association en vue de les commettre ».
Article 2🔗
L'article 218-2 du Code pénal est modifié, et ainsi rédigé :
« Article 218-2 : Sera puni d'un emprisonnement de un à cinq ans et de l'amende prévue au chiffre 4 de l'article 26 dont le maximum pourra être porté au décuple ou de l'une de ces deux peines seulement quiconque aura, par méconnaissance de ses obligations professionnelles, apporté son concours à toute opération de transfert, de placement, de dissimulation ou de conversion de biens et capitaux d'origine illicite. »
Article 3🔗
L'article 218-3 du Code pénal est modifié, et ainsi rédigé :
« Article 218-3 : Pour l'application de la présente section, est qualifié de biens et de capitaux d'origine illicite le produit des infractions punies en droit monégasque d'une peine d'emprisonnement supérieure à trois ans.
Est également qualifié de biens et de capitaux d'origine illicite le produit des infractions mentionnées aux articles 82, 83, 115, 118, 119, 265, 268, 304, 324, 327, 328-5, 335, 337, 360, 362, 363 et 364 du Code pénal, aux articles 44 et 45 de la Loi n° 606 du 20 juin 1955, aux articles 23, 24 et 25 de la Loi n° 1.058 du 10 juin 1983 et à l'article 26-I de la Loi n° 1.194 du 9 juillet 1997 ».