Projet de loi n° 1.085 relative au droit à l'oubli à d'autres mesures facilitant l'accès au crédit

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Exposé des motifs🔗

Le 15 juin 2022, le Conseil National a adopté en séance publique la proposition de loi n° 254 « instituant le droit à l'oubli en matière d'assurance de prêt bancaire », laquelle a été reçue le 17 juin 2022 par le Gouvernement Princier. Par courrier du 15 décembre 2022, celui-ci a fait connaître au Conseil National sa décision de transformer ladite proposition en projet de loi, en précisant que diverses modifications pourraient être apportées au dispositif proposé.

L'objectif du présent projet de loi est de faciliter l'accès à l'emprunt bancaire pour des personnes placées, du fait des aléas de la vie, en situation de risque aggravé de santé en raison d'une maladie ou d'un handicap, dans la mesure où l'assurance emprunteur est souvent une condition d'obtention des prêts. Dans ce cadre, plusieurs mesures ont vocation à être juridiquement consacrées, au-delà du seul droit à l'oubli.

L'ambition de ce texte trouve son origine première dans les engagements internationaux pris par la Principauté en matière de lutte contre toute forme de discrimination.

À cet égard, il peut être rappelé que la Principauté a ratifié le 1er décembre 2005 la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, dont l'article 14 consacre l'interdiction de la discrimination dans la jouissance des droits qui sont reconnues par ladite Convention.

De même rappellera-t-on que la Principauté a signé le 23 septembre 2009, puis ratifié le 19 septembre 2017, la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, intégrée à la législation monégasque depuis l'Ordonnance Souveraine n° 6.630 du 2 novembre 2017. Cette Convention consacre cette volonté de lutter contre toute forme de discrimination à l'égard des « personnes qui présentent des incapacités physiques, mentales, intellectuelles ou sensorielles durables dont l'interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l'égalité avec les autres ».

Dans certaines situations, les personnes souffrant d'une pathologie grave et durable peuvent être considérées comme exposant à un « risque » économique pour les professionnels, plus précisément dans le domaine bancaire et de l'assurance. Alors même que l'accès au crédit est souvent conditionné à l'obtention d'une assurance emprunteur, ces personnes peuvent être confrontées à un traitement inégalitaire par rapport aux personnes ne présentant pas de « risque aggravé de santé ». Ceci peut notamment se traduire par l'application d'une surprime très importante, ou tout simplement par un refus d'assurance emprunteur. Cette situation pourrait être qualifiée de discriminatoire pour ces personnes présentant un risque aggravé de santé, dès lors qu'elles sont susceptibles, pour ce motif, d'être entravées dans « la pleine et égale jouissance de tous les droits humains et de toutes les libertés fondamentales ».

Dans ce contexte, il est également rappelé que depuis son adhésion au Conseil de l'Europe en date du 5 octobre 2004, la Principauté – ainsi que l'a précisé le Conseil National dans sa proposition de loi initiale – tend à « ancrer durablement dans sa législation ses engagements pris en matière de lutte contre les discriminations de toute sorte » en ce qu'il lui appartient « d'offrir à l'ensemble de sa population, nationaux et résidents, l'assurance d'un traitement égalitaire et effectif dans l'exercice de ses droits ».

En outre, le 21 avril 2021, une résolution a été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée Parlementaire du Conseil de l'Europe en matière d'égalité et de non-discrimination à l'égard des personnes atteinte d'affection de longue durée. Au titre de cette résolution, il a été clairement demandé « aux autorités nationales non seulement l'adoption d'une définition claire du droit à l'oubli mais aussi une mise en œuvre effective et uniforme de cette protection ».

En sus de la dimension internationale dans laquelle la réforme projetée s'inscrit, celle-ci a également vocation à être appréhendée dans un référentiel bilatéral spécifique.

À la faveur d'une approche comparatiste avec la France, il convient d'y noter l'existence d'une convention nationale relative à l'accès au crédit des personnes présentant du fait de leur état de santé ou de leur handicap, un risque aggravé de santé dont le principe a été consacré par la loi française dans le Code de la santé publique et qui est conclue entre des professionnels de la banque et de l'assurance, des associations de malades et les pouvoirs publics. La convention actuellement en vigueur, dite « Convention s'Assurer et Emprunter avec un Risque Aggravé de Santé » ou convention AERAS, a été signée le 6 juillet 2006 et est actualisée tous les trois ans. En 2016, le droit à l'oubli des personnes présentant un risque aggravé de santé a été consacré par la loi française n° 2016-41 du 31 janvier 2016 de modernisation du système de santé au sein de l'article L. 1141-5 du Code de la santé publique.

Le présent projet de loi tend ainsi à doter le corpus juris de moyens contraignants de lutte contre la discrimination qui découlerait d'un refus d'assurance emprunteur ou de l'application de surprimes, rendant difficile, voire impossible, le recours au crédit bancaire pour des personnes présentant un « risque » pour les professionnels en raison d'une maladie ou d'un handicap.

Outre la dimension liée à l'impératif de lutte contre toute forme de discrimination, il convient d'être attentif à ce que la réglementation des assurances s'inscrive dans le cadre des relations franco-monégasques. Celui-ci procède de la Convention relative à la réglementation des assurances, signée à Paris le 18 mai 1963, rendue exécutoire à l'égard de la Principauté par l'Ordonnance Souveraine n° 3.041 du 19 août 1963, et dont l'article premier énonce que « Le Gouvernement Princier s'engage à la réglementation des assurances. Cette réglementation devra être coordonnée avec celle de la République française. ».

C'est à l'aune de ces considérations que doit être appréhendée, à Monaco, la mise en place des mesures permettant de faciliter l'accès au crédit par les personnes présentant un risque aggravé de santé.

Tout d'abord, le texte met en place un droit à l'oubli à l'égard des personnes ayant été atteintes d'une pathologie de type cancer ou relative à l'hépatite C, dès lors qu'il n'y a pas eu de rechute passé un délai à compter de la fin du protocole thérapeutique. Ce droit à l'oubli permet d'éviter à ces personnes de déclarer la pathologie bénéficiant de ce droit à l'oubli sur un questionnaire de santé lors de la souscription d'un crédit nécessitant une assurance emprunteur, étant précisé que même si l'information de cet état de santé venait à se savoir, l'établissement de crédit, la compagnie d'assurance ou l'assureur ne pourrait en tenir compte.

Le dispositif tend ensuite à accorder le bénéfice d'une assurance emprunteur sans surprime ni exclusion de garantie, ou du moins une assurance avec une prime se rapprochant des conditions standards, dès lors que la pathologie dont la personne est atteinte fait partie de la liste des pathologies figurant au sein d'une grille de référence établissant les catégories des pathologies, les taux des surprimes maximaux, les stades de référence, les délais au-delà desquels aucune surprime, ni exclusion de garantie n'est appliquée.

Puis, dans certains cas et sous certaines conditions, le questionnaire sur l'état de santé ne sera pas obligatoire et ne pourra être sollicité par le professionnel.

Enfin, en cas de conflit entre les professionnels, à savoir établissements de crédit, compagnies d'assurance ou assureurs et les personnes présentant un risque aggravé de santé, il est possible de saisir une commission de médiation avant toute action judiciaire.

Sous le bénéfice de ces considérations d'ordre général, le présent projet de loi appelle les commentaires particuliers ci-après.

D'un point de vue formel, le projet de loi est divisé en trois chapitres. Ceux-ci contiennent respectivement les articles relatifs aux dispositions générales (articles 1 et 2), aux mesures d'aide à l'accès au crédit bancaire des personnes présentant un risque aggravé de santé (articles 3 à 11) et, enfin, à la commission de médiation (article 12).

Le chapitre premier intitulé « Dispositions générales » comporte deux articles.

L'article premier vient définir des termes du projet de loi et notamment « les personnes présentant un risque aggravé de santé ». En effet, il faut entendre par « personnes présentant un risque aggravé de santé » les personnes malades ou ayant été malades et qui présentent un risque de maladie – morbidité – ou de décès – mortalité – supérieur à celui d'une population de référence. Il est précisé que l'accroissement du risque lié à l'âge de l'assuré, à la nature de sa profession ou de son comportement dans la vie quotidienne, par exemple les sports à risque, ne constitue pas un risque aggravé de santé au sens du projet de loi.

Concernant le terme « assureur », il désigne au sein du projet de loi tout organisme d'assurance, assureur ou société d'assurance autorisé en Principauté et exerçant les activités visées à l'article 3 de l'Ordonnance Souveraine n° 4.178 du 12 décembre 1968 portant institution du contrôle de l'Etat sur les entreprises d'assurances de toute nature et de capitalisation et tendant à l'organisation de l'industrie des assurances, modifiée, et sollicitée directement ou indirectement par l'emprunteur.

Quant aux établissements de crédit, il s'agit de ceux visés par l'Ordonnance Souveraine n° 13.889 du 18 février 1999 relative à la réglementation applicable aux établissements de crédit de la Principauté, y compris les succursales établies sur le territoire de la Principauté d'établissements de crédit dont le siège social est situé à l'étranger.

Cet article définit également les termes « assurance emprunteur » et « surprime d'assurance ».

L'article 2 renvoie toutes les modalités relatives à la formation et à l'instruction de la demande d'assurance à une ordonnance souveraine qui détaillera également le contenu de cette demande ainsi que la communication de la décision de l'assureur et de l'établissement de crédit. Cette ordonnance souveraine viendra également préciser la durée de validité de toute proposition d'assurance.

Cet article oblige les établissements de crédit et les assureurs à remettre aux personnes souscrivant un contrat d'assurance lié à un emprunt un document d'information sur les dispositifs mis en place par les sections I et II du chapitre II, et ce, concomitamment à tout type de questionnaire d'information sur l'état de santé.

Il importe que toute personne soit tenue, dans le cadre de la demande d'un prêt, de répondre exactement aux questions posées par l'assureur notamment dans le formulaire de déclaration du risque, auquel l'assureur ou l'établissement de crédit l'interroge lors de la conclusion d'un contrat, et sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l'assureur ou l'établissement de crédit les risques qu'il prend en charge. Les dispositifs du droit à l'oubli et de la suppression de fournir des informations de l'état de santé dans certaines circonstances au sein du projet de loi font dérogation à ce principe.

Le chapitre 2 intitulé « Mesures d'aide à l'accès à l'assurance et à l'emprunt bancaire des personnes présentant un risque aggravé de santé » est composé de trois sections.

La première mesure est celle du droit à l'oubli et, plus précisément, de l'absence de déclaration d'une ancienne pathologie sous certaines conditions (section I). La deuxième mesure permet d'obtenir des contrats d'assurance dans les conditions standards ou s'en rapprochant, à savoir sans surprime ni exclusion de garantie ou avec des surprimes plafonnées selon une grille de référence en fonction de la déclaration de l'état de santé qui aura été faite (section II). Enfin, la dernière mesure proposée est celle de l'exonération de fournir des informations relatives à l'état de santé ou de se soumettre à des examens médicaux (section III).

La section I, intitulée « Droit à l'oubli », comporte quatre articles (articles 3 à 6). Cette section met en place un droit à l'oubli, sous certaines conditions, pour les personnes ayant été atteinte d'une pathologie figurant sur une liste qui sera fixée par ordonnance souveraine. Cette liste devrait inclure les cancers et l'hépatite C. Ce droit garantit à ces personnes, passé certains délais, d'une part, de ne plus avoir à déclarer ces pathologies dont elles ont souffert lors de la souscription d'un contrat emprunteur et, d'autre part, de ne se voir appliquer aucune exclusion de garantie ou surprime du fait de ces pathologies même si ces pathologies ont été déclarées.

L'article 3 vise donc à instaurer un dispositif permettant à des personnes ayant été atteinte par une pathologie et plus précisément par une pathologie cancéreuse ou relative à l'hépatite C, de ne plus à avoir à la déclarer, sous certaines conditions à remplir au moment de contracter une assurance emprunteur. En effet, sous certaines conditions, aucune information médicale relative aux pathologies cancéreuses ou relative à l'hépatite C ne peut être recueillie par l'assureur.

Il est rappelé que l'assurance emprunteur, définie à l'article premier, est un contrat d'assurance dont l'objet est de garantir le remboursement d'un prêt dû par l'emprunteur à l'établissement de crédit prêteur, en cas de survenance d'un événement conduisant à une impossibilité pour l'emprunteur de s'acquitter de ses obligations, à savoir le décès, la situation d'invalidité ou d'inaptitude à l'emploi, de la perte d'emploi, etc. Tout dépend du contenu de la garantie. Ce contrat protège à la fois l'établissement de crédit – contre le risque de défaillance de l'emprunteur – et son client – qui se protège ainsi que ses héritiers contre les conséquences financières des aléas de la vie, l'investissement immobilier étant un acte important.

L'article 4 détermine les conditions de bénéfice de ce droit à l'oubli. Il y a trois conditions à remplir pour en bénéficier. La première condition est liée à la nature du prêt bancaire. La demande d'assurance doit survenir à l'occasion d'une demande d'octroi d'un prêt à la consommation dédié ou affecté, d'un prêt immobilier ou d'un prêt professionnel destiné à l'acquisition de locaux ou de mobiliers et matériels nécessaires à l'activité professionnelle.

La deuxième condition est propre à la date d'échéance du contrat d'assurance. L'échéance du contrat d'assurance doit intervenir avant que l'emprunteur atteigne un âge anniversaire qui sera fixé par ordonnance souveraine. À titre comparatif, en 2023 en France, la fin du contrat d'assurance doit intervenir avant le 71ème anniversaire de l'emprunteur.

La dernière condition est propre à la date d'achèvement du protocole thérapeutique. La date d'achèvement sera déterminée par ordonnance souveraine. À titre comparatif, en 2023 en France, cette durée ne peut excéder 5 ans.

Il est précisé que, pour le cancer, la fin du protocole thérapeutique devrait être la date de la fin du traitement actif, en l'absence de rechute, par chirurgie, radiothérapie ou chimiothérapie, à laquelle plus aucun traitement n'est nécessaire hormis la possibilité d'une thérapeutique persistante de type hormonothérapie ou immunothérapie.

La rechute signifie toute nouvelle manifestation médicalement constatée du cancer, qu'elle le soit par le bais d'un examen clinique, biologique ou d'imagerie. Les modalités d'application de ce droit à l'oubli sont définies par ordonnance souveraine.

L'article 5 vient préciser les éléments qui restent soumis à déclaration et qui ne rentrent pas dans les pathologies concernées. Ainsi, les autres pathologies et facteurs de risques, les situations actuelles d'incapacité, d'invalidité ou d'inaptitude au travail, en lien ou non avec l'affection relevant du droit à l'oubli, sont à déclarer à l'assureur en réponse au questionnaire de santé ou au questionnaire d'information et pourront faire l'objet d'une décision adaptée ou d'une tarification en tant que telle.

L'article 6 précise que l'assureur ne peut pas retenir des informations médicales relatives à une pathologie pour laquelle aucune information ne peut être sollicitée en vertu des dispositions sur le droit à l'oubli, et ce même si l'emprunteur a fait état de ces informations.

En effet, aucune surprime ni exclusion de garantie ne peut être appliquée à l'emprunteur du fait d'une pathologie bénéficiant du droit à l'oubli.

La section II, intitulée « Bénéfice d'une assurance sans surprime ou exclusion de garantie ou avec une surprime plafonnée », comporte trois articles (articles 7 à 9). Cette section prévoit, avec la déclaration de l'état de santé ou des antécédents de santé, le bénéfice d'obtenir une assurance au condition standard ou s'en rapprochant, plus précisément sans surprime ou exclusion de garantie ou avec une surprime plafonnée selon une grille de référence. Cette dernière liste les pathologies, à savoir les pathologies cancéreuses et autres pathologies, y compris chroniques, pour lesquelles l'assurance sera accordée aux personnes qui en ont souffert ou en souffrent.

Cette liste distingue deux situations, à savoir, d'une part, la situation où l'assurance est accordée à ces personnes sans surprime ni exclusion de garantie, et, d'autre part, la situation où l'assurance est accordée à ces personnes dans des conditions se rapprochant des conditions standard et plus précisément la liste qui détermine les conditions d'acceptation par garantie, et fixe les taux de surprimes maximaux et des délais adaptés à chacune de ces pathologies.

L'article 7 pose les conditions pour qu'une personne, présentant ou ayant présenté un risque aggravé de santé et l'ayant déclaré notamment dans un questionnaire médical, puisse bénéficier d'une assurance dans le cadre de la souscription d'un contrat de prêt sans surprime ou exclusion de garantie ou alors dans des conditions se rapprochant des conditions standard avec une surprime plafonnée selon la pathologie et la durée. Trois conditions doivent être réunies.

La première condition est relative à la nature du prêt. Seuls les prêts immobiliers ou les prêts professionnels en vue de l'acquisition de locaux ou de mobiliers et matériels nécessaires à l'activité professionnelle sont concernés. Les prêts à la consommation sont exclus du bénéfice de cette grille de référence.

La deuxième condition porte sur le montant assuré. Si celui-ci concerne les opérations de prêts immobiliers, la part assurée ne doit pas excéder un montant déterminé par ordonnance souveraine, sans tenir compte des crédit relais lorsqu'il s'agit de la résidence principale. Par comparaison, en 2023 en France, ce montant s'élève à un montant de 420 000 euros. Dans les autres cas de prêts immobiliers et prêts professionnels, le montant assuré s'applique aux contrats relatifs ou non à un encours cumulé de prêts, dont la part assurée n'excède pas un montant fixé par ordonnance souveraine. Pour information et comparaison dans la législation française en 2023, ce montant s'élève à la somme de 420 000 euros.

La dernière condition est relative à l'âge anniversaire de l'emprunteur à l'échéance du contrat d'assurance. L'échéance du contrat d'assurance doit intervenir avant que l'emprunteur atteigne un âge fixé par ordonnance souveraine. À titre de comparatif, en France en 2023, à la fin du contrat, l'emprunteur ne doit pas être âgé de plus de 70 ans et doit intervenir avant le 71ème anniversaire de ce dernier.

Ainsi, pour les prêts immobiliers et les prêts professionnels, les risques décès et invalidité peuvent être couverts si le montant du prêt ou le cumul des prêts n'excède pas une somme de 420 000 euros et si l'âge de l'emprunteur en fin de prêt n'excède pas 70 ans. Les crédits relais sont exclus lorsqu'il s'agit de l'acquisition d'une résidence principale.

L'article 8 précise qu'une grille de référence des pathologies constituant un risque aggravé de santé sera établie par arrêté ministériel, le contenu général de ladite grille étant précisée dans le texte projeté.

Cette grille de référence définit, par pathologie figurant dans la liste, les délais à compter desquels des assurances emprunteur sont accordées. Elle précise notamment la date de référence à partir de laquelle ces délais courent.

La grille de référence liste également des pathologies pour lesquelles des données de la science disponible permettent de conclure qu'une assurance emprunteur peut être accordée dans des conditions se rapprochant des conditions standard. Elle précise, par garantie, les critères d'accès à ces conditions d'assurance et les taux de surprime maximaux applicables. Pour ces pathologies, l'emprunteur est informé par l'assureur de la tarification standard de la prime et peut aussi apprécier le niveau de surprime appliquée.

L'article 9 pose le principe de l'interdiction pour les personnes présentant un risque aggravé de santé de se voir appliquer conjointement une surprime et une exclusion de garantie au titre d'une même pathologie pour leur contrat d'assurance dans le cadre de la souscription d'un crédit immobilier ou professionnel.

La section III intitulée « Exonération de fournir des informations relatives à l'état de santé ou de se soumettre à des examens médicaux » instaure un dispositif afin de faciliter l'accès au crédit des personnes présentant un risque aggravé de santé dans le cadre d'un crédit limité dans un certain montant et sous certaines conditions. Cette section est composée de deux articles (articles 10 à 11).

L'article 10 prévoit pour les crédits à la consommation affectés ou dédiés que le questionnaire médical est supprimé sous certaines conditions tenant au montant du prêt, à l'âge de l'emprunteur à la souscription du crédit, à la durée de remboursement et à la déclaration sur l'honneur de l'emprunteur. Les trois premières conditions seront fixées par ordonnance souveraine. Pour information, en 2023 en France, le montant du prêt ou cumul des prêts ne doit pas dépasser 17 000 euros, la durée de remboursement doit être inférieure ou égale à quatre ans et l'âge du candidat doit être de 50 ans au plus en début de prêt.

Au-delà de ces plafonds ou limite, l'emprunteur est soumis à un questionnaire de santé.

L'article 11 prévoit le même dispositif que l'article 10 mais applicable aux prêts immobiliers soit pour l'acquisition d'un bien à usage d'habitation, soit pour l'acquisition à usage professionnel et d'habitation. Le questionnaire médical est supprimé sous certaines conditions tenant à la part assurée sur les encours cumulés des contrats de crédit et sur l'âge de l'emprunteur à l'échéance du prêt.

Pour information, en France en 2023, la part assurée sur les encours cumulés des contrats de crédit n'excède pas la somme de 200 000 euros et l'échéance de remboursement du crédit contracté est antérieure au soixantième anniversaire de l'assuré.

Un chapitre III intitulé « Commission de médiation » est composée d'un article unique (article 12).

L'article 12 vient instaurer une commission de médiation en cas de conflit entre l'emprunteur et les assureurs ou établissements de crédit. Cette commission examine les réclamations individuelles.

Les conditions et modalités sont définies par ordonnance souveraine, ainsi que la composition et le fonctionnement de la commission.

Tel est l'objet du présent projet de loi.

Dispositif🔗

Chapitre premier - Dispositions générales🔗

Article 1er🔗

Au sens de la présente loi, on entend par :

  • 1) « assureur » : tout organisme d'assurance, assureur ou société d'assurance, autorisé en Principauté et exerçant les activités visées à l'article 3 de l'Ordonnance Souveraine n 4.178 du 12 décembre 1968 portant institution du contrôle de l'État sur les entreprises d'assurances de toute nature et de capitalisation et tendant à l'organisation de l'industrie des assurances, modifiée, et sollicité, dans le cadre de la présente loi, directement ou indirectement par l'emprunteur ;

  • 2) « établissement de crédit » : tout établissement visé par l'Ordonnance Souveraine n°13.889 du 18 février 1999 relative à la réglementation applicable aux établissements de crédit de la Principauté, y compris toute succursale établie sur le territoire de la Principauté d'un établissement de crédit dont le siège social est situé à l'étranger ;

  • 3) « personne présentant un risque aggravé de santé » : toute personne souffrant ou ayant souffert d'une pathologie qui présente un risque de morbidité ou de mortalité supérieur à celui de la population de référence ;

  • 4) « assurance emprunteur » : toute assurance souscrite à l'occasion de la demande d'octroi d'un prêt auprès d'un établissement de crédit, qui garantit la prise en charge de tout ou partie du prêt en cas de survenance de certains évènements et notamment en cas de décès de l'emprunteur, en cas de perte totale et irréversible d'autonomie, d'incapacité temporaire de travail, d'invalidité permanente et éventuellement la perte d'emploi ;

  • 5) « surprime d'assurance » : tout supplément de prime ou de cotisation réclamé à l'emprunteur en plus de la cotisation de base, lorsque le risque présenté par l'emprunteur diverge trop fortement du risque moyen auquel est associée la cotisation de base.

Article 2🔗

Les modalités relatives à la formation et à l'instruction de la demande d'assurance, au contenu et à la communication de la décision de l'assureur et de l'établissement de crédit, ainsi que la durée de validité de toute proposition d'assurance, sont définies par ordonnance souveraine.

Un document d'information sur les mesures prévues par les sections I et II du chapitre II est remis, simultanément au questionnaire de santé, aux personnes souscrivant un contrat d'assurance en relation avec un emprunt entrant dans les conditions de la présente loi par les établissements de crédit ou assureurs.

Chapitre II - Mesures d'aide à l'accès au crédit des personnes présentant un risque aggrave de sante🔗

Section I - Droit à l'oubli🔗

Article 3🔗

Toute personne bénéficie d'un droit à l'oubli lui permettant de ne pas déclarer une ancienne pathologie, figurant sur une liste fixée par ordonnance souveraine, à un assureur ou un établissement de crédit lors de la souscription d'un contrat d'assurance emprunteur.

Article 4🔗

L'exercice du droit à l'oubli prévu à l'article 3 est subordonné au respect des conditions suivantes :

  • 1) la demande d'assurance survient à l'occasion d'une demande d'octroi d'un prêt :

    • a) à la consommation affecté ou dédié ;

    • b) professionnel destiné à l'acquisition de locaux ou de mobiliers et matériels nécessaires à l'activité professionnelle ;

    • c) immobilier ;

  • 2) le protocole thérapeutique est achevé depuis une durée fixée par ordonnance souveraine ;

  • 3) l'échéance du contrat d'assurance intervient avant que l'emprunteur atteigne un âge fixé par ordonnance souveraine.

Les modalités d'application du présent article sont fixées par ordonnance souveraine.

Article 5🔗

Toute pathologie ou affection autre que celles figurant sur la liste mentionnée à l'article 3, tout facteur de risque, toute situation actuelle d'invalidité ou d'inaptitude au travail, en lien ou non avec les pathologies relevant du droit à l'oubli, ou toute conséquence de l'une de ces pathologies, affections ou des traitements y afférents, notamment les effets secondaires, sont déclarés par l'emprunteur à l'assureur ou à l'établissement de crédit.

Article 6🔗

Aucune information médicale relative à une pathologie bénéficiant du droit à l'oubli ne peut être retenue par un assureur ou un établissement de crédit, même lorsqu'il en est fait état par l'emprunteur.

Aucune surprime ni exclusion de garantie ne peut être appliquée à l'emprunteur du fait d'une pathologie figurant sur la liste mentionnée à l'article 3.

Section II - Bénéfice d'une assurance sans surprime ou exclusion de garantie ou avec une surprime plafonnée🔗

Article 7🔗

Toute personne ayant déclaré à un assureur ou établissement de crédit présenter une pathologie, y compris chronique, constituant un risque aggravé de santé et figurant dans une grille de référence définie à l'article 8, peut bénéficier d'une assurance, sans surprime ou exclusion de garantie ou avec une surprime plafonnée, dès lors que les conditions suivantes sont réunies :

  • 1) la demande d'assurance survient à l'occasion d'une demande d'octroi d'un des prêts suivants :

    • a) immobilier ;

    • b) professionnel destiné à l'acquisition de locaux ou de mobiliers et matériels nécessaires à l'activité professionnelle ;

  • 2) le montant assuré concerne les opérations de prêts immobiliers dont la part assurée n'excède pas un montant fixé par ordonnance souveraine, sans tenir compte des crédits relais lorsqu'il s'agit de l'acquisition d'une résidence principale. Dans les autres cas de prêts immobiliers et de prêts professionnels, le montant assuré s'applique aux contrats relatifs à un encours cumulé de prêts, dont la part assurée n'excède pas un montant fixé par ordonnance souveraine ;

  • 3) l'échéance du contrat d'assurance intervient avant que l'emprunteur atteigne un âge fixé par ordonnance souveraine.

Article 8🔗

La grille de référence, mentionnée à l'article 7, est établie par arrêté ministériel. Elle définit :

  • 1) la liste et les caractéristiques des pathologies, notamment les types histologiques et les stades de référence, et les délais au-delà desquels aucune surprime, ni exclusion de garantie n'est appliquée, pour certaines pathologies, aux personnes qui en ont souffert ;

  • 2) les taux de surprime maximaux applicables par les assureurs, pour certaines pathologies qui ne permettent pas aux personnes qui en souffrent d'accéder à une assurance emprunteur à un tarif standard.

Article 9🔗

Les personnes atteintes ou ayant été atteintes d'une pathologie pour laquelle l'existence d'un risque aggravé de santé a été établi ne peuvent se voir appliquer conjointement une majoration de tarifs et une exclusion de garantie au titre de cette même pathologie pour leurs contrats d'assurance ayant pour objet de garantir le remboursement d'un crédit visé au chiffre 1 du premier alinéa de l'article 7.

Section III - Exonération de fournir des informations relatives à l'état de santé ou de se soumettre à des examens médicaux🔗

Article 10🔗

Lorsque le contrat d'assurance a pour objet de garantir, en cas de survenance d'un des risques que ce contrat définit, soit le remboursement total ou partiel du montant restant dû au titre d'un contrat de crédit à la consommation, soit le paiement de tout ou partie des échéances dudit prêt, aucune information relative à l'état de santé, ni aucun examen médical de l'assuré ne peut être sollicité par l'assureur, sous réserve du respect de l'ensemble des conditions suivantes :

  • 1) le montant assuré ne dépasse pas un montant fixé par ordonnance souveraine ;

  • 2) la durée de remboursement est inférieure ou égale à une durée fixée par ordonnance souveraine ;

  • 3) l'âge de l'emprunteur n'excède pas un âge fixé par ordonnance souveraine ;

  • 4) l'emprunteur déclare sur l'honneur un non-cumul de prêts au-delà du plafond susmentionné.

Article 11🔗

Lorsque le contrat d'assurance a pour objet de garantir, en cas de survenance d'un des risques que ce contrat définit, soit le remboursement total ou partiel du montant restant dû au titre d'un contrat de crédit immobilier pour l'acquisition d'un bien à usage d'habitation ou à usage professionnel, soit le paiement de tout ou partie des échéances dudit prêt, aucune information relative à l'état de santé ni aucun examen médical de l'assuré ne peut être sollicité par l'assureur, sous réserve du respect de l'ensemble des conditions suivantes :

  • 1) la part assurée sur l'encours cumulé des contrats de crédit n'excède pas un montant fixé par ordonnances souveraine ;

  • 2) l'échéance de remboursement du crédit contracté intervient avant que l'emprunteur atteigne un âge fixé par ordonnance souveraine.

Chapitre III - Commission de médiation🔗

Article 12🔗

Une commission est chargée, dans les conditions et selon les modalités définies par ordonnance souveraine, d'examiner les réclamations individuelles qui lui sont adressées concernant l'application de la présente loi, le cas échéant, d'effectuer la médiation entre les emprunteurs, d'une part, et les assureurs ou les établissements de crédit, d'autre part.

La composition et le mode de fonctionnement de cette commission de médiation sont définis par ordonnance souveraine.

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