Cour d'appel : condamnation d'une société pour traitement discriminatoire d'une salariée en raison de son état de grossesse
La Cour d'appel a rendu une décision le 26 septembre 2024 concernant l'exécution déloyale du contrat de travail par une société en raison de l'état de grossesse de sa salariée. Le fait, pour la société, de priver de bonus la salariée du seul fait qu'elle avait bénéficié d'une augmentation de salaire sans déclarer son projet de maternité revient à une mesure de rétorsion discriminatoire, quand bien même le bonus est considéré comme étant discrétionnaire (Cour d'appel, 26 septembre 2024, La société z M (MONACO) S. A. M. c/ v. A.).
En l'espèce, une femme avait été embauchée en CDI en qualité d'assistante de gestion le 22 juillet 2013. Son contrat de travail prévoyait notamment la possibilité de bénéficier d'un « bonus individuel variable », au titre duquel elle avait perçu une somme de 41 000 euros pour l'année 2019. Le 11 mars 2020, elle a été placée en arrêt de travail lié à un état de grossesse, puis en congé maternité et en congé allaitement conventionnels jusqu'au 4 mars 2021.
À la suite de plusieurs échanges avec sa hiérarchie en mars 2021 concernant l'absence de paiement de bonus pour l'année 2020, elle adressa un courrier à son employeur mentionnant que : « en refusant tout dialogue, je considère que l'établissement ne répond plus à ses obligations substantielles d'employeur. Face à ces discriminations répétées je me vois contrainte de démissionner de mon poste d'assistante de gestion, à compter de la réception de cette lettre ». Le 1er septembre 2021, elle saisit le Tribunal du travail et sollicita la reconnaissance d'une exécution déloyale du contrat de travail, d'une iniquité et d'une discrimination, ainsi que la requalification de la démission en licenciement abusif et la nullité du licenciement.
Le 31 janvier 2023, le Tribunal du travail qualifia le bonus de discrétionnaire, reconnut l'inégalité de traitement salariale et requalifia la démission en licenciement abusif tout en rejetant la demande de nullité du licenciement. Il condamna alors la société au paiement de diverses sommes, dont la somme de 7 000 euros à titre de bonus pour l'année 2020. Le 13 mars 2023, la société fit appel du jugement.
La Cour d'appel, par jugement du 26 septembre 2024, confirme le jugement rendu par le Tribunal du travail en toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne le montant des sommes que la société avait été condamnée à lui verser.
Sur l'absence de versement du bonus pour l'année 2020, la Cour d'appel constate que le fait de priver de bonus la salariée, du seul fait qu'elle avait bénéficié d'une augmentation de salaire sans déclarer son projet de maternité, revient à une mesure de rétorsion discriminatoire, ce qui caractérise une exécution fautive du contrat. Concernant la nature du montant, en revanche, la Cour relève que la société aurait conservé son pouvoir discrétionnaire pour son évaluation. La salariée fournit néanmoins des éléments de preuve démontrant que des salariées, en congé maternité, avaient bénéficié d'un bonus sans prorata au regard de leur présence effective. La Cour, dans son pouvoir d'appréciation, relève alors à la somme de 20 000 euros le montant dû au titre de bonus pour l'année 2020.