Tribunal du travail, 3 juillet 2024, Monsieur f. A. c/ La Société Anonyme Monégasque dénommée F.
Abstract🔗
Tribunal du Travail – Demandes – Recevabilité – Conditions
Employés de jeu – Cagnotte des pourboires – Répartition – Conventions collectives applicables – Opposabilité
Résumé🔗
Aux termes de l'article 1er de la loi n° 446 du 16 mai 1946, le Bureau de jugement du Tribunal du travail ne peut connaître que des demandes soumises préalablement à la tentative de conciliation, qu'il s'agisse de leur nature ou de leur quantum. En l'espèce, le salarié a déposé une requête devant le Bureau de conciliation afin d'obtenir le paiement de rappel de salaire au titre des parts bénéficiaires pour l'exercice 2012 et 2013 et de recevoir pour l'avenir sa quote-part conformément à la Convention Collective toujours en vigueur et en fonction du nombre de salariés bénéficiaires des parts bénéficiaires attribuées à la catégorie de personnes de laquelle il relève. Si la demande pour l'avenir n'était pas déterminée, elle était déterminable et partant recevable. En effet, le salarié ne pouvait alors pas chiffrer une demande reposant sur un salaire non encore perçu. Il avait cependant identifié le désaccord avec son employeur quant à la méthode de calcul. La Société défenderesse sera en conséquence déboutée de son exception d'irrecevabilité.
Aux termes d'un accord du 28 mai 1945 entre la Société défenderesse et le syndicat des employés de jeux, il a été convenu de répartir le produit de la cagnotte des pourboires des jeux de roulette et de trente et quarante de la manière suivante :
70% entre les employés des jeux de roulette et de trente et quarante,
30% au paiement des parts bénéficiaires.
En l'état d'un désaccord sur le mode de distribution de la part de 30%, la sentence arbitrale « Notari » du 30 juillet 1945 a fixé comme suit la répartition des parts bénéficiaires :
25% en parts ordinaires à raison d'une part par 100 francs d'appointement et ¼ de part par fraction de 25 francs,
5% du produit total de la cagnotte en parts égales.
Depuis le 13 novembre 1946, une Convention Collective régissait les rapports entre la Société défenderesse et ses salariés. Elle prévoyait la répartition de parts dites bénéficiaires entre les différents salariés attributaires selon la méthode déterminée par la sentence arbitrale « Notari » du 30 juillet 1945.
Le 30 mars 2012 une nouvelle Convention Collective était signée entre la Société défenderesse et différents syndicats à l'exclusion du Syndicat des Jeux annexes et du Syndicat des Caisses. 80 % des effectifs des caissiers y souscrivaient tout de même à titre individuel. Afin de fixer la quotité de masse à attribuer aux salariés demeurant soumis aux dispositions de la Convention Collective de 1946, la Société défenderesse a édicté un accord, signé par le syndicat des cadres administratifs et le syndicat des agents de maîtrise le 20 mars 2013 stipulant que « Les parts de masse à distribuer (parts ordinaires, parts supplémentaires, parts égales) sont calculées dans la proportion que représentent les salariés encore attributaires par rapport à l'ensemble des attributaires en 2011/2012 » et que « Ce pourcentage est calculé chaque année en fonction du nombre d'attributaires pour l'exercice considéré en tenant compte des départs et des entrées dans le statut commissionné, la référence restant toujours l'exercice 2011/2012 ». Par sentence du 26 septembre 2016, la Cour supérieure d'arbitrage a « Déclaré valide l'accord conclu le 20 mars 2013 entre d'une part, la D et, d'autre part les syndicats des cadres administratifs, le syndicat des agents de maîtrise devenu ultérieurement le syndicat « non jeux unifiés » et « Dit et jugé que cette validité n'a pas pour conséquence son opposabilité aux parties non-signataires ».
S'agissant de la période antérieure au 1er avril 2016, revendiquant ne pas être signataire de la Convention Collective du 30 mars 2012, le salarié indique, d'une part, que l'accord du 20 mars 2013 ne pouvait lui être appliqué et que, d'autre part, il convenait de continuer à lui appliquer la répartition de la totalité de la cagnotte selon la méthode de calcul fixée par la sentence arbitrale « Notari » du 30 juillet 1945 entre lui-même et les seuls salariés non signataires de la nouvelle Convention Collective, les autres ayant renoncé à leur qualité d'attributaire en renonçant à la Convention Collective du 13 novembre 1946. Le Tribunal du travail considère qu'il est exact de dire, comme l'a rappelé la Cour supérieure d'arbitrage, qu'en l'absence d'accord, ni à titre collectif ni à titre individuel, quant à l'application de l'accord du 20 mars 2013, cet accord n'était pas applicable aux syndicats des jeux annexes et des caisses. En revanche, il n'est pas plus contestable que les signataires de la Convention Collective du 30 mars 2012 se sont entendus pour « intégrer dans les salaires de base des salariés commissionnés les montants correspondants à la répartition entre ces salariés des 30% prélevés sur la cagnotte ». Ainsi, contrairement à ce que le demandeur affirme, les salariés ayant adhéré à la Convention Collective du 20 mars 2012 n'ont pas renoncé à leur qualité de commissionnés, mais ont uniquement vu le montant correspondant à leur quote-part de la cagnotte intégré dans leur salaire de base. Ils pouvaient agir ainsi sans contrevenir aux principes de la sentence « Notari ». En effet, celle-ci a uniquement édicté que « il ne suffit pas qu'une fraction, même majoritaire, de l'ensemble des ayants-droits renonce à invoquer le bénéfice des avantages discutés pour emporter renonciation auxdits avantages pour les ayants-droits non consentants », qu'il faut comprendre en ce que l'accord de certains n'emporte pas application pour les autres. Toutefois, en l'espèce il n'y a eu aucune renonciation au droit à une quote-part de la cagnotte, mais simplement accord quant à une modalité de répartition lissée et non plus fluctuante. L'ensemble des salariés étaient dès lors bien demeurés attributaires des parts bénéficiaires, ceux adhérant à la nouvelle Convention Collective du 20 mars 2012 selon une nouvelle modalité de versement (fixe) et ceux non-signataires demeurant payés à la commission.
S'agissant de la période postérieure au 1er avril 2016, la Société défenderesse et les syndicats des appareils automatiques (cadres et employés du Sun Casino, cadres et maitrises du Café de Paris, jeux annexes) se sont entendus pour signer une nouvelle Convention Collective le 1er avril 2016, prévoyant un nouveau système de rémunération et mettant un terme à la perception des parts bénéficiaires. Le demandeur soutient que cette Convention ne lui est pas applicable, pour ne pas y avoir adhéré individuellement. Or, la représentativité syndicale permet aux organisations de signer avec l'employeur des accords s'appliquant à l'ensemble des salariés. Dès lors, la signature des syndicats des appareils automatiques emportait application de l'accord à l'ensemble des salariés relevant de ce secteur d'activité. C'est dès lors à bon droit que la Société défenderesse a appliqué à compter du 1er avril 2016 la Convention Collective « jeux-appareils automatiques » au salarié et les demandes de rappel de salaire et d'expertise seront rejetées.
TRIBUNAL DU TRAVAIL
JUGEMENT DU 3 JUILLET 2024
N° 62-2013/2014
En la cause de Monsieur f. A., né le jma à NICE (06), de nationalité française, demeurant x1 à BEAUSOLEIL (06240) ;
Demandeur, ayant élu domicile en l'étude de Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;
d'une part ;
Contre :
La Société Anonyme Monégasque dénommée F., dont le siège social se situe x2 à MONACO (98000), prise en la personne de son Président du Conseil d'Administration en exercice, y demeurant en cette qualité ;
Défenderesse, ayant élu domicile en l'étude de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;
d'autre part ;
Visa🔗
LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu la procédure enregistrée sous le numéro 62-2013/2014 ;
Vu le jugement avant-dire-droit au fond du Tribunal du Travail en date du 24 mars 2016 aux termes duquel la juridiction s'est déclarée compétente pour connaitre des demandes formées par Monsieur f.A et sursis à statuer dans l'attente de la décision définitive qui sera rendue dans la procédure d'arbitrage initiée le 30 septembre 2013 par la Société Anonyme Monégasque dénommée F. (ci-après SAM F.) ;
Vu le procès-verbal de non-conciliation dressé par la Commission de conciliation des conflits collectifs du travail dans le conflit opposant la Direction de la SAM F. à ses syndicats, notamment aux Syndicats des Jeux Annexes et au Syndicat Monégasque du Personnel des Caisses de la F., en date du 8 novembre 2013 ayant pour objet la validité de l'accord du 20 mars 2013 organisant le mode de calcul des parts dites bénéficiaires ;
Vu la sentence arbitrale rendue le 30 juin 2016 relative au conflit collectif du travail opposant la Direction de la SAM F. à ses syndicats, notamment aux Syndicats des Jeux Annexes et au Syndicat Monégasque du Personnel des Caisses de la F. aux termes de laquelle l'exception d'incompétence ratione materiae a été rejetée, l'exception de litispendance et la demande de sursis à statuer ont été rejetées et l'accord relatif au calcul des parts dites bénéficiaires du 20 mars 2013 a été déclaré non valide ;
Vu la requête en annulation déposée par la SAM F. devant la Cour Supérieure d'Arbitrage en date du 11 juillet 2016 ;
Vu l'arrêt rendu par la Cour Supérieure d'Arbitrage en date du 29 juillet 2016 ayant notamment déclaré le recours recevable en la forme et bien fondé, cassé et annulé la sentence arbitrale du 30 juin 2016, évoqué le fond, fixé un calendrier procédural et renvoyé la cause et les parties pour débats au fond à l'audience du 22 août 2016 ;
Vu l'arrêt rendu par la Cour Supérieure d'Arbitrage en date du 26 septembre 2016 ayant notamment déclaré valide l'accord conclu le 20 mars 2013 entre, d'une part la F. et, d'autre part, le syndicat des cadres administratifs, le syndicat des agents de maîtrise devenu ultérieurement le syndicat « non jeux unifié » et le syndicat des personnels du contrôle et de la sécurité, dit et jugé que cette validité n'a pas pour conséquence son opposabilité aux parties non signataires et rejeté le surplus des demandes ;
Vu les conclusions récapitulatives de Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur au nom de Monsieur f. A., en date du 11 mai 2023 ;
Vu les conclusions récapitulatives de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur au nom de la S. A. M. F., en date du 14 décembre 2023 ;
Vu l'ordonnance de clôture de la procédure en date du 20 décembre 2023 ;
À l'audience publique du 22 février 2024, les conseils des parties ont été entendus en leurs plaidoiries, l'affaire était mise en délibéré pour être rendue le 3 juillet 2024, sans opposition des parties par mise à disposition au Secrétariat du Tribunal du travail, ces dernières en ayant été avisées par Madame le Président ;
Vu les pièces du dossier ;
Motifs🔗
Depuis le 13 novembre 1946, une Convention Collective régissait les rapports entre la F. et ses salariés. Elle prévoyait la répartition de parts dites bénéficiaires entre les différents salariés attributaires selon une méthode déterminée par la sentence arbitrale « Notari » du 30 juillet 1945.
Le 30 mars 2012 une nouvelle Convention Collective était signée entre la F. et différents syndicats à l'exclusion du Syndicat des Jeux annexes et du Syndicat des Caisses. 80 % des effectifs des caissiers y souscrivaient tout de même à titre individuel.
Cette Convention prévoit pour les salariés attributaires soumis à son régime que les parts bénéficiaires résultent de la répartition aux salariés des 30 % prélevés sur la cagnotte des jeux soumis à ce prélèvement et que les 30 % seront affectés au paiement des parts bénéficiaires intégrées dans les salaires de base.
Afin de fixer la quotité de masse à attribuer aux salariés demeurant soumis aux dispositions de la Convention Collective de 1946, la F. a édicté un accord, signé par le syndicat des cadres administratifs et le syndicat des agents de maîtrise le 20 mars 2013 stipulant :
« Les parts de masse à distribuer (parts ordinaires, parts supplémentaires, parts égales) sont calculées dans la proportion que représentent les salariés encore attributaires par rapport à l'ensemble des attributaires en 2011/2012.
Ce pourcentage est calculé chaque année en fonction du nombre d'attributaires pour l'exercice considéré en tenant compte des départs et des entrées dans le statut commissionné, la référence restant toujours l'exercice 2011/2012 ».
La question de la validité de cet accord a été soumise à une procédure d'arbitrage.
De nombreux employés de la F., appartenant tous au service des appareils automatiques ou des caisses, prétendants ne pas être signataires de la convention et de l'accord collectifs, ni individuellement ni collectivement, ont réclamé la poursuite de l'application de la Convention Collective de 1946 et l'attribution d'un intéressement plus élevé du fait de la baisse du nombre de salariés commissionnés.
Ensuite d'un procès-verbal de non-conciliation du 18 février 2014, Monsieur f. A., a attrait la F. devant le Bureau de jugement du Tribunal du travail à l'effet de :
dire et juger qu'il est fondé à obtenir le paiement de la somme de 12.246,98 euros, en sus du montant qui lui a été versé par la F. au titre des parts bénéficiaires pour l'exercice 2012/2013,
Sauf à parfaire ;
dire et juger qu'il est fondé à recevoir pour l'avenir sa quote-part, conformément à la Convention Collective toujours en vigueur, et en fonction du nombre de salariés bénéficiaires des parts bénéficiaires attribuées à la catégorie de personnes desquelles il relève,
désigner en tant que de besoin tel expert qu'il plaira, à l'effet de contrôler et évaluer ledit différentiel,
condamner la F., en tant que de besoin à régler cette somme, avec intérêts au taux légal à compter de la présente demande,
les frais et dépens (mémoire),
l'exécution provisoire de la décision à intervenir, dans les limites légales.
Par jugement avant-dire-droit du 24 mars 2016, le Tribunal du travail s'est déclaré compétent pour connaître des demandes des salariés de la F. et a ordonné le sursis à statuer dans l'attente de la décision définitive rendue dans la procédure d'arbitrage initiée par la F.
Par sentence du 26 septembre 2016, la Cour supérieure d'arbitrage a :
« Déclaré valide l'accord conclu le 20 mars 2013 entre d'une part, la F. et, d'autre part les syndicats des cadres administratifs, le syndicat des agents de maîtrise devenu ultérieurement le syndicat « non jeux unifiés »,
« Dit et jugé que cette validité n'a pas pour conséquence son opposabilité aux parties non-signataires »,
« Rejeté le surplus des demandes ».
À compter du 1er avril 2016, le personnel des Jeux Annexes et Appareils Automatiques, auquel n'appartient pas Monsieur f. A., s'est vu proposer une nouvelle Convention Collective « jeux ». Il prétend alors que ceux ayant fait le choix d'y adhérer ont renoncé à leur statut de bénéficiaire des parts dites bénéficiaires, ce qui n'est pas son cas.
Par conclusions récapitulatives du 11 mai 2023 Monsieur f. A. fixe sa demande à 545.075,66 euros, sauf à parfaire et sollicite 2.780 euros au titre des frais irrépétibles.
Il fait valoir pour l'essentiel que :
n'étant pas signataire de la Convention Collective du 30 mars 2012 ni de l'accord du 20 mars 2013, que ce soit individuellement ou par l'intermédiaire de son syndicat, ils ne lui sont pas opposables,
il est en conséquence fondé à obtenir le paiement d'un complément de solde de rémunération constitué par les « parts bénéficiaires » pour l'exercice 2012/2013 et pour les exercices suivants jusqu'à son adhésion à la Convention Collective « jeux » de 2016, calculé en fonction du nombre de salariés attributaires dits « commissionnés » suivant les règles posées par la Convention Collective du 13 novembre 1946 et ses avenants à l'exception de la Convention Collective du 30 mars 2012,
les adhérents à la nouvelle Convention Collective ne sont pas demeurés attributaires des parts bénéficiaires et ne sont plus commissionnés,
or, aux termes de la Convention de 1946, la répartition des parts bénéficiaires ne peut avoir lieu qu'entre les salariés commissionnés,
la quote-part de son intéressement doit être calculé en fonction du nombre de commissionnés selon chaque exercice observé,
et non pas selon la méthode de calcul arbitrairement décidée par l'employeur sans ratification de sa part,
la méthode de calcul de la répartition de la masse à distribuer prévue par la Convention Collective de 1946 devait continuer à s'appliquer à tous les salariés y demeurant affiliés,
les règles définissant la répartition des parts bénéficiaires ne pouvaient être modifiées ou remplacées que si la totalité des attributaires acceptait d'en changer,
la F. a pris l'initiative fautive de redistribuer des pourboires suivant des nouvelles règles afin d'amoindrir ses charges, règles sur lesquelles il n'a jamais donné son accord,
elle a appliqué de force à compter du 1er avril 2016 la Convention Collective du 30 mars 2012 et l'accord corollaire du 20 mars 2013 alors qu'ils ne lui étaient pas opposables,
la demande de fixation de la quote-part pour l'avenir est recevable,
elle n'était pas chiffrable au moment de la saisine du Bureau de conciliation, puisque les exercices comptables étaient en cours,
elle a néanmoins bien été soumise au préliminaire de conciliation,
la désignation d'un expert judiciaire est nécessaire à l'effet d'établir le différentiel des sommes dues,
cette demande n'est pas destinée à pallier une prétendue carence de sa part, mais résulte du refus de la F. de communiquer les éléments permettant de calculer la quote-part,
elle permettra un chiffrage précis des demandes, ou à tout le moins la vérification de celui-ci,
l'attestation de l'expert-comptable communiquée par la F. ne correspond pas aux informations transmises par l'ancien D. R. H. dans le cadre du plan social d'entreprise, ni à ceux émanant du service de la cagnotte,
la demande d'expertise apparaît donc plus que jamais nécessaire.
Par conclusions récapitulatives du 14 décembre 2023 la F. sollicite le débouté de l'intégralité des demandes de Monsieur f. A. et 3.000 euros au titre des frais irrépétibles.
Elle fait valoir pour l'essentiel que :
la demande de condamnation pour l'avenir est irrecevable en ce qu'elle n'est pas déterminée en son montant,
la demande de désignation d'un expert a pour unique but de pallier la carence du demandeur dans l'administration de la preuve,
il n'a d'ailleurs même pas pris la peine de justifier son calcul ou à tout le moins de la formule de calcul lui ayant permis de fixer le montant de la demande qu'il formule,
l'entrée en vigueur de la Convention Collective de 2012 n'a jamais remis en cause la qualité d'attributaire de parts bénéficiaires des salariés concernés,
la F. a toujours affecté la cagnotte au paiement des parts bénéficiaires, au bénéfice de tous les salariés quelle que soit la Convention Collective à laquelle ils sont soumis,
les salariés soumis à la nouvelle Convention et faisant partie du groupe fermé continuent à percevoir leurs parts bénéficiaires, celles-ci étant intégrées dans leur salaire de base et non plus versées de manière distincte,
les termes de la Convention Collective de 1946 et des sentences arbitrales ayant suivi ne peuvent être appliqués, alors que les conditions dans lesquelles elles ont été négociées et décidées ne sont plus réunies,
jusqu'en 2012 le nombre d'attributaires des parts bénéficiaires prenait en compte les salariés sortants mais également les salariés entrants,
le fait d'exclure les salariés faisant partie du groupe fermé de la Convention de 2012 du partage des cagnottes augmente artificiellement la valeur des parts, ce qui est en contradiction totale avec l'esprit des Conventions et sentences arbitrales,
la Convention Collective de 2012 n'a pas remis en cause le mode de répartition de la cagnotte, les règles de la sentence « Notari » demeurant inchangées, dès lors que ce sont toujours 30% des cagnottes qui sont répartis entre les salariés,
la question de l'opposabilité de l'accord de 2013 entre la F. et les syndicats n'est pas utile à la solution du litige, celle-ci ayant trait à un conflit collectif du travail, et non pas au conflit individuel du salarié,
la décision de la Cour supérieure d'arbitrage s'est limitée à dire que l'accord n'est pas opposable aux syndicats non-signataires,
l'employeur est tenu d'appliquer aux contrats de travail de ses salariés un accord collectif dont il est signataire et qui est déclaré valable,
la reconnaissance de la validité de l'accord de 2013 confirme que les salariés qui bénéficiaient de parts bénéficiaires sous l'empire de la Convention Collective de 1946 dont le contrat de travail a ensuite été soumis aux stipulations de la Convention Collective de 2012 sont restés attributaires de parts bénéficiaires,
l'intégration des parts bénéficiaires dans le salaire fixe des salariés constitue un changement dans les modalités de rémunération mais ne remet nullement en cause la qualité d'attributaire des salariés,
la répartition des parts bénéficiaires doit donc se faire en fonction du nombre de salariés restant attributaires des parts bénéficiaires, que celles-ci soient versées sous la forme d'un commissionnement ou intégrées dans le salaire de base et calculées selon le mode de calcul fixé par l'accord de 2013,
La F. a redistribué l'ensemble des parts bénéficiaires aux salariés attributaires, prenant même à sa charge une partie des parts bénéficiaires quand le niveau de la cagnotte n'atteignait pas le montant garanti dans la Convention Collective de 2012,
le salarié a en conséquence était rempli intégralement de ses droits,
le rapport d'expertise produit par le demandeur a été établi unilatéralement sur la base d'informations erronées,
il est fondé sur des bulletins de salaires non exhaustifs et quelques documents,
les estimations ont été réalisées sur un effectif inconnu,
la méthode de calcul est sujette à caution, l'expert n'ayant pas pris en compte la contrepartie des parts bénéficiaires perçues par le salarié selon les termes de l'accord du 20 avril 2013,
les affirmations selon lesquelles les informations figurant sur l'attestation du commissaire aux comptes seraient fausses sont inexactes,
le courriel du D. R. H. informait les représentants du personnel sur le montant des pourboires pour l'ensemble des jeux de table ; or, la cagnotte servant de base de calcul aux parts bénéficiaires n'est constituée que des pourboires générés par les jeux de roulette européenne et de trente et quarante,
le document qui aurait été établi par le service de la cagnotte est sur papier libre, sans en-tête ni la moindre indication sur son auteur ni la moindre signature.
SUR CE
Sur la recevabilité de la demande pour l'avenir
Aux termes de l'article 1er de la loi n° 446 du 16 mai 1946, le Bureau de jugement du Tribunal du travail ne peut connaître que des demandes soumises préalablement à la tentative de conciliation, qu'il s'agisse de leur nature ou de leur quantum.
En l'espèce, le salarié a déposé une requête devant le Bureau de conciliation afin d'obtenir le paiement de rappel de salaire au titre des parts bénéficiaires pour l'exercice 2012 et 2013 et de recevoir pour l'avenir sa quote-part conformément à la Convention Collective toujours en vigueur et en fonction du nombre de salariés bénéficiaires des parts bénéficiaires attribuées à la catégorie de personnes de laquelle il relève.
Si la demande pour l'avenir n'était pas déterminée, elle était déterminable et partant recevable. En effet, le salarié ne pouvait alors pas chiffrer une demande reposant sur un salaire non encore perçu. Il avait cependant identifié le désaccord avec son employeur quant à la méthode de calcul.
La SAM F. sera en conséquence déboutée de son exception d'irrecevabilité.
Sur le fond
Aux termes d'un accord du 28 mai 1945 entre la SAM F. et le syndicat des employés de jeux, il a été convenu de répartir le produit de la cagnotte des pourboires des jeux de roulette et de trente et quarante de la manière suivante :
70% entre les employés des jeux de roulette et de trente et quarante,
30% au paiement des parts bénéficiaires.
En l'état d'un désaccord sur le mode de distribution de la part de 30%, la sentence arbitrale « Notari » du 30 juillet 1945 a fixé comme suit la répartition des parts bénéficiaires :
25% en parts ordinaires à raison d'une part par 100 francs d'appointement et ¼ de part par fraction de 25 francs,
5% du produit total de la cagnotte en parts égales.
Depuis le 13 novembre 1946, une Convention Collective régissait les rapports entre la SAM F. et ses salariés. Elle prévoyait la répartition de parts dites bénéficiaires entre les différents salariés attributaires selon la méthode déterminée par la sentence arbitrale « Notari » du 30 juillet 1945.
Sur la période antérieure au 1er avril 2016
Le 30 mars 2012 une nouvelle Convention Collective était signée entre la SAM F. et différents syndicats à l'exclusion du Syndicat des Jeux annexes et du Syndicat des Caisses. 80 % des effectifs des caissiers y souscrivaient tout de même à titre individuel.
Cette Convention prévoit pour les salariés attributaires soumis à son régime que les parts bénéficiaires résultent de la répartition aux salariés des 30 % prélevés sur la cagnotte des jeux soumis à ce prélèvement et que les 30 % seront affectés au paiement des parts bénéficiaires intégrées dans les salaires de base.
Afin de fixer la quotité de masse à attribuer aux salariés demeurant soumis aux dispositions de la Convention Collective de 1946, la SAM F. a édicté un accord, signé par le syndicat des cadres administratifs et le syndicat des agents de maîtrise le 20 mars 2013 stipulant :
« Les parts de masse à distribuer (parts ordinaires, parts supplémentaires, parts égales) sont calculées dans la proportion que représentent les salariés encore attributaires par rapport à l'ensemble des attributaires en 2011/2012.
Ce pourcentage est calculé chaque année en fonction du nombre d'attributaires pour l'exercice considéré en tenant compte des départs et des entrées dans le statut commissionné, la référence restant toujours l'exercice 2011/2012 ».
Par sentence du 26 septembre 2016, la Cour supérieure d'arbitrage a :
« Déclaré valide l'accord conclu le 20 mars 2013 entre d'une part, la F. et, d'autre part les syndicats des cadres administratifs, le syndicat des agents de maîtrise devenu ultérieurement le syndicat « non jeux unifiés »,
« Dit et jugé que cette validité n'a pas pour conséquence son opposabilité aux parties non-signataires »,
« Rejeté le surplus des demandes ».
Revendiquant ne pas être signataire de la Convention Collective du 30 mars 2012, le salarié indique, d'une part, que l'accord du 20 mars 2013 ne pouvait lui être appliqué et que, d'autre part, il convenait de continuer à lui appliquer la répartition de la totalité de la cagnotte selon la méthode de calcul fixée par la sentence arbitrale « Notari » entre lui-même et les seuls salariés non signataires de la nouvelle Convention Collective, les autres ayant renoncé à leur qualité d'attributaire en renonçant à la Convention collective du 13 novembre 1946.
Il est exact de dire, comme l'a rappelé la Cour supérieure d'arbitrage, qu'en l'absence d'accord, ni à titre collectif ni à titre individuel, quant à l'application de l'accord du 20 mars 2013, cet accord n'étant pas applicable aux syndicats des jeux annexes et des caisses.
En revanche, il n'est pas plus contestable que les signataires de la Convention collective du 30 mars 2012 se sont entendus pour « intégrer dans les salaires de base des salariés commissionnés les montants correspondants à la répartition entre ces salariés des 30% prélevés sur la cagnotte ».
Ainsi, contrairement à ce que le demandeur affirme, les salariés ayant adhéré à la Convention Collective du 20 mars 2012 n'ont pas renoncé à leur qualité de commissionnés, mais ont uniquement vu le montant correspondant à leur quote-part de la cagnotte intégré dans leur salaire de base. Ils pouvaient agir ainsi sans contrevenir aux principes de la sentence « Notari ». En effet, celle-ci a uniquement édicté que « il ne suffit pas qu'une fraction, même majoritaire, de l'ensemble des ayants-droits renonce à invoquer le bénéfice des avantages discutés pour emporter renonciation auxdits avantages pour les ayants-droits non consentants », qu'il faut comprendre en ce que l'accord de certains n'emporte pas application pour les autres. Toutefois, en l'espèce il n'y a eu aucune renonciation au droit à une quote-part de la cagnotte, mais simplement accord quant à une modalité de répartition lissée et non plus fluctuante.
L'ensemble des salariés étaient dès lors bien demeurés attributaires des parts bénéficiaires, ceux adhérant à la nouvelle Convention Collective du 20 mars 2012 selon une nouvelle modalité de versement (fixe) et ceux non-signataires demeurant payés à la commission.
D'ailleurs, il convient de rappeler que la sentence « Notari » avait déjà indiqué que le bénéfice de la modification de la situation de certains salariés, si elle ne pouvait affecter les droits acquis des autres, ne pouvait pas plus créer de droits supplémentaires en précisant « le principe de conservation des droits acquis ne peut être invoqué qu'à l'occasion du partage de la masse faisant l'objet d'une distribution antérieure » et « la masse constituée par les 25% du produit total de la cagnotte se trouverait accrue en valeur absolue si l'on ne prélevait pas sur son montant les sommes allouées au titre des parts supplémentaires des cadres des jeux et des témoignages de satisfaction, désormais réglés par frais généraux ».
Ainsi, son économie générale consistait à rappeler que le principe du droit acquis ne permettait pas de porter atteinte aux avantages sans renonciation, tout en rappelant que la renonciation d'autres ayants-droits ne pouvait créer de droits supplémentaires.
En l'espèce, la lecture des bulletins de salaires des employés des caisses fait apparaître que les parts bénéficiaires ont bien été réglées jusqu'au 1er avril 2016.
Le point de désaccord entre les parties réside dans la détermination de la catégorie d'attributaires des parts bénéficiaires, le demandeur considérant que ses collègues ayant adhéré à la Convention Collective du 20 mars 2012 y auraient renoncé. Or, tel n'est pas le cas, comme cela vient d'être développé supra. D'ailleurs, la Convention Collective du 20 mars 2012 stipule bien que le groupe fermé est constitué par les salariés commissionnés, preuve qu'ils n'ont jamais renoncé à l'être.
Par ailleurs, le salarié considère que la SAM F. ne démontrerait pas avoir versé la cagnotte conformément aux énonciations de la sentence « Notari ». Toutefois, il procède à un renversement de la charge de la preuve. C'est en effet à lui d'apporter des éléments permettant d'établir qu'il n'aurait pas perçu sa quote-part des 30% (25% en parts ordinaires et 5% en parts égales) au regard de l'ensemble des salariés attributaires des parts bénéficiaires, soit les salariés des groupes fermés. Or, le rapport d'expertise qu'il produit est fondé sur un faux postulat et n'a pas pris la peine de vérifier si les sommes qui lui ont été allouées régulièrement entre 2012 et 2016 au titre des parts bénéficiaires correspondaient bien à sa quote-part.
Par ailleurs, au sujet du prétendu montant erroné de la cagnotte fourni par la SAM F, les éléments apportés par le salarié ne sont pas probants, alors que ceux produits par la SAM F. ne sont pas critiqués de manière pertinente.
En effet, la SAM F. a toujours produit des projets de répartition des parts bénéficiaires présentés de la manière suivante :
Montant des pourboires des roulettes et 30/40,
Répartition 1ère masse (déduction faite des parts supplémentaires des cadres des jeux) en parts ordinaires et parts supplémentaires,
Réparation 2ème masse,.
qui ont été validés par l'ensemble des représentants des syndicats pour les exercices communiqués à compter de 2006/2007 et jusqu'en 2011/2012, dernier exercice avant la cristallisation du conflit.
Lors de la réparation des parts bénéficiaires pour l'exercice 2012/2013, le projet présenté par la SAM F. n'a pas été validé par les syndicats des jeux annexes et des caisses.
Ces chiffres ont pourtant servis de base au paiement des parts bénéficiaires du demandeur et il convient d'apprécier s'ils étaient conformes à la réalité.
Au sujet du nombre de salariés bénéficiant des parts bénéficiaires, il a déjà été développé ci-dessus que l'ensemble des salariés des groupes fermés devaient les percevoir, qu'ils aient signé ou non la Convention Collective du 20 mars 2012. C'est dès lors à juste titre que la SAM F. a considéré que l'ensemble des salariés étaient demeurés attributaires des parts bénéficiaires et que le calcul pour les salariés commissionnés de leur quote-part devait se faire au prorata de l'ensemble des salariés.
Au sujet du montant de la cagnotte, ni lors des discussions contemporaines à la survenue du litige, ni au cours de la procédure judiciaire, le demandeur n'a jamais apporté le moindre élément pertinent. Précédemment, le débat se concentrait uniquement sur le nombre de salariés pouvant prétendre à la qualité d'attributaire des parts bénéficiaires, sans remise en cause du montant de la cagnotte à partager. Dorénavant, ce montant est contesté par le demandeur, sans élément tangible. En effet le document édité sur Word avec un intitulé « service de la cagnotte 31 mars 2022 » ne présente aucune garantie d'authenticité et a été édité dans des circonstances et par des personnes inconnues. Par ailleurs, le mail de Monsieur j. F., Directeur des ressources humaines, du 12 novembre 2020 n'est absolument pas en contradiction avec les chiffres pris en compte par la SAM F., puisqu'il est évoqué le montant total des pourboires collectés aux jeux de table et alors que ce sont uniquement les pourboires des jeux de roulette et de trente et quarante qui sont répartis au titre des parts bénéficiaires.
Surtout, le salarié ne peut reprocher à son employeur de ne pas avoir communiqué les éléments comptables alors que son syndicat a refusé de participer aux réunions de répartition des parts bénéficiaires, causant ainsi son propre préjudice de défaut d'information.
Il ne remet dès lors pas sérieusement en cause ni le calcul de sa quote-part, ni le montant de la cagnotte.
Dans ces conditions, à défaut de preuve de ce que le salaire qui lui a été versé ne correspondrait pas à la commune intention des parties, il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes de rappel de salaire de Monsieur f. A. ni à la demande subséquente d'expertise.
Sur la période postérieure au 1er avril 2016
La SAM F. et les syndicats des appareils automatiques (cadres et employés du Sun Casino, cadres et maitrises du Café de Paris, jeux annexes) se sont entendus pour signer une nouvelle Convention Collective le 1er avril 2016, prévoyant un nouveau système de rémunération et mettant un terme à la perception des parts bénéficiaires.
Les caissiers n'ont quant à eux adhéré à aucune nouvelle Convention Collective.
Pour autant, la lecture de leurs bulletins de salaire à compter du mois d'avril 2016 démontre que les parts bénéficiaires ne leur ont plus été versées. Ils ont en revanche bénéficié d'une augmentation exponentielle de leur salaire de base. Par exemple, celui de Monsieur f. C. est passé de 2.853 euros bruts en mars 2016 à 4.233 euros bruts en avril 2016 et celui de Monsieur g. D. de 2.331 à 3.443 euros bruts.
En pratique, comme l'explique la SAM F., elle a abandonné la Convention Collective de 1946 au profit de celle de 2012 concernant le mode de rémunération.
Aux termes de l'article 14 de la loi n° 416 du 7 juin 1945 sur les Conventions Collectives de travail « Une convention collective de travail à durée indéterminée peut prendre fin par la volonté de l'une quelconque des parties qui notifie sa renonciation aux autres parties et à la direction des services sociaux ».
En l'espèce, les parties s'accordent à dire que la SAM F. a renoncé unilatéralement à l'application de la Convention Collective de 1946 à compter du 1er avril 2016. Cela ressort d'ailleurs du paiement des congés payés sur parts bénéficiaires à cette date-là, afin de solder les comptes au regard des modalités de calcul de la rémunération sous l'égide de la Convention de 1946.
La F. pouvait, au regard des dispositions légales sus-visées, librement mettre fin à la Convention Collective de 1946 et ce sans porter atteinte à l'autorité de la chose jugée de la Sentence « Notari », celle-ci n'ayant de cause que tant que l'accord du 28 mai 1945 adossé à la Convention Collective du 13 novembre 1946 était en vigueur.
En revanche, en présence d'une dénonciation unilatérale et sans accord de substitution, la SAM F. se devait de garantir aux salariés le maintien de leurs avantages acquis.
Toutefois, comme cela a déjà été développé ci-dessus, le partage de la cagnotte ne devait pas avoir lieu entre les seuls non signataires des nouvelles Conventions Collectives proposées par l'employeur, mais entre tous les salariés des groupes fermés demeurés attributaires des parts bénéficiaires, certains d'entre eux ayant simplement consenti à des modalités de versement différentes.
De même, l'avantage acquis par les salariés consistait dans la perception d'une quote-part de la cagnotte mais aucunement dans sa modalité de versement. Ainsi, le fait de procéder au versement de manière fixe, en remplacement d'un versement variable, n'est pas en soi constitutif d'une faute. Il ne porte pas atteinte au principe des droits acquis. En effet, un système de rémunération, qui a une nature collective, n'est jamais un acquis d'un salarié, contrairement au niveau de rémunération du salarié, celui-ci devant lui demeurer acquis.
Monsieur f. A. ne communique pas ses bulletins de salaire, hormis ceux des mois de mars et mai 2014 et mars 2015. La vérification de l'atteinte à ses droits acquis est dès lors impossible et pour cette seule raison sa demande peut être rejetée. En outre, l'analyse des bulletins de salaire de ses collègues permet de constater qu'aucune atteinte n'a été portée à leur rémunération. Au contraire, après la modification unilatérale du mode de calcul de la rémunération, elle a été considérablement accrue au bénéfice des salariés. Ainsi, Monsieur f.C est passé d'un salaire annuel net de 53.109,38 euros en décembre 2015 à un salaire annuel net de 72.788,57 euros en décembre 2017, et ce alors que la cagnotte récoltée avait considérablement diminué. Il en est de même pour l'ensemble de ses collègues ayant communiqué leurs bulletins de salaires. Il ne ressort dès lors de cette analyse aucune atteinte au droit acquis du salarié, celui du maintien de la rémunération.
En revanche, en ne respectant pas les modalités de dénonciation des Conventions Collectives l'employeur n'a pas exécuté le contrat de travail de bonne foi. Il a ainsi alimenté un contentieux déjà nourri et a complexifié une situation donnant déjà lieu à interprétations contradictoires. L'employeur a non seulement bafoué ses obligations légales, mais a nié le droit syndical, en ne permettant pas qu'une phase de négociation et de discussion puisse s'ouvrir suite à la dénonciation, ce qui aurait été le cas si elle avait été faite dans les formes.
La sanction d'un tel comportement ne peut toutefois pas être l'allocation d'un salaire non dû et ne pourrait se résoudre qu'en dommages et intérêts qui ne sont pas sollicités en l'espèce.
Sur les autres demandes
Chacune des parties succombant partiellement, elles conserveront la charge de leurs propres dépens.
En équité et compte tenu du fait que la SAM F. a alimenté le contentieux en ne respectant pas ses obligations dans le cadre de la dénonciation de Conventions Collectives, elle est condamnée à prendre en charge les frais exposés par Monsieur f. A. à hauteur de 2.500 euros.
La nécessité que l'exécution provisoire soit prononcée n'étant pas caractérisée, il n'y a pas lieu de l'ordonner.
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL DU TRAVAIL, statuant par mise à disposition au Secrétariat du Tribunal du Travail, contradictoirement, en premier ressort et après en avoir délibéré,
Déboute la SAM F. de son exception d'irrecevabilité ;
Déboute Monsieur f. A. de ses demandes de paiement de sommes et d'expertise ;
Ordonne la compensation des dépens, y compris ceux réservés par jugement avant-dire-droit au fond en date du 24 mars 2016 ;
Condamne la SAM F. à verser à Monsieur f. A. la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles ;
Rejette le surplus des demandes respectives des parties ;
Composition🔗
Ainsi jugé par Madame Cyrielle COLLE, Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, Madame Diane GROULX et Madame Anne-Marie MONACO, membres employeurs, Monsieur Cédrick LANARI et Madame Alexandra OUKDIM, membres salariés, assistés de Madame Isabel DELLERBA, Secrétaire en Chef, et - en l'absence d'opposition des parties - mis à disposition au Secrétariat du Tribunal du Travail, le trois juillet deux mille vingt-quatre.