Tribunal du travail, 10 décembre 2020, Monsieur e. D. c/ La SAM A

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Abstract🔗

Résumé🔗

Pour rechercher le pourcentage des emplois spéciaux par rapport aux emplois permanents, il faut se placer à la date de la signature du contrat de travail litigieux, soit le 27 décembre 2001.

Ainsi, l'article 34 2° de la Convention Collective du 13 novembre 1946, dans sa version applicable au 27 décembre 2001 (suite à l'accord du 23 janvier 2001), prévoit au titre des emplois spéciaux :

« Engagements sur des emplois spéciaux : En dehors des règles générales de recrutement prévues à la présence convention collective générale, qui ne s'applique pas aux directeurs, le conseil d'administration ou son délégué pourra toujours pourvoir aussi à certains emplois par des engagements effectués à des conditions particulières, plaçant leurs titulaires hors du champs d'application de la présente convention collective générale, sans qu'ils puissent se prévaloir des avantages concédés au personnel en ressortissant (droit éventuel aux parts bénéficiaires, indemnités de départ, modalités spécifiques de détermination des calculs d'heures supplémentaires, discipline, etc ...), ce, que ces avantages soient inscrits dans la convention elle-même ou appliqués à la suite d'accords ou en raison des usages, en faveur de ses bénéficiaires.

En tout état de cause, le nombre de ces emplois spéciaux (sans compter les directeurs) ne pourra dépasser 15 % du nombre total des personnels engagés sur des postes permanents. ».

À contrario, les personnels qui bénéficient, même en partie des dispositions de la Convention Collective Générale, ne relèvent pas des emplois spéciaux.

Ainsi, à la date du 27 décembre 2001, il existait plusieurs avenants desquels ils résultent que :

  • avenant à la Convention Collective Générale pour le Personnel du Service des Jeux du 25 novembre 1946, qui prévoit en préambule :

« Sous le bénéfice des dérogations exceptionnelles apportées par la présente convention, la convention collective générale du personnel de la SAM A est applicable aux employés des jeux... ».

  • avenant à la Convention Collective Générale pour le Personnel de la salle de jeux exploitée par la Société A dans les locaux de l'hôtel B, en date du 23 janvier 1976, qui prévoit en préambule :

« L'ensemble du personnel de la salle de jeux A/B relève de la convention collective générale du 13 novembre 1946.

Le protocole d'accord, adopté le 29 novembre 1974, par les parties soussignées, a défini, dans le cadre de cette convention précitée, les principes directeurs du statut de ce personnel et prévu, en son article 2 du chapitre I, l'établissement de l'avenant qui va suivre.

(..).

Champ d'application.

Le présent avenant au personnel de la salle de jeux A/B, réparti en : service des jeux, services annexes, service des appareils automatiques et en tout autre service qui serait créé ultérieurement.

Ce personnel comprend d'une part des employés dont le contrat de travail est à durée indéterminée, d'autre part, des employés dont le contrat de travail est à durée déterminée (stagiaires, auxiliaires et temporaires).

(...).  ».

·     avenant n° 2 à l'avenant en date du 18 décembre 1978 à la Convention Collective Générale pour le Personnel du Service de Jeux Américains A/Casino, du 12 juillet 1982, qui prévoit en préambule :

« Le présente avenant n° 2 entend répondre aux préoccupations du personnel de jeux américains A/Casino en les faisant bénéficier, dans les trois catégories de jeux de table exploitées par la SAM A, d'un développement de carrière comparable et coordonné.

(...).

3° - Intervention du syndicat A/LOEWS au présent avenant n° 2.

(...).

Il est rappelé enfin que les présentes conventions n'apportent aucune novation aux différents accords collectifs régissant cette catégorie de personnel de la salle de jeux américains A/LOEWS, et qu'il apparaît inutile de rappeler en l'espèce. ».

Les personnels qui bénéficient, même en partie des dispositions de la Convention Collective Générale, ne relèvent pas des emplois spéciaux. Il en résulte que les employés de l'hôtel B, devenu le C, relèvent de la Convention Collective Générale et ne peuvent ainsi être intégrés dans les « emplois spéciaux ».

Par ailleurs, il n'y a pas lieu de retenir les salariés non commissionnés dans les emplois spéciaux dans la mesure où il s'agit de salariés du secteur jeux, lesquels sont soumis à la Convention Collective Générale, sauf certaines particularités (avenant à la convention collective générale pour le personnel du service des jeux en date du 25 novembre 1946).

Monsieur e. D. émet des doutes sur le nombre des emplois permanents retenus par la SAM A, alors que le chiffrage retenu par cette dernière lui est favorable puisque ne prenant que les seuls salariés permanents de la SAM A et non du groupe A..

Il résulte de l'ensemble de ces explications que le calcul opéré par la société défenderesse aboutit à un résultat inférieur au seuil de 15 % fixé par l'accord du 23 janvier 2001 ; le pourcentage d'emplois spéciaux représentant un pourcentage de 11,14 % du nombre total des personnels engagés sur des postes permanents.

Dans ces circonstances, Monsieur e.D.ne pourra qu'être débouté de toute demande indemnitaire à ce titre.


Motifs🔗

TRIBUNAL DU TRAVAIL

JUGEMENT DU 10 DÉCEMBRE 2020

  • En la cause de Monsieur e. D., demeurant X1à NICE (06000) ;

Demandeur, ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Véronique POINEAU-CHANTRAIT, avocat au Barreau de Nice ;

d'une part ;

Contre :

  • La société anonyme monégasque dénommée SOCIÉTÉ A, dont le siège social se situe X2 à MONACO ;

Défenderesse, ayant primitivement élu domicile en l'étude de Maître Sophie LAVAGNA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, puis en celle de Maître Patricia REY, avocat-défenseur près la même Cour et plaidant par Maître Amandine VETU, avocat au Barreau de Paris ;

d'autre part ;

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu les procédures enregistrées sous les numéros 25-2016/2017 et 80-2018/2019 ;

Vu le jugement mixte du Tribunal du Travail en date du 4 juin 2020 ;

Après avoir entendu Maître Véronique POINEAU-CHANTRAIT, avocat au barreau de Nice pour Monsieur e. D. et Maître Amandine VETU, avocat au barreau de Paris pour la S. A. M. A, en leurs observations ;

Vu les pièces du dossier ;

* * * *

Par jugement mixte en date du 4 juin 2020, auquel il convient de se référer pour un examen plus ample des faits de la cause et de la procédure, le Tribunal a :

  • - ordonné la jonction des instances portant les numéros 25 de l'année judiciaire 2016-2017 et 80 de l'année judiciaire 2018-2019,

  • - dit que Monsieur e. D. a été embauché en contrat à durée déterminée du 3 janvier 2001 au 31 décembre 2001 et a été soumis pendant cette période au statut de droit commun de la SAM A tel que figurant dans la Convention Collective du 13 novembre 1946 (modifié par l'accord d'entreprise du 23 janvier 2001),

  • - débouté Monsieur e. D. de sa demande en nullité de l'article 4 du contrat de travail en date du 27 décembre 2001,

  • - débouté Monsieur e. D. de sa demande tendant à lui voir reconnaître le statut « groupe fermé A » visé à l'annexe II de la Convention Collective du 1er décembre 2014,

    • * avant-dire-droit,

  • - sur les conséquences de l'engagement de Monsieur e. D. sous le régime des emplois spéciaux,

  • - ordonné la réouverture des débats et enjoint à la S. A. M. A de produire tous justificatifs démontrant le nombre des emplois spéciaux existants au sein de la SAM A le 27 décembre 2001, avec un chiffrage en pourcentage par rapport au nombre total des postes engagés sur des postes permanents.

La SAM A a procédé à la communication de certains documents, avec une note explicative, laquelle a donné lieu à une réponse de la part du conseil de Monsieur e. D. et à une réplique de la société défenderesse.

Le Tribunal relève qu'il n'avait en aucun cas sollicité une note en délibéré de la part des parties, mais seulement des pièces faisant apparaître le pourcentage des emplois au sein des effectifs de la SAM A.

Cette dernière s'est ainsi crue autorisée à annexer une note explicative aux documents produits, ce qui a entraîné une réponse du demandeur, avec des pièces complémentaires, puis une nouvelle note de la part de la SAM A qui a également annexé des pièces complémentaires.

Ce faisant, si les explications apportées par la SAM A peuvent être retenues concernant le mode de calcul des emplois spéciaux, le respect du principe du contradictoire et des droits de la défense justifient la réplique de Monsieur e. D.; et ce, à l'exception des pièces annexées par ce dernier à sa note en délibéré (le Tribunal n'ayant aucunement autorisé le demandeur à produire des pièces complémentaires), ainsi que celle rédigée par la SAM A pour y répondre, lesquelles devront être rejetées des débats.

Il résulte ainsi des explications des parties que ces dernières sont en désaccord sur le nombre de salariés en poste permanent et sur le décompte des emplois spéciaux.

SUR CE,

La SAM A soutient :

« En conclusion, il résulte des documents fournis que sur un total de 1.382 salariés permanents au 31 décembre 2001, 154 salariés relevaient des emplois spéciaux (89 ISC et 65 contractuels).

Cela représente un pourcentage totale de 11,14% ((154 x 100) / 1382).

La limite de 15 % fixée par l'accord du 23 janvier 2001 a donc bel et bien été respectée. ».

Pour rechercher le pourcentage des emplois spéciaux par rapport aux emplois permanents, il faut se placer à la date de la signature du contrat de travail litigieux, soit le 27 décembre 2001.

Ainsi, l'article 34 2° de la Convention Collective du 13 novembre 1946, dans sa version applicable au 27 décembre 2001 (suite à l'accord du 23 janvier 2001), prévoit au titre des emplois spéciaux :

« Engagements sur des emplois spéciaux : En dehors des règles générales de recrutement prévues à la présence convention collective générale, qui ne s'applique pas aux directeurs, le conseil d'administration ou son délégué pourra toujours pourvoir aussi à certains emplois par des engagements effectués à des conditions particulières, plaçant leurs titulaires hors du champs d'application de la présente convention collective générale, sans qu'ils puissent se prévaloir des avantages concédés au personnel en ressortissant (droit éventuel aux parts bénéficiaires, indemnités de départ, modalités spécifiques de détermination des calculs d'heures supplémentaires, discipline, etc ...), ce, que ces avantages soient inscrits dans la convention elle-même ou appliqués à la suite d'accords ou en raison des usages, en faveur de ses bénéficiaires.

En tout état de cause, le nombre de ces emplois spéciaux (sans compter les directeurs) ne pourra dépasser 15 % du nombre total des personnels engagés sur des postes permanents. ».

À contrario, les personnels qui bénéficient, même en partie des dispositions de la Convention Collective Générale, ne relèvent pas des emplois spéciaux.

Ainsi, à la date du 27 décembre 2001, il existait plusieurs avenants desquels ils résultent que :

  • avenant à la Convention Collective Générale pour le Personnel du Service des Jeux du 25 novembre 1946, qui prévoit en préambule :

« Sous le bénéfice des dérogations exceptionnelles apportées par la présente convention, la convention collective générale du personnel de la SAM A est applicable aux employés des jeux... ».

  • avenant à la Convention Collective Générale pour le Personnel de la salle de jeux exploitée par la Société A dans les locaux de l'hôtel B, en date du 23 janvier 1976, qui prévoit en préambule :

« L'ensemble du personnel de la salle de jeux A/B relève de la convention collective générale du 13 novembre 1946.

Le protocole d'accord, adopté le 29 novembre 1974, par les parties soussignées, a défini, dans le cadre de cette convention précitée, les principes directeurs du statut de ce personnel et prévu, en son article 2 du chapitre I, l'établissement de l'avenant qui va suivre.

(..).

Champ d'application.

Le présent avenant au personnel de la salle de jeux A/B, réparti en : service des jeux, services annexes, service des appareils automatiques et en tout autre service qui serait créé ultérieurement.

Ce personnel comprend d'une part des employés dont le contrat de travail est à durée indéterminée, d'autre part, des employés dont le contrat de travail est à durée déterminée (stagiaires, auxiliaires et temporaires).

(...). ».

  • avenant n° 2 à l'avenant en date du 18 décembre 1978 à la Convention Collective Générale pour le Personnel du Service de Jeux Américains A/Casino, du 12 juillet 1982, qui prévoit en préambule :

« Le présente avenant n° 2 entend répondre aux préoccupations du personnel de jeux américains A/Casino en les faisant bénéficier, dans les trois catégories de jeux de table exploitées par la SAM A, d'un développement de carrière comparable et coordonné.

(...).

3° - Intervention du syndicat A/B au présent avenant n° 2.

(...).

Il est rappelé enfin que les présentes conventions n'apportent aucune novation aux différents accords collectifs régissant cette catégorie de personnel de la salle de jeux américains A/B, et qu'il apparaît inutile de rappeler en l'espèce. ».

Ainsi qu'il a été indiqué supra, les personnels qui bénéficient, même en partie des dispositions de la Convention Collective Générale, ne relèvent pas des emplois spéciaux.

Il en résulte que les employés de l'hôtel B, devenu le C, relèvent de la Convention Collective Générale et ne peuvent ainsi être intégrés dans les « emplois spéciaux ».

Par ailleurs, il n'y a pas lieu de retenir les salariés non commissionnés dans les emplois spéciaux dans la mesure où il s'agit de salariés du secteur jeux, lesquels sont soumis à la Convention Collective Générale, sauf certaines particularités (avenant à la convention collective générale pour le personnel du service des jeux en date du 25 novembre 1946).

Monsieur e. D. émet des doutes sur le nombre des emplois permanents retenus par la SAM A, alors que le chiffrage retenu par cette dernière lui est favorable puisque ne prenant que les seuls salariés permanents de la SAM A et non du groupe A.

Il résulte de l'ensemble de ces explications que le calcul opéré par la société défenderesse aboutit à un résultat inférieur au seuil de 15 % fixé par l'accord du 23 janvier 2001 ; le pourcentage d'emplois spéciaux représentant un pourcentage de 11,14 % du nombre total des personnels engagés sur des postes permanents.

Dans ces circonstances, Monsieur e. D. ne pourra qu'être débouté de toute demande indemnitaire à ce titre.

Succombant dans ses prétentions, Monsieur e. D. sera condamné aux dépens du présent jugement et du jugement mixte rendu le 4 juin 2020.

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et après en avoir délibéré,

Rejette des débats les pièces communiquées par Monsieur e. D. annexées à sa note en délibéré en date du 15 septembre 2020 ;

Rejette des débats la note en délibéré de la S. A. M. A en réplique à celle de Monsieur Emmanuelle D. du 15 septembre 2020 ;

Déboute Monsieur e. D. de ses demandes indemnitaires liées à son statut hors Convention Collective Générale en tant que salarié engagé sous le régime des emplois spéciaux ;

Condamne Monsieur e. D. aux dépens du présent jugement et du jugement mixte rendu le 4 juin 2020 ;

Composition🔗

Ainsi jugé par Monsieur Michel SORIANO, Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, Messieurs Alain HACHE, Francis GRIFFIN, membres employeurs, Messieurs Bernard ASSO, Marc RENAUD, membres salariés, et lecture étant considérée comme donnée à l'audience publique, au Palais de Justice, le dix décembre deux mille vingt, par Monsieur Michel SORIANO, Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, Messieurs Alain HACHE, Francis GRIFFIN, Bernard ASSO et Marc RENAUD, assistés de Madame Christèle SETTINIERI, Secrétaire adjoint, le dispositif de la décision étant affiché dans la salle des pas perdus du Palais.

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