Tribunal du travail, 7 novembre 2019, Madame b D c/ La société A

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Abstract🔗

Procédure civile - Pièces - Qualification - Attestations (non) - Documents établis antérieurement aux faits litigieux - Contrat de travail - Sanction disciplinaire - Mise à pied - Nullité (oui) - Préjudice moral

Résumé🔗

Les pièces litigieuses ont toutes été établies et adressées à l'employeur antérieurement aux sanctions disciplinaires infligées à la salariée. Elles n'ont en aucun cas été faites à destination du Tribunal dans les conditions prévues par l'article 323 du Code de procédure civile. Elles sont donc recevables.

En notifiant un avertissement à la salariée pour certains griefs, l'employeur a épuisé son pouvoir disciplinaire pour les faits dont il avait connaissance et qu'il n'a pas estimé utile de sanctionner. La lettre de mise à pied reprend des reproches dont l'employeur avait connaissance avant l'avertissement et pour lesquels il n'a pas sanctionné la salariée, de sorte qu'ils ne sauraient être retenus. Il y a lieu dans ces circonstances d'annuler la mise à pied. Il est alloué 1.000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral. 


Motifs🔗

TRIBUNAL DU TRAVAIL

JUGEMENT DU 7 NOVEMBRE 2019

  • En la cause de Madame b D, demeurant X1à NICE (06300) ;

Demanderesse, ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Aurélie SOUSTELLE, avocat au barreau de Nice ;

d'une part ;

Contre :

  • La société anonyme monégasque dénommée C exploitant sous l'enseigne A, dont le siège social se situe X2 à MONACO ;

Défenderesse, ayant élu domicile en l'étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

d'autre part ;

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu la requête introductive d'instance en date du 7 novembre 2017, reçue le même jour ;

Vu la procédure enregistrée sous le numéro 29-2017/2018 ;

Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 5 décembre 2017 ;

Vu les conclusions de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur au nom de Madame b D en date 8 mars 2018 et 6 décembre 2018 ;

Vu les conclusions de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur au nom de la S. A. M. C exploitant sous l'enseigne A, en date des 17 mai 2018 et 7 février 2019 ;

Après avoir entendu Maître Aurélie SOUSTELLE, avocat au barreau de Nice pour Madame b D et Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco pour la S. A. M. C exploitant sous l'enseigne A, en leurs plaidoiries ;

Vu les pièces du dossier ;

* * * *

Madame b D a été embauchée par la société anonyme monégasque C (ci-après A) à compter du 3 avril 2008 en qualité d'Inspectrice d'Étage puis de Gouvernante à compter du 1er janvier 2011.

Par courrier en date du 28 septembre 2017, Madame b D a fait l'objet d'une mise à pied disciplinaire d'une durée de trois jours, les 11, 12 et 13 octobre 2017.

Par requête en date du 7 novembre 2017 reçue au greffe le même jour, Madame b D a saisi le Tribunal du travail en conciliation des demandes suivantes :

« l'annulation de la sanction de trois jours de mise à pied disciplinaire : 350 euros,

dommages et intérêts pour préjudice moral : 3.000 euros (motifs et causes de cette sanction ayant entrainé la dégradation de ma santé, mon avenir professionnel, ainsi que l'instabilité de ma vie familiale). ».

Aucune conciliation n'ayant pu aboutir, l'affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement.

Madame b D a déposé des conclusions les 8 mars 2018 et 6 décembre 2018 dans lesquelles elle fait essentiellement valoir que :

  • il appartient à l'employeur de démontrer les griefs fondant la sanction,

  • elle a été élue déléguée du personnel suppléante lors des élections du 10 novembre 2017, recueillant un nombre important de voix, en totale contradiction avec les griefs formés à son encontre,

  • peu de temps avant cette sanction, elle s'était vu infliger un avertissement tout aussi injustifié,

  • elle a contesté la mise à pied par courrier du 2 octobre 2017,

  • elle dénonce régulièrement les difficultés relatives à l'organisation du travail au sein de son service,

  • elle a demandé, en vain, à être confrontée aux sept personnes qui l'accusaient,

  • les attestations produites par l'employeur sont nulles au regard des dispositions de l'article 324 du Code de procédure civile,

  • l'employeur produit un document anonyme lui interdisant, de ce fait, toute défense,

  • les faits qui lui sont reprochés sont pourtant particulièrement graves et portent atteinte à son honneur,

  • elle produit des attestations démontrant qu'elle entretient de bons rapports avec ses collègues de travail,

  • dès le 14 septembre 2017, elle a subi une première interruption de travail pour « crise d'angoisse invalidante. ».

Madame b D soulève la nullité des pièces nos 7 à 12 produites par le A et l'irrecevabilité de sa pièce n°13.

Le A a déposé des conclusions les 17 mai 2018 et 7 février 2019 dans lesquelles il s'oppose aux prétentions émises à son encontre et soutient que :

  • la chronologie des faits démontre une dégradation du comportement de la salariée et ce, nonobstant les mises en garde répétées et notamment celle reçue le 4 novembre 2016,

  • le 31 août 2017, il a notifié à Madame b D un avertissement en raison d'une nouvelle violente dispute intervenue devant les salariés d'autres services,

  • suite à la dernière altercation, des salariés sont venus l'informer oralement que non seulement le comportement de Madame b D s'aggravait mais que, de plus, cette dernière colportait des rumeurs sur leurs vies privées et les dénigrait,

  • il a alors sollicité des écrits de ces salariés,

  • les courriers en question ne sont en aucun cas des attestations,

  • en sa qualité de Gouvernante, Madame b D est tenue à une obligation de bonne conduite, de discrétion et d'exemplarité,

  • il s'agit d'un problème récurrent chez la demanderesse puisqu'elle a déjà fait l'objet, antérieurement, d'une mise en garde et d'un avertissement en raison de deux altercations devant la clientèle et d'autres salariés,

  • il a fait preuve de patience et de clémence depuis 2006,

  • la sanction est ainsi justifiée et proportionnée à la gravité des fautes reprochées.

SUR CE,

  • Sur la nullité des pièces n os 7 à 12 produites par le A MONTE CARLO :

Aux termes de l'article 324 du Code de procédure civile, « l'attestation doit, à peine de nullité :

  • 1° être établie par une personne remplissant les conditions requises pour être entendue comme témoin ;

  • 2° être écrite, datée et signée de la main de son auteur ;

  • 3° mentionner les nom, prénoms, date et lieu de naissance, demeure et profession de son auteur, ainsi que l'existence ou l'absence de liens de parenté, d'alliance, de subordination ou d'intérêt avec les parties ;

  • 4° préciser si son auteur a quelque intérêt au procès ;

  • 5° indiquer qu'elle est établie en vue de sa production en justice et que son auteur sait qu'une fausse attestation l'exposerait aux sanctions prévues par l'article 103 du Code pénal ;

  • 6° être accompagnée de tout document officiel, en original ou en photocopie, justifiant de l'identité de son auteur et comportant sa signature. ».

L'article 323 du même Code prévoit en outre :

« Lorsque la preuve testimoniale est admissible, le tribunal peut recevoir des tiers les déclarations de nature à l'éclairer sur les faits litigieux auxquels ils ont assisté ou qu'ils ont personnellement constatés.

Les déclarations sont faites par attestation ou recueillies par voie d'enquête. ».

Les pièces litigieuses ont toutes été établies et adressées à l'employeur antérieurement aux sanctions disciplinaires infligées à Madame b D

Elles n'ont en aucun cas été faites à destination du Tribunal dans les conditions prévues par l'article 323 susvisé.

Ce faisant, les pièces nos 7 à 12 produites par le A sont parfaitement recevables.

  • Sur l'irrecevabilité de la pièce n° 13 produite par le A MONTE-CARLO

Il s'agit d'un document manuscrit anonyme et qui ne peut en conséquence être retenu par le Tribunal.

La pièce n° 13 sera dans ces circonstances rejetée des débats.

  • Sur la mise à pied :

Conformément aux dispositions des articles 1er et 54 de la loi n° 446 du 16 mai 1946, le Tribunal du travail dispose du droit de contrôler les sanctions disciplinaires prononcées par l'employeur à l'encontre d'un salarié ; que la sanction doit être justifiée et proportionnée à la faute commise, sous peine d'être annulée.

Si l'employeur tient de son pouvoir de direction dans l'entreprise le droit de sanctionner un salarié pour un comportement fautif, il appartient au Tribunal du travail, saisi d'une contestation d'une sanction disciplinaire, d'en contrôler le bien- fondé et de l'annuler si elle apparaît irrégulière en la forme, injustifiée, disproportionnée par rapport à la faute commise voire même discriminatoire.

Il lui incombe, en cas de contestation, d'établir tant la régularité formelle de la mesure prise que son caractère justifié et proportionné au regard du manquement commis.

Le comportement fautif du salarié doit se manifester par un acte positif ou une abstention de nature volontaire, fait avéré qui lui est imputable et constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail.

La lettre de notification doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables. Elle doit indiquer la consistance des faits et ne pas se contenter de viser leur qualification.

En l'absence de motivation suffisante, les sanctions sont injustifiées et annulables de plein droit.

Madame b D a fait l'objet d'une mise à pied par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 28 septembre 2017, en ces termes :

En qualité de Gouvernante d'étage vous êtes entre autre garante de la qualité des prestations fournies aux clients en chambre et vous véhiculez l'image et l'ambiance de l'hôtel par votre attitude exemplaire, votre interaction chaleureuse et conviviale avec les clients et les équipes.

Or, nous sommes au regret de constater que vous avez failli à vos obligations professionnelles.

En effet, depuis le 29 juillet 2017, date à laquelle vous avez eu une altercation avec l'une de vos collègues, certains collaborateurs du service des étages ont manifesté leur exaspération face à vos agissements, propos et comportements totalement inappropriés que vous manifestez à leur égard depuis de nombreuses années.

Un certain nombre de vos collègues ont manifesté leur souhait de nous relater dans un premier temps oralement ce qui se passait au sein du service des étages. S'en sont suivis des témoignages écrits vous mettant personnellement en cause et faisant état de :

  • 1/ Propos diffamatoires envers la direction et dénigrement des équipes : vous répandez des rumeurs de liaisons impliquant d'anciens et actuels membres de la Direction : M. B. ancien Directeur Général, Mme S. ancienne Responsable Ressources Humaines, Mme V. Gouvernante Générale, M. R. Chef de Cuisine, M. F. ancien responsable Technique, M. R. Directeur Général mais également vos collègues : Mme G. et Mme GU.

  • Des médisances concernant la vie privée de vos collègues, elle parle de notre vie privée, elle parle de la vie privée de notre responsable, elle vient vers nous et raconte, elle vient nous chercher dans les étages pendant les heures de travail pour nous raconter la vie de nos supérieurs des jugements sur les compétences professionnelles : propos à l'égard de Mme V. elle se plaint de son incompétence, de sa position statique dans son bureau, vous colportez de fausses informations notre responsable est raciste, z vole les passes, elle simulait des vols pour inculper mes collègues .

  • 2/ Posture managériale inappropriée et abus de pouvoir : « je suis très angoissée de venir au travail car ma gouvernante n. me met la pression (...) je n'ai jamais rien dit par peur des représailles, je parle aujourd'hui pour que la Direction nous aide à en finir avec cette situation, depuis 5 ans je venais avec le stress. ».

  • 3/ Utilisation des actifs de l'entreprise à des fins personnelles : elle a une clé repas dont elle se sert chaque week-end, elle squatte dans les chambres, elle se sert dans les minibars .

Vous comprendrez que face aux témoignages de plusieurs de vos collègues et devant la gravité des propos qui y Sont relatés, malgré le fait que vous ayez contesté l'ensemble de ces propos, nous ne tolèrerons pas que cette situation perdure.

Vos propos et votre comportement sont totalement contraires aux valeurs de respect et de confiance, que nous considérons comme des valeurs incontournables au sein de notre établissement, et qui représentent des notions indispensables à tout environnement professionnel. Il est inadmissible que ce sentiment de crainte et d'humiliation perdure et que le moral et l'honneur de certains de nos collaborateurs en soit affecté.

De plus, une telle attitude est de nature à détériorer les relations professionnelles et par conséquent le bon fonctionnement du service et la cohésion des salariées dont vous avez la charge, ce que nous ne pouvons admettre. En effet, ces propos injurieux et méprisants ont des impacts encore plus néfastes du fait du lien hiérarchique existant entre la majorité de ces salariés et vous.

Une telle attitude est par ailleurs d'autant plus préjudiciable pour l'établissement que nous vous avons fait confiance pour les responsabilités qu'implique votre poste en terme de management du service d'étage. Nous attendons par conséquent de votre part que vous mesuriez l'importance de la portée de votre attitude vis-à-vis des collaborateurs de votre service.

Ainsi, nous tenons à vous rappeler qu'il est essentiel que vous adoptiez un comportement exemplaire, professionnel et respectueux, tant envers votre hiérarchie qu'envers vos collègues de travail, et attendons de votre part que vous fassiez preuve à l'avenir d'un comportement plus adapté à vos responsabilités et à vos fonctions de management.

Par conséquent, nous vous demandons de ne pas vous présenter à l'Hôtel les 11, 12 et 13 octobre 2017.

(...). ».

Il n'est pas contesté que Madame b D avait fait l'objet d'un avertissement par courrier en date du 31 août 2017 suite à une altercation avec Monsieur y G. le 29 juillet 2017, devant des collègues d'autres services.

Ce faisant, l'employeur qui, bien qu'informé de l'ensemble des faits reprochés à une salariée, choisit de lui notifier un avertissement seulement pour certains d'entre eux, a épuisé son pouvoir disciplinaire et ne peut prononcer ultérieurement une sanction disciplinaire pour les autres faits connus avant la date de notification de la première sanction.

De nouveaux faits fautifs survenus après l'envoi de la lettre notifiant une sanction disciplinaire peuvent justifier une nouvelle sanction, à condition que des griefs nouveaux soient établis.

En l'espèce, les pièces nos 7 à 11 produites par le A sont constituées par des courriers adressés par divers salariés à l'employeur afin de se plaindre du comportement de Madame b D à savoir, outre l'altercation avec Monsieur y. G.:

  • propos discriminatoires,

  • médisances concernant la vie privée de collègues et de membres de la direction,

  • utilisation des actifs de l'entreprise à des fins personnelles,

  • colporte de fausses informations,

  • jugements sur les compétences professionnelles de collègues,

L'employeur ne pouvait dès lors ignorer l'existence de ces éléments de comportement lorsqu'il a averti Madame b D le 31 août 2017.

En notifiant un avertissement à la salariée pour certains griefs, l'employeur a épuisé son pouvoir disciplinaire pour les faits dont il avait connaissance et qu'il n'a pas estimé utile de sanctionner.

L'employeur reproche ainsi trois griefs à la salariée, qu'il convient de reprendre :

  • * Propos diffamatoires envers la Direction et dénigrement des équipes

Pour justifier ce grief, l'employeur produit un courrier que lui a adressé Madame z G L. salariée au A depuis le 1er janvier 2008 en tant qu'Assistante Gouvernante Générale, dans lequel il n'est fait état d'aucun propos diffamatoire envers la direction ou de dénigrement envers les équipes.

Madame z G L. revient sur l'altercation survenue le 27 juillet 2017 entre la demanderesse et un collègue de travail, y. G.

Ces développements sont sans intérêt dans la mesure où cet incident a donné lieu à un avertissement infligé à Madame b D le 31 août 2017, non contesté devant la présente juridiction.

Celle-ci poursuit son témoignage de la manière suivante :

« Ce n'est pas la première fois que n. s'emporte de cette manière. Je l'ai déjà vue sortir du bureau d'Edith en criant, en s'emportant ; quelques fois. J'ai assisté à une altercation entre n. et m L. en plein service. En se criant dessus pour résoudre un conflit personnel.

J'ai eu à faire à des propos violents. Elle m'a insulté suite à un différent d'organisation interne. Nous avons été convoquée par la R. H. Laure B et Edith. concernant les disparitions des pass rien ne prouve ma responsabilité totale...

Durant les évaluations annuelles de service, le prénom de n. revient très régulièrement. Les femmes de chambres se plaignent de son attitude en générale à leur égard. Elles ne souhaitent pas que je retranscrivent les propos sur leur évaluation par peur de ?.. Par la suite j'en réfère à Edith ; qui elle-même lors de chaque évaluation de service avec n. se fait faire le reproche sur son poste de gouvernante d'étage, se rapprocher d'Edith pour confirmer mes dires.

Concernant les faits de l'histoire de Saloua j'étais présente ce jour-là, lorsqu'elle a appelé une gouvernante pour signaler qu'elle n'était pas bien dans telle chambre. n. lui a répondu d'appeler la R. H.. Saloua a appelé sur un autre poste j'ai eu son appel et je suis montée auprès d'elle. J'en ai référé à n. P. RH, qui est venue également auprès de Saloua.

Je demande à la direction de se rapprocher de mes collègues de travail pour confirmer les faits cités.

Je décide de vous informer de ces situations parce que de telles attitudes nuisent au bon déroulement de notre service. ».

Le témoin cite des événements dont il n'a pas été personnellement témoin et qui seront écartés par le Tribunal.

Il fait ensuite état d'une altercation avec m L. et d'un « incident » avec une collègue de travail, Saloua, mais sans indiquer de date, ce qui ne permet pas au Tribunal de vérifier si ceux-ci sont intervenus après l'avertissement en date du 31 août 2017.

Enfin, les rumeurs de liaisons impliquant d'anciens et actuels membres de la Direction, les médisances concernant la vie privée de ses collègues, les jugements sur les compétences professionnelles de collègues et le colportage de fausses informations telles que figurant dans la lettre de mise à pied sont hors débats pour ne pas avoir été sanctionnés en leur temps.

En conséquence, ce premier grief n'est pas démontré et ne sera pas retenu par le Tribunal.

  • * Posture managériale inappropriée et abus de pouvoir

Pour justifier ce grief, le seul document produit par l'employeur postérieurement à l'avertissement du 31 août 2017 est constitué par le courrier de Madame z G L. en date du 13 septembre 2017, dans lequel elle ne décrit aucune posture managériale inappropriée, ni aucun abus de pouvoir telle que décrit par l'employeur, à savoir :

« je suis très angoissée de venir au travail car ma gouvernante n. me met la pression (...) je n'ai jamais rien dit par peur des représailles, je parle aujourd'hui pour que la Direction nous aide à en finir avec cette situation, depuis 5 ans je venais avec le stress. ».

Ce deuxième grief ne sera dès lors pas retenu.

  • * Utilisation des actifs de l'entreprise à des fins personnelles

Le Tribunal ne peut reprendre l'argumentation développée au titre du deuxième grief.

Force est de constater que le A a repris dans la lettre de mise à pied des reproches dont il avait connaissance avant l'avertissement du 31 août 2017 et pour lesquels il n'a pas sanctionné la salariée, de sorte qu'ils ne sauraient être retenus, l'employeur ayant épuisé son pouvoir disciplinaire sur ceux-ci.

Il y a lieu dans ces circonstances d'annuler la mise à pied infligée à Madame b D le 28 septembre 2017.

La demanderesse sollicite la somme de 350 euros de dommages et intérêts mais ne précise pas le préjudice devant être indemnisé, de sorte qu'elle sera déboutée de sa prétention.

Madame b D forme également une demande de dommages et intérêts à hauteur de 3.000 euros en réparation de son préjudice moral.

La salariée démontre avoir été affectée par la sanction disciplinaire infligée, justifiant ainsi l'allocation d'une somme de 1.000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral.

  • Sur les dépens :

Succombant dans ses prétentions, la S. A. M. C exploitant sous l'enseigne A sera condamnée aux dépens.

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et après en avoir délibéré,

Rejette des débats la pièce n° 13 produite par la société anonyme monégasque C exploitant sous l'enseigne A ;

Annule la mise à pied infligée à Madame b D le 28 septembre 2017 ;

Condamne la S. A. M. C exploitant sous l'enseigne A à payer à Madame b D la somme de 1.000 euros (mille euros) de dommages et intérêts au titre du préjudice moral ;

Déboute Madame b D du surplus de ses demandes ;

Condamne la S. A. M. C exploitant sous l'enseigne A aux dépens du présent jugement ;

Composition🔗

Ainsi jugé par Monsieur Michel SORIANO, Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, Madame Carol MILLO, Monsieur Alain HACHE, membres employeurs, Madame Anne-Marie PELAZZA, Monsieur Hubert DUPONT-SONNEVILLE, membres salariés, et prononcé en audience publique du Tribunal du Travail de la Principauté de Monaco, au Palais de Justice, le sept novembre deux mille dix-neuf, par Monsieur Michel SORIANO, Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, en présence de Messieurs Hubert DUPONT-SONNEVILLE, Alain HACHE, Madame Carol MILLO, et Madame Anne-Marie PELAZZA étant empêchée, assistés de Madame Christèle SETTINIERI, Secrétaire adjoint.

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