Tribunal du travail, 26 septembre 2019, Monsieur s. C. c/ La société A
Abstract🔗
Procédure civile - Pièces - Office du juge - Recherche d'un motif de nullité (non) - Contrat de travail - Licenciement - Faute grave (oui) - Absences injustifiées - Manquement à l'obligation de confidentialité - Sollicitation de commissions non déclarées (non) - Rupture abusive (non) - Absence de faute de l'employeur - Mise à pied conservatoire - Enquête
Résumé🔗
Il n'appartient pas au Tribunal de se substituer aux parties pour rechercher si les pièces produites par l'une d'elles encourent une éventuelle nullité.
Les pièces produites par la banque comme fondant le licenciement ne sont constituées que par des documents qu'elle a elle-même établis et qui ne sont corroborés par aucun élément extérieur, pas même une confrontation entre le client « accusateur » et son « accusé ». Le grief tenant aux sollicitations auprès d'un client de la Banque employeur de commissions non déclarées en contrepartie de l'obtention de taux préférentiels ne sera dès lors pas retenu. En revanche, le grief relatif à des absences injustifiées, excédant le nombre de congés payé est établi. De plus, les transferts, par le salarié sur sa messagerie personnelle, de documents internes à la banque, confidentiels, caractérisent un manquement à son obligation de confidentialité, ce qui constitue une faute grave.
La décision de rupture n'est pas fondée sur un motif fallacieux et ne présente donc pas en elle-même un caractère fautif. Aucune faute de l'employeur ne peut ouvrir droit à l'indemnisation d'un préjudice matériel et financier résultant du licenciement. Aucune faute ne peut être reprochée à l'employeur dans les circonstances entourant le licenciement. L'employeur a d'abord procédé à une mise à pied à titre conservatoire du salarié et a diligenté une enquête suite à des accusations particulièrement graves d'un client. L'enquête a ensuite permis de relever d'autres fautes à l'encontre du salarié, lesquelles ont justifié la rupture du contrat de travail.
Motifs🔗
TRIBUNAL DU TRAVAIL
JUGEMENT DU 26 SEPTEMBRE 2019
En la cause de Monsieur s. C., demeurant X1 à MONACO ;
Demandeur, ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Massimo LOMBARDI, avocat au barreau de Nice ;
d'une part ;
Contre :
La société anonyme monégasque dénommée A (MONACO), dont le siège social se situe X2 et X3 à MONACO ;
Défenderesse, ayant élu domicile en l'étude de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant Maître Sophie MARQUET, avocat près la même Cour ;
d'autre part ;
LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu la requête introductive d'instance en date du 15 mai 2017, reçue le même jour ;
Vu la procédure enregistrée sous le numéro 85-2016/2017 ;
Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 13 juin 2017 ;
Vu les conclusions de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur au nom de Monsieur s. C. en date des 7 décembre 2017, 17 mai 2018 et 10 janvier 2019 ;
Vu les conclusions de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur au nom de la S. A. M. A (MONACO), en date des 8 mars 2018, 8 novembre 2018 et 9 mai 2019 ;
Après avoir entendu Maître Massimo LOMBARDI, avocat au barreau de Nice pour Monsieur s. C. et Maître Sophie MARQUET, avocat près la Cour d'appel de Monaco pour la S. A. M. A (MONACO), en leurs plaidoiries ;
Vu les pièces du dossier ;
* * * *
Monsieur s. C. a été embauché par la société anonyme monégasque A (ci-après A) par contrat à durée indéterminée, à compter du 6 juin 2016, en qualité de Gestionnaire, catégorie cadre, niveau 7, classification HC, coefficient 845 de la Convention Collective Monégasque de Travail du Personnel des Banques, avec une rémunération fixe de 270.000 euros bruts par an et une rémunération variable sur la base d'objectifs contractuellement fixés.
Le 8 février 2017, Monsieur s. C. a été promu en qualité de Managing Director Senior Advisor.
Par courrier en date du 23 février 2017, Monsieur s. C. a fait l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire pour absence injustifiée du 10 au 20 février 2017 et afin de vérifier les accusations d'un client à son encontre.
Une enquête interne a été menée à la suite de laquelle le salarié a été convoqué le 1er mars 2017 devant le conseil de discipline pour le 24 mars 2017.
Par courrier en date du 9 mars 2017, l'employeur a adressé à Monsieur s. C. la copie du dossier soumis au conseil de discipline, lequel a émis un avis favorable au licenciement pour faute grave du salarié.
Par courrier en date du 27 mars 2017, la société anonyme monégasque A (MONACO) a communiqué au salarié l'avis du conseil de discipline et lui a notifié son licenciement pour faute grave.
Par requête en date du 6 avril 2017, reçue au greffe le 15 avril 2017, Monsieur s. C. a saisi le Tribunal du travail en conciliation à l'encontre de la S. A. M. B (MONACO) des demandes suivantes :
1/ sur l'exécution et la rupture du contrat de travail :
dire et juger que le contrat de travail n'a pas été exécuté de bonne foi,
reconnaître que l'ancienneté de Monsieur s. C. remonte au 12 janvier 2007,
dire et juger que le licenciement n'est pas fondé sur un motif valable et revêt un caractère abusif,
condamner l'employeur au paiement de :
* à titre principal :
rappel de salaire (mise à pied) : 24.399,20 euros,
indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaires : 2.439,92 euros,
indemnité compensatrice de préavis : 67.500 euros,
congés payés sur indemnité compensatrice de préavis : 6.750 euros,
indemnité de licenciement : 236.250 euros,
bonus 2016 : 135.000 euros,
primes d'encouragement : 175.000 euros,
dommages et intérêts : 540.000 euros,
* à titre subsidiaire :
- rappel de salaire (mise à pied) : 24.399,20 euros,
- indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaires : 2.439,92 euros,
- indemnité compensatrice de préavis : 67.500 euros,
- congés payés sur indemnité compensatrice de préavis : 6.750 euros,
- indemnité de licenciement : 236.250 euros,
- dommages et intérêts : 850.000 euros.
2/ autres demandes :
régularisation de l'ensemble des bulletins de salaire,
régularisation de la situation auprès de l'ensemble des organismes sociaux,
exécution provisoire du jugement à intervenir,
frais et dépens (mémoire),
intérêts au taux légal sur l'ensemble des sommes à compter de la requête.
Aucune conciliation n'étant intervenue, l'affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement.
Par conclusions en date du 10 janvier 2019, Monsieur s. C. reconnaît que la S. A. M. B (MONACO) n'est pas son employeur.
Il soutient ne pas s'être désisté à l'encontre de cette entité après le préliminaire de conciliation dans l'attente d'obtenir la confirmation sur la personnalité juridique de son employeur. Il entendait avoir la certitude de diriger ses demandes à l'encontre du véritable employeur.
Il indique avoir engagé l'action à l'encontre de la S. A. M. B (MONACO) en parfaite bonne foi.
Il sollicite en conséquence de voir :
ordonner la jonction entre la procédure judiciaire enregistrée sous le RG n° 2017/0418 (saisine du 18 avril 2017) avec celle enregistrée sous le RG n° 2017/0515 (saisine du 15 mai 2017),
débouter la S. A. M. B (MONACO) de toutes ses demandes,
la condamner aux dépens.
La S. A. M. B (MONACO) indique que :
par courrier en date du 9 mai 2017, elle a adressé un courrier au Tribunal du travail dans lequel elle fait état de l'absence de lien d'emploi avec le demandeur,
durant l'audience de conciliation, Monsieur s. C. a néanmoins maintenu ses demandes à son encontre, lesquelles sont irrecevables,
la jonction a vocation à être prononcée non pas pour des mêmes demandes à l'encontre de deux entités distinctes mais pour des demandes nouvelles, relatives au même contrat de travail et ce entre les mêmes parties,
en refusant de se désister à son encontre, sans aucune raison valable, il l'a contrainte à engager des frais de justice pour les besoins de sa défense.
Dans le dernier état de ses conclusions, la S. A. M. B (MONACO) sollicite du Tribunal :
ordonner sa mise hors de cause,
déclarer irrecevables les demandes présentées par Monsieur s. C.
rejeter la demande de jonction présentée par Monsieur s. C.
condamner Monsieur s. C. à la somme de 5.000 euros pour procédure abusive,
le condamner aux dépens.
Par requête en date du 15 mai 2017, reçue au greffe le même jour, Monsieur s. C. a saisi le Tribunal du travail en conciliation à l'encontre de la S. A. M. A (MONACO) des demandes suivantes :
1/ sur l'exécution et la rupture du contrat de travail :
- dire et juger que le contrat de travail n'a pas été exécuté de bonne foi,
- reconnaître que l'ancienneté de Monsieur s. C. remonte au 12 janvier 2007,
- dire et juger que le licenciement n'est pas fondé sur un motif valable et revêt un caractère abusif,
condamner l'employeur au paiement de :
* à titre principal :
- rappel de salaire (mise à pied) : 24.399,20 euros,
- indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaires : 2.439,92 euros,
- indemnité compensatrice de préavis : 67.500 euros,
- congés payés sur indemnité compensatrice de préavis : 6.750 euros,
- indemnité de licenciement : 236.250 euros,
- bonus 2016 : 135.000 euros,
- primes d'encouragement : 175.000 euros,
- dommages et intérêts : 540.000 euros,
* à titre subsidiaire :
- rappel de salaire (mise à pied) : 24.399,20 euros,
- indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaires : 2.439,92 euros,
- indemnité compensatrice de préavis : 67.500 euros,
- congés payés sur indemnité compensatrice de préavis : 6.750 euros,
- indemnité de licenciement : 236.250 euros,
- dommages et intérêts : 850.000 euros,
* autres demandes :
- régularisation de l'ensemble des bulletins de salaire,
- régularisation de la situation auprès de l'ensemble des organismes sociaux,
- exécution provisoire du jugement à intervenir,
- frais et dépens (mémoire),
- intérêts au taux légal sur l'ensemble des sommes à compter de la requête.
Aucune conciliation n'étant intervenue, l'affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement.
Monsieur s. C. a déposé des conclusions les 7 décembre 2017, 17 mai 2018 et 10 janvier 2019 dans lesquelles il fait essentiellement valoir que :
sur le caractère abusif du licenciement :
la banque a voulu se débarrasser d'un salarié qui n'était pas le bienvenu suite à l'arrivée de Monsieur a. H P. en qualité de Directeur Général de la société anonyme monégasque A,
sur la sollicitation auprès d'un client de commissions non déclarées en contrepartie de l'obtention de taux préférentiels,
les déclarations du client LC sont infondées, contradictoires, fluctuantes et discordantes par rapport aux éléments matériels du dossier,
les documents versés aux débats démontrent qu'il s'agit d'une machination, les allégations du client étant purement fantaisistes et ne sont corroborées par aucun élément,
rien ne démontre les accusations quant à des arrangements similaires avec d'autres clients,
le client LC a refusé de témoigner par écrit,
l'enquête a été menée à charge,
sur la violation des règles de cross border :
cette prétendue violation n'est pas démontrée par l'employeur,
il n'a exercé aucune activité bancaire aux U. S. A.,
le client en question est un ami, de nationalité britannique, résident à Monaco, et n'ayant aucun compte aux U. S. A. où il était en vacances,
le diner reproché était un diner amical et familial,
sur l'absence injustifiée :
il avait informé oralement son supérieur de son absence pour soigner sa fille gravement malade,
il pensait avoir renseigné sa demande de congé. Il a sûrement rencontré un problème informatique, problème déjà rencontré par le passé,
l'employeur aurait dû l'aviser dès le 7 février 2017 du défaut de respect des règles internes en matière de congés,
il avait déjà bénéficié auparavant de congés par anticipation et cela n'avait posé aucun problème,
sur le transfert d'informations confidentielles sur sa messagerie personnelle :
le samedi 30 juillet 2016, il s'est envoyé la position titre d'un prospect. Il ne s'agit pas d'un document de la banque mais d'un document appartenant au prospect, et ce pour préparer un rendez-vous qui a donné lieu à l'ouverture d'un compte et la souscription d'un prêt auprès de la banque employeur,
le 23 septembre 2016, il s'est fait adresser par son assistant des documents permettant l'ouverture d'un compte auprès de la banque par un de ses prospects,
le 16 septembre 2016, il a adressé sur sa boîte mail personnel une page de son agenda personnel et une liste de prospects où seulement des initiales ou des prénoms sont visible,
la banque ne peut se prévaloir d'aucun préjudice, au contraire,
sur l'ancienneté :
les échanges de mèls avec Madame P. Directrice d'une entreprise de recrutement, confirment la reprise d'ancienneté au 12 janvier 2007,
cette date figure d'ailleurs sur le contrat de travail,
sur le bonus garantie 2016 :
ce bonus est prévu au contrat,
il a atteint les objectifs assignés par l'employeur,
la banque a validé le versement de 150.000 euros. Il n'a reçu que la somme de 15.000 euros,
la prime d'encouragement :
elle correspond au prix d'achat de 3.707 actions de la société anonyme monégasque A,
elle est prévue au contrat,
le Tribunal du travail est compétent dans la mesure où la demande se rattache au contrat de travail.
La société anonyme monégasque A a déposé des conclusions les 8 mars 2018, 8 novembre 2018 et 9 mai 2019 dans lesquelles elle demande au Tribunal, dans le dernier état de ses écritures, de :
écarter des débats les pièces adverses nos 15, 16 et 17 entachées de nullité en application de l'article 324 du Code de procédure civile,
rejeter la demande de jonction présentée par Monsieur s. C.
débouter Monsieur s. C. de toutes ses demandes,
rejeter les nouvelles demandes de Monsieur s. C. non soumises au préliminaire de conciliation,
le condamner aux dépens.
La société anonyme monégasque A (MONACO) soutient essentiellement que :
sur l'ancienneté :
la date d'embauche est au 6 juin 2016 et figure sur tous les documents contractuels,
la date du 12 janvier 2007 figurant sur le contrat de travail ne constitue pas une reprise d'ancienneté,
cette mention figure dans les contrats de travail du secteur bancaire dans la mesure où elle est nécessaire au calcul de la majoration d'ancienneté prévue par la convention collective : il s'agit de la date d'entrée dans la profession,
sur la validité du licenciement :
la violation du cross border :
Monsieur s. C. a affirmé lors de l'enquête n'avoir jamais rencontré de clients dans des pays non autorisés même pendant ses vacances, alors qu'il a effectué des actes bancaires pour un client de la banque se trouvant aux Etats-Unis,
Monsieur s. C. a informé certains de ses clients d'une période durant laquelle il se trouvera sur le territoire américain et les a invité à expressément le contacter pendant cette période sur son téléphone portable,
la violation de l'obligation de confidentialité et de secret professionnel :
Monsieur s. C. a procédé à un transfert d'informations confidentielles concernant la banque et ses clients vers sa messagerie personnelle, ce qu'il ne conteste pas,
les raisons pour lesquelles le salarié a réalisé les transferts de documents importent peu,
les absences injustifiées :
Monsieur s. C. avait évoqué verbalement au sein de son équipe un départ en congés mais qui n'a jamais fait l'objet d'une demande formelle de sa part, de sorte qu'elle n'était pas informée de la durée de l'absence,
elle a été informée par l'assistant de Monsieur s. C. que ce dernier était en voyage aux Etats-Unis jusqu'au 17 février 2017,
le demandeur n'a pas respecté la procédure interne en matière de congés,
sur le caractère abusif du licenciement :
le fait d'avoir diligenté une enquête suite à des accusations portées par un client ne peut constituer une déloyauté dans l'exécution du contrat de travail,
l'enquête a permis à Monsieur s. C. de se défendre et d'apporter ses explications,
la procédure de révocation prévue par la Convention Collective a été respectée,
Monsieur s. C. ne démontre aucun préjudice en lien avec le licenciement,
sur le bonus 2016 :
les conditions prévues pour son versement ne sont pas remplies,
la somme de 150.000 euros visée par le salarié ne constitue pas la somme devant lui revenir à ce titre mais une référence de l'assiette de calcul pour l'année 2016,
sur la prime d'intéressement :
il est prévu une clause de compétence des tribunaux de Zurich et l'application de la loi Suisse,
en outre, Monsieur s. C. a été licencié avant la date d'acquisition du premier tiers des actions prévue pour le 1er juin 2017, puis le 6 juin 2018 et enfin le 6 juin 2019.
SUR CE,
Sur la demande de jonction :
Aux termes de l'article 59 de la loi n° 446 du 16 mai 1946 :
« Toutes les demandes dérivant du contrat de travail entre les mêmes parties doivent avoir fait l'objet d'une seule instance, à peine d'être déclarées non recevables, à moins que le demandeur ne justifie que les causes des demandes nouvelles ne sont nées à son profit ou n'ont été connues de lui que postérieurement à l'introduction de la demande primitive.
Sont toutefois recevables les nouveaux chefs de demandes tant que le tribunal du travail ne se sera pas prononcé en premier ou en dernier ressort sur les chefs de la demande primitive ; il ordonnera la jonction des instances et se prononcera sur elles par un seul et même jugement. ».
En l'espèce, Monsieur s. C. sollicite la jonction entre l'instance par lui introduite par requête en date du 6 avril 2017, reçue au greffe le 15 avril 2017, à l'encontre de la S. A. M. B (MONACO) et celle introduite par requête en date du 15 mai 2017, reçue au greffe le même jour, à l'encontre de la S. A. M. A (MONACO).
Il n'est contesté par aucune des parties que la S. A. M. B (MONACO) n'est pas et n'a jamais été l'employeur de Monsieur s. C.
Tenant les dispositions de l'article 59 visées supra, le Tribunal ne saurait ordonner une jonction entre deux procédures dont les chefs de demandes sont identiques, mais visant deux personnes morales, dont l'une n'est en aucune manière concernée par le litige.
Sur la nullité des attestations produites par Monsieur s. C. en pièces n os 15, 16 et 17
Aux termes de l'article 324 du Code de procédure civile, « l'attestation doit, à peine de nullité :
1° être établie par une personne remplissant les conditions requises pour être entendue comme témoin ;
2° être écrite, datée et signée de la main de son auteur ;
3° mentionner les nom, prénoms, date et lieu de naissance, demeure et profession de son auteur, ainsi que l'existence ou l'absence de liens de parenté, d'alliance, de subordination ou d'intérêt avec les parties ;
4° préciser si son auteur a quelque intérêt au procès ;
5° indiquer qu'elle est établie en vue de sa production en justice et que son auteur sait qu'une fausse attestation l'exposerait aux sanctions prévues par l'article 103 du Code pénal ;
6° être accompagnée de tout document officiel, en original ou en photocopie, justifiant de l'identité de son auteur et comportant sa signature. ».
La pièce n° 17 est constituée par une attestation établie par Monsieur m. D.
La société anonyme monégasque A (MONACO) en sollicite la nullité faute pour son auteur d'avoir notamment précisé l'absence de lien d'alliance ou de subordination avec Monsieur s. C.
Le témoin indique seulement qu'il n'a aucun lien de parenté avec les parties.
L'absence de mention sur un lien (ou pas) d'alliance ou de subordination doit entraîner la nullité de l'attestation.
La société anonyme monégasque A (MONACO) excipe de la nullité des attestations produites par Monsieur s. C. en pièces nos 15 et 16 en invoquant l'article 324 du Code de procédure civile mais sans préciser quelles circonstances justifieraient d'annuler ce témoignage.
Il n'appartient pas au Tribunal de se substituer aux parties pour rechercher si les pièces produites par l'une d'elles encourent une éventuelle nullité.
L'exception de nullité soulevée par la société anonyme monégasque A (MONACO) concernant les pièces nos 15 et 16 produites par Monsieur s. C. sera donc rejetée.
Sur la validité du motif de rupture :
L'argumentation développée à ce titre par Monsieur s. C. intervient sous le paragraphe intitulé « SUR LE CARACTERE ABUSIF DU LICENCIEMENT » .
En effet, et malgré cet intitulé, Monsieur s. C. articule toute son argumentation sur les griefs qui lui sont reprochés et qui ont fondé son licenciement.
Il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de la réalité et de la validité des motifs invoqués à l'appui de sa décision de rupture et notamment de la faute grave alléguée.
La faute grave résulte de tout fait ou ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail et des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible son maintien dans l'entreprise et exige son départ immédiat, ce, même pendant la durée du préavis.
Cette faute n'est pas nécessairement fonction du préjudice qui en est découlé.
En l'espèce, Monsieur s. C. a été licencié par lettre du 27 mars 2017 ainsi libellée :
« Monsieur,
Nous faisons suite à la séance du Conseil de discipline du 24 mars 2017.
Nous vous rappelons que nous avions convoqué ce Conseil de discipline afin de recueillir son avis sur la sanction de 2d degré que nous envisagions de prendre à votre égard compte tenu des faits qui vous étaient reprochés à savoir plusieurs violations des règles et procédures en vigueur au sein de la société anonyme monégasque A (MONACO) dont certaines constituent des manquements graves à vos obligations contractuelles rendant impossible la poursuite de votre contrat de travail.
Nous vous avons notifié une mise à pied conservatoire le 23 février 2017 dans le cadre d'une enquête interne rendue nécessaire en l'état de la réclamation d'un de vos clients.
Outre les faits à l'origine de votre mise à pied et votre départ non autorisé en congés pour une période excédant vos droits, les investigations menées ont mis en lumière plusieurs violations graves de nos règles internes et notamment la violation des règles Cross-border auxquelles est soumise la SAM A et de votre obligation de confidentialité via le transfert d'informations strictement confidentielles appartenant aux clients de la Banque sur votre adresse mail personnelle en infraction avec votre obligation de confidentialité.
Cas agissements justifient la rupture de votre contrat de travail pour faute grave.
À l'issue de la séance du 24 mars 2017, le Conseil de discipline a émis à l'unanimité un avis favorable à la sanction envisagée, dont vous trouverez ci-joint un exemplaire.
Par conséquent, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave privatif de rémunération de la période de mise à pied conservatoire.
(...). ».
Cette lettre prononce la rupture du contrat de travail suite à la décision du conseil de discipline d'autoriser le licenciement de Monsieur s. C. Il convient dès lors de se reporter au rapport destiné à ladite commission et détaillant les fautes reprochées au salarié, à savoir :
« (...)
II. Les fautes commises par Monsieur s. C. à l'origine du licenciement envisagé :
2.1. Sollicitation auprès d'un client de la Banque de commissions non déclarées en contrepartie de l'obtention de taux préférentiels,
(...)
2.2. Violation des règles de Cross-border et de l'interdiction d'exercer toute prestation de nature bancaire sur le territoire américain à laquelle est soumise la Banque,
(...)
2.3. Absence injustifiée, violation des procédures internes en matière de départ en congé, absence non autorisée au-delà du nombre de jours acquis,
(...)
2.4. Transfert d'informations confidentielles concernant la Banque et ses clients vers sa messagerie personnelle et sans autorisation,
(...). ».
Il convient dès lors de reprendre lesdits griefs :
« Sollicitation auprès d'un client de la Banque de commissions non déclarées en contrepartie de l'obtention de taux préférentiels ».
Pour démontrer ce grief, l'employeur produit les éléments suivants :
Une attestation établie par Monsieur a. H P. Directeur Général de la S. A. M. A (MONACO), dans laquelle il détaille les accusations portées par le client « LC » à l'encontre de Monsieur s. C.
Eu égard à la qualité et aux fonctions de Monsieur a. H P. au sein de la S. A. M. A (MONACO), son témoignage doit être examiné avec une grande prudence, et ce, d'autant plus que Monsieur a. H P. a interrogé à plusieurs reprises Monsieur s. C. dans le cadre de l'enquête interne diligentée par la banque.
Bien plus, Monsieur s. C. a toujours contesté les accusations du client, sans que l'employeur ne lui ait jamais présenté la moindre preuve matérielle de celles-ci.
Ce témoignage sera dès lors apprécié en fonction d'éléments extérieurs et objectifs apportés par l'employeur.
Une attestation établie par Madame m. R. « Chief Risk Officer » au sein de la S. A. M. A (MONACO), ainsi libellée :
« Je déclare avoir rencontré le 16 février 2017, dans les locaux de la banque, le client de la banque Monsieur LC (ci-après LC) en présence de Monsieur a H. P. Au cours de cet entretien, LC a confirmé que son gestionnaire, Monsieur s. C. employé au sein de la S. A. M. A (MONACO) S. A. M., lui a demander de lui payer des commissions dans le cadre de l'octroi d'un crédit autorisé par notre établissement considérant que s'il avait obtenu un taux de marge préférentiel c'était grâce à son action en interne. Selon ses calculs le montant pourrait s'élever à approximativement EUR 100.000 par an pendant 10 ans.
Au cours de ce même rendez-vous, j'ai demandé à LC s'il avait le détail de comment le versement devrait se faire et il m'a répondu qu'ils n'avaient pas discuté du détail mais que ce n'était certainement pas par virement bancaire. J'ai demandé à LC si des demandes de ce type avaient déjà été initiées par Monsieur s. C. il m'a répondu par l'affirmative. ».
Un procès-verbal d'entretien en date du 20 février 2017, mené par Monsieur H P. aux termes duquel Monsieur s. C. conteste toutes les accusations portées à son encontre. Il en sera de même lors de l'entretien en date du 21 février 2017, toujours mené par Monsieur Pascal H P.
Un courriel en date du 23 février 2017 de Madame m. R. adressé à « B, R A. ; H P. a.; B, R ; M, J-C », dont l'objet est le suivant : « Private and confidential Compte-rendu appel du 22.02.2017 ».
Il est fait état de retraits espèces qui auraient été réalisés par le client « LC » sans aucune justification matérielle.
Les pièces ainsi produites par la banque ne sont constituées que par des documents qu'elle a elle-même établis et qui ne sont corroborés par aucun élément extérieur, pas même une confrontation entre le client « accusateur » et son « accusé ».
Le grief tenant aux « commissions » ne sera dès lors pas retenu.
« Violation des règles de Cross-border et de l'interdiction d'exercer toute prestation de nature bancaire sur le territoire américain à laquelle est soumise la Banque ».
La S. A. M. A (MONACO) vise dans ses écritures une directive Cross border D-1046-MC-01 justifiant l'interdiction invoquée, laquelle n'est pas produite aux débats.
L'employeur ne démontre dès lors pas la faute ainsi commise par le salarié, les seuls documents versés aux débats concernant d'autres établissements bancaires.
Les règles de cross-border sont ainsi différentes suivant d'une part, les pays et, d'autres part, les établissements bancaires concernés.
Ce grief ne sera dès lors pas retenu.
« Absence injustifiée, violation des procédures internes en matière de départ en congé, absence non autorisée au-delà du nombre de jours acquis ».
Monsieur s. C. ne conteste pas l'absence reprochée mais soutient qu'il en avait informé verbalement sa hiérarchie, sans avoir pour autant respecté la procédure interne en la matière.
Le Tribunal relève que Monsieur s. C. a varié dans ses explications à ce titre.
Il a néanmoins adressé un courriel à Madame H. du service des ressources humaines, le 21 février 2017 en ces termes :
« Bonjour,
Suite au meeting que j'ai eu hier à 17.00 avec a.:
Je suis désolé, je pensais avoir fait la demande dans l'outil des congés. J'ai dû oublier. Il m'arrive également de devoir demander au R. H. de le faire pour moi, cette fois ci j'ai dû oublier de les contacter.
Par contre le CEO de la banque savait et était d'accord avec mon voyage.
J'avais la tête dans mes problèmes personnels graves.
Je viens de poser les jours en question.
Merci. ».
Ce mèl faisait suite à celui de Madame H. en date du 20 février 2017 :
« Monsieur,
Vous n'étiez pas présent à votre poste de travail du 10 au 17 février 2017.
Cette absence correspond à une demande de congés que vous aviez évoquée verbalement au sein de votre équipe mais qui n'a jamais été formellement soumise et encore moins ni validée.
En effet cette demande n'a pas été rentrée au sein de notre système FIGGO de sorte que nous n'étions informés ni de votre absence ni de la durée de celle-ci.
Nous vous rappelons que toute demande de congés ou d'absence doit faire l'objet d'une demande préalable sur notre système, soumise à la double validation écrite via FIGGO de la Direction et de votre supérieur hiérarchique conformément à la procédure prévue au sein de notre règlement intérieur.
Malgré cette absence de demande et validation préalable vous avez pourtant décidé, de manière unilatérale, de partir en congés.
De plus, la durée de votre absence excède le nombre de congés payés acquis de sorte que vous vous trouvez en absence injustifiée.
Ces agissements traduisent un important manque de professionnalisme, une violation de nos règles internes d'organisation du travail et des obligations qui nous incombent à l'égard de nos clients.
Nous constatons ce jour que vous n'avez toujours pas regagné votre poste et n'avez adressé aucun justificatif d'absence.
Nous vous demandons de nous fournir toutes explications utiles sur ces évènements et de vous présenter ce jour à 17 heures pour un entretien préalable à une possible sanction disciplinaire. ».
Le règlement intérieur prévoit à ce titre en son article 5 « CONGÉS » :
« (...) Les congés du salarié doivent être approuvés préalablement selon les modalités mentionnés dans la procédure interne D1013 MC-Gestion du personnel et traitement de la paie.
Cette demande devra faire l'objet d'une double validation dans le système de gestion des congés, généralement par le « back-up » et le supérieur hiérarchique du salarié.
Le non-respect des procédures de validation des congés pourra être sanctionné. ».
Les explications fournies par le demandeur démontrent sans ambiguïté qu'il était parfaitement au fait de ladite procédure et une information orale ne peut suppléer cette dernière.
En sa qualité de cadre hors classe, Monsieur s. C. avait toute latitude pour organiser son temps de travail, de sorte qu'il ne peut être fait un quelconque reproche à l'employeur de ne pas avoir réagi immédiatement.
De plus, l'absence reprochée excède le nombre de congés payés acquis par Monsieur s. C.
Le grief lié à l'absence injustifiée du salarié est dès lors parfaitement justifié.
« Transfert d'informations confidentielles concernant la Banque et ses clients vers sa messagerie personnelle et sans autorisation ».
Monsieur s. C. ne conteste pas les faits qui lui sont reprochés à ce titre mais les justifie de la manière suivante :
il s'agit dans un cas de documents concernant des prospects,
il s'agit ensuite de documents comportant uniquement des initiales ou des prénoms.
Le règlement intérieur prévoit en son article 8.3 :
« Il est interdit d'emporter des objets appartenant à la Banque ou de s'adresser des documents appartenant à la Banque, même en photocopie ou par tout autre procédé (internet par exemple) conformément au code de compliance. ».
Un prospect est une personne prospectée par une entreprise commerciale afin qu'elle en devienne le client. Il peut s'agir d'une personne physique ou d'une personne morale. Le prospect n'est pas le client de l'entreprise, mais il est susceptible de le devenir.
Eu égard à cette définition du prospect, les documents que Monsieur s. C. a transférés sur son compte de messagerie électronique personnelle n'appartiennent pas à la banque, mais au « prospecteur » et seul le client potentiel peut, dans cette hypothèse, arguer d'une éventuelle atteinte à la confidentialité et au secret professionnel.
Il en va différemment pour la seconde série de documents puisqu'il s'agit de :
relevés de comptes de clients de la S. A. M. A (MONACO),
plusieurs pages d'instructions de transferts de compte d'un autre établissement bancaire vers la S. A. M. A (MONACO).
Monsieur s. C. a incontestablement violé les dispositions visées supra du règlement intérieur, mais également celles contenues dans son contrat de travail en son article 12 « confidentialité- secret professionnel ».
Les transferts, par Monsieur s. C. sur sa messagerie personnelle, de documents internes à la banque, confidentiels, caractérisent le manquement du salarié à son obligation de confidentialité, ce qui constitue une faute grave.
Le licenciement de Monsieur s. C. est dans ces circonstances fondé sur une cause valable.
Le demandeur sera débouté de ses demandes financières subséquentes.
Sur le caractère abusif du licenciement :
Tout licenciement fondé sur un motif valable peut néanmoins présenter un caractère abusif si le salarié, auquel incombe la charge de cette preuve, démontre que l'employeur a méconnu certaines dispositions légales lors de la mise en œuvre de la rupture ou si les conditions matérielles ou morales de sa notification présentent un caractère fautif ou révèlent une intention de nuire ou la légèreté blâmable de l'employeur.
Un licenciement peut être considéré comme abusif (qu'il ait été reconnu valable ou non) si l'employeur a avancé pour le justifier un faux motif, c'est-à-dire un motif qui n'était pas le motif réel qui l'a conduit à prendre cette décision et qui voulait « tromper », ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
Il appartient à celui qui réclame des dommages et intérêts, de prouver outre le préjudice subi, l'existence d'une faute commise par l'employeur dans l'exercice de son droit de mettre fin au contrat de travail, laquelle peut consister dans l'allégation d'un motif de rupture fallacieux ou dans la précipitation, la brutalité ou la légèreté blâmable avec lesquelles le congédiement a été donné.
En application de l'article 13 de la loi n° 729 du 16 mars 1963, toute rupture abusive du contrat de travail peut donner lieu à des dommages et intérêts.
L'analyse qui précède a permis de constater que le grief énoncé dans la lettre de licenciement s'est avéré fondé.
Pour autant, le motif fallacieux se caractérise par la fausseté du grief invoqué combinée à la volonté de tromperie et de nuisance de celui qui l'invoque.
Force est de constater que Monsieur s. C. qui a la charge de la preuve à ce titre, ne démontre pas que le licenciement serait intervenu pour une autre cause que celle visée dans la lettre de licenciement.
Dans ces circonstances, la décision de rupture n'est pas fondée sur un motif fallacieux et ne présente donc pas en elle-même un caractère fautif ; ainsi, aucune faute de l'employeur ne peut ouvrir droit à l'indemnisation d'un préjudice matériel et financier résultant du licenciement.
Monsieur s. C. soutient :
qu'il a dû faire face à des interrogatoires de la direction, alors qu'il était en train de passer une période difficile compte-tenu de la maladie de sa fille,
que l'enquête a été menée à charge afin de trouver des motifs de licenciement ; la direction n'a jamais pris en considération ses explications et elle n'a pas examiné les pièces du dossier.
Aucune faute ne peut être reprochée à l'employeur dans les circonstances entourant le licenciement.
En effet, la S. A. M. A (MONACO) a d'abord procédé à une mise à pied à titre conservatoire du salarié et a diligenté une enquête suite à des accusations particulièrement graves d'un client.
La S. A. M. A (MONACO), tenant la gravité des faits, ne pouvait qu'agir de la sorte.
L'enquête a ensuite permis de relever d'autres fautes à l'encontre du salarié, lesquelles ont justifié la rupture du contrat de travail.
La procédure de licenciement telle que prévue par la Convention Collective a enfin été respectée par l'employeur.
Monsieur s. C. sera dans ces circonstances débouté de sa demande de dommages et intérêts.
Sur le bonus 2016 :
L'article 7 du contrat de travail prévoit :
« Prime variable individuelle
Les termes et conditions relatifs à l'attribution d'une prime variable individuelle sont définis dans le document intitulé « Définition de la validation du paramètre relatif à la rémunération variable basée sur la performance » du 19 avril 2016, ainsi que toute annexe faisant référence à celui-ci. À cet égard, l'employé reconnaît avoir reçu l'ensemble des informations nécessaires concernant le calcul ainsi que les conditions de paiement de la prime variable individuelle ou de toute autre prime. ».
Il est également prévu dans les conditions générales, deuxième paragraphe, du document intitulé « Définition de la validation du paramètre relatif à la rémunération variable basée sur la performance » (pièce n° 4 produite par Monsieur s. C. en langue anglaise avec sa traduction en français) :
« Toute rémunération variable (y compris la rémunération variable basée sur la performance) ou autre rémunération spéciale reçue de l'employeur en ses des éléments de rémunération fixes est de nature discrétionnaire et dépend du développement commercial (y compris la performance financière du Groupe et/ou de l'employeur) ainsi que de l'évaluation de la performance du participant et ne confère aucun droit relatif à des paiements ultérieurs ou équivalents, même si des paiements de cette nature ont été effectués plusieurs années de suite. ».
Il résulte des termes clairs de ce document que le principe du versement d'une prime n'était pas acquis chaque année, son montant étant en outre variable et dépendant des divers facteurs précités.
En effet, la rémunération variable accordée à Monsieur s. C. est purement discrétionnaire et qu'en cas de versement, son mode de calcul est lié à la performance de la salariée et aux résultats de la S. A. M. A (MONACO).
Il s'en déduit que Monsieur s. C. n'avait pas de droit acquis au versement d'une rémunération variable.
Monsieur s. C. sera dans ces circonstances débouté de sa demande de ce chef.
Sur la prime d'encouragement/d'intéressement :
Cette prime est prévue par la pièce n° 6 produite par Monsieur s. C.(en langue anglaise avec sa traduction en français).
Ce document signé par les parties comporte une clause de compétence juridictionnelle en ces termes :
« Tout litige découlant du présent régime général d'intéressement à long terme de la S. A. M. A ou s'y rattachant sera soumis à la compétence des tribunaux du canton de Zurich (Suisse). Zurich sera le lieu d'exécution de l'ensemble des obligations ainsi que le lieu de poursuite pour dettes ( Schuldbetreibung ). ».
Cette clause ne fait pas échec à une compétence territoriale impérative au sens de la loi du for monégasque, et ne concerne pas l'état des personnes, de sorte que la validité d'une telle clause n'est pas discutable.
Il convient dans ces circonstances de faire droit à l'exception d'incompétence soulevée par la S. A. M. A (MONACO) dans ses écritures récapitulatives du 19 mai 2019, page 27, non reprises dans le dispositif et de se déclarer incompétent pour connaître de la demande présentée par Monsieur s. C. au titre de la prime d'encouragement/intéressement.
Sur l'ancienneté :
Le licenciement pour faute grave de Monsieur s. C. ayant été déclaré valable, il n'est d'aucun intérêt de statuer sur une reprise éventuelle d'ancienneté qui ne pourrait avoir aucun effet juridique.
Succombant dans ses prétentions, Monsieur s. C. sera condamné aux dépens du présent jugement.
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL DU TRAVAIL, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et après en avoir délibéré,
Rejette la demande jonction présentée par Monsieur s. C.;
Prononce la nullité de l'attestation produite par Monsieur s. C. en pièce n° 17 ;
Se déclare incompétent pour connaître de la demande présentée par Monsieur s. C. au titre de la prime d'encouragement/intéressement ;
Dit que le licenciement de Monsieur s. C. par la société anonyme monégasque A (MONACO) repose sur un motif valable et ne revêt pas un caractère abusif ;
Déboute Monsieur s. C. de toutes ses demandes ;
Condamne Monsieur s. C. aux dépens du présent jugement ;
Composition🔗
Ainsi jugé par Monsieur Michel SORIANO, Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, Monsieur Jean-Pierre DESCHAMPS, Madame Diane GROULX, membres employeurs, Messieurs Pierre-Franck CRESPI, Lionel RAUT, membres salariés, et prononcé en audience publique du Tribunal du Travail de la Principauté de Monaco, au Palais de Justice, le vingt-six septembre deux mille dix-neuf, par Monsieur Michel SORIANO, Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, en présence de Messieurs Jean-Pierre DESCHAMPS, Pierre-Franck CRESPI, Lionel RAUT et Madame Diane GROULX, assistés de Madame Christèle SETTINIERI, Secrétaire adjoint.