Tribunal du travail, 11 juillet 2019, Madame v. B. c/ La SAM A

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Abstract🔗

Contrat de travail – Licenciement pour insuffisance professionnelle – Motif valable (non) – Caractère abusif (oui)

Résumé🔗

Il n'est pas contesté que l'appréciation des aptitudes professionnelles et de l'adaptation à l'emploi relève du pouvoir patronal et le Juge ne peut prétendre y substituer son appréciation ; néanmoins, il convient pour celui-ci de vérifier que ses exigences étaient justifiées. Pour constituer une cause de licenciement, l'insuffisance professionnelle doit être caractérisée par des faits objectifs et matériellement vérifiables. Il revient au Juge de vérifier l'incompétence alléguée par l'employeur, laquelle ne peut être fondée sur une appréciation purement subjective de celui-ci mais doit reposer sur des éléments concrets pour constituer un motif valable de licenciement. Il incombe en conséquence à l'employeur d'apporter au Juge des éléments objectifs à l'appui des faits qu'il invoque comme propres, selon lui, à caractériser l'insuffisance professionnelle dont il se prévaut. Elle ne résulte pas nécessairement d'un comportement volontaire mais révèle l'inaptitude du salarié à assumer ses fonctions, son incompétence. L'insuffisance professionnelle se trouve caractérisée par l'inaptitude du salarié à exercer sa prestation de travail dans des conditions que l'employeur pouvait légitimement attendre en application du contrat et devait reposer sur des éléments matériels précis et objectifs imputables au salarié ; elle se manifeste dans les répercussions en tant qu'elle perturbe la bonne marche de l'entreprise. Dans ses écritures, l'employeur indique que les résultats de la salariée ne sont pas en cause, seule son incapacité managériale ayant motivé la rupture. Le Tribunal relève que l'entretien a eu lieu le 29 janvier 2016 et que la lettre de convocation à l'entretien préalable au licenciement est en date du 7 juin 2016, sans que l'employeur ne démontre une détérioration de la situation managériale cause de la rupture. Bien plus, la SAM A ne démontre aucunement que Madame v. B. serait responsable des départs de collègues dans son service. L'évaluation globale de la performance est supérieure aux attentes. Il ressort encore de l'évaluation que les objectifs quantitatifs ont été atteints, voire dépassés, malgré « l'hémorragie due au recentrage du dispositif commercial » . Là encore, le manager fait état d'un « gros turn over » en 2013 sans pour autant démontrer que Madame v. B. en serait la cause. La défenderesse n'établit pas en quoi Madame v. B. a concrètement manqué au professionnalisme attendu d'elle qui aurait perturbé la bonne marche de l'entreprise ou aurait été préjudiciable aux intérêts de celle-ci. Cette insuffisance professionnelle ne peut, faute d'élément concret, être considérée comme établie. Il résulte que le licenciement de Madame v. B. n'apparaît pas fondé sur des motifs valables.

Constitue un licenciement abusif l'existence d'une faute commise par l'employeur dans l'exercice de son droit de mettre fin au contrat de travail, laquelle peut consister notamment dans l'allégation d'un motif de rupture fallacieux ; qu'il appartient au salarié qui se prévaut du caractère abusif de la rupture d'en rapporter la preuve. Il appartient à celui qui réclame des dommages et intérêts, de prouver outre le préjudice subi, l'existence d'une faute commise par l'employeur dans l'exercice de son droit de mettre fin au contrat de travail, laquelle peut consister dans l'allégation d'un motif de rupture fallacieux ou dans la précipitation, la brutalité ou la légèreté blâmable avec lesquelles le congédiement a été donné. En application de l'article 13 de la loi n° 729 du 16 mars 1963, toute rupture abusive du contrat de travail peut donner lieu à des dommages et intérêts. Le licenciement qui ne repose pas sur un motif valable n'ouvre droit à la réparation du préjudice matériel en résultant que lorsque l'employeur a commis un abus dans la prise de décision, soit par exemple en invoquant des motifs fallacieux ou encore en prononçant la rupture malgré l'absence de tout fondement légal. L'analyse qui précède a permis de constater que le grief énoncé dans la lettre de licenciement s'est avéré infondé. Pour autant, le motif fallacieux se caractérise par la fausseté du grief invoqué combinée à la volonté de tromperie et de nuisance de celui qui l'invoque. Au cas particulier, Madame v. B. sollicite d'être indemnisée à hauteur de la somme de 355.000 euros en réparation de ses préjudices moral et financier. S'agissant d'un motif non valable, il n'est pas, pour autant, automatiquement fallacieux. Un licenciement peut être considéré comme abusif (qu'il ait été reconnu valable ou non) si l'employeur a avancé pour le justifier un faux motif, c'est-à-dire un motif qui n'était pas le motif réel qui l'a conduit à prendre cette décision et qui voulait « tromper ». Par ailleurs, le faux motif ne peut caractériser de facto l'abus de l'employeur ; à défaut, cela reviendrait à utiliser la notion française de « cause réelle et sérieuse ». En effet, en droit français, un licenciement sans cause réelle et sérieuse (fondé sur un faux motif) est abusif et entraîne automatiquement l'allocation de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi. En droit monégasque, un licenciement fondé ou non sur des motifs valables peut ne pas être considéré comme abusif. Madame v. B. considère que le véritable motif de son licenciement réside dans la réorganisation du service. Force est de constater que la demanderesse ne produit aucun élément permettant d'accréditer ses allégations à ce titre. Madame v. B.ne démontre dès lors pas avoir été licenciée pour un autre motif que celui contenu dans la lettre de rupture.  La demanderesse soutient encore que la procédure conventionnelle de licenciement n'a pas été respectée par l'employeur. Elle considère que les griefs qui lui sont reprochés doivent retenir une qualification disciplinaire. L'employeur a en effet reproché à la salariée de ne pas avoir un management suffisamment efficace, malgré les objectifs qui lui auraient été assignés sur ce point précis. Ce faisant, il ne s'agit pas d'une insuffisance professionnelle mais d'une volonté avérée du salarié de ne pas exécuter les recommandations de l'employeur, ce qui présente incontestablement un caractère disciplinaire. Il résulte de la lecture des articles 25 à 32 de la Convention Collective Monégasque du Travail des Personnels des Banques que cet accord collectif distingue l'insuffisance de travail de l'inaptitude professionnelle, la première résultant de la mauvaise volonté de l'agent concerné à remplir ses fonctions, alors que la seconde est la conséquence d'une incapacité physique, intellectuelle ou professionnelle du salarié à occuper l'emploi qui lui est confié, à la condition toutefois que cette inaptitude ne revête pas un caractère purement temporaire. Ainsi, alors que l'insuffisance de travail, les manquements à la discipline ainsi que de manière générale toutes les fautes professionnelles commises par un agent sont passibles des sanctions du premier ou du deuxième degré prévues par l'article 25, l'insuffisance résultant d'une incapacité physique, intellectuelle ou professionnelle constitue, indépendamment de l'application des dispositions relatives aux sanctions disciplinaires, un motif de rupture du contrat de travail. En conséquence, lorsque un établissement bancaire entend prononcer à l'encontre d'un salarié, auquel elle reproche une insuffisance de travail, un manquement à la discipline ou même simplement des fautes à caractère professionnel, une sanction du deuxième degré, telle que la révocation, celle-ci doit obligatoirement requérir préalablement l'avis d'un conseil de discipline dans les conditions prévues à l'article 27 de l'Accord Collectif susvisé. En l'espèce, dès lors que la rupture du contrat de travail de Madame v. B. s'avère en réalité la conséquence des fautes à caractère professionnel ne revêtant aucunement une insuffisance professionnelle mais un non-respect des consignes de l'employeur et dès lors une insuffisance de travail, la SAM A avait l'obligation, en application des dispositions des articles 25 alinéas 3 et 4 et 27 de la Convention Collective Monégasque de Travail des Banques de recueillir l'avis du conseil de discipline avant de notifier à la salariée la sanction du deuxième degré que constitue son licenciement. Cet avis n'ayant en l'espèce pas été obtenu, ni même au demeurant sollicité par la banque, la rupture du contrat de travail de Madame v. B. revêt, en la forme, un caractère irrégulier. En ne sollicitant pas l'avis du conseil de discipline, la SAM A a privé Madame v. B. des garanties prévues par l'article 27 de la Convention Collective des Banques, le non-respect de ces dispositions protectrices se traduisant concrètement pour l'intéressée par la perte de la chance qui lui était ainsi offerte d'obtenir de la part de cette instance un avis défavorable, susceptible de faire obstacle à son licenciement. Bien plus, le Tribunal relève que la société défenderesse ne justifie pas avoir recherché la cause de l'insuffisance constatée, ni même avoir tenté de trouver des solutions alternatives pour conserver, le cas échéant, une employée disposant d'une importante ancienneté (près de huit années). De plus, l'employeur n'a aucunement envisagé, avant de prendre des mesures irréversibles, de notifier une sanction du 1er degré afin de marquer une position plus ferme sur les problèmes rencontrés (au demeurant non démontrés) et de permettre à Madame v. B.de prendre la réelle mesure de la nécessité de changer d'attitude.

Si la dispense de préavis peut se justifier eu égard au poste à responsabilité de Madame v. B. la mise à pied déguisée infligée à la salariée dès la remise de la lettre de convocation à l'entretien préalable constitue une légèreté blâmable de l'employeur rendant le licenciement abusif.

Quant au préjudice invoqué, il est de principe que toute demande de dommages et intérêts formée du chef d'un abus dans les conditions de mise en œuvre de la rupture, et non d'un abus dans la prise de décision, ne peut être admise qu'en ce qui concerne le préjudice moral qui résulte du contexte ayant présidé à sa mise en œuvre, et ce, à l'exclusion du préjudice matériel qui serait résulté d'un licenciement abusif dans son principe. Les difficultés financières dont il est fait état sont en effet le résultat de la diminution de revenu, provoquée par la perte d'emploi et non la conséquence de la brutalité et de l'abus qui, à les supposer établis, auraient caractérisé le licenciement. De plus, le demandeur n'établit nullement en quoi ces difficultés matérielles auraient été provoquées par les circonstances fautives ayant entouré le licenciement, lesquelles n'ont d'ailleurs pas été retenues par le tribunal. Elles ne peuvent être de nature à établir l'existence d'une faute dans la mise en œuvre de la rupture (Cour de révision, 26 mars 2014, Pourvoi n° 2013-17). La demanderesse a perdu une chance d'obtenir l'avis de la Commission de Discipline et de la Commission Paritaire et de conserver un autre emploi au sein de l'entreprise, alors qu'elle a incontestablement subi un préjudice moral important lié aux conditions dans lesquelles la rupture est intervenue et aux efforts limités de l'employeur pour comprendre et régler éventuellement les difficultés en cause. Ainsi compte-tenu des éléments d'appréciation dont dispose le Tribunal et notamment l'âge de Madame v. B. lors de la notification de son licenciement (52 ans) et de son ancienneté de service (7 ans et 7 mois), de l'absence de toute sanction ou de toute remarque sur la qualité de son travail, le préjudice moral subi par celle-ci, consécutivement à la rupture de son contrat de travail sera équitablement réparé par l'allocation à son profit d'une somme de 120.000 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêt au taux légal à compter de la présente décision.

Quels que soient les paramètres de détermination de la rémunération variable et à moins que le salarié n'ait accepté le principe d'une prime discrétionnaire, l'employeur est tenu à une obligation de transparence qui le contraint à communiquer au salarié les éléments servant de base au calcul de son salaire, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.


Motifs🔗

TRIBUNAL DU TRAVAIL

JUGEMENT DU 11 JUILLET 2019

  • En la cause de Madame v. B., demeurant X1 à VILLEFRANCHE-SUR-MER (06230) ;

Demanderesse, ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Delphine FRAHI, avocat au barreau de Nice ;

d'une part ;

Contre :

  • La société anonyme monégasque dénommée A, (anciennement dénommée B) dont le siège social se situe X2 à MONACO ;

Défenderesse, ayant primitivement élu domicile en l'étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, puis en celle de Maître Sarah FILIPPI, avocat-défenseur près la même Cour, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

d'autre part ;

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu la requête introductive d'instance en date du 21 septembre 2016, reçue le 27 septembre 2016 ;

Vu la procédure enregistrée sous le numéro 30-2016/2017 ;

Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 22 novembre 2016 ;

Vu les conclusions de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur au nom de Madame v. B. en date des 2 mars 2017, 5 octobre 2017, 17 mai 2018 et 6 décembre 2018 ;

Vu les conclusions de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de la SAM A, en date du 4 mai 2017, puis celles de Maître Sarah FILIPPI, avocat-défenseur, en date des 8 mars 2018, 4 octobre 2018 et 7 février 2019 ;

Après avoir entendu Maître Delphine FRAHI, avocat au barreau de Nice pour Madame v. B. et Maître Sarah FILIPPI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco pour la SAM A, en leurs plaidoiries ;

Vu les pièces du dossier ;

* * * *

Madame v. B. a été embauchée par la société anonyme monégasque A à compter du 1er décembre 2008 en qualité de Responsable de la Direction des Gestions.

Le groupe D a subi une réorganisation et au sein de chaque entité, a été créé le poste de responsable produit entité (RPE), poste occupé par Madame v. B. à la SAM A.

Par courrier remis en main propre le 7 juin 2016, Madame v. B. est convoquée à un entretien préalable en vue de son licenciement prévu le 13 juin 2016. Elle est en même temps dispensée d'activité immédiatement, l'employeur lui demandant de rendre son badge d'accès.

Par courrier en date du 17 juin 2016, Madame v. B. est licenciée pour insuffisance professionnelle.

Par requête en date du 21 septembre 2016 reçue au greffe le 27 septembre 2016, Madame v. B. a saisi le Tribunal du travail en conciliation des demandes suivantes :

  • dire et juger que le licenciement n'est pas fondé sur un motif valable et revêt un caractère abusif,

  • à titre principal :

    • rappels de salaire : 100.833 euros,

    • indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire : 10.083 euros,

    • solde indemnité de licenciement : 80.797 euros,

    • dommages et intérêts : 355.000 euros,

  • à titre subsidiaire :

    • dommages et intérêts : 547.000 euros,

  • autres demandes :

    • régularisation de l'ensemble des bulletins de salaire,

    • régularisation de la situation auprès des organismes sociaux,

    • exécution provisoire du jugement à intervenir,

    • frais et dépens (mémoire),

    • intérêts au taux légal sur l'ensemble des sommes à compter de la requête.

À l'audience de conciliation, la requérante a ajouté la demande suivante :

  • la communication des entretiens d'évaluations complets (avec les commentaires de tous les intervenants pour les années 2012, 2013, 2014 et 2015).

Aucune conciliation n'ayant pu intervenir, le dossier a fait l'objet d'un renvoi devant le bureau de conciliation.

Madame v. B. a déposé des conclusions les 2 mars 2017, 5 octobre 2017, 17 mai 2018 et 6 décembre 2018 dans lesquelles elle demande au Tribunal de :

« - par décision avant-dire-droit :

  • * ordonner à la SAM A et sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir, de communiquer aux débats et à la requérante les rapports d'inspection dans leur intégralité et le registre d'entrée et de sortie du personnel,

  • * condamner la SAM A aux entiers dépens distraits au profit de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, sous sa due affirmation,

- par décision au fond :

  • * dire et juger que le licenciement est irrégulier,

  • * dire et juger que l'employeur a exécuté de mauvaise foi le contrat de travail,

  • * dire et juger que le licenciement de Madame v. B. repose sur un motif non valable,

  • * dire et juger que le licenciement de Madame v. B. revêt un caractère abusif,

- en conséquence :

  • * condamner la SAM A à payer à Madame v. B. la somme de 100.833 euros à titre de rappels de salaires et 10.083 euros à titre de congés payés sur rappels de salaires,

  • * condamner la SAM A à payer à Madame v. B. la somme de 80.797 euros à titre de solde d'indemnité de licenciement,

  • * condamner la SAM A à payer à Madame v. B. la somme de 355.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- à titre subsidiaire :

  • * condamner la SAM A à payer à Madame v. B. la somme de 547.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- en tout état de cause :

  • * ordonner la remise de l'ensemble des bulletins de salaire régularisés, ainsi que régularisation (et justification de la régularisation) de la situation auprès de l'ensemble des organismes sociaux,

  • * prononcer l'exécution provisoire du jugement à intervenir,

  • * dire et juger que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter de la citation devant le bureau de conciliation,

  • * condamner la SAM A aux entiers dépens distraits au profit de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, sous sa due affirmation. ».

Madame v. B. fait essentiellement valoir que :

sur la communication des documents d'évaluation complets :

  • l'employeur fonde le licenciement sur son insuffisance professionnelle. Or, ses évaluations professionnelles annuelles démontrent ses performances et la satisfaction de l'employeur,

  • la SAM A a communiqué les évaluations avec ses premières écritures,

  • elle ne pouvait en aucune manière les récupérer avant de quitter les locaux de l'entreprise dans la mesure où elle a été priée de quitter les lieux lors de la remise de la lettre de convocation à l'entretien préalable et raccompagnée à la sortie,

  • les inspections par le groupe F ont fait ressortir l'excellente performance de l'équipe qu'elle dirigeait,

  • les deux rapports d'inspection constituent des documents essentiels lui permettant de justifier ses dires,

  • la SAM A n'a pas communiqué le rapport de l'année 2009 et n'a communiqué que partiellement celui de l'année 2013,

  • le secret professionnel et le secret des affaires avancés par la SAM A est sans objet, ces rapports n'ayant aucun lien avec les clients et les rapports étant en partie versés aux débats,

  • la SAM A fait état d'un turn over important dans l'équipe qu'elle dirigeait, mais ne le démontre pas,

  • elle est dès lors bien fondée à solliciter avant-dire-droit la communication du registre d'entrées et de sorties du personnel afin d'apprécier ce grief,

sur le motif du licenciement :

  • elle dispose de trente années d'expérience reconnue dans le domaine bancaire et de la gestion, et ce, au service de trois employeurs seulement,

  • à son embauche, les performances du service étaient mauvaises, la collecte inexistante, les sorties de mandats nombreuses,

  • lorsque le poste lui a été présenté par le Cabinet de Recrutement, l'équipe comptait dix personnes,

  • lors de sa prise de fonction, quatre personnes avaient démissionné,

  • son rôle était de redresser le service et l'image de la gestion à la SAM A,

  • en sept années et demie, elle est parvenue à redynamiser les gestions de la SAM A qui devient la première banque à Monaco pour la gestion,

  • les avoirs sous gestion ont atteint les 2 milliards d'euros,

  • les retours des clients auprès des commerciaux ont été très positifs,

  • elle a toujours fait preuve d'une grande rigueur et conscience professionnelle,

  • les bilans sociaux remis chaque année par l'employeur font état d'un taux d'activité de 100 % chaque année,

  • ses évaluations mettent en avant des résultats supérieurs aux attentes,

  • la direction n'hésitait pas à mettre en avant son professionnalisme, ses performances remarquables voire exceptionnelles ainsi que son talent managérial,

  • les montants importants des bonus qui lui ont été versés témoignent de la satisfaction de la SAM A,

  • les inspections par le groupe font ressortir l'excellent fonctionnement de l'équipe qu'elle a dirigée,

  • lors des différents contrôles par la Commission de Contrôle des Activités Financières, il a été reconnu que son service faisait une stricte application des procédures fédérales,

  • le dernier entretien d'évaluation du 18 décembre 2015 montre qu'elle n'avait déjà plus sa place dans la nouvelle organisation,

  • l'évaluation globale des compétences la place encore en position « confirmée », mais ses performances sont curieusement évaluées comme « inférieures aux attentes », alors que les résultats de l'année ont été exceptionnels,

  • en récompense de ces très bons résultats, elle a obtenu le doublement du bonus de ses collaborateurs, alors que le sien a été considérablement réduit,

  • elle a formulé des observations sur l'évaluation pour l'année 2015, complétées par un courriel du 21 décembre 2015,

  • cette évaluation ne correspond pas à la réalité dans la mesure où elle fut la meilleure année en termes de performance et de collecte,

  • l'employeur a dans ses conclusions invoqué des carences en management, précisant qu'il s'agirait de la cause unique de son licenciement,

  • la SAM A ne démontre pas ce grief et tente de le justifier par un turn over important dans son équipe,

  • si les départs des collaborateurs avaient été motivés par son management, la SAM A n'aurait pas manqué de réagir,

  • les appréciations sur ses qualités managériales ont été très souvent satisfaisantes et gratifiantes,

  • elle a alerté à plusieurs reprises sa hiérarchie sur ce problème de turn over,

  • elle a demandé à plusieurs reprises depuis son embauche une formation en management et formation d'équipe, en vain,

  • la SAM A a manqué à son obligation de donner au salarié les moyens et outils nécessaires pour s'adapter à ses fonctions et accomplir au mieux ses fonctions,

  • si des difficultés de management avaient existé, la SAM A aurait dû l'envoyer en formation,

  • la Convention Collective applicable impose en outre une obligation d'adaptation à la charge de l'employeur,

sur le caractère abusif du licenciement :

  • la nature des reproches formulés dans les écritures de la SAM A présente un caractère disciplinaire, de sorte que l'employeur aurait dû respecter la procédure idoine,

  • la SAM A l'a privée de la chance de voir le conseil de discipline rendre un avis négatif à la sanction prononcée,

  • le vrai motif de licenciement résidait dans la réorganisation du service,

  • la SAM A a dissimulé le véritable motif de rupture afin de tromper la salariée,

  • il est apparu que les gestionnaires en place n'allaient plus correspondre aux profils requis par la nouvelle direction fédérale,

  • depuis l'arrivée de Monsieur f. L. Responsable Fédéral, les quatre responsables de gestion locaux ont été remplacés,

  • compte-tenu de la centralisation de la gestion, son poste se trouvait surdimensionné et limité à un simple rôle d'exécutant,

  • la SAM A a fait preuve de brutalité et de légèreté dans la mise en œuvre du licenciement,

  • elle a subi un préjudice très important tant sur le plan professionnel et financier que moral,

  • son médecin lui a prescrit un premier traitement antidépresseur le 26 août 2016, puis un traitement plus lourd le 27 octobre 2016.

La SAM A a déposé des conclusions les 4 mai 2017, 8 mars 2018, 4 octobre 2018 et 7 février 2019 dans lesquelles il s'oppose aux prétentions émises à son encontre et soutient essentiellement que :

sur la communication de pièces :

  • il a communiqué toutes les évaluations de Madame v. B. depuis qu'elle est entrée à son service,

  • ces évaluations sont en permanence accessibles depuis l'ordinateur du collaborateur,

  • les rapports d'inspection n'ont pas intéressé le seul service de Madame v. B. justifiant qu'ils ne soient pas communiqués dans leur intégralité eu égard au secret professionnel et des affaires,

  • l'inspection pour l'année 2009 a été réalisée trois mois à peine après l'arrivée de Madame v. B. de sorte qu'elle n'est d'aucune utilité pour la solution du litige,

  • pour l'année 2013, il a communiqué les seules pages du rapport concernant le service de Madame v. B.

sur le motif du licenciement :

  • les résultats commerciaux de Madame v. B. ne sont pas en question,

  • la salariée s'est montrée totalement défaillante dans le management de son équipe,

  • dès l'évaluation 2009, l'insuffisance de Madame v. B. dans la gestion de son équipe était pointée du doigt,

  • en 2010, la notation des compétences managériales reste très en retrait pour une collaboratrice ayant une expérience telle que Madame v. B.

  • en 2011, l'évaluation globale est sanctionnée par « inférieure aux attentes » ; le manager déplore un turn over important,

  • en 2012, l'évaluation des compétences managériales n'évolue pas ; le manager précise que Madame v. B. ne s'intègre pas au travail de groupe,

  • en 2013, l'évaluation des compétences n'enregistre aucune progression, de même qu'en 2014,

  • en 2015, l'évaluation des compétences montre une sérieuse chute de plusieurs notes managériales,

  • Madame v. B. reconnaît une quinzaine de départs dans son service durant son mandat,

  • l'insuffisance professionnelle de la salariée a été pondérée, un temps, par ses résultats commerciaux,

  • à l'arrivée de Madame v. B. son service comprenait neuf collaborateurs et huit au 31 décembre 2008,

  • en regard de son manque de compétences managériales, Madame v. B. n'a jamais bénéficié d'une revalorisation de son salaire en huit ans d'activité,

  • il y avait de réelles difficultés dans la gestion de l'équipe et notamment un problème de communication interne au service,

  • aux termes de l'évaluation annuelle 2015, certains objectifs ont été assignés à Madame v. B. avec une échéance à fin février 2016 ; au 30 mai 2016, ces objectifs n'étaient pas réalisés,

  • un turn over important a affecté le service à compter de 2008 en correspondance avec l'arrivée de Madame v. B. Quinze collaborateurs ont quitté son service, dont onze démissions, alors que certains avaient une ancienneté de plus de douze ans,

  • un tel turn over était de nature à mettre en danger la pérennité des activités de la banque,

  • le registre du personnel ne serait d'aucune utilité, Madame v. B. ne contestant ni la nature de la rupture, ni le nombre des collaborateurs concernés,

  • Madame v. B. a sollicité à plusieurs reprises des stages en animation d'équipe, ce qui démontre son insuffisance dans ce domaine,

  • depuis son embauche, Madame v. B. a bénéficié de 385 heures de formation,

  • ce n'est qu'à compter de l'évaluation 2015 que Madame v. B. a prétendu développer ses compétences en matière de management. Elle a ainsi pu bénéficier d'une formation à ce titre au début de l'année 2016,

  • Madame v. B. a laissé le service dans un état catastrophique,

  • depuis le départ de la salariée, le turn over a cessé,

  • la réorganisation du groupe n'est en aucune manière la cause du licenciement de Madame v. B.

  • il s'agissait de mettre en commun les expertises, de faire des économies. Le rôle du patron de la gestion locale a donc évolué en ce sens qu'il n'était plus appelé à décider seul au risque d'avoir une stratégie contraire à celle d'un homologue du groupe,

  • dans la nouvelle organisation, il a été mis en place une collégialité (comité d'investissement) à laquelle Madame v. B. était étroitement associée, et elle s'est montrée incapable de travailler de cette façon,

  • Madame v. B. n'appliquait des décisions collégiales que celles qui avaient son assentiment,

  • elle a été incapable d'entendre les demandes répétées de sa hiérarchie,

  • avoir des difficultés à s'inscrire dans la nouvelle collégialité de la gestion des actifs relève de l'insuffisance professionnelle,

  • Madame v. B. se mettait en marge au point de laisser son équipe livrée à elle-même,

  • il ne s'agit aucunement d'un motif disciplinaire,

  • l'article 25 de la Convention Collective applicable ne prévoit aucune forme pour formuler une observation au salarié dans le cadre d'une insuffisance professionnelle ; elle peut dès lors être faite dans le cadre d'une évaluation annuelle,

  • aucun autre poste ne pouvait être proposé à Madame v. B. dans la mesure où ils appelaient tous à gérer une équipe,

  • il n'y avait d'autre issue que la rupture de la collaboration,

sur le caractère abusif du licenciement :

  • le faux motif invoqué par Madame v. B. est totalement inexistant,

  • la mutualisation de la gestion des produits et des fonds à l'échelle du groupe s'est mise en place en 2012 et le licenciement est intervenu quatre ans plus tard,

  • la salariée a été suspendue d'activité eu égard à ses fonctions,

  • il n'était effectivement plus possible de maintenir un responsable de service alors que ce dernier était en crise du fait de son insuffisance,

  • Madame v. B. a pu conserver son téléphone portable, son véhicule de fonction, sa carte de parking jusqu'au terme de son préavis,

  • après l'entretien, il a pris un délai de réflexion avant d'envoyer la lettre de licenciement,

  • Madame v. B. a dû clôturer ses comptes ouverts à la SAM A comme tous les collaborateurs qui quittent la banque,

  • aucune brutalité ou légèreté blâmable ne peut dès lors être retenue,

  • au cours de l'année 2015, Madame v. B. s'est vu proposer une évolution vers un poste n'impliquant pas de fonction managériale et elle a refusé cette proposition.

SUR CE,

  • Sur le motif de la rupture :

Il appartient à l'employeur d'établir la réalité et la validité des motifs invoqués à l'appui de sa décision de licenciement.

En l'espèce, Madame v. B. a été licenciée par lettre du 17 juin 2016 ainsi libellée :

« Madame,

Pour les motifs qui vous ont été exposés lors de nos divers entretiens, notamment au cours de l'entretien du 13 juin 2016, nous vous notifions par la présente notre décision de mettre fin à votre contrat de travail pour insuffisance professionnelle.

La durée conventionnelle de votre préavis est de trois mois à compter de la première présentation de la présente, date à laquelle vous cesserez de faire partie de nos effectifs. Vous restez dispensée d'activité jusqu'au terme de votre préavis sans préjudice des sommes qui vous sont dues. Cependant, nous vous demandons de rester à notre disposition dans le cas où une mission requérant votre présence effective serait nécessaire.

(...) ».

Il n'est pas contesté que l'appréciation des aptitudes professionnelles et de l'adaptation à l'emploi relève du pouvoir patronal et le Juge ne peut prétendre y substituer son appréciation ; néanmoins, il convient pour celui-ci de vérifier que ses exigences étaient justifiées.

Pour constituer une cause de licenciement, l'insuffisance professionnelle doit être caractérisée par des faits objectifs et matériellement vérifiables. Il revient au Juge de vérifier l'incompétence alléguée par l'employeur, laquelle ne peut être fondée sur une appréciation purement subjective de celui-ci mais doit reposer sur des éléments concrets pour constituer un motif valable de licenciement.

Il incombe en conséquence à l'employeur d'apporter au Juge des éléments objectifs à l'appui des faits qu'il invoque comme propres, selon lui, à caractériser l'insuffisance professionnelle dont il se prévaut.

Elle ne résulte pas nécessairement d'un comportement volontaire mais révèle l'inaptitude du salarié à assumer ses fonctions, son incompétence.

L'insuffisance professionnelle se trouve caractérisée par l'inaptitude du salarié à exercer sa prestation de travail dans des conditions que l'employeur pouvait légitimement attendre en application du contrat et devait reposer sur des éléments matériels précis et objectifs imputables au salarié ; elle se manifeste dans les répercussions en tant qu'elle perturbe la bonne marche de l'entreprise.

Dans ses écritures, l'employeur indique que les résultats de la salariée ne sont pas en cause, seule son incapacité managériale ayant motivé la rupture.

Ce seul grief ressort d'ailleurs du courrier adressé par la SAM A le 8 juillet 2016 au conseil de Madame v. B. suite à la contestation de son licenciement.

Pour justifier ce grief, le licenciement de Madame v. B. la SAM A produit les éléments suivants :

les entretiens d'évaluation de la salariée depuis son embauche desquels il résulte :

pour l'année 2009 :

« Objectifs qualitatifs.

(...).

Commentaires du manager :

  • v. a su réorganiser l'équipe et le process de gestion de façon optimale et par son professionnalisme a contribué à rassurer et remotiver une équipe un peu perdue et désarçonnée par les réflexions du métier sur la mutualisation des gestions. Cependant, il conviendrait de pratiquer un management de proximité, en empathie l'année prochaine en profitant d'un rythme de croisière plus établie.

Commentaires du collaborateur :

  • Un management challenging avec une équipe démotivée qui a connu 3 départs et 3 arrivées en un an (sur 9 personnes). J'ai impulsé une participation active de l'équipe dans le process de gestion. J'espère fédérer plus l'équipe autour des challenges à venir même certains gérants sont présents depuis longtemps au même poste et ont émis des désirs d'évolution au sein de la SAM A.

Évaluation : conforme aux attentes :

(...).

Évaluation globale de la performance : supérieure aux attentes :

(...).

Objectifs de l'année à venir :

(...).

Description de l'objectif :

Qualité du management globale :

  • Animation et motivation de l'équipe en s'appuyant notamment sur t. Ma.

(...).

Évaluation des compétences :

(...).

  • Mobiliser les hommes.

  • Entrainer et motiver les collaborateurs : en développement.

  • Développer les personnes et les équipes : confirmée.

  • Coopérer/fonctionner en transversal : maitrisée.

Intelligence relationnelle.

Communiquer/influencer : confirmée.

Écouter et comprendre les autres : maitrisée.

Évaluation globale : confirmée.

(...).

Commentaires :

  • Globalement v. a un niveau de compétences professionnelles qui se situe entre l'expertise et confirmé.

  • Elle devra améliorer ses capacités en animation et motivation d'équipe.

(...).

Commentaires du manager :

  • En l'espace d'un an, v. aura réussi à redresser la situation d'une équipe de gestion en perdition :

  • retour à d'excellentes performances bien au-dessus de la concurrence,

  • collecte de nouveau positive sur les mandats.

  • Retour de la confiance auprès des commerciaux...

  • Reste à transformer l'essai en 2010 en confirmant ces performances et en entrainant derrière elle une équipe encore trop sur la défensive.

Commentaires du collaborateur :

  • (...) redonner confiance aux forces commerciales en la gestion en communiquant abondamment auprès d'eux et en les accompagnant auprès des clients (...).

  • L'équipe de gestion a besoin d'être accompagnée dans ses évolutions importantes et du sang neuf aidera sûrement à sa dynamisation. ».

pour l'année 2010 :

« Évaluation de la performance :

Objectifs qualitatifs.

Commentaires du manager :

  • v. doit continuer sur sa lancée et amener les autres gérants à plus vendre leurs fonds ou mandats. Les gérants de l'équipe se sont plus mobilisés pour vendre la gestion même s'ils doivent développer encore leur proactivité.

Commentaires du collaborateur :

(...)

  • Nous sommes organisés afin que chaque pôle soit suivi plus précisément par un gérant. Nous contribuons largement à l'élaboration et la diffusion de la stratégie économique auprès des commerciaux.

Évaluation : conforme aux attentes.

Qualité du management global :

  • Animation et motivation de l'équipe en s'appuyant notamment sur t. M.

(...).

Commentaires du manager :

  • Une année agitée sur le plan des ressources humaines : 2 départs, 1 congé maternité et 3 arrivées !! Malgré ces perturbations, l'équipe a su gardé son cap et une bonne polyvalence s'est mise en place afin de pallier aux départs.

Commentaires du collaborateur :

  • L'équipe a su garder son attachement à produire des performances et assurer un bon service aux commerciaux malgré des départs et arrivées multiples. Je me suis attachée à garder intact la motivation de l'équipe et sa volonté de bien faire malgré des surcharges de travail.

Évaluation : supérieurs aux attentes.

Évaluation globale de la performance : exceptionnelle.

Commentaires :

  • Une magnifique année pour v. et son équipe à la fois en terme de performances et aussi de collecte

Objectifs de l'année à venir.

(...).

Objectifs qualitatifs.

(...).

Description de l'objectif :

Qualité du management global : animation et motivation de l'équipe.

Évaluation des compétences

(...).

Évaluation des compétences.

(...).

  • Mobiliser les hommes.

  • Développer les personnes et les équipes : confirmée.

  • Entrainer et motiver les collaborateurs : maitrisée.

  • Coopérer/fonctionner en transversal : maitrisée.

Intelligence relationnelle :

Écouter et comprendre les autres : maitrisée.

Communiquer/influencer : confirmée.

Évaluation globale : confirmée.

(...).

Commentaires du manager :

  • v. B. a su redonner un souffle dynamique à la gestion de la SAM A. À la fois en terme de performances qui sont les meilleurs de la place qu'en terme de collecte (encours en hausse de 25 %).

  • Au niveau fédéral, elle a aussi su gagner une excellente crédibilité auprès des autres entités ce qui contribue à renforcer la position de la SAM A... ».

pour l'année 2011 :

«Évaluation de la performance.

(...).

Objectifs qualitatifs

(...).

Description de l'objectif :

  • Qualité du management global : animation et motivation de l'équipe.

Commentaires du manager :

  • 50 % de turn over, impliquant beaucoup de formation et d'organisation.

Évaluation : conforme aux attentes.

Commentaires du collaborateur :

  • L'équipe gestion était composée de personnes présentes dans l'équipe depuis très longtemps. J'ai donc été confrontée à beaucoup de départs. Il est motivant d'accueillir et d'intégrer de nouveaux collaborateurs mais un peu de stabilité serait nécessaire.

Évaluation globale de la performance : inférieure aux attentes.

Commentaires :

  • 2011 fut une année difficile. J'ai tenté au cours de ces 3 années à la SAM A de reconstruire un département gestion en apportant des méthodes de travail, une élaboration de la stratégie de marchés, une proximité avec les équipes de commerciaux. La comparaison des performances avec les autres places gestion de la SA E est proche en 2011 et satisfaisante sur 3 ans. Il en va de même pour la concurrence externe. Cette évaluation « inférieure aux attentes » me semble trop sévère face aux résultats et à l'engagement total qui a été le mien depuis mon arrivée à la SAM A.

Objectifs de l'année à venir.

(...).

Objectifs qualitatifs

(...).

Description de l'objectif :

  • Qualité du management global : animation et motivation de l'équipe. La société F : sensibilisation de l'équipe au respect de la charte.

Évaluation des compétences.

(...).

Mobiliser les hommes :

  • Développer les personnes et les équipes : confirmée.

  • Entrainer et motiver les collaborateurs : confirmée.

  • Coopérer/fonctionner en transversal : confirmée.

Intelligence relationnelle :

  • Écouter et comprendre les autres : maitrisée.

  • Communiquer/influencer : confirmée.

Évaluation globale : confirmée.

(...).

Commentaires du manager :

  • 2011 aura été l'année de tous les risques : changement de système, Sicavisation, crise de la dette avec des attentes importantes côté clientèle.

  • Le turn over de l'équipe (50% de l'effectif) n'aura pas aidé pour affronter tous ces challenges.

  • Globalement les principaux obstacles auront été évités, seul l'écueil de l'allocation obligataire du mandat rendement aura généré une sous-performance notable sur un profil qui est malheureusement assez favorisé par les commerciaux de la banque.

  • (...).

  • Mais le professionnalisme et le sérieux de v. devraient permettre d'y remédier et de redonner de l'élan à la gestion de la SAM A pour une année 2012 prometteuse.

Commentaires du collaborateur :

  • 2011 fut une année difficile. J'ai tenté au cours de ces 3 années à la SAM A de reconstruire un département gestion en apportant des méthodes de travail, une élaboration de la stratégie de marchés, une proximité avec les équipes de commerciaux. La comparaison des performances avec les autres places gestion de la SA E est proche en 2011 et satisfaisante sur 3 ans. Il en va de même pour la concurrence externe. Cette évaluation « inférieure aux attentes » me semble trop sévère face aux résultats et à l'engagement total qui a été le mien depuis mon arrivée à la SAM A.

  • Autres points :

  • (...).

  • 40 % de notre temps est consacré à la communication avec les commerciaux : les 4 gérants seniors participent à plus de 280 rendez-vous client avec les commerciaux. Le middle office gestion réalise chaque mois les reportings mandats et fonds pour les commerciaux. La stratégie gestion est présentée chaque mois aux commerciaux. ».

Pour l'année 2012 :

« Évaluation des compétences :

(...).

Mobiliser les hommes :

  • Entrainer et motiver les collaborateurs : confirmée.

  • Développer les personnes et les équipes : confirmée.

  • Coopérer/fonctionner en transversal : confirmée.

Intelligence relationnelle :

  • Communiquer/influencer : confirmée.

  • Écouter et comprendre les autres : maitrisée.

  • (...).

  • Relations managériales : maitrisée.

  • Évaluation globale : confirmée.

Performance :

(...).

Objectifs qualitatifs :

(...).

Objectif :

  • Qualité du management global : animation et motivation de l'équipe. La société F : sensibilisation de l'équipe au respect de la charte.

  • Évaluation : inférieure aux attentes.

Indicateur de réussite.

  • L'équipe de gestion est perçue par les commerciaux comme sympathique, motivée, toujours disponible et professionnelle.

  • Les performances réalisées en 2012 et sur 4 ans sont très bonnes, gages de l'implication de chaque gérant à faire réussir l'équipe de gestion.

  • Sans un management correct, une telle implication de l'ensemble de l'équipe n'est pas possible ni tenable sur la durée (depuis 4 ans).

  • Mon style de management est d'être présente auprès de chacun, de m'impliquer dans les problèmes qu'ils peuvent rencontrer, de les soutenir dans les années difficiles, d'échanger nos idées d'investissement librement, de laisser à chaque gérant de réelles responsabilités et une vrais lisibilité.

Commentaires du manager :

  • Côté de la société F pas de souci.

  • Par contre, un manque de communication descendante et transverse a pesé sur l'ambiance d'équipe ainsi que sur la motivation d'un certain nombre de gérants.

  • Il faudra profiter de la mobilisation autour du projet gestion fédéral pour relancer une nouvelle dynamique.

  • Évaluation globale de la performance : exceptionnelle.

Commentaires :

  • Un très bon millésime pour la gestion de la SAM A. v. a su porter à son terme la Sicavisation des mandats tout en participant pleinement au projet métier. Enfin les performances sont au rendez-vous : les meilleures des 4 entités.

Objectifs de l'année à venir :

(...).

Objectifs qualitatifs :

(...).

Objectif :

  • Management des équipes pour contribuer à la réussite du projet gestion et maintenir la motivation : communiquer régulièrement avec eux et les mettre en contact avec l'advisory.

(...).

Commentaires du manager :

Manager hiérarchique :

  • Excellentes performances de toute la gamme en 2012 pour la dernière année en pleine autonomie de gestion pour v.

  • Malgré un très bon appui commercial de la part de son équipe (rendez-vous, disponibilité, ... ), la collecte aura un peu déçu mais semble se redresser en début 2013.

  • 2013 sera une année charnière avec le démarrage de la Co-Gestion avec les autres entités de la société R. Cela sera source de plus d'échanges, de transversalité mais il ne faudra pas perdre de vue l'objectif à long terme de continuer à augmenter le taux de pénétration de la Gestion à la SAM A. v. dispose de tout les atouts pour atteindre cet objectif.

Manager fonctionnel :

  • v. est une gérante expérimentée et avec un sens très aigu du marché.

  • Cette Qualité essentielle devra continuer à être mise au service du projet.

  • Sa connaissance forte des fonds externes en fait par ailleurs un sponsor qui doit créer la différence sur cette brique de contribution aux performances.

  • Elle doit porter avec conviction les idées du comité d'investissement dont elle partie centrale et importante à l'instar des autres RPE et aider à faire la promotion de notre travail commun.

  • (...) ».

Pour l'année 2013 :

« Évaluation des compétences :

(...).

  • Mobiliser les hommes.

  • Coopérer/fonctionner en transversal : maitrisée.

  • Entrainer et motiver les collaborateurs : maitrisée.

  • Développer les personnes et les équipes : confirmée.

  • Intelligence relationnelle.

  • Communiquer/influencer : confirmée

  • Écouter et comprendre les autres : maitrisée

  • (...).

  • Relations managériales : maitrisée.

  • Évaluation globale : confirmée.

Performance :

(...).

Objectifs qualitatifs :

(...).

Objectif :

  • Management des équipes pour contribuer à la réussite du projet gestion et maintenir la motivation : communiquer régulièrement avec eux et les mettre en contact avec l'advisory.

  • Évaluation : inférieure aux attentes.

Indicateur de réussite :

Commentaires du manager :

  • Dans un contexte de changement fort avec la mise en place du projet gestions, il faut plus que jamais « porter » ce projet et remobiliser les forces vives de l'équipe avec un turnover croissant.

  • Évaluation globale de la performance : supérieure aux attentes.

Objectifs de l'année à venir :

(...).

Objectifs qualitatifs :

(...).

Objectif :

  • Rayonnement personnel : attitude globale, management, influence.

Commentaires du manager :

  • Un objectif important afin d'assurer la cohésion de l'équipe et de pouvoir incarner au mieux la fonction de RPE gestion au sein de la SAM A.

  • (...).

  • Souhaites de formation.

  • Développement personnel : coaching : indispensable.

Commentaires du manager :

  • v. aura connu une année pour le moins « challenging » sur le plan RH et organisationnel : avec 3 démissions des gérants les plus séniors de l'équipe et des changements aussi dans son reporting matriciel produits.

  • Elle aura tenu bon la barque de la gestion de la SAM A avec des performances de qualité et une légère progression des encours malgré l'hémorragie due au recentrage du dispositif commercial.

  • Il faudra tenir compte des enseignements de ce gros turnover en 2013 pour mieux accompagner l'arrivée des nouveaux gérants cette année et préserver une harmonie et une convivialité avec le reste de l'équipe. La collaboration de l'ensemble de la ligne gestion et son responsable sera à ce titre cruciale afin de préparer au mieux l'intégration dans la nouvelle société de gestion.

Commentaires du manager fonctionnel :

(...).

  • Sur le plan relationnel, le déploiement du projet sur la gestion tout au long de l'année nous a permis d'accentuer notre proximité à grande satisfaction. La coopération entre RPE est et sera un facteur clé de succès pour la gestion discrétionnaire.

  • Sur le plan local, selon les informations qui m'ont été remontées directement par les membres de son équipe, v. doit accentuer sa proximité avec elle. »

(... ).

Pour l'année 2014 :

« Évaluation des compétences :

(...).

  • Mobiliser les hommes.

  • Coopérer/fonctionner en transversal : maitrisée.

  • Entrainer et motiver les collaborateurs : confirmée.

  • Développer les personnes et les équipes : confirmée.

  • Intelligence relationnelle.

  • Communiquer/influencer : confirmée.

  • Écouter et comprendre les autres : maitrisée.

  • (...).

  • Relations managériales : maitrisée.

  • Évaluation globale : confirmée.

Performance :

(...).

Objectifs qualitatifs :

(...).

Objectif :

  • Rayonnement personnel : attitude globale, management, influence.

  • Évaluation : conforme aux attentes.

Commentaires du manager :

  • Un objectif important afin d'assurer la cohésion de l'équipe et de pouvoir incarner au mieux la fonction de RPE gestion au sein de la SAM A.

  • Évaluation globale de la performance : supérieure aux attentes.

Objectifs de l'année à venir :

(...).

Objectifs qualitatifs :

(...).

Objectif :

  • Animation des RMs : participation aux restitutions comité, RDvs clients, rédaction de proposition d'investissement.

  • Communication plus présente notamment en cas de périodes difficiles sur les marchés.

Objectif :

  • Coopération au projet métier et inter entités.

Sponsoring des fonds internes.

Commentaires du manager :

  • Une année de transition qui aura vu la finalisation de la migration vers le nouveau modèle de co-gestion qui n'aura pas été sans heurts.

  • Au final, les performances sont contrastées : bonnes sur le sur mesure (Grds comptes, fonds dédiés) plus décevantes sur les profilés et les fonds flexibles.

  • Beaucoup de travail aura été effectué en 2014 avec la bascule vers la société M, la fusion des fonds flexibles, des fonds dédiés CCSS et toujours beaucoup de rdv clients. Le tout à effectifs réduits (départ de M. P., de D. L. remplacé qu'en juillet, maladie de H. B.)

  • Dans ce contexte v. aura bien tenu la barque de la gestion sans rien céder de ses convictions. La hausse des actifs qui lui sont confiés fin 2014 (+ 300 M€) illustre bien la confiance qui lui est accordée.

  • (...). ».

Pour l'année 2015 :

Le Tribunal relève que l'entretien a eu lieu le 29 janvier 2016 et que la lettre de convocation à l'entretien préalable au licenciement est en date du 7 juin 2016, sans que l'employeur ne démontre une détérioration de la situation managériale cause de la rupture.

Bien plus, la SAM A ne démontre aucunement que Madame v. B. serait responsable des départs de collègues dans son service.

Il apparaît encore que par courriel en date du 29 juin 2015, la demanderesse a transmis à Monsieur BA. Directeur des Ressources Humaines, une demande d'augmentation de salaire que lui a présenté Monsieur f. M. Middle Office.

Ce dernier n'ayant pas obtenu l'augmentation de salaire réclamée a démissionné ainsi qu'il résulte d'un mèl de la salariée en date du 20 novembre 2015 adressé à son supérieur hiérarchique, Monsieur s. H.:

« Bonjour s.,

Je vous avais alerté sur le risque opérationnel en cas de départ de F. M. suite à la démission de D. BE.

D'où mon insistance auprès de la D. R. H. pour prendre en compte ses demandes de réajustement au niveau du salaire.

F. M. n'a pas eu le temps de former L. T. totalement.

J'ai ensuite insisté sur la nécessité qu'un formateur vienne de Suisse. B. F. est venu une journée et demi : cela est insuffisant.

Vous me disiez qu'une personne est dédiée pour la formation des middle ? Il serait important qu'elle vienne à la SAM A au moins une semaine.

À votre disposition pour en discuter.

Cordialement. ».

Aucune réponse n'a été apportée à cet email par Monsieur s. H.

La pièce n° 48 produite par Madame v. B. démontre également qu'une autre collègue de travail est partie de la SAM A volontairement, aucune responsabilité de la demanderesse ne pouvant être retenue à ce titre.

Il convient encore de relever que le seul reproche lié à l'incapacité managériale visée par l'employeur tient aux départs de plusieurs salariés du service de Madame v. B.

Ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, l'employeur ne démontre en aucune manière que Madame v. B. serait responsable de ces départs.

Bien plus, en reprenant les évaluations de la demanderesse, telles que reprises supra, il apparaît que :

sur l'évaluation pour l'année 2010, les commentaires du manager suite à deux départs ne sont aucunement négatifs.

  • La note concernant le point « entraîner et motiver les collaborateurs » passant de 2 à 3, les autres restant inchangées et allant de « maîtrisée » à « confirmée ».

sur l'évaluation pour l'année 2011, aucun commentaire négatif n'apparaît sur le management, ce dernier étant conforme aux attentes.

  • La note concernant le point « entraîner et motiver les collaborateurs » passant de 3 à 4, celle concernant le point « Coopérer/fonctionner en transversal » passant de 3 à 4, les autres restant inchangées et allant de « maîtrisée » à « confirmée » .

sur l'évaluation pour l'année 2012, le manager fait état d'un manque de communication descendante et transverse tout en qualifiant l'évaluation globale de la performance d'exceptionnelle.

  • Par ailleurs, les notes des points « mobiliser les hommes » et « intelligence relationnelle » n'ont pas bougé, restant entre « maîtrisée » et « confirmée ».

  • Enfin, l'évaluation 2012 comporte un nouvel axe de notation, à savoir « relations managériales », pour lequel il est donné à Madame v. B. la note de 3 (maitrisée).

sur l'évaluation pour l'année 2013, le manager estime que l'objectif assigné à Madame v. B. lors de l'évaluation 2012 (développement de la communication avec les équipes) est inférieur aux attentes.

  • Cependant, l'évaluation globale de la performance est supérieure aux attentes.

  • Il ressort encore de l'évaluation que les objectifs quantitatifs ont été atteints, voire dépassés, malgré « l'hémorragie due au recentrage du dispositif commercial » .

  • Là encore, le manager fait état d'un « gros turn over » en 2013 sans pour autant démontrer que Madame v. B. en serait la cause.

  • Le manager tempère ses propos et justifie son appréciation par un « changement fort dans la mise en place du projet gestion ».

  • Les notes concernant les points « Entrainer et motiver les collaborateurs » et « Coopérer/fonctionner en transversal » passent de 4 à 3 (maîtrisée), les autres restant inchangées et allant de « maîtrisée » à « confirmée », et notamment celle concernant les « relations managériales » restant au niveau « maîtrisée ».

Sur l'évaluation pour l'année 2014, les objectifs qualitatifs sont qualifiés d'exceptionnels et conformes aux attentes, avec une évaluation globale de la performance supérieure aux attentes.

  • Aucun commentaire négatif n'apparaît sur le management de Madame v. B.

  • Les notes concernant les points « Entrainer et motiver les collaborateurs » et « Coopérer/fonctionner en transversal » passent de 3 à 4, les autres restant inchangées et allant de « maîtrisée » à « confirmée », et notamment celle concernant les « relations managériales » restant au niveau « maîtrisée ».

sur l'évaluation pour l'année 2015, les objectifs qualitatifs sont conformes aux attentes, sauf en ce qui concerne la « coopération au projet métier et inter entités et le sponsoring des fonds internes » pour lesquels il est mentionné « inférieur aux attentes », avec un commentaire négatif du manager sur ce point.

  • Les notes concernant les points «Mobiliser les hommes» et « Intelligence relationnelle » perdent un point, de même que celle concernant les « relations managériales ».

De ce fait, l'évaluation globale de la performance est inférieure aux attentes malgré des objectifs quantitatifs largement atteints.

Le manager reproche encore à Madame v. B. un turn over trop important, dont il n'est pas plus démontré qu'il provient d'une insuffisance de celle-ci dans le management.

Enfin, Madame v. B. réitère ses commentaires sur le risque lié à la suppression par Monsieur s. H. du poste de Responsable du Middle Office et Risk Manager en 2014 (précédent courriel sur ce point en date du 20 novembre 2015).

Le reproche du manager est dès lors infondé.

Le Tribunal relève encore que des objectifs qualitatifs ont été assignés à Madame v. B. pour l'année 2016 et que Madame v. B. a fait l'objet d'un licenciement le 17 juin 2016 (courrier de convocation en date du 7 juin 2016) sans qu'aucun rappel à l'ordre ou mise en garde sur ses qualités managériales n'aient été faites par l'employeur.

Ce dernier se contente de produire des courriels des successeurs de la salariée, postérieurs au licenciement de cette dernière, et n'ayant aucun rapport avec le litige dans la mesure où ils ne concernent en aucune manière le grief retenu par l'employeur pour justifier la rupture du contrat de travail.

La défenderesse n'établit pas en quoi Madame v. B. a concrètement manqué au professionnalisme attendu d'elle qui aurait perturbé la bonne marche de l'entreprise ou aurait été préjudiciable aux intérêts de celle-ci.

Cette insuffisance professionnelle ne peut, faute d'élément concret, être considérée comme établie.

Il résulte que le licenciement de Madame v. B. n'apparaît pas fondé sur des motifs valables.

  • Sur le caractère abusif du licenciement :

Constitue un licenciement abusif l'existence d'une faute commise par l'employeur dans l'exercice de son droit de mettre fin au contrat de travail, laquelle peut consister notamment dans l'allégation d'un motif de rupture fallacieux ; qu'il appartient au salarié qui se prévaut du caractère abusif de la rupture d'en rapporter la preuve.

Il appartient à celui qui réclame des dommages et intérêts, de prouver outre le préjudice subi, l'existence d'une faute commise par l'employeur dans l'exercice de son droit de mettre fin au contrat de travail, laquelle peut consister dans l'allégation d'un motif de rupture fallacieux ou dans la précipitation, la brutalité ou la légèreté blâmable avec lesquelles le congédiement a été donné.

En application de l'article 13 de la loi n° 729 du 16 mars 1963, toute rupture abusive du contrat de travail peut donner lieu à des dommages et intérêts.

Le licenciement qui ne repose pas sur un motif valable n'ouvre droit à la réparation du préjudice matériel en résultant que lorsque l'employeur a commis un abus dans la prise de décision, soit par exemple en invoquant des motifs fallacieux ou encore en prononçant la rupture malgré l'absence de tout fondement légal.

L'analyse qui précède a permis de constater que le grief énoncé dans la lettre de licenciement s'est avéré infondé.

Pour autant, le motif fallacieux se caractérise par la fausseté du grief invoqué combinée à la volonté de tromperie et de nuisance de celui qui l'invoque.

Au cas particulier, Madame v. B. sollicite d'être indemnisée à hauteur de la somme de 355.000 euros en réparation de ses préjudices moral et financier.

S'agissant d'un motif non valable, il n'est pas, pour autant, automatiquement fallacieux.

Un licenciement peut être considéré comme abusif (qu'il ait été reconnu valable ou non) si l'employeur a avancé pour le justifier un faux motif, c'est-à-dire un motif qui n'était pas le motif réel qui l'a conduit à prendre cette décision et qui voulait « tromper ».

Par ailleurs, le faux motif ne peut caractériser de facto l'abus de l'employeur ; à défaut, cela reviendrait à utiliser la notion française de « cause réelle et sérieuse ».

En effet, en droit français, un licenciement sans cause réelle et sérieuse (fondé sur un faux motif) est abusif et entraîne automatiquement l'allocation de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

En droit monégasque, un licenciement fondé ou non sur des motifs valables peut ne pas être considéré comme abusif.

Madame v. B. considère que le véritable motif de son licenciement réside dans la réorganisation du service.

Force est de constater que la demanderesse ne produit aucun élément permettant d'accréditer ses allégations à ce titre.

La réorganisation au niveau fédérale fut elle démontrée qu'il eut appartenu à Madame v. B. de prouver le lien entre celle-ci et son licenciement.

Bien plus, elle indique que les quatre responsables produit entité (RPE), dont elle fait partie, ont tous été évincés ou poussés vers la sortie sans le démontrer pour autant.

Madame v. B. ne démontre dès lors pas avoir été licenciée pour un autre motif que celui contenu dans la lettre de rupture.

La demanderesse soutient encore que la procédure conventionnelle de licenciement n'a pas été respectée par l'employeur.

Elle considère que les griefs qui lui sont reprochés doivent retenir une qualification disciplinaire.

L'employeur a en effet reproché à la salariée de ne pas avoir un management suffisamment efficace, malgré les objectifs qui lui auraient été assignés sur ce point précis.

Ce faisant, il ne s'agit pas d'une insuffisance professionnelle mais d'une volonté avérée du salarié de ne pas exécuter les recommandations de l'employeur, ce qui présente incontestablement un caractère disciplinaire.

Il résulte de la lecture des articles 25 à 32 de la Convention Collective Monégasque du Travail des Personnels des Banques que cet accord collectif distingue l'insuffisance de travail de l'inaptitude professionnelle, la première résultant de la mauvaise volonté de l'agent concerné à remplir ses fonctions, alors que la seconde est la conséquence d'une incapacité physique, intellectuelle ou professionnelle du salarié à occuper l'emploi qui lui est confié, à la condition toutefois que cette inaptitude ne revête pas un caractère purement temporaire.

Ainsi, alors que l'insuffisance de travail, les manquements à la discipline ainsi que de manière générale toutes les fautes professionnelles commises par un agent sont passibles des sanctions du premier ou du deuxième degré prévues par l'article 25, l'insuffisance résultant d'une incapacité physique, intellectuelle ou professionnelle constitue, indépendamment de l'application des dispositions relatives aux sanctions disciplinaires, un motif de rupture du contrat de travail.

En conséquence, lorsque un établissement bancaire entend prononcer à l'encontre d'un salarié, auquel elle reproche une insuffisance de travail, un manquement à la discipline ou même simplement des fautes à caractère professionnel, une sanction du deuxième degré, telle que la révocation, celle-ci doit obligatoirement requérir préalablement l'avis d'un conseil de discipline dans les conditions prévues à l'article 27 de l'Accord Collectif susvisé.

En l'espèce, dès lors que la rupture du contrat de travail de Madame v. B. s'avère en réalité la conséquence des fautes à caractère professionnel ne revêtant aucunement une insuffisance professionnelle mais un non-respect des consignes de l'employeur et dès lors une insuffisance de travail, la SAM A avait l'obligation, en application des dispositions des articles 25 alinéas 3 et 4 et 27 de la Convention Collective Monégasque de Travail des Banques de recueillir l'avis du conseil de discipline avant de notifier à la salariée la sanction du deuxième degré que constitue son licenciement.

Cet avis n'ayant en l'espèce pas été obtenu, ni même au demeurant sollicité par la banque, la rupture du contrat de travail de Madame v. B. revêt, en la forme, un caractère irrégulier.

En ne sollicitant pas l'avis du conseil de discipline, la SAM A a privé Madame v. B. des garanties prévues par l'article 27 de la Convention Collective des Banques, le non-respect de ces dispositions protectrices se traduisant concrètement pour l'intéressée par la perte de la chance qui lui était ainsi offerte d'obtenir de la part de cette instance un avis défavorable, susceptible de faire obstacle à son licenciement.

Bien plus, le Tribunal relève que la société défenderesse ne justifie pas avoir recherché la cause de l'insuffisance constatée, ni même avoir tenté de trouver des solutions alternatives pour conserver, le cas échéant, une employée disposant d'une importante ancienneté (près de huit années).

De plus, l'employeur n'a aucunement envisagé, avant de prendre des mesures irréversibles, de notifier une sanction du 1er degré afin de marquer une position plus ferme sur les problèmes rencontrés (au demeurant non démontrés) et de permettre à Madame v. B. de prendre la réelle mesure de la nécessité de changer d'attitude.

La demanderesse soutient en outre que son licenciement s'est réalisé dans des conditions brutales, vexatoires et avec légèreté blâmable.

Les pièces du dossier montrent que :

  • l'employeur a convoqué Madame v. B. a un entretien préalable par courrier remis en main propre le 7 juin 2016, et ce pour le 13 juin 2016,

  • dans le même temps, Madame v. B. est dispensée d'activité et de présence dans l'entreprise,

  • la lettre de licenciement est datée du 17 juin 2016.

Si la dispense de préavis peut se justifier eu égard au poste à responsabilité de Madame v. B. la mise à pied déguisée infligée à la salariée dès la remise de la lettre de convocation à l'entretien préalable constitue une légèreté blâmable de l'employeur rendant le licenciement abusif.

Quant au préjudice invoqué, il est de principe que toute demande de dommages et intérêts formée du chef d'un abus dans les conditions de mise en œuvre de la rupture, et non d'un abus dans la prise de décision, ne peut être admise qu'en ce qui concerne le préjudice moral qui résulte du contexte ayant présidé à sa mise en œuvre, et ce, à l'exclusion du préjudice matériel qui serait résulté d'un licenciement abusif dans son principe.

Les difficultés financières dont il est fait état sont en effet le résultat de la diminution de revenu, provoquée par la perte d'emploi et non la conséquence de la brutalité et de l'abus qui, à les supposer établis, auraient caractérisé le licenciement. De plus, le demandeur n'établit nullement en quoi ces difficultés matérielles auraient été provoquées par les circonstances fautives ayant entouré le licenciement, lesquelles n'ont d'ailleurs pas été retenues par le tribunal. Elles ne peuvent être de nature à établir l'existence d'une faute dans la mise en œuvre de la rupture (Cour de révision, 26 mars 2014, Pourvoi n° 2013-17).

La demanderesse a perdu une chance d'obtenir l'avis de la Commission de Discipline et de la Commission Paritaire et de conserver un autre emploi au sein de l'entreprise, alors qu'elle a incontestablement subi un préjudice moral important lié aux conditions dans lesquelles la rupture est intervenue et aux efforts limités de l'employeur pour comprendre et régler éventuellement les difficultés en cause.

Ainsi compte-tenu des éléments d'appréciation dont dispose le Tribunal et notamment l'âge de Madame v. B. lors de la notification de son licenciement (52 ans) et de son ancienneté de service (7 ans et 7 mois), de l'absence de toute sanction ou de toute remarque sur la qualité de son travail, le préjudice moral subi par celle-ci, consécutivement à la rupture de son contrat de travail sera équitablement réparé par l'allocation à son profit d'une somme de 120.000 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêt au taux légal à compter de la présente décision.

  • Sur les rappels de salaire :

Le bonus.

Madame v. B. sollicite le versement de la somme de 100.833 euros se décomposant comme suit :

30.000 euros au titre du reliquat de son bonus afférent à l'année 2015,

70.833 euros au titre de son bonus afférent à l'année 2016, au prorata de sa présence dans les effectifs.

Madame v. B. a été engagée aux conditions suivantes telles que prévues dans un courrier en date du 14 août 2008 émargé et signé par les parties :

« (...).

SALAIRE ANNUEL BRUT.

  • 130.000 euros (cent trente mille euros).

Votre salaire sera payé sur 14,5 mois, dans les conditions déterminées par la Convention Collective Monégasque de Travail du Personnel des Banques.

Ce salaire inclut toutes primes, majorations et avantages tels que définis par ladite Convention ainsi que la majoration légale de 5 % monégasque.

Ce salaire sera majoré des sommes versées au titre de l'indemnité différentielle de congés payés, et des sommes qui pourraient vous être attribuées dans le cadre de l'accord d'intéressement aux bénéfices de la SAM A, selon les règles de notre Établissement.

La date de votre intégration au sein de la SAM A constituant la date de départ pour la définition de votre éligibilité, le premier versement de ces sommes interviendra en juin 2010 au titre de l'année 2009 selon les termes dudit accord d'intéressement.

RÉMUNÉRATION VARIABLE.

Vous serez éligible à une rémunération variable annuelle discrétionnaire dont les modalités de calcul seront liées à votre performance ainsi qu'aux résultats de la SAM A et de la SA E.

Ce bonus, déterminé par année calendaire, n'est payable qu'à la double condition que vous soyez présent le jour du paiement et qu'aucune notification de rupture de votre contrat de travail ne soit préalablement intervenue, tant à votre initiative qu'à celle de la SAM A.

Le paiement suppose également l'absence de manquement professionnel avéré de votre part notamment pour non-respect des règles de déontologie ou de confidentialité existant à la SAM A.

(...). ».

Il résulte de ces dispositions contractuelles que la rémunération variable accordée à Madame v. B. est purement discrétionnaire et qu'en cas de versement, son mode de calcul est lié à la performance de la salariée et aux résultats de la SAM A et de la SA E.

Quels que soient les paramètres de détermination de la rémunération variable et à moins que le salarié n'ait accepté le principe d'une prime discrétionnaire, l'employeur est tenu à une obligation de transparence qui le contraint à communiquer au salarié les éléments servant de base au calcul de son salaire, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

En outre, le caractère discrétionnaire est confirmé par les pièces produites par la demanderesse. En effet, le versement de bonus n'apparaît que sur les bulletins de salaire du mois de février 2010 et du mois de mars 2016.

Il s'en déduit que Madame v. B. n'avait pas de droit acquis au versement d'une rémunération variable.

Madame v. B. sera dans ces circonstances déboutée de sa demande de ce chef, ainsi que de celle relative à l'indemnité de congés payés afférente.

Le solde d'indemnité de licenciement.

Madame v. B. sollicite la somme de 80.797 euros à ce titre.

Elle fait valoir de manière erronée que le licenciement étant fondé sur des considérations économiques, l'indemnité de licenciement doit être calculée sur la base du traitement annuel.

Par ailleurs, en application des dispositions de l'article 40 de la Convention Collective Monégasque du Travail du Personnel des Banques, c'est le dernier traitement perçu qui sert de base au calcul de l'indemnité de licenciement, soit la somme de 10.251 euros.

Les dispositions de l'article 39 de la même Convention Collective prévoient que « pour les gradés et les cadres, le montant de l'indemnité est égal, par semestre de service dans l'entreprise, et en sus de l'indemnité de délai congé, à un demi mois de traitement calculé sur la base du dernier mois de traitement perçu avec un maximum de deux ans de traitement. »

Ce faisant, Madame v. B. aurait dû bénéficier de la somme de 76.882,50 euros qui se décompose comme suit :

  • * 15 semestres (7 ans et 7 mois) x 5.125,50 (10.251/2) = 76.882,50 euros.

Madame v. B. ayant perçu la somme de 67.255,88 euros, il lui reste dû un reliquat d'un montant de 9.626,62 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 27 septembre 2016, date de la réception au greffe de la requête introductive d'instance.

  • Sur la remise des documents liés à la rupture :

Il convient d'ordonner, en tant que de besoin, la délivrance du reçu pour solde de tout compte, du dernier bulletin de salaire et de l'attestation destinée à Pôle Emploi conformes à la présente décision, dans le délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement.

  • Sur l'exécution provisoire :

Il n'est pas justifié pour le surplus des conditions nécessaires au prononcé de l'exécution provisoire autre que l'exécution provisoire de droit prévue par les dispositions de l'article 60 de la loi n° 446 du 16 mai 1946.

  • Sur les dépens :

Partie succombante, la SAM A sera condamné aux dépens.

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et après en avoir délibéré,

Dit que le licenciement de Madame v. B. ne repose pas sur une cause valable et revêt un caractère abusif ;

Condamne en conséquence la société anonyme monégasque A à payer à Madame v. B. la somme de 120.000 euros (cent vingt mille euros) à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

Condamne la SAM A à payer à Madame v. B. la somme de 9.626,62 euros (neuf mille six cent vingt-six euros et soixante-deux centimes) à titre de solde d'indemnité de licenciement, avec intérêts au taux légal à compter du 27 septembre 2016, date de la réception au greffe de la requête introductive d'instance ;

Ordonne, en tant que de besoin, la délivrance par la SAM A à Madame v. B. dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision, du reçu pour solde de tout compte, du dernier bulletin de salaire et de l'attestation destinée à Pôle Emploi conformes à la présente décision ;

Déboute Madame v. B. du surplus de ses demandes ;

Condamne la SAM A aux dépens du présent jugement ;

Composition🔗

Ainsi jugé par Monsieur Michel SORIANO, Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, Messieurs Cédric CAVASSINO, Jean-François RIEHL, membres employeurs, Messieurs Hubert DUPONT-SONNEVILLE, Fabrizio RIDOLFI, membres salariés, et prononcé en audience publique du Tribunal du Travail de la Principauté de Monaco, au Palais de Justice, le onze juillet deux mille dix-neuf, par Monsieur Michel SORIANO, Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, en présence de Messieurs Cédric CAVASSINO et Hubert DUPONT-SONNEVILLE, Messieurs Jean-François RIEHL et Fabrizio RIDOLFI étant empêchés, assistés de Madame Sandrine FERRER-JAUSSEIN, Secrétaire en Chef.

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