Tribunal du travail, 19 octobre 2017, Monsieur d. SI. c/ La SAM A
Abstract🔗
Licenciement – Faute grave (oui) – Motif valable (oui) – Caractère abusif (non)
Résumé🔗
Il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de la réalité et de la validité des motifs invoqués à l'appui de sa décision de rupture et notamment de la faute grave alléguée. La faute grave résulte de tout fait ou ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail et des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible son maintien dans l'entreprise et exige son départ immédiat, ce, même pendant la durée du préavis. Cette faute n'est pas nécessairement en fonction du préjudice qui en est découlé.
En l'espèce, Monsieur d. SI. a commis des fautes professionnelles consistant en des négligences, des manquements et une exécution défectueuse du travail eu égard à ses fonctions de directeur financier ; certaines carences ayant d'ailleurs entraîné des pénalités de retard pour l'employeur. L'ensemble des explications développées ci-dessus justifie dans ces circonstances le licenciement pour faute grave de Monsieur d. SI..
Tout licenciement fondé sur un motif valable peut néanmoins présenter un caractère abusif si le salarié, auquel incombe la charge de cette preuve, démontre que l'employeur a méconnu certaines dispositions légales lors de la mise en œuvre de la rupture ou si les conditions matérielles ou morales de sa notification présentent un caractère fautif ou révèlent une intention de nuire ou la légèreté blâmable de l'employeur. Un licenciement peut être considéré comme abusif (qu'il ait été reconnu valable ou non) si l'employeur a avancé pour le justifier un faux motif, c'est-à-dire un motif qui n'était pas le motif réel qui l'a conduit à prendre cette décision et qui voulait « tromper », ce qui n'est pas le cas en l'espèce. En l'espèce, l'analyse qui précède a permis de constater que le grief énoncé dans la lettre de licenciement s'est avéré fondé. Pour autant le motif fallacieux se caractérise par la fausseté du grief invoqué combinée à la volonté de tromperie et de nuisance de celui qui l'invoque. Le Tribunal relève à ce titre que Monsieur d. SI. est défaillant dans l'administration de la preuve. Il ne démontre pas avoir été licencié pour une autre cause que celle énoncée dans la lettre de licenciement. Monsieur d. SI. invoque également les circonstances brutales et vexatoires du licenciement. Or, Monsieur d. SI. ne démontre aucun abus ou légèreté blâmable de l'employeur dans la mise en œuvre du licenciement.
Motifs🔗
TRIBUNAL DU TRAVAIL
AUDIENCE DU 19 OCTOBRE 2017
En la cause de :
Monsieur d. SI., demeurant X1 à MONACO,
Demandeur, ayant élu domicile en l'Étude de Maître Sophie LAVAGNA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco,
d'une part ;
Contre :
La SAM A en abrégé « A », dont le siège social se situe X2 à MONACO,
Défenderesse, ayant élu domicile en l'Étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco,
d'autre part ;
LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Vu la requête introductive d'instance en date du 20 mai 2015 reçue le 26 mai 2015 ;
Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 23 juin 2015 ;
Vu les conclusions déposées par Maître Sophie LAVAGNA, avocat-défenseur, au nom de Monsieur d. SI., les 5 novembre 2015 3 novembre 2016 et 12 avril 2017 ;
Vu les conclusions déposées par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de la SAM A, les 14 mars 2016 et 5 janvier 2017 ;
Vu les pièces du dossier ;
Monsieur d. SI. a été embauché par la SAM A en contrat à durée indéterminée à compter du 15 septembre 1999 en qualité de Comptable.
À compter du 1er juillet 2002, il est nommé « directeur financier cadre ».
En parallèle, il a occupé la fonction de responsable financier au sein de la société I pour une durée mensuelle de travail de 16 heures.
Les deux sociétés étaient dirigées par Monsieur s. PA..
Le 4 juillet 2005, le permis de travail de Monsieur d. SI. auprès de la société I est modifié pour indiquer une durée de travail mensuelle de 32 heures.
À compter du mois de novembre 2007, Monsieur SI. a bénéficié d'un permis de travail auprès de la SAM A pour 84 heures par mois et d'un second auprès de la société I pour 85 heures par mois.
En début d'année 2008, Monsieur PA. a cédé l'intégralité de ses actions à Madame PE-RO. et a démissionné de ses fonctions.
Par courrier en date du 28 septembre 2012, Monsieur SI. a été licencié pour motif économique par la société I.
Au mois de juillet 2013, Monsieur Christophe DI. acquiert l'ensemble des actions de la société A.
Le 2 août 2013, Monsieur DI. a remis au salarié un avertissement pour un virement à son profit de la somme de 2.472,19 euros sans son accord.
Le 20 septembre 2013, une mise à pied à titre conservatoire de quinze jours est notifiée à Monsieur d. SI. afin de « procéder à un contrôle approprié des éléments comptables ».
Le 24 septembre 2013, l'employeur a demandé au salarié par courrier recommandé avec accusé de réception, de lui remettre les clés des placards restés fermés ainsi que les codes d'accès aux différents logiciels.
Cette demande était réitérée le 26 septembre suivant.
Le 27 septembre 2013, Monsieur SI. se rendait au siège de la société accompagné d'un huissier de justice afin de faire constater la remise des différentes clés réclamées ainsi que des mots de passe du logiciel paye.
À l'issue de la mise à pied, le 7 octobre 2013, Monsieur SI. s'est présenté sur son lieu de travail. A son arrivée, l'employeur lui a remis une lettre de licenciement pour faute grave datée du 4 octobre 2013, confirmée par courrier recommandé avec accusé de réception.
Par requête en date du 20 mai 2015, reçue le 26 mai 2015, Monsieur SI. a saisi le Tribunal du travail, en conciliation, des demandes suivantes :
« Suite à mon licenciement notifié par courrier RAR du 4 octobre 2013 pour faute grave, privatif d'indemnités.
Sur les demandes suivantes :
1. juger le licenciement abusif,
2. demande de rémunération brute non perçue entre le 01/01/2013 et le 05/08/2013,
salaire brut : 18.113,93 euros,
prime d'ancienneté brute : 2.354,81 euros,
soit un montant total brut : 20.468,74 euros.
3. Versement du 13ème mois en décembre 2013 : 2.840,31 €,
4. Versement de l'indemnité compensatrice de préavis (3 mois) : 8.520,93 €,
5. Versement de l'indemnité de congédiement : 12.940,32 €,
6. Versement de l'indemnité de licenciement, 17.041,86 € déduction faite de l'indemnité de congédiement, 12.940,32 €,6.
Pour un total de : 4.101,54 €.
7. versement de l'indemnité de congés payés : 12.926,36 €,
8. dommages et intérêts pour non-paiement du salaire dû et licenciement abusif : 50.000 €,
9. intérêt au taux légal,
10. exécution provisoire ».
Aucune conciliation n'ayant pu intervenir, l'affaire a été renvoyée devant le Bureau de jugement.
Monsieur d. SI. a déposé des conclusions les 5 novembre 2015, 3 novembre 2016 et 18 avril 2017 dans lesquelles il fait essentiellement valoir que :
il a travaillé au sein de la société I en plus des 169 heures qu'il effectuait auprès de la société A,
en début d'année 2008, Madame PE-RO. lui a confié les fonctions de directeur général de la société A, sans qu'aucun formalisme ne soit effectué et sans modification de sa rémunération,
il a dû faire face à un surcroit de travail considérable,
en 2010, l'employeur lui donne une procuration bancaire sur les comptes bancaires des deux sociétés, I et A,
ces procurations lui seront retirées en mai 2013,
il a subi un véritable harcèlement de la part de Monsieur DI., en limitant son champ de manœuvre dans son travail, dans le seul but de le pousser à la démission,
sur la rémunération brute non perçue entre le 1er janvier et le 5 août 2013 :
lorsqu'il a été licencié par la société I, il lui avait été garanti la modification de son contrat de travail à temps complet au sein de la société A à compter du 1er janvier 2013,
il a travaillé à temps complet dans cette dernière société jusqu'au mois de novembre 2007,
pour des raisons purement économiques, il lui avait été demandé de partager son temps de travail entre les deux sociétés, à raison de 84 heures pour la société A et 85 heures pour la société I,
l'ampleur de la tâche de travail au sein de la société A était sans aucune mesure avec celle effectuée pour la société I,
la défenderesse le reconnaît en page 3 de ses écritures,
il paraît donc tout à fait logique qu'une fois licencié de la société I, son contrat soit de nouveau modifié à temps complet auprès de la SAM A,
malgré son licenciement, il a continué à s'occuper de la société I,
il a occupé en plus de son poste de travail celui de la gestion du e-commerce,
ce n'est que le 6 août 2013 que Monsieur Christophe DI. lui a indiqué que son contrat de travail ne serait pas modifié et qu'il devrait effectuer un temps de travail de 84 heures mensuelles, à raison de 4 heures par jour,
il produit un certain nombre de mails démontrant qu'il travaillait bien plus que 4 heures par jour,
il avait le statut de cadre et s'occupait en plus de la comptabilité du volet commercial et marketing de la société et il lui arrivait de ne pas venir directement à la société le matin afin d'effectuer les nombreuses tâches qu'il avait à accomplir dans la journée.
Sur le licenciement :
le virement de son salaire du mois de juillet 2013 a bien été réalisé avec l'accord de Monsieur DI. dans la mesure où il n'avait plus les procurations bancaires sur les comptes de la société depuis le mois de mai 2013,
la mise à pied est intervenue au moment où les commissaires aux comptes vérifiaient les comptes des deux sociétés et que sa présence eut été indispensable pour le bon déroulement du contrôle,
la lettre de licenciement comporte dix-neuf points de reproches sur des faits que Monsieur DI. feindra d'ignorer alors qu'il en était parfaitement informé et conscient,
les faits reprochés ne lui sont pas imputables. Il a toujours agi dans le respect des instructions qui lui étaient données et dans l'intérêt des deux sociétés,
les manquements relevés dans la lettre de licenciement ne répondent en rien à la définition de la faute grave,
il a été licencié en outre dans des conditions vexatoires et humiliantes,
les rapports se sont détériorés dès l'arrivée de Monsieur Christophe DI., dont le but était de le contraindre à démissionner en lui faisant subir un véritable harcèlement,
il a été licencié sans explication, sans aucun entretien préalable,
la multitude de griefs évoqués dans la lettre de licenciement montre que l'employeur cherchait un moyen de se séparer de lui à moindre coût,
il a subi un préjudice financier et moral important.
Monsieur d. SI. demande encore dans le corps de ses écritures, sans le reprendre dans le dispositif, que les attestations établies par Monsieur r CI. et Madame DE-DU. produites par la défenderesse soient écartées des débats.
La SAM A a déposé des conclusions les 14 mars 2016 et 5 janvier 2017 dans lesquelles elle s'oppose aux prétentions émises à son encontre et sollicite une somme de 5.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Elle expose essentiellement à l'appui de ses prétentions :
sur la rémunération brute prétendument due :
Monsieur d. SI. a été licencié par la société I en raison de la suppression de son poste, le 28 septembre 2012. Il s'est remis à lui-même son solde de tout compte, son certificat de travail ainsi que l'attestation Pôle emploi, fin août 2013,
il ne lui a jamais été promis qu'il passerait à temps plein chez la société A,
il avait été « basculé » à mi-temps auprès de la société I en l'état des difficultés financières de la société A, laquelle n'avait aucun intérêt à le reprendre à temps plein en 2013, étant toujours déficitaire,
cette promesse a d'autant moins pu lui être faite que son travail souffrait d'insuffisances notoires,
le demandeur ne rapporte pas la preuve qu'il a travaillé 169 heures par mois pour la société A,
les mails produits par le salarié sont laconiques, n'ont appelé aucune analyse particulière et ne caractérisent aucunement un travail soutenu,
Monsieur d. SI. travaillait selon son bon vouloir et avec des horaires élastiques,
une note était d'ailleurs remise au salarié le 6 août 2013 lui rappelant que son temps de travail est de 84 heures mensuelles, qu'il doit effectuer entre 9 heures et 15 heures (temps de pause à décompter),
sur le licenciement :
Monsieur d. SI. reconnaît ses manquements mais prétexte qu'ils découleraient d'une surcharge de travail et de difficultés financières de l'entreprise n'ayant pas permis de débloquer les fonds nécessaires en temps et heures des cotisations dues aux organismes sociaux,
il n'évoque à aucun moment des faits pouvant caractériser un quelconque harcèlement de la part de l'employeur,
Monsieur Christophe DI. a découvert rapidement les manquements de Monsieur d. SI. et notamment après la remise des clés et codes d'accès par ce dernier,
une prétendue surcharge de travail ne peut être retenue dans la mesure où le demandeur était assisté d'une salariée et bénéficiait du support d'un cabinet d'expertise comptable,
il ne s'est jamais plaint auprès de son employeur d'une quelconque surcharge de travail,
Monsieur d. SI. ne savait pas définir les priorités, ne déléguait pas ou mal,
il veillait à faire régner une ambiance négative, allant jusqu'à dénigrer l'état de la société auprès de certains collaborateurs, les incitant à quitter l'entreprise,
l'employeur a pris soin de vérifier ses suspicions avant de prendre une mesure définitive, tout en écartant Monsieur SI. de l'entreprise par l'intermédiaire d'une mise à pied conservatoire,
le demandeur ne s'est jamais vu reconnaître le statut de directeur général de la société ; il s'est attribué ce titre allant jusqu'à se faire passer comme tel auprès de ses interlocuteurs.
SUR CE,
1 - Sur les attestations produites par la défenderesse
Aux termes de l'article 324 du Code de procédure civile, « l'attestation doit, à peine de nullité :
1° être établie par une personne remplissant les conditions requises pour être entendue comme témoin ;
2° être écrite, datée et signée de la main de son auteur ;
3° mentionner les nom, prénoms, date et lieu de naissance, demeure et profession de son auteur, ainsi que l'existence ou l'absence de liens de parenté, d'alliance, de subordination ou d'intérêt avec les parties ;
4° préciser si son auteur a quelque intérêt au procès ;
5° indiquer qu'elle est établie en vue de sa production en justice et que son auteur sait qu'une fausse attestation l'exposerait aux sanctions prévues par l'article 103 du Code pénal ;
6° être accompagnée de tout document officiel, en original ou en photocopie, justifiant de l'identité de son auteur et comportant sa signature. ».
En page de ses dernières écritures, Monsieur d. SI. précise que la nullité demandée ne concerne pas l'attestation de Madame Suzanne IA..
La pièce n° 19-1 à 19-3 est une attestation établie par r CI., dans laquelle il indique qu'il travaille chez la société A en tant que WEB MASTER COMMERCIAL et qu'il n'a pas de lien de subordination avec les parties.
Il est admis que les mentions exigées par l'article 324 du Code de procédure civile ne doivent pas nécessairement être reproduites à l'identique de la rédaction dudit article et que certaines informations telles notamment que l'intérêt au litige et l'existence d'un lien de subordination peuvent s'apprécier par le contenu même de l'attestation ;
De plus, l'alinéa 4 invoqué invite les auteurs d'une attestation à préciser s'ils ont « quelque intérêt au procès » ; il s'agit donc d'une précision à apporter lorsque cet intérêt existe, de sorte que l'absence d'une telle mention doit être entendue comme un défaut d'intérêt - ce d'autant qu'il n'est pas soutenu qu'un tel intérêt existerait en l'espèce - et ne peut être sanctionnée dès lors par la nullité de la pièce qui comporte les mentions légales imposées ;
Dès lors, la régularité de l'attestation établie par Monsieur r CI. ne saurait être discutée dans la mesure où ce dernier a indiqué très précisément qu'il était au service de la société A et qu'il n'y a pas, de ce fait, volonté de dissimuler cette qualité.
L'indication à la suite de l'absence de lien de subordination ne constitue qu'une erreur matérielle qui ne saurait entraîner la nullité de l'attestation.
La pièce n° 20 est une attestation établie par Madame DE-DU. qui précise n'avoir aucun lien de subordination avec les parties, alors qu'il n'en est rien.
Ce faisant, ce document a été régularisé en pièce n° 20bis de sorte qu'il n'y a pas lieu à en prononcer la nullité.
Le lien de subordination de l'attestant avec la société défenderesse n'est susceptible d'avoir d'effet que sur la valeur probante.
Il n'y a pas lieu en conséquence d'écarter des débats cette attestation.
2 - Sur la demande de rémunération brute non perçue entre le 1er janvier 2013 et le 5 août 2013
En application des dispositions de l'article 1162 du Code civil, en son alinéa premier, « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ».
Pour démontrer qu'il a travaillé à temps plein entre le 1er janvier 2013 et 05 août 2013, Monsieur d. SI. produit les éléments suivants :
L'arrêt rendu par la Cour d'appel de Monaco le 12 mars 2013 dans l'instance opposant la société A à Monsieur TH. et dans lequel l'employeur soutient (page 6) :
« après le départ de ce salarié (Mr TH.), ses fonctions ont été transférées à M. SI. qui concentre aujourd'hui les attributions de directeur commercial entre ses mains, aucun recrutement n'ayant été effectué ».
Monsieur d. SI. indique à ce titre qu'il ne pouvait réaliser l'ensemble des tâches qui lui étaient dévolues en travaillant seulement 4 heures par jour.
Cet élément démontre seulement une adjonction de nouvelles tâches à Monsieur d. SI., ce dernier devant justifier et démontrer qu'il a dépassé le quota des 4 heures journalières pour les réaliser.
Des courriels en pièce n° 20 qui démontrent que Monsieur SI. a utilisé sa messagerie professionnelle sur une amplitude supérieure à 4 heures de travail.
Le Tribunal relève que les mails ne concernent que 10 jours sur les 7 mois revendiqués par Monsieur SI., de sorte qu'ils ne peuvent démontrer une relation de travail à temps complet pendant toute cette période.
Des courriels en pièce n° 25 concernant quatre jours sur les sept mois visés ci-dessus, écrits à des heures tardives.
Là encore, ces éléments ne démontrent pas une présence constante et un travail effectif de Monsieur SI. à temps plein, non seulement sur les jours considérés, mais également et surtout sur la période revendiquée par le salarié.
Il convient encore de relever que Monsieur SI. bénéficiait, en sa qualité de Cadre, d'une autonomie pour organiser son travail ; la référence à ces heures correspondant manifestement au moment de réalisation d'une opération donnée.
Les mails produits par le demandeur visent différentes heures, dont l'amplitude excède parfois 9 heures par jour, et ne peut s'apparenter à une plage complète de travail effectif (l'activité concrète et la disponibilité permanente sans possibilité de vaquer à d'autres occupations n'étant pas démontrées).
Il en résulte que le Tribunal ne peut ainsi déterminer la répartition du temps de travail du salarié sur toute la période en cause, ni le nombre d'heures de travail effectif, et faire droit à la demande présentée de ce chef par Monsieur SI..
3 - Sur le motif de la rupture
Il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de la réalité et de la validité des motifs invoqués à l'appui de sa décision de rupture et notamment de la faute grave alléguée.
La faute grave résulte de tout fait ou ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail et des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible son maintien dans l'entreprise et exige son départ immédiat, ce, même pendant la durée du préavis.
Cette faute n'est pas nécessairement en fonction du préjudice qui en est découlé.
En l'espèce, Monsieur SI. a été licencié par lettre du 4 octobre 2013 et il lui est reproché vingt griefs qu'il convient de reprendre infra.
« Vous n'avez pas déposé les résultats de la société pour l'exercice échu, ni les renseignements et documents annexes auprès des services fiscaux et ce, dans le délai légal, ce qui a occasionné une amende fiscale ».
Pour justifier ce grief, l'employeur produit les éléments suivants :
une lettre de la Direction des Services Fiscaux du 17 septembre 2013 ainsi libellée :
« Monsieur l'Administrateur délégué,
Votre entreprise assujettie à l'impôt sur les bénéfices n'a pas produit dans le délai légal la déclaration des résultats prévue à l'article 23 de l'Ordonnance souveraine n° 3152 du 19 mars 1964, ni les renseignements et documents annexes visés aux 1° à 9° et 11° à 13° du paragraphe 1 de ce même article, afférents à l'exercice clos le 31 décembre 2012.
Sa situation fiscale n'ayant pas été régularisée à ce jour, malgré deux lettres de rappel du service, ces infractions ont été sanctionnées par une amende fiscale fixée à 700 € ».
Une mise en demeure était adressée à la société par courrier du 6 décembre 2013.
Suite à un courrier de Monsieur Christophe DI. en date du 10 décembre 2013, la Direction des Services Fiscaux accordait le 11 décembre 2013, à titre exceptionnel, une remise gracieuse de l'amende.
Monsieur d. SI. ne conteste pas ce grief mais justifie sa carence par une surcharge de travail, non démontrée.
Ce grief sera dès lors retenu.
« De même, le défaut de paiement des organismes O et M au titre du dernier trimestre 2012 et du premier trimestre 2013, qui a également généré des majorations de retard ».
Pour justifier ce grief, l'employeur produit en pièces n° 58-15 et 58-16 les lettres de majorations de retard correspondantes adressées les 15 juin et 12 septembre 2013.
Le dossier du défendeur comporte également les lettres de mise en demeure concernant les périodes considérées : pièces n° 58-13, 58-17, 58-18, 58-21, 58-22, 58-23, 58-24, 58-25.
Monsieur SI. ne conteste pas les faits mais soutient qu'il a exécuté les ordres de la direction au vu d'un manque de trésorerie.
Force est constater que ces allégations ne sont corroborées par aucun élément.
Ce grief sera dès lors retenu.
« Un contrôle de la rubrique « caisse » du compte général au 30 septembre 2013 montre des écarts inexpliqués au regard des montants « espèces » renseignés ».
Le Tribunal relève que l'employeur ne produit aucune pièce, ni ne développe aucune argumentation sur ce point.
Ce grief ne sera dès lors pas retenu.
« Parallèlement, nous avons dû vous mettre en demeure de procéder au remboursement de l'achat de matériel informatique pour une somme de 1.731,05 euros, celui-ci ayant été opéré sur les fonds de la société, mais pour votre compte personnel ».
Monsieur d. SI. ne conteste pas les faits mais soutient qu'il a obtenu l'accord de Monsieur Christophe DI. pour ce faire, « car le tarif qui est pratiqué pour la société était plus intéressant que celui appliqué à un particulier. Il était bien entendu convenu que cet achat serait remboursé par Mr SI.. ».
Le demandeur ne démontre aucunement ses allégations à ce titre de sorte que le grief reproché sera retenu.
« Plusieurs salariés nous ont également et récemment certifié n'avoir obtenu leurs bulletins de salaire qu'après d'incessantes réclamations auprès de vous, ce qui constitue de la part de la société des infractions pénalement sanctionnables ».
Pour justifier ce grief, l'employeur produit les éléments suivants :
l'attestation de Madame SC. IA. qui indique sur ce point : « Les bulletins de salaire à la charge de Mr SI. pour la société A du début de mes fonctions jusqu'à août 2013 ne m'ont jamais été remis au bon moment, tous les mois étant en retard et souvent j'étais obligé de le relancer jusqu'à ce que celui-ci se daigne me les remettre, plusieurs mois après et tous en même temps. ».
l'attestation de Monsieur CI. ainsi libellée : « je n'ai jamais reçu mon bulletin de salaire en début de mois, mais avec plusieurs mois de retard, car je devais toujours demander à plusieurs reprises à M SI. d'avoir mon bulletin de salaire. ».
l'attestation de Madame DE-DU. : « Monsieur SI. ne me remettait jamais à la fin du mois mes bulletins de salaire sauf après réclamations incessantes. ».
une déclaration commune des salariés RE., IA. et DE. dans laquelle ils déclarent « ne jamais avoir reçu à la fin du mois nos bulletins de salaires sauf après réclamations incessantes. ».
Monsieur SI. indique « qu'il a effectivement pu arriver que les bulletins de salaire ne soient donnés immédiatement à un ou plusieurs salariés, soit lorsque celui-ci se trouvait en congés, soit pas simple manque de temps. Cependant les retards ou leurs fréquences n'ont jamais été aussi importants et récurrents que le prétendent les attestations fournies. ».
Le retard, quel qu'il soit, dans la remise de ce document constitue une faute à la charge de l'employeur.
La faute de Monsieur SI. est dès lors caractérisée.
« Aux côtés de diverses enveloppes évoquant une collecte de fonds pour le café, une somme de près de 500 € en petite monnaie, représentant l'argent prélevé auprès du personnel pour l'achat du café mis à sa disposition ; la méthode éveille nos soupçons ».
Pour justifier ce grief, l'employeur produit les éléments suivants :
des enveloppes en pièce n° 24 sur lesquelles figurent des sommes, sur certaines la mention « café »,
deux factures N au nom de la SAM A en date des 7 décembre 2010 et 24 janvier 2011, réglées par carte bancaire.
Monsieur SI. explique qu'il s'agissait de la collecte mise en place pour le règlement du café.
Il ajoute qu'il ne peut en aucun cas en accepter le montant qu'il n'a pu vérifier.
Les pièces produites par l'employeur démontrent l'existence d'un système de collecte destiné à l'achat de café mais celui-ci ne démontre aucunement que les enveloppes contenaient réellement la somme totale de 500 euros tel que visée dans la lettre de licenciement ou plus de 550 euros telle que visée en page 20 de ses dernières conclusions.
Ce grief ne sera pas retenu.
« Des mises en demeures adressées par la Direction des services fiscaux à la société A pour défaut de déclaration de ses résultats et absence des documents devant leur être annexés pour plusieurs exercices (2008, 2009, 2010, 2011, 2012) laissant apparaître qu'il s'agissait là d'un manquement chronique à vos fonctions de directeur financier ».
Pour démontrer ce grief, l'employeur produit les courriers de mise en demeure en pièces n° 54-1 à 54-6 concernant la remise des documents dits « annexes » puis en pièces n° 55-1 à 55-6 concernant la déclaration des résultats de la société.
Monsieur d. SI. ne donne aucune explication sur les faits reprochés.
Ce grief sera dans ces circonstances retenu.
« Des courriers sous enveloppe à l'attention des dirigeants de la société A qui n'ont jamais été ouverts, ni remis à leur destinataire ».
Pour justifier ce grief, l'employeur produit en pièce n° 26 une enveloppe de l'IMSEE portant un cachet daté du 13 juin 2013 et en pièce n° 27 une enveloppe de la Chambre de développement économique de Monaco portant un cachet daté du 19 mars 2013, adressées à Madame PE-RO., lesdites enveloppes n'étant pas ouvertes.
Monsieur d. SI. reconnaît qu'il avait en charge le soin d'ouvrir tout le courrier et se défend en soutenant qu'il s'agissait de courriers faisant référence à des invitations, sans importance ; ce qui est contredit par les pièces produites par l'employeur.
Ce grief sera dès lors retenu.
« Des rappels de l'agent général représentant la compagnie J en Principauté, assureur-loi de la société A, pour défaut de paiement des cotisations dues au titre du contrat idoine, dont un du 14 mai 2013 ».
Le Tribunal constate que les lettres de rappel adressées par la compagnie J ne concernent pas le contrat visé dans le grief mais une assurance pour le transport terrestre de marchandises livrées.
Ce grief ne sera dès lors pas retenu.
« L'existence de chèques établis à l'ordre de la société A par la compagnie J au titre de remboursements dans le cadre d'un contrat d'assurance de marchandises transportées, lesquels n'ont jamais été présentés à l'encaissement ».
L'employeur justifie ce grief par la production en pièces n° 31 et 32 des courriers correspondants accompagnés de deux chèques d'un montant de 76,07 euros chacun ; le premier étant daté du 24 novembre 2010 et le second du 23 août 2012.
Monsieur d. SI. soutient qu'il avait prévu de mettre ces chèques à l'encaissement début août 2013, « lorsque Monsieur DI. lui a demandé de n'effectuer que les 84 heures de travail qui étaient contractuellement prévues. Il n'a tout simplement pas disposé de temps pour le faire. ».
Il convient de rappeler au salarié la date d'émission des chèques en cause et la nature de ses fonctions, à savoir directeur financier.
Enfin, le montant du chèque est sans importance, la faute n'étant pas fonction de celui-ci.
Ce grief sera dès lors retenu.
« De nombreuses mises en demeure reçues de G, l'organisme privé chargé de la gestion d'un service public H et adressées à la SAM I (dont vous étiez salarié à temps partiel et occupant les locaux avec la société A) au titre du non-respect de diverses obligations de déclaration, ainsi que des mises en demeure à l'attention de la société A pour les mêmes motifs, confirmant votre propension à ne pas accomplir les formalités légales pour acquitter les cotisations dues ».
Pour justifier ce grief, l'employeur produit les éléments suivants :
Des lettres de mise en demeure des organismes de retraite et concernant des impayés et des défauts de déclaration annuelle des salaires (pièces n° 58-1 à 58-27).
Le Tribunal relève que les impayés concernent les années 2011 et 2012, au cours desquelles Monsieur d. SI. disposait d'une procuration sur les comptes bancaires de la société A (jusqu'au mois de mai 2013). Dès lors, en sa qualité de directeur financier, il devait non seulement établir les chèques mais également les signer et les adresser dans les délais aux organismes concernés.
En outre, sa carence dans l'établissement et l'envoi des différentes déclarations de salaires est établie.
Ce grief sera retenu.
« Des chèques récemment établis à l'ordre de l'organisme privé chargé de la gestion d'un service public E et de F signés par Mme PE., président administrateur délégué qui n'ont jamais été envoyés à ces organismes ».
L'employeur produit lesdits chèques en pièces n° 63 à 66.
Monsieur d. SI. indique avoir préparé les chèques dans les délais, Madame PE-RO. les ayant mis de côté au vu du manque de trésorerie. Par la suite, la signature de cette dernière n'était plus valable.
Il ne démontre aucunement ses allégations quant à un ordre de la direction pour mettre les paiements de côté suite à une trésorerie insuffisante.
Ce grief sera retenu.
« L'existence de chèques tirés sur la société A elles-mêmes ou libellés « au porteur », ou encore à des tiers et qui sont restés « en vrac » ».
L'employeur produit les documents correspondant en pièces n° 33 à 37.
Le demandeur ne donne aucune explication sur la présence de ces chèques et la raison de leur établissement, et ce au mépris de ses fonctions de directeur financier.
Ce grief sera retenu.
« Divers chèques laissés pêle-mêle, dont nous ne voyons aucunement quelle était la finalité ».
Aucune pièce n'est produite à l'appui de ce grief qui ne sera pas retenu.
« Des chéquiers non détruits (Banque D), de même qu'une carte bancaire délivrée par la S à Mme PE. es qualité, laquelle venait à échéance le 30 juin 2013 avec le Code confidentiel permettant son usage, moyens de paiement accessibles à tout un chacun qui auraient pu être utilisés au préjudice de la société ».
L'employeur produit les documents correspondant en pièces n° 38 à 40.
Les chéquiers datant de 2003 et 2004 aurait dû faire l'objet d'un archivage, Monsieur d. SI. soutenant à tort qu'ils étaient inutilisables.
En effet, un commerçant recevant un chèque ne dispose d'aucun moyen de contrôle à ce titre.
Il en est de même de la carte bancaire.
Ce grief sera retenu.
« L'existence de contrats d'abonnement T souscrits pour des téléphones portables au nom de la société, mais sans aucun aval, dont nous ignorons où ils se trouvent et qui en tout état de cause n'ont jamais été mis à la disposition des dirigeants ou du personnel, tout en occasionnant une facturation mensuelle conséquente au regard des factures de juin 2013 retrouvées ».
Pour justifier ce grief, l'employeur produit les éléments suivants :
une facture de T en date du 1er mai 2013 d'un montant de 909,68 euros, concernant 6 lignes,
une facture de T en date du 1er juin 2013 d'un montant de 344,06 euros, concernant 6 lignes.
Contrairement à ce que soutient l'employeur, ces téléphones ont été mis à disposition du personnel de l'entreprise dans la mesure où les lignes ont été utilisées.
Il ne démontre pas l'intervention de Monsieur d. SI. dans la signature des contrats auprès de T, de sorte que ce grief ne sera pas retenu.
« Un contrat intitulé « accord de confidentialité » engageant la société A envers les Laboratoires L que vous avez signé en qualité de « gérant », titre inexistant dans une société anonyme monégasque, alors, de surcroît que vous n'êtes nullement un de ses mandataires sociaux et en tout cas sans jamais avoir reçu aucune délégation à cette fin ».
L'employeur produit le contrat litigieux dans lequel la société A est représentée par son gérant, Monsieur d. SI..
En sa qualité de directeur financier, le demandeur ne disposait d'aucun pouvoir pour engager la société contractuellement.
Monsieur d. SI. a outrepassé ses pouvoirs.
Le grief sera retenu.
« Un permis de travail au nom de Mme VA., qui ne lui a donc jamais été remis en contravention avec les dispositions légales ».
L'employeur produit l'autorisation d'embauchage et le permis de travail de Madame VA. en date du 30 mai 2011.
Monsieur d. SI. soutient que le permis de travail n'a pu être remis à la salariée, sa période de travail ayant été trop courte.
L'employeur ne démontre pas que Monsieur SI. disposait en sus de ses fonctions de directeur financier, celles de gestion du personnel.
Ce grief ne sera pas retenu.
« L'existence de cartes de visite à votre nom et d'une déclaration effectuée auprès du K vous attribuant le titre de « directeur général », que vous n'avez jamais eu ».
Pour justifier ce grief, l'employeur produit les éléments suivants :
des cartes de visite au nom de Monsieur d. SI., Directeur Général de la société A,
une déclaration effectuée auprès de K attribuant à Monsieur SI. le titre de directeur général,
une télécopie de Maître GARDETTO, avocat, adressée à Monsieur d. SI., Directeur Général de la S. A. M. A.
Monsieur d. SI. soutient qu'il occupait les fonctions de directeur général, sans pour autant le démontrer.
La direction générale définit la stratégie globale de l'entreprise et supervise son exécution.
La fonction de direction générale regroupe l'ensemble des postes de management global de l'entreprise ou d'une partie de l'entreprise. Elle se caractérise par la prise en charge d'une double responsabilité à la fois stratégique et opérationnelle.
Le demandeur ne donne aucune précision sur les tâches qu'il a exécutées en tant que directeur général.
Il s'est ainsi approprié un titre et une fonction qu'il n'a jamais eus, ce qui constitue une faute.
« Des documents établissant que vous avez souscrit pour vous-même, sans aucune autorisation de la direction, une mutuelle de prévoyance santé auprès du B, en faisant payer les cotisations par la société A ».
L'employeur démontre ce grief par la production du justificatif de la prévoyance souscrite auprès du B et du chèque correspondant d'un montant de 1.644,10 euros tiré sur le compte de la société A pour l'année 2013 et de 1.705,90 euros pour l'année 2012.
Le demandeur soutient que ce contrat existait depuis plusieurs années et avait été souscrit avec l'autorisation de Madame PE-RO..
Le dossier comporte une attestation établie par cette dernière ainsi libellée :
« Je n'ai jamais permis ou autorisé Monsieur SI. à faire prendre en charge sa mutuelle par l'entreprise ».
Ainsi qu'il a été précisé supra, le demandeur, en sa qualité de directeur financier, bénéficiait d'une procuration sur les comptes bancaires de la société, de sorte qu'il a pu établir et signer les chèques correspondant sans passer par Madame PE-RO..
Ce grief sera dès lors retenu.
Il résulte des éléments ci-dessus développés que Monsieur d. SI. a commis des fautes professionnelles consistant en des négligences, des manquements et une exécution défectueuse du travail eu égard à ses fonctions de directeur financier ; certaines carences ayant d'ailleurs entraîné des pénalités de retard pour l'employeur.
En effet, le site de l'Apec définit le directeur financier de la manière suivante :
« Le directeur financier supervise l'ensemble des fonctions comptabilité, gestion, trésorerie, fiscalité et communication financière. Il pilote la stratégie financière et budgétaire de l'entreprise, la politique d'investissement et de développement des directions, en visant des gains de compétitivité. ».
L'ensemble des explications développées ci-dessus justifie dans ces circonstances le licenciement pour faute grave de Monsieur d. SI..
Il sera également débouté de ses demandes financières subséquentes.
4 - Sur le caractère abusif du licenciement
Tout licenciement fondé sur un motif valable peut néanmoins présenter un caractère abusif si le salarié, auquel incombe la charge de cette preuve, démontre que l'employeur a méconnu certaines dispositions légales lors de la mise en œuvre de la rupture ou si les conditions matérielles ou morales de sa notification présentent un caractère fautif ou révèlent une intention de nuire ou la légèreté blâmable de l'employeur.
Un licenciement peut être considéré comme abusif (qu'il ait été reconnu valable ou non) si l'employeur a avancé pour le justifier un faux motif, c'est-à-dire un motif qui n'était pas le motif réel qui l'a conduit à prendre cette décision et qui voulait « tromper », ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
L'analyse qui précède a permis de constater que le grief énoncé dans la lettre de licenciement s'est avéré fondé.
Pour autant le motif fallacieux se caractérise par la fausseté du grief invoqué combinée à la volonté de tromperie et de nuisance de celui qui l'invoque.
Le Tribunal relève à ce titre que Monsieur d. SI. est défaillant dans l'administration de la preuve. Il ne démontre pas avoir été licencié pour une autre cause que celle énoncée dans la lettre de licenciement.
Dès lors, aucune faute de l'employeur ne pouvait ouvrir droit à l'indemnisation d'un préjudice matériel et financier résultant du licenciement.
Monsieur d. SI. invoque également les circonstances brutales et vexatoires du licenciement.
Il apparaît que le salarié a fait l'objet d'une mise à pied suivant courrier remis en main propre puis envoyé en recommandé avec accusé de réception en date du 20 septembre 2013, en ces termes :
« Monsieur,
À la suite du changement d'actionnariat de la SAM A, la connaissance que j'acquiers depuis plusieurs semaines du fonctionnement comptable de la société m'interpelle.
Il apparaît notamment que vous avez cessé de payer les organismes sociaux en temps et heure me mettant devant le fait accompli, ce qui vaut à la société d'avoir notamment à supporter des majorations de retard.
De même, la société vient de se voir infliger une amende par les services fiscaux pour défaut de présentation de ses résultats dans le délai légal.
En l'état, j'ai décidé de prononcer une mise à pied à titre conservatoire à votre égard, laquelle prend effet dès la remise de la présente.
Je fixe la durée de celle-ci à quinze jours pour procéder à un contrôle approprié des éléments comptables, temps qui devrait me suffire pour apprécier plus avant l'exacte situation, la gravité des faits avérés ou celle d'autres faits qui pourraient se révéler.
Pendant cette durée, vous ne vous présenterez pas sur votre lieu de travail tout en restant, bien évidemment, soumis à vos autres obligations contractuelles.
Je reviendrai vers vous une fois mon enquête terminée pour vous informer de la décision que j'aurai prise.
Pour l'heure, cette mesure ne s'accompagne d'aucune suspension de votre rémunération. ».
L'employeur reproche ensuite à Monsieur d. SI. de ne pas avoir laissé les clés des armoires de son bureau ; reproche qui ne saurait être retenu dans la mesure où il a été demandé au salarié le jour même de la remise de la lettre de mise à pied de quitter l'entreprise, ce qui a pu avoir un effet déstabilisant pour Monsieur d. SI..
L'enquête menée par l'employeur a permis de découvrir de nombreuses anomalies dans le travail exécuté par le demandeur.
Ce faisant, Monsieur d. SI. ne démontre aucun abus ou légèreté blâmable de l'employeur dans la mise en œuvre du licenciement.
5 - Sur la demande en dommages et intérêts présentée par la société A
L'action en justice représente l'exercice d'un droit qui ne peut dégénérer en abus de droit, sauf la démonstration, non rapportée au cas d'espèce, d'une intention de nuire ou d'une erreur équipollente au dol.
La défenderesse sera dès lors déboutée de ce chef de demande.
Chacune des parties succombant partiellement en ses demandes, chacune d'elle conservera à sa charge ses propres dépens.
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,
statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et après en avoir délibéré ;
Dit que le licenciement de Monsieur d. SI. par la SAM A, repose sur un motif valable et n'est pas abusif,
Déboute Monsieur d. SI. de toutes ses demandes,
Déboute la SAM A, de sa demande reconventionnelle,
Condamne Monsieur d. SI. aux dépens.
Composition🔗
Ainsi jugé par Monsieur Michel SORIANO, Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, Messieurs Nicolas MATILE, Francis GRIFFIN, membres employeurs, Madame Marianne FRASCONI, Monsieur Gilles UGOLINI, membres salariés, et prononcé en audience publique du Tribunal du Travail de la Principauté de Monaco, au Palais de Justice, le dix-neuf octobre deux mille dix-sept, par Monsieur Michel SORIANO, Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, en présence de Messieurs Francis GRIFFIN, Gilles UGOLINI et Madame Marianne FRASCONI, Monsieur Nicolas MATILE étant empêché, assistés de Madame Sandrine FERRER-JAUSSEIN, Secrétaire en Chef.