Tribunal du travail, 29 septembre 2016, Monsieur s. GI. c/ La société A
Abstract🔗
Contrat de travail - Prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur - Harcèlement moral (non) - Effet d'une démission - Préjudice moral (oui)
Résumé🔗
Le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur en raison de son attitude et de ses décisions ainsi que des faits d'harcèlement moral dont il avait été victime de la part de son chef de service. Il demande le paiement d'un complément d'indemnités de rupture ainsi que l'allocation de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral et du préjudice moral subis.
La notion de harcèlement moral est inconnue en droit monégasque mais la responsabilité de l'employeur peut être recherchée à ce titre par application des règles de droit commun (articles 989 et 1231 du Code civil, agissements de toute nature entraînant ou étant susceptibles d'entraîner notamment une dégradation de la santé physique ou mentale de ses salariés, absence de prise des mesures appropriées à l'occasion d'une situation de harcèlement moral ou de difficultés relationnelles entre ses salariés). L'employeur n'est toutefois nullement tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de harcèlement moral, en l'état des dispositions légales monégasques. En l'espèce, l'employeur a été négligent en s'abstenant de mettre en œuvre des mesures appropriées pour tenter de régler le dernier différend ayant opposé le salarié à sa supérieure hiérarchique. Le dernier signalement remontant à plus d'une année, elle ne constitue cependant pas une violation suffisamment grave de ses obligations pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail et permettre de lui imputer la responsabilité de la rupture. La rupture litigieuse s'analyse en conséquence en une démission. Le Tribunal rejette les demandes en paiement de l'indemnité de licenciement, de l'indemnité de préavis et des congés payés sur préavis formées par le salarié.
En l'absence de soutien du salarié par sa hiérarchie dans un contexte ancien mais clairement connu, aggravé par la réaction disproportionnée de l'employeur qui a engagé une procédure inutile de licenciement pour faute grave en dehors de toute volonté d'apaisement, l'intéressé a subi un préjudice moral, réparé par le versement de la somme de 10 000 euros, à titre de dommages et intérêts.
Motifs🔗
TRIBUNAL DU TRAVAIL
AUDIENCE DU 29 SEPTEMBRE 2016
En la cause de Monsieur s. GI., demeurant : « X1 »- X1 à NICE (06200),
demandeur, plaidant par Maître Jean-Charles GARDETTO, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et ayant élu domicile en son Etude,
d'une part ;
Contre :
La société anonyme monégasque A, dont le siège social se situe : X à MONACO (98000),
défenderesse, plaidant par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et ayant élu domicile en son Etude,
d'autre part ;
LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Vu le Jugement du Tribunal du Travail en date du 3 octobre 2013 ;
Vu la requête introductive d'instance en date du 24 février 2014, reçue le 26 février 2014 ;
Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 2 juin 2014 ;
Vu les conclusions déposées par Maître Jean-Charles GARDETTO, avocat-défenseur, au nom de Monsieur s. GI., en date des 10 janvier 2013, 11avril 2013, 31 juillet 2014, 10 avril 2015 et 5 novembre 2015 ;
Vu les conclusions déposées par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de la société anonyme monégasque A, en date des 7 mars 2013, 2 mai 2013, 6 février 2014, 18 décembre 2014 et 11 juin 2015 ;
Après avoir entendu Maître Jean-Charles GARDETTO, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, pour Monsieur s. GI., et Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, pour la société anonyme monégasque A, en leurs plaidoiries ;
Vu les pièces du dossier ;
* * * *
s. GI. a été employé par la société anonyme monégasque A à compter du 1er janvier 2007, suivant contrat à durée indéterminée, en qualité de rédacteur au service juridique.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 3 janvier 2011, celui-ci a informé l'employeur qu'il prenait acte de la rupture du contrat de travail en raison de son attitude et ses décisions ainsi que des faits d'harcèlement moral dont il avait été victime de la part de son chef de service, S. TA., tout en précisant que la rupture, qui s'analyse en un licenciement abusif, prendrait effet le jour de la présentation du courrier recommandé.
s. GI. a, ensuite d'un procès-verbal de défaut en date du 8 octobre 2012, attrait la SAM A devant le bureau de jugement du Tribunal du Travail à l'effet d'obtenir sa condamnation au paiement de :
- compléments d'indemnité de préavis, de congés payés sur préavis, d'indemnités de licenciement et de congés payés, primes et avantages inclus, compte tenu de son ancienneté, la somme 1.700 euros au titre de la perte subie sur la valeur nominale de son dépôt lors de la clôture du compte à terme rémunéré qu'il avait ouvert dans les livres de la société A (compte qu'il a été contraint de clôturer à la demande de la banque à la suite de son licenciement), outre une juste indemnisation de la perte de chance subie au titre des intérêts qu'il aurait dû percevoir,
- la somme de 100.000 euros en réparation des préjudices subis du chef de la dégradation de ses conditions de travail et de leurs incidences sur sa santé,
- la somme de 150.000 euros en réparation du préjudice moral, dont le préjudice réputationnel, subi en raison de l'abus commis par l'employeur dans la mise en œuvre du licenciement fondé sur une prétendue faute grave,
- la somme de 14.038,49 euros au titre du préjudice matériel résultant des pertes de salaire subies pendant l'arrêt maladie.
Selon jugement avant-dire-droit au fond en date du 3 octobre 2014, ce Tribunal a :
- sursis à statuer sur les demandes formées par s. GI. dans l'attente de la décision définitive à intervenir concernant l'accident du travail déclaré par ce dernier,
- débouté s. GI. de sa demande en paiement de dommages-intérêts, de sa demande d'enquête et de sa demande de communication de son dossier personnel,
- enjoint à la société anonyme monégasque A de produire à l'audience du 7 novembre 2013 l'intégralité du rapport d'audit (y compris ses pièces jointes) réalisé par la société C et du compte rendu des réunions des 15 décembre 2008 et 23 août 2010,
- réservé les dépens en fin de cause.
Par arrêt du 20 septembre 2013, devenu définitif, la Cour d'appel a notamment confirmé le jugement du Tribunal de première instance en date du 14 juin 2012 - lequel avait considéré que les troubles présentés par s. GI. suivant avis d'arrêt de travail du 20 juillet 2010 ne constituaient pas un accident du travail - et a déclaré sans objet la demande de condamnation de dommages-intérêts formée par s. GI..
Suivant procès-verbal de défaut en date du 2 juin 2014, s. GI. a attrait la société anonyme monégasque A devant le bureau de jugement du Tribunal du travail à l'effet d'obtenir sa condamnation à lui payer les sommes suivantes :
- 70.000 euros en remboursement des frais engagés pour faire valoir ses droits au titre du contrat de son contrat de travail dans les différentes instances qu'il a dû engager ou dans le cadre desquelles, ayant été lui-même été assigné en référé par la société A, il a dû assurer sa défense,
- 75.000 euros en réparation du préjudice moral subi à l'occasion des multiples procédures qu'il a dû engager ou auxquelles, assigné, il a dû se défendre,
Et après actualisation de ses demandes en raison de l'attitude dilatoire de la société A:
- 7.468,80 euros bruts à titre d'indemnité de licenciement, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Tribunal du Travail par lettre du 29 mai 2012,
- 11.672 euros bruts à titre d'indemnité de préavis, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Tribunal du Travail par lettre du 29 mai 2012,
- 1.167,20 euros bruts au titre des congés payés sur préavis, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Tribunal du Travail par lettre du 29 mai 2012,
- 1.718,10 euros au titre de la perte subie sur la valeur nominale de son dépôt lors de la clôture du compte à terme rémunéré qu'il avait ouvert dans les livres de la société A, compte qu'il a été contraint de clôturer à la demande de la banque suite à son licenciement, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Tribunal du Travail par lettre du 29 mai 2012,
- 1.500 euros au titre de la perte de chance de percevoir des intérêts et de bénéficier d'une hausse du cours de la devise britannique, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Tribunal du Travail par lettre du 29 mai 2012,
- 100.000 euros en réparation des préjudices subis du chef de la dégradation de ses conditions de travail et de leurs incidences sur sa santé, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Tribunal du Travail par lettre du 29 mai 2012,
- 150.000 euros en réparation du préjudice moral (dont le préjudice réputationnel) subi en raison de l'abus commis par l'employeur dans la mise en œuvre du licenciement fondé sur une prétendue faute grave, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Tribunal du Travail par lettre du 29 mai 2012,
- 14.038,49 euros au titre de son préjudice matériel résultant des pertes de salaires subies pendant son arrêt maladie, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du Tribunal du Travail par lettre du 29 mai 2012.
Il a également sollicité la communication de nouveaux documents de fin de contrat (certificat de travail, attestation Pôle Emploi, solde de tout compte), sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard.
Dans le dernier état de ses écritures judiciaires, s. GI. demande au Tribunal d'ordonner la jonction des instances, de constater que la société A s'obstine sciemment à refuser de produire les comptes rendus des réunions des 15 décembre 2008 et 23 août 2010 ainsi que le rapport d'audit de la société C (pièces jointes comprises) et d'en tirer toutes conséquences de droit, notamment, en accueillant comme sincères et véritables les comptes rendus qu'il verse aux débats pour les réunions des 13 juin 2008 (Pièce n° 22), des 2 et 15 décembre 2008 (Pièces n° 60 et 131). Il a maintenu ses autres prétentions mais a finalement sollicité la somme de 6.292 euros au titre de son préjudice matériel résultant des pertes de salaire subies pendant son arrêt maladie, avec intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2012.
Au soutien de ses demandes, s. GI. fait valoir pour l'essentiel, étant précisé que pour un plus ample exposé de ses moyens et arguments, il est expressément renvoyé aux différents jeux de conclusions :
- après avoir été employé par la société B à Monaco à compter de l'année 2000, il a dû quitter son poste à la suite d'un licenciement économique fin 2006 (alors très apprécié par sa hiérarchie en la personne de Rob BR., lequel a souhaité lui établir une lettre de recommandation ainsi qu'une attestation dans la présente instance et témoigne de ce qu'il a été apte à assurer la responsabilité d'un service juridique dès l'année 2006),
- il a été embauché le 1er janvier 2007 par la société A en qualité de rédacteur juridique au sein du service devenu Direction des affaires juridiques, dont la responsable était Madame Michèle SA. OY., les relations de travail à cette époque étant cordiales et l'ambiance agréable,
- en mai 2008, Madame SA. OY. a été remplacée par S. TA. et suite à cette arrivée, les conditions de travail au sein du service et plus particulièrement les siennes se sont rapidement détériorées,
- sa nouvelle responsable a, de manière persistante et injustifiée, remis en cause son travail et ses compétences, n'hésitant pas à l'humilier à la moindre occasion et à déformer ses propos pour tenter de l'isoler de ses collègues,
- celle-ci avait d'ailleurs indiqué à sa nouvelle équipe que ceux qui voulaient partir pouvaient le faire, ce qui a retiré toute motivation à ses collaborateurs et leur a transféré son propre stress,
- dans ce climat d'hostilité, son état de santé s'est peu à peu dégradé ainsi qu'en attestent ses collègues et ses amis,
- il a tenté d'y remédier par des séances d'acupuncture et d'ostéopathie,
- la direction de la société A a été informée à plusieurs reprises et alertée des faits survenus au sein de la Direction des affaires juridiques,
- le 5 mars 2009, il a avisé le médecin du travail de ses problèmes relationnels avec sa supérieure hiérarchique,
- dès la fin de l'année 2008, à l'occasion d'une altercation entre Madame TA. et Madame PE. à l'issue de laquelle cette dernière s'était vue infliger un avertissement, il avait informé sa supérieure des répercussions sur son état de santé de la situation du service,
- après plusieurs réunions sans effet tenues en mai-juin 2008 et décembre 2008, la direction de la société A a prévu une procédure d'alerte aux termes de laquelle chaque salarié devait faire remonter immédiatement à la Direction des ressources humaines tout problème,
- cette procédure avait été mise en place par Monsieur BA., Directeur des ressources humaines, inquiet de découvrir, lors de la réunion du 15 décembre 2008, huit mois d'historique négatif de ce service dont le Secrétaire général ne l'avait pas avisé,
- Madame TA. a persisté dans ses méthodes et la direction de la société A n'a pas souhaité prendre les mesures appropriées pour mettre un terme à ses agissements,
- il a craqué le 19 juillet 2010 après deux ans de lutte, brimades et humiliations incessantes de sa responsable qui ont eu raison de sa santé psychologique,
- il a sombré dans une profonde dépression suite à une ultime « crise » de sa supérieure hiérarchique,
- son psychiatre l'a placé en arrêt de travail, après avoir envisagé de l'hospitaliser, puis ses arrêts ont été renouvelés jusqu'au 3 janvier 2011 avec prescription d'antidépresseurs pour la première fois de sa vie,
- informée de l'état dépressif de son salarié et prenant conscience des difficultés au sein de la Direction des affaires juridiques, la direction de la société A a fait réaliser un audit ayant pour objet de fluidifier les relations et mieux organiser la charge de travail selon les mots de Monsieur BA. (ce qui prouve l'existence d'un problème relationnel inhérent à la personne de Madame TA.),
- alors qu'il était en maladie, il a avisé son employeur de ses arrêts de travail et a sollicité un reclassement dans un autre service où il ne serait plus placé sous l'autorité hiérarchique de Madame TA., laquelle était responsable de sa dépression,
- face au refus de la défenderesse, il a été contraint de prendre acte de la rupture de son contrat de travail par courrier recommandé avec accusé de réception du 3 janvier 2011,
- en dépit de toute ambiguïté quant à sa décision et dans la rédaction de la lettre en ce sens, la société A a prétexté un abandon de poste et, après avoir organisé un simulacre de conseil de discipline (auquel malade il n'a pas eu le droit de se faire représenter par son avocat), l'a licencié par courrier du 22 février 2011 pour faute grave,
- les faits en cause sont constitutifs du délit pénal de violences et voies de fait qui peuvent être psychologiques, de l'infraction de violences psychologiques introduites par loi du 29 juillet 2011 ainsi que du délit pénal de harcèlement moral, objet d'un projet de loi,
- ils constituent également une faute civile engageant la responsabilité de son auteur,
- pour que le harcèlement moral soit caractérisé il faut que les agissements soient de nature à entraîner une dégradation des conditions de travail du salarié,
- il a bien été victime de tels agissements, Madame TA. ayant instauré un climat particulièrement stressant et hostile,
- des problèmes organisationnels sont aussi survenus en raison d'une difficulté de positionnement de sa nouvelle responsable,
- dès son évaluation de la fin de l'année 2008, il a pris le soin de souligner entre autres lesdites difficultés de positionnement et leurs répercussions sur ses conditions de travail,
- lors la réunion du 13 juin 2008 organisée après d'autres pour tenter de remédier aux problèmes rencontrés, M. GA. a établi un document dont il ressort de nombreuses difficultés relationnelles et un manque cruel de communication ainsi qu'un manque de confiance engendrant un stress généralisé,
- bien que des solutions aient été envisagées, la situation ne s'est pas améliorée,
- au contraire, Madame TA. a pris des mesures de contrôle très étroit du travail de ses collaborateurs en leur rappelant de manière incessante les procédures de gestion des demandes,
- elle allait même jusqu'à exiger de savoir où chacun se trouvait lorsqu'il quittait son bureau y compris pour se rendre aux toilettes,
- lors de la crise du 16 octobre 2008, deux demandes lui avaient été transférées par Madame TA. mais il avait laissé une collègue répondre à l'une d'elles (comme cela se pratiquait habituellement), si bien que sa supérieure lui a rappelé d'un ton sec et agressif qu'elle devait être informée lorsqu'il se permettait de transférer une demande, lui a opposé qu'elle avait des méthodes de travail et lui a fait sentir son infériorité (très choqué, il a rédigé un courrier électronique relatant ces faits),
- après cet incident, il a subi de très nombreuses critiques, Madame TA. n'hésitant pas à remettre en cause son travail déjà validé par Madame JO. (supérieure hiérarchique de Madame TA.), notamment pour un contrat d'apporteur d'affaires, qui a donné lieu à une violente critique,
- ce n'est pas seulement son travail qui a été remis en cause mais son organisation et ses capacités, comme lors de l'évaluation réalisée le 15 janvier 2009,
- il s'est senti humilié par de telles remarques tandis qu'il accomplissait des tâches lourdes au prix d'un investissement maximal,
- il lui était reproché un manque d'autonomie alors que toute prise d'initiative aboutissait à une remontrance,
- la remise en question de ses qualités rédactionnelles, de son organisation et des avis qu'il émettait est d'autant plus incompréhensible que son aisance sur ce point a toujours été louée et qu'il a géré seul le service juridique de la société B durant presque toute l'année 2006,
- il existe même une contradiction avec l'évaluation de Madame SA. OY. pour les premiers mois de l'année 2008 et l'année 2007,
- Madame TA. lui intimait des ordres d'un ton froid et sec pour le rabaisser et l'humilier devant ses collègues, ou lui demander des tâches déjà réalisées,
- comme si elle cherchait à nuire à ses collaborateurs, Madame TA. se plaisait à déléguer des tâches à la dernière minute, ce qui ne permettait pas une bonne connaissance des dossiers,
- le 14 novembre 2008, elle lui a, par exemple, demandé de se rendre à une réunion une demi-heure plus tard sans préparation, en sorte qu'il a refusé tout comme une autre de ses collègues,
- sa responsable pouvait agir en contradiction totale avec des directives qu'elle avait données antérieurement,
- sa supérieure a exigé de manière particulièrement agressive et humiliante qu'il justifie son absence à une réunion du 20 janvier 2009 en dehors de ses heures de travail, alors qu'il avait prévenu plusieurs semaines à l'avance qu'il ne pourrait y assister pour raison médicale,
- cet incident a fait l'objet d'un rapport dans le carnet de bord de la Direction des affaires juridiques et a été répercuté à Monsieur BA.,
- il s'est seul vu reprocher d'avoir osé noter, dans les commentaires de son évaluation pour l'année 2009, « la surcharge de travail induite par la réorganisation imminente du service », bien que d'autres de ses collègues aient fait une réflexion similaire,
- il a subi une attitude dure, injustifiée, et s'est ainsi vu refuser ses congés d'été le 22 juin 2010 au motif qu'une collègue était absente aux mêmes dates (sans que cette circonstance n'ait jamais été prise en compte), tandis qu'aucune discussion n'a été possible, s. TA. étant proche de la crise de nerfs,
- cette dernière lui reprochait régulièrement des choses dont il n'était pas à l'origine et éclatait en sanglots comme pour le mettre encore plus mal à l'aise, notamment le vendredi 2 juillet 2010 à 18 heures 30 (après lui avoir reproché son retard au rendez-vous du pédiatre de sa fille),
- il s'est ouvert à propos de cet énième incident, le soir même, auprès de Madame JO. avec laquelle un entretien a été convenu mais qui a effacé l'historique de ses messages pour que les faits qu'il a relatés n'y figurent plus,
- Madame JO. n'a pu lui apporter aucune réponse si ce n'est de s'expliquer avec S. TA.,
- il a informé Monsieur BA. de cet évènement (ainsi qu'il avait été convenu en décembre 2008), ce qui lui a été violemment reproché par Madame JO. qui l'a menacé d'avertir l'intéressée,
- le 19 juillet 2010, alors qu'il rentrait de congé, S. TA. n'a pas répondu à son bonjour et a fait preuve d'une totale indifférence à son égard,
- elle l'a ensuite convoqué pour lui faire des reproches sur un dossier pour lequel il s'était particulièrement investi, prétendant avoir dû le refaire entièrement (les modifications réalisées étant pourtant minimes),
- elle a pris un malin plaisir à lui adresser des demandes prioritaires avec des délais très réduits même s'il avait 250 mails en attente, sans manquer de lui faire des griefs pour l'inscription à une formation dont il avait eu connaissance le jour même,
- cette attitude s'est poursuivie toute la journée avec de multiples convocations,
- n'en pouvant plus, il est allé consulter le docteur RO., psychiatre, qui a constaté un mal être profond, l'a placé en arrêt maladie et a prescrit des antidépresseurs,
- ces agissements répétés ont porté atteinte à ses droits, à sa dignité, à sa santé et à sa carrière, tandis que la dégradation de son état de santé est établie,
- dès le 29 juin 2010, il a alerté la déléguée du personnel,
- le docteur RO. a établi, outre les arrêts de travail, une attestation le 21 décembre 2010 qui confirme la réalité du harcèlement moral,
- le docteur B. expert désigné fin 2010 dans le cadre de la procédure d'accident du travail est affirmatif, de même que de nombreux médecins, un ostéopathe, une psychologue clinicienne et un pneumologue,
- sa dépression a été reconnue par le jugement du Tribunal de première instance du 14 juin 2012 qui a rejeté sa demande au motif qu'il était atteint d'une maladie mais n'avait pas fait l'objet d'un accident, le lien ayant pourtant bien été fait avec ses conditions de travail,
- l'impact des agissements de sa supérieure hiérarchique sur la dégradation de son état de santé (débutée avec l'arrivée de S. TA.) est incontestable,
- dès le mois de janvier 2009, il a été suivi par un médecin acupuncteur et un ostéopathe et verse aux débats de nombreuses attestations de ses amis, collègues, voisins et famille établissant l'évolution de son état de santé,
- la défenderesse est restée inactive, en violation à son obligation de bonne foi et à son obligation de sécurité de résultat,
- elle a été informée à de nombreuses reprises des difficultés qui existaient au sein de la Direction des affaires juridiques,
- plusieurs réunions ont eu lieu notamment les 13 juin 2008, 2 décembre 2008 et 15 décembre 2008,
- la réunion du 13 juin 2008 a fait l'objet d'un document de synthèse établi par Madame GA., qui met en lumière les problèmes relationnels avec l'équipe et le manque de communication (soulevés dès la fin de l'année 2008 dans son évaluation),
- celle du 2 décembre 2008 a donné lieu à un compte-rendu signé par lui et par Madame GA. après l'avertissement infligé à une collaboratrice (ensuite annulé par la direction, propos déformés),
- la réunion du 15 décembre 2008 organisée à la demande de Monsieur BA., à laquelle assistait l'ensemble des membres de la Direction des affaires juridiques, a permis d'évoquer les problèmes de positionnement de Madame TA. et de Madame JO. ainsi leurs conséquences sur les conditions de travail, les difficultés d'intégration de Madame TA. (ses collaborateurs ayant souligné son manque d'intérêt pour le travail, son caractère inadapté et ses méthodes de travail, le dénigrement dont ils faisaient l'objet, la déformation de leurs propos pour les monter les uns contre les autres, les problèmes de stress mal vécus),
- S. TA. a perdu son calme et fait une crise de nerfs, si bien que Monsieur BA. a proposé une médiation, le prononcé du mot « nounours » pour calmer la situation en cas de difficulté et la tenue d'un carnet de bord sur lequel les problèmes seraient consignés,
- le Tribunal appréciera le caractère dérisoire des mesures et la circonstance que la Direction de la société A était avisée de la situation ainsi que des agissements de S. TA.,
- après son départ, de nouvelles réunions sont intervenues dont une le 23 août 2010 suite à la réception de son courrier du 16 août 2010 informant la société A de son état de santé,
- ont été convoquées Mesdames PE. et GA. qui ont confirmé le harcèlement moral qu'il dénonçait dans sa correspondance (« elle a un relationnel de chiote et de toute façon, il n'y a pas de fumée sans feu »),
- pour une raison inexpliquée, la Direction des ressources humaines n'a jamais adressé de compte-rendu aux participants des nombreuses réunions,
- l'employeur doit mettre le salarié en mesure de travailler dans un environnement sûr et lui procurer une sécurité réelle contre les risques d'accidents et de maladies professionnelles, et à défaut, il engage sa responsabilité sans même qu'il y ait lieu de prouver une faute de sa part,
- la défenderesse n'a pris aucune véritable mesure malgré sa parfaite connaissance des difficultés (procès-verbal d'audition de Monsieur BA. par la Sûreté Publique suite à l'accident du travail dont il a été victime),
- la société A a attendu que l'un de ses employés soit victime d'une grave dépression pour essayer de comprendre ce qui se passait et commander un audit, les termes de la mission en témoignant,
- la carence de l'employeur à assurer sa sécurité ou à prendre les mesures pour mettre fin au harcèlement moral l'a contraint à prendre acte de la rupture du contrat de travail compte tenu du refus de le reclasser, en sorte qu'elle sera requalifiée en licenciement sans motif et abusif,
- il a écrit au mois d'octobre 2010 pour témoigner de son attachement à la société A et son espoir de voir les difficultés se résorber, mais n'a reçu aucune réponse,
- son conseil a, le 9 octobre 2010, sollicité soit une reprise de son poste après déplacement de Madame TA., soit un autre poste équivalent compatible avec ses compétences hors de la sphère d'influence de cette dernière,
- la défenderesse lui a opposé une fin de non-recevoir et l'a placé en demi-salaire,
- c'est à bon droit qu'exerçant son droit de retrait, il n'a pas exécuté son préavis compte tenu des risques que lui faisait courir sur sa santé un maintien dans l'entreprise,
- subsidiairement, son licenciement est intervenu en violation de l'article 25 de la Convention collective nationale des banques qui prévoit une obligation de reclassement pour le salarié en mauvais état de santé,
- son absence était due à son état de santé lequel ne lui permettait plus d'occuper son poste,
- la société A devait chercher à le reclasser, ce qu'il a refusé fautivement (offre interne d'emploi du 29 juin 2010 demeuré sans suite puis demande du 9 octobre 2010),
- l'employeur s'est contenté de constater l'absence de reprise du travail pour le congédier en contrevenant aux dispositions de l'article 32 alinéa 1er de ladite convention collective, alors que son absence était due à un mauvais état de santé passager médicalement constaté,
- à titre infiniment subsidiaire, son congédiement est abusif puisqu'il a été décidé à l'issue d'un Conseil de discipline tenu en violation de ses droits de la défense,
- souffrant d'une pneumonie et sous assistance respiratoire, il n'a pu assister au Conseil de discipline et n'a pu être représenté par son avocat,
- ses demandes indemnitaires sont justifiées dès lors qu'il a subi deux années de harcèlement sans que la défenderesse ne prenne les mesures appropriées, puis a été accusé d'abandon de poste,
- la société A n'hésite pas à le diffamer dans ses conclusions dans le cadre de la procédure d'accident du travail et d'une procédure l'opposant à un autre salarié,
- il a continué à consulter un psychiatre, à suivre un traitement au cours de l'année 2011 et à subir des séances d'ostéopathie,
- épuisé, il est tombé gravement malade en mars 2011, a dû être hospitalisé et placé sous oxygène pour une pneumonie en raison de sa grande faiblesse résultant des agissements successifs de Madame TA. puis de la défenderesse,
- il a été contraint à un mois d'arrêt de travail alors qu'il était en période d'essai chez un autre employeur qui aurait pu ne pas le conserver,
- il a subi un préjudice moral et réputationnel avec un simulacre de Conseil de discipline et un licenciement,
- la société A a clôturé (malgré son opposition) son compte de dépôt à terme en livres sterling d'autorité même s'il pouvait être conservé aux conditions des autres clients,
- il a perdu 1.700 euros outre les frais d'encaissement et perdu une chance de percevoir des intérêts et de bénéficier d'une hausse de la devise britannique,
- il a été placé en demi-salaire le 12 août 2010 de manière injustifiée dans la mesure où il convient de tenir compte de son ancienneté dans la profession (année 2000) pour appliquer les dispositions de l'article 52 alinéa 1er de la convention collective,
- il avait donc droit à un plein traitement durant 3 mois à compter du 20 juillet 2010, puis, compte tenu de ses 10 ans d'ancienneté à cette date, à un nouveau mois à plein traitement,
- les indemnités de prévoyance ne se substituent pas aux obligations de paiement du plein salaire par l'employeur, tandis que le décalage dans le temps lui a été préjudiciable,
- il confirme avoir reçu la somme de 9.438,55 euros soit 1.573 euros par mois si bien qu'il lui reste dû une somme de 6.292 euros,
- la défenderesse n'a pas respecté l'injonction de communiquer résultant du jugement du 3 octobre 2013, puisqu'elle produit certaines annexes du rapport de la société C et pas d'autres (après avoir prétendu qu'il n'en existait pas ; procédure française encore en cours devant la Cour de Cassation), ne produit pas les synthèses intégrales des séances de travail collectives (ou la séance de travail individuelle de Céline PAS.), ni les comptes rendus des réunions du 15 décembre 2008 et 23 août 2010,
- il verse pour sa part aux débats le rapport d'audit incomplet de la société C,
- il convient de noter que l'huissier français avait constaté la présence d'une boite à archives portant la mention de la société A que la gérante de la société C a refusé d'ouvrir, ce qui sous-tend que son contenu était important ou sensible,
- le rapport d'audit démontre l'existence de difficultés inextricables au sein de la Direction des affaires juridiques : un problème relationnel et comportemental qui transcende les simples problèmes organisationnels et de surcharge de travail comme l'avait mentionné Monsieur BA. devant les services de police,
- l'audit lorsqu'il utilise, le 8 septembre 2010 (deux mois après son arrêt de travail pour dépression), les termes « clarifier les rôles de chacun pour améliorer le fonctionnement global de l'équipe », établit qu'il existe une confusion des rôles de chacun dans l'équipe laquelle créée des dysfonctionnements, « optimiser l'organisation du service et son fonctionnement » met en évidence que le service est désorganisé et fonctionne mal, « développer les synergies et la confiance afin de renforcer le mode collaboratif au sein des équipes » note le manque de confiance chronique ainsi qu'une absence de mise en commun des moyens qui ont pour corollaire une mauvaise coopération avec les autres services de la banque, « les objectifs de la démarche étant de garantir le maintien de la qualité des activités au sein du service » relève que la qualité des activités du service est mauvaise et pas au niveau escompté, « renforcer la qualité des relations au sein de l'équipe, afin que chacun puisse accompagner ses missions dans un climat serein » souligne une absence de sérénité patente ainsi qu'une ambiance et un relationnel de mauvaise qualité,
- il est également précisé que le manager n'est apparemment pas en position de leadership, ne s'engage pas et ne suscite pas l'engagement ou l'adhésion de ses collaborateurs,
- aux termes de la synthèse de travail collective du 2 décembre 2010, en fin d'audit, « la communication s'est améliorée », « l'équipe est en cours de construction », « l'échange d'informations est structuré », ce qui permet de comprendre a contrario l'état préexistant du service, tandis que la solidarité doit être renforcée vis-à-vis du responsable (ce qui confirme les difficultés décrites par ses soins) et que la « notion d'appartenance reste à construire »,
- il est impensable que Monsieur BA. n'ait pas établi de compte-rendu de la réunion du 23 août 2010, tandis que le Tribunal en tirera les conséquences,
- en tout état de cause, les pièces communiquées sporadiquement renforcent davantage les plaintes qu'il a exprimées et conduisent à considérer que la responsabilité de la société A est engagée,
- la synthèse de la séance de travail du 22 septembre 2010 de Madame PE. montre les méthodes de travail de Madame TA. qui, après avoir confié à l'un de ses collaborateurs un contrat à analyser, recommence elle-même le processus, ce qui procède d'un manque de confiance dans ses collaborateurs et engorge le service,
- de même, Madame PE. suggère, sur l'activité consultation/conseil, de « revoir la répartition et la distribution des dossiers » et de « revoir la cohérence du processus de validation », tout en notant un besoin de back up pour les activités successions, mise sous protection judiciaire, saisies arrêts, réquisitions services fiscaux, ces remarques révélant un manque d'organisation et de sécurité juridique au sein du service,
- la synthèse de la séance de travail de Madame GA. fait part de « gros problèmes de communication, tensions dans l'équipe, climat anxiogène », ce qualificatif d'anxiogène étant également utilisé par Madame PE. dans son courriel du 11 décembre 2008 et dans celui du demandeur à Madame JO. du 2 juillet 2010,
- la synthèse de travail de Madame TA. dévalorise à nouveau les compétences du demandeur, lesquelles ont pourtant été reconnues à la société B et l'ont à nouveau été à la société K,
- les témoignages de Messieurs VI., SA. et BR. RU. viennent encore confirmer l'évolution de l'atmosphère ou des conditions de travail liée à la personnalité et au comportement de S. TA.,
- les échanges de mails entre C. PE., M. GA. et lui-même sont également édifiants sur le harcèlement moral exercé,
- l'attestation de Monsieur BA. doit être déclarée nulle puisqu'elle n'indique pas qu'elle a été établie en vue de sa production en justice et qu'une fausse attestation expose le témoin à une sanction pénale,
- les écrits de la société A sont injurieux et portent atteinte à son honneur et à sa réputation, ce qui ne fait que raviver ses plaies de victime,
- il a invité Madame TA. à déjeuner le 26 avril 2010 pour lui faire part de la surcharge de travail qui n'avait fait qu'empirer après le départ de Monsieur BR. outre qu'il avait une invitation à lui rendre, mais cette dernière n'a fourni ni réponse ni solution,
- il a envoyé un courrier électronique à S. TA. après l'accident de la route de celle-ci par empathie et parce qu'il s'était persuadé qu'en étant gentil et serviable, en mettant de la bonne volonté, il contribuerait à l'amélioration de ses conditions de travail,
- il n'a pas eu de cabale des anciens contre les nouveaux comme le prétend l'employeur,
- ce ne sont pas des facteurs externes au service qui ont impacté l'activité mais des facteurs internes,
- la société A produit une note sur la fermeture des portes du service mais n'apporte pas de réponse sur le caractère policier de la surveillance de Madame TA.,
- il y a lieu de rejeter toute assimilation sournoise et erronée avec le dossier BR. qui a été licencié pour insuffisance professionnelle,
- il ne peut être tiré argument de sa candidature le 29 juin 2010 au poste de responsable du service entrée en relation et documentation,
- il était prêt à travailler dans n'importe quel service compte tenu de la dégradation de ses conditions de travail, son seuil de tolérance étant largement dépassé (sensibilité compliance marginale dans son parcours professionnel),
- la défenderesse a refusé de se déplacer à l'audience de conciliation et n'a pas mandaté son conseil pour se présenter, cette attitude méprisante devant être sanctionnée,
- le total cumulé des frais et honoraires qu'il a dû exposer dépasse la somme de 70.000 euros réclamée,
- la demande de dommages-intérêts de la société A sera rejetée car elle est fantaisiste et manifestement disproportionnée.
Aux termes de ses écritures judiciaires, la société anonyme monégasque A demande au Tribunal d'ordonner la jonction des deux instances, de débouter s. GI. de l'intégralité de ses prétentions, de l'autoriser à verser aux débats les relevés de compte du demandeur sur lesquels figurent les indemnités journalières reçues de la CCSS qui lui ont été virées du 14 août 2010 au 3 janvier 2011, de condamner le salarié à lui verser la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et vexatoire.
Elle soutient pour l'essentiel, référence étant faite expressément pour le surplus à ses conclusions :
- s. GI. laisse entendre qu'elle dissimulerait certaines pièces, ce qui est inexact,
- le compte-rendu de la réunion du 13 juin 2008 produit par le demandeur n'a rien d'officiel, est manuscrit, établi sur papier libre et aurait été rédigé par Madame GA., sans comporter aucun visa ou signature,
- le compte-rendu de réunion du 2 décembre 2008 aurait été rédigé par le salarié et Madame GA., qui l'ont signé et paraphé, mais n'a pas été validé par le Directeur des ressources humaines qui n'en a pas eu connaissance, étant souligné qu'il ne s'agissait pas d'une réunion mais d'un entretien informel entre eux et Monsieur BA.,
- ces documents ne peuvent avoir en définitive aucune valeur,
- les rencontres des 15 décembre 2008 et 23 août 2010 n'ont pas fait l'objet d'un compte-rendu par la Direction des ressources humaines,
- devant la Sûreté Publique, Monsieur BA. n'a jamais évoqué l'existence d'un écrit retranscrivant ses échanges avec des collaborateurs,
- elle ne peut donc verser aux débats un document inexistant et ne peut apporter de preuve négative,
- par ailleurs, s. GI. a oublié d'aviser la juridiction des actions entreprises en France au sujet de la communication du rapport d'audit de la société C, et a demandé au Tribunal du Travail d'enjoindre à son ancien employeur de communiquer des pièces dont il était déjà en possession,
- il n'existe plus d'intérêt à rappeler le risque né de la divulgation du contenu des travaux en cause (informations confidentielles à protéger concernant ses collaborateurs), le demandeur ayant versé aux débats le rapport en cause sans attendre la décision de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence rendue le 2 octobre 2014 et devant assumer le cas échéant toute difficulté qui pourrait résulter de ce choix,
- il n'existe pas d'annexes au sens propre, le document qui lui a été restitué étant identique à celui en possession du salarié,
- trois rendez-vous sont intervenus en amont de la « démarche d'optimisation organisationnelle » du service, seule objet du rapport, pour préparer le travail futur et celui en ateliers collectifs,
- le 10 septembre 2010, le Directeur des ressources humaines a organisé une suite de rendez-vous informels (pièce n° 60), lors desquels la société C a présente sa proposition de planification (démarche d'optimisation organisationnelle : l'encadrement, pièce n° 61, l'équipe, pièce n0 62),
- s'agissant de la phase de validation et de lancement de la démarche du prestataire, il n'y a rien de surprenant qu'elle soit intervenue à la diligence de la Direction générale et de celle des ressources humaines puisque l'audit est intervenu dans le cadre général des changements initiés au sein de la banque,
- deux séances de travail ont ensuite eu lieu les 17 et 23 septembre 2010 avec Mesdames JO. et TA.,
- parallèlement, le 22 septembre 2010, Mesdames GA. et PE. se sont entretenues chacune séparément avec le cabinet C,
- elle communique les synthèses concernant Mesdames GA. et PE. (l'une n'étant plus salariée et l'autre ayant donné son aval) qui ne confirment aucunement les allégations de s. GI.,
- elle ne fait ainsi nullement obstruction à la manifestation de la vérité et le Tribunal dispose des éléments suffisants pour apprécier la théorie développée par le demandeur,
- le salarié s'est mis en arrêt maladie le 20 juillet 2010 en arguant, selon son courrier du 16 août 2010, d'un état dépressif provoqué directement par les conditions de travail imposées par sa supérieure hiérarchique et par le harcèlement moral dont il a été victime de la part de cette dernière, tout en prétendant qu'il s'agissait d'un accident du travail,
- elle lui a répondu qu'il lui appartenait de prouver ses dires et qu'à défaut, elle considérerait que les propos étaient diffamatoires et prendrait les dispositions nécessaires pour défendre ses intérêts et ceux de ses collaborateurs,
- en octobre 2010, elle a reçu un courrier agressif du conseil de s. GI. faisant état de revendications salariales résultant d'une différence d'interprétation de la convention collective ainsi que de sa volonté, soit de reprendre son poste à la Direction des affaires juridiques après déplacement de Madame TA., soit un poste équivalent et compatible avec ses compétences hors de la sphère d'action et d'influence de cette dernière, et menaçant, à défaut, de poursuites judiciaires,
- dans sa réponse du 26 octobre 2010, son conseil a relevé qu'il s'agissait d'une véritable tentative de chantage,
- par lettre du 3 janvier 2011, le demandeur a prétendu déduire de ce refus d'accéder à ses exigences une rupture de son contrat de travail,
- le 12 janvier 2011, elle a répondu au salarié en lui demandant d'expliciter ses intentions, en lui rappelant que le dernier arrêt de travail reçu conduisait à une reprise de poste le 4 janvier 2011 et en sollicitant un justificatif de l'absence depuis cette date, faute de quoi l'abandon de poste serait constaté,
- suivant courrier du 17 janvier 2011, le conseil de s. GI. a indiqué que ce dernier avait présenté sa démission forcée, ce qui avait entraîné la rupture du contrat de travail avec effet au 5 janvier 2011, et que depuis cette date le salarié ne faisait plus partie de l'effectif de la société A,
- le 20 janvier 2011, son conseil a précisé que la thèse de la démission forcée n'avait aucun rapport avec la réalité, la banque n'ayant jamais souhaité le départ de s. GI., et que dans sa correspondance du 3 janvier 2011, celui-ci développait une autre thèse, celle du licenciement abusif,
- par lettre du 21 janvier 2011, elle a constaté l'abandon de poste et a avisé le demandeur qu'il serait convoqué devant le Conseil de discipline,
- en dépit de la contestation du salarié, elle a confirmé les termes de ses précédents courriers et a maintenu le 3 février 2011 la convocation devant le Conseil de discipline,
- l'insistance de s. GI. à vouloir faire considérer son contrat de travail comme rompu s'explique par le fait que son soi-disant état dépressif a miraculeusement guéri et qu'il a retrouvé du travail dès le 10 janvier 2011 à la société K (ce qu'elle n'a su qu'après une requête en compulsoire),
- le 22 février 2011, elle a prononcé le licenciement pour faute grave en l'état de l'abandon de poste depuis le 4 janvier 2011,
- le demandeur a joué la comédie de l'accident du travail pour ne plus travailler avec son chef de service pour des raisons caractérielles, qui lui sont imputables, et essaie de faire porter les torts de la rupture du contrat de travail sur la banque,
- l'arrêt de la Cour d'appel du 20 septembre 2013, qui a force de chose irrévocablement jugée, n'a pas seulement dit que les troubles allégués ne procédaient pas d'un accident du travail mais a également démontré qu'ils ne pouvaient être rattachés à des faits de harcèlement, la preuve de leur existence objective n'étant pas rapportée,
- c'est l'inexistence même des faits de harcèlement qui a conduit la Cour à exclure un accident du travail,
- la présente affaire doit être replacée dans son contexte visé en filigrane dans les commentaires du salarié (établis de manière concertée avec Mesdames GA. et PE.) lors de son évaluation annuelle 2008 à travers laquelle il n'évoque aucun problème personnel et relationnel avec S. TA. mais explique que le service a été affecté dans son fonctionnement par une réorganisation interne, comme d'autres services de la banque,
- la crise financière a impacté le métier de banquier, en sorte qu'elle a entrepris en 2008, sous l'impulsion de sa maison mère, une politique de changement,
- il existe donc des facteurs externes au service juridique qui ont pu impacter l'activité et générer des inquiétudes ou du stress pour les collaborateurs,
- la comparaison des organigrammes en témoigne puisque l'ancienne direction des risques et des affaires juridiques dirigée par Madame MO. JO. avec pour subordonnée Madame SA. OY., en qualité de responsable des rédacteurs juridiques a été scindée, entre la direction des risques et du contrôle permanent et la direction des affaires juridiques, Madame SA. OY. ayant été nommée responsable du service analyse des risques crédit et Madame JO. Secrétaire général, Madame TA. ayant été recrutée (regard nouveau avec une personne extérieure) pour prendre la tête de la direction des affaires juridiques rattachée au secrétariat général,
- au cours de son évaluation de l'année 2007, Madame GA. avait émis le souhait de prendre la direction de ce service, tandis que le fait que la nouvelle responsable soit venue de l'extérieur a pu générer des jalousies et/ou incompréhensions de la part de l'équipe en place,
- de même, le demandeur a mal réagi à la nomination d'un nouveau chef de service dont il a rapidement pris le parti de contester l'autorité,
- s. GI. a également postulé sur une offre d'emploi interne le 29 juin 2010 à un poste de responsable du service entrée en relation et documentation, ce qui confirme ses aspirations pour un poste de « compliance », et ne l'ayant pas obtenu, il est tombé malade,
- les tensions évoquées par le demandeur n'avaient aucun caractère personnel, ciblé ou subjectif,
- le 29 juillet 2009, le salarié a écrit à Madame TA. victime d'un accident de la circulation et l'a invitée à déjeuner le 26 avril 2010,
- les commentaires de sa responsable dans son évaluation de l'année 2009 ne comportent aucun mépris ou ne sont pas ceux d'un supérieur harceleur,
- s. GI. a été défendu par sa responsable lors de la plainte d'un client et l'en a remerciée,
- ce dernier a perçu une prime exceptionnelle en 2009 et 2010 en considération de sa contribution personnelle, ce qui contredit l'hypothèse d'un harcèlement, et allègue l'interdiction de sortir alors qu'en réalité, il existait une instruction de la Secrétaire générale sur la fermeture des portes des bureaux,
- dans l'affaire BR. RU., le Tribunal du travail a, aux termes d'un jugement du 31 mai 2012 non frappé d'appel, considéré le licenciement pour insuffisance professionnelle fondé sur un motif valable et non abusif, en soulignant l'absence de démonstration d'une mauvaise ambiance entretenue par la responsable de la Direction des affaires juridiques, a retenu que les propos vexatoires évoqués par s. GI., témoin, faute d'être clairement établis ne pouvaient être appréciés par la juridiction, a relevé l'existence de relations délétères entre E. BR. RU. et sa responsable, S. TA., sans que cela ne puisse être considéré comme un harcèlement,
- les compétences du demandeur n'ont jamais été dénigrées,
- le témoignage de Monsieur VI. est dépourvu de tout caractère probant dès lors qu'il se fait l'écho de ce qu'il a entendu et non constaté personnellement,
- le document remis lors de la réunion de restitution de l'audit de la société C a rappelé que le service était très sollicité par sa transversalité et travaillait à flux tendu, a souligné la surcharge de travail due au contexte économique et à l'absence d'un collaborateur (bascule informatique et nouvelles ressources renforçant l'équipe),
- ce cabinet a mis en avant plusieurs points de force, tandis que les axes à poursuivre ne mettent en évidence aucun des problèmes allégués par le salarié,
- s. GI. extrapole et dévoie ce rapport, étant précisé que Madame PAS. n'a pas fait l'objet d'un entretien individuel puisqu'elle n'était pas salariée au début de l'audit et n'a été intégrée que le 4 octobre 2010,
- Monsieur BA. n'a fait qu'évoquer la pression mise par S. TA. pour respecter les délais impartis, dans un contexte de surcharge de travail, de réorganisation et de crise financière,
- elle a mis en œuvre diverses mesures pour permettre au chef de service de franchir cette période difficile (création d'un poste supplémentaire pour absorber l'accroissement des dossiers, documentation juridique mise à jour et développée),
- la société C n'a pas cherché à dissimuler des informations secrètes, les travaux initiés au sein de la Direction des affaires juridiques ayant été menés dans un mouvement général et non pour résoudre les problèmes invoqués,
- par ailleurs, il ne suffit pas de se sentir harcelé pour qu'une situation de harcèlement moral soit reconnue par le Tribunaux,
- le demandeur prétend tirer argument également d'échanges anodins par courriers électroniques,
- ni Madame GA. ni Madame PE. n'ont jamais fait allusion à un quelconque harcèlement moral,
- les commentaires de l'évaluation de l'année 2009 ne sont empreints d'aucun accent de dévalorisation et ne comportent aucune critique inappropriée, étant relevé que l'évaluation de l'année 2007 réalisée par Madame SA. OY. formulait des réserves sur l'autonomie et évoquait les besoins de formation,
- le harcèlement moral au travail doit être distingué des contraintes et conflits inhérents à toute relation de travail et susceptibles de créer une situation de stress pour le salarié,
- le demandeur ne rapporte pas la preuve de pratiques persécutrices, ni de pratiques relationnelles génératrices d'humiliation ou de perte de confiance en soi par leur excès ou leur répétition, ni de pratiques d'isolement ou encore punitives,
- elle n'a manqué à aucune de ses obligations et a respecté les dispositions de la convention collective s'agissant d'un licenciement disciplinaire,
- à la date de la rupture, s. GI. travaillait déjà pour une autre banque,
- le soi-disant rapport de force instauré n'a consisté qu'en l'exigence du respect du contrat de travail par le demandeur à laquelle son conseil a apporté une réponse aussi outrancière qu'orchestrée par les besoins du salarié d'occuper son autre emploi,
- s'il a été mentionné aux termes du courrier du 12 août 2010 le passage en demi-traitement à compter du 14 août 2010, en réalité, le régime CCSS a été directement appliqué pour un motif favorable à s. GI.,
- en effet, le maintien du demi-traitement aurait généré un revenu inférieur à celui reçu par le jeu du cumul des indemnités journalières avec les indemnités complémentaires perçues au titre du contrat de prévoyance MERCER,
- il s'ensuit que le demandeur a bien obtenu 90 % de son salaire conformément à la convention collective et même plus,
- à compter du 14 août 2010, le salarié a reçu des indemnités journalières CCSS versées sur son compte totalisant 9.485,55 euros ainsi que la somme globale de 3.669,90 au titre du contrat de prévoyance MERCER (pour 78 jours indemnisés, bulletins de paie de janvier et février 2011, soit du 18 octobre 2010 au 3 janvier 2011, compte tenu du délai de carence de 90 jours), et n'a donc subi aucune perte de salaire,
- s. GI. ne peut ignorer que la perte du statut d'agent de la banque engendre celle des conditions tarifaires préférentielles, alors que l'article 1.24 des conditions générales de fonctionnement de tout compte ouvert à la société A prévoit que la banque peut clôturer le compte sans avoir à justifier d'un motif,
- le 8 mars 2011, elle a informé le demandeur qu'elle allait procéder à la clôture sur la base de ces dispositions,
- ce dernier a prétendu qu'elle ne pouvait l'obliger à clôturer ce compte alors même qu'il avait accepté les conditions générales,
- elle a maintenu sa position le 28 mars 2011 et a invité le salarié à faire connaître ses instructions pour ses avoirs, et l'a relancé le 26 avril 2011,
- le conseil français de s. GI. a persisté, le compte a été clôturé le 31 mai 2011 et elle a adressé le 8 juin 2011 deux chèques au demandeur,
- elle n'a commis aucune faute, étant précisé que le dépôt à terme était à échéance du 6 avril 2011 et qu'en l'absence d'instructions, elle n'avait d'autre choix que de procéder à son exécution,
- le salarié soutient avoir subi un préjudice moral pour les différentes procédures ayant opposé les parties mais la seule demande qu'il pourrait présenter concerne les deux instances en cours devant la présente juridiction,
- dans la procédure d'accident du travail, s. GI. a été débouté de ses demandes, et devant la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, a été condamné à verser la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- le demandeur ne peut tenter d'obtenir de ce Tribunal des sommes compensant ses déboires judiciaires, dont il est l'unique responsable,
- le salarié cherche à lui nuire en le contraignant à exposer des frais pour se défendre dans une instance résolument abusive, tandis qu'il a été porté atteinte à son honneur et à sa réputation.
SUR QUOI,
Il convient d'ordonner la jonction des instances n° 8 de l'année judiciaire 2012-2013 et 223 de l'année judiciaire 2013-2014 dès lors qu'elles dérivent d'un même contrat de travail.
L'attestation d'Ariel BA. produite sous le numéro 69 par la SAM A est bien nulle par application des dispositions de l'article 324 du Code de procédure civile mais a été régularisée par une attestation valable produite sous le numéro 71.
Aucun élément ne permet en définitive de considérer que les réunions des 15 décembre 2008 et 23 août 2010 aient formellement donné lieu à la rédaction d'un compte-rendu par la direction des ressources humaines, en sorte que le Tribunal ne peut tirer aucune conséquence de leur non-communication. Il en est de même pour les autres réunions, étant relevé que la présente juridiction analysera la valeur probante des pièces produites par le demandeur à cet égard.
Le contenu des documents établis par la société C (tels que remis à un premier huissier français ; procès-verbal de constat du 27 mars 2013) ne permet pas :
- de révéler l'existence d'un « rapport » à proprement parler qui comporterait des annexes - alors que les deux synthèses d'entretien individuel mené avec M. GA. et C. PE. (pouvant intéresser directement le présent litige), qui faisaient défaut (au regard de la description des différentes phases faite par M. TU. le 27 mars 2013), ont finalement bien été versées aux débats,
- d'estimer qu'un élément pertinent (les déclarations de Mesdames TA. et JO. ne pouvant pas réellement être considérées comme telles) serait susceptible d'avoir été caché, étant précisé que les constatations du deuxième huissier français (procès-verbal du 7 mai 2013) mentionnent que la gérante de la société C a indiqué qu'elle n'était plus en possession d'aucun document en rapport avec la mission confiée et notamment que les fiches d'entretien individuel avaient été adressées à l'employeur, tandis que la circonstance que cette dernière n'ait pas accepté, à cette occasion, l'ouverture d'une boîte d'archives notée de la société A ne suffit pas à établir une volonté de dissimulation de la part de la défenderesse.
En conséquence, la présente juridiction ne peut pas clairement conclure que la SAM A n'aurait pas respecté l'injonction contenue dans son jugement du 3 octobre 2013.
En application des dispositions de l'article 6 de la loi n° 729 du 16 mars 1963, chaque partie au contrat de travail à durée indéterminée dispose d'un droit de résiliation unilatérale.
Le salarié peut donc librement mettre fin au contrat de travail en démissionnant de son emploi.
Pour produire effet, cette démission doit toutefois être l'expression d'une volonté certaine, libre et réfléchie, claire et non équivoque, en dehors de toute crainte et de toute pression.
Le fait pour le salarié d'imputer à l'employeur la responsabilité de la rupture des relations contractuelles, tout en prenant l'initiative, ne constitue pas l'expression claire et non équivoque de son intention de démissionner, quand bien même les griefs exprimés ne seraient pas fondés (TPI, 25 janvier 2007, Société V c/ RC).
Pour autant, le salarié, qui soutient que la cessation des relations contractuelles s'analyse en un licenciement en raison du comportement fautif de l'employeur, doit rapporter la preuve que la rupture résulte du non-respect par ce dernier de ses obligations substantielles, qui a rendu impossible la poursuite du contrat de travail (TT, 31 mai 2007, KS c/ Société C confirmé par TPI, 5 février 2009).
En l'espèce, en dépit de l'interprétation que la SAM A a effectuée des correspondances de s. GI. du 3 janvier 2011 et du 25 janvier 2011, il apparaît que celui-ci a bien pris l'initiative de la rupture, tout en en imputant la responsabilité à son employeur, et l'a ainsi analysée en un licenciement. Le contrat de travail ayant dès lors été rompu à l'initiative du salarié (sans exécution d'un préavis au regard des griefs invoqués), la mesure de licenciement pour faute grave (abandon de poste) postérieure, notifiée le 22 février 2011, ensuite de l'organisation d'un Conseil de discipline, n'avait en réalité aucun effet dans les relations entre les parties (même s'il n'est pas question de nullité).
Il convient, en conséquence, de déterminer si la rupture initiée par le demandeur le 3 janvier 2011 résulte d'un manquement grave par la SAM A à ses obligations essentielles.
Si la notion de harcèlement moral est encore inconnue en droit monégasque, il n'en demeure pas moins que la responsabilité de l'employeur peut être recherchée à cet égard par application des règles de droit commun :
- sur le fondement de l'obligation de bonne foi prévue par l'article 989 du Code civil,
* lorsqu'il est l'auteur, dans des circonstances liées au travail, d'agissements (abus, menaces, humiliations, mises à l'écart) entraînant ou étant susceptibles d'entraîner notamment une dégradation de la santé physique ou mentale de ses salariés,
* lorsqu'il a été informé d'une situation de harcèlement moral ou de difficultés relationnelles entre ses salariés et s'est abstenu de prendre les mesures appropriées,
- sur le fondement de l'article 1231 alinéa 4 du Code civil, lorsque les agissements susévoqués ont été commis par un de ses salariés dans le cadre du lien de préposition.
Cependant, l'employeur n'est nullement tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de harcèlement moral, en l'état des dispositions légales monégasques.
Contrairement à l'argumentation de chacune des parties sur ce point, la Cour d'appel, par son arrêt confirmatif du 20 septembre 2013, a seulement estimé que les troubles constatés le 20 juillet 2010 ne constituaient pas un accident du travail et n'a pas retenu une quelconque autre date aux troubles en cause ou leur origine professionnelle, en sorte que le Tribunal du Travail n'a pas à tirer de conséquence particulière des décisions ainsi rendues dans la matière spécifique des accidents du travail pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral.
Bien que les nombreuses pièces versées aux débats démontrent la réalité d'une prise en charge médicale ou paramédicale de troubles physiques et psychiques (pièces n° 6, 7, 9, 13, 14, 20, 21, 49, 74, 81, 84, 85, 113, 114, 119) présentés par le demandeur, depuis l'année 2008 et en particulier à compter du 20 juillet 2010, que celui-ci a imputés (confidences à ses proches et amis : pièces n° 1, 4, 5, 51 a et b, 53 a, b, c, 54, 55 a et b, 58, 66 a, b et c, 159, 160 ; déclarations aux médecins, psychologue ou ostéopathe, pièces n° 6, 9, 10, 21, 49) à l'attitude de sa supérieure hiérarchique, S. TA. - tout au long de cette période et en dernier lieu le 19 juillet 2010 - s. GI. ne fournit cependant pas d'éléments de preuve suffisants permettant d'établir qu'il aurait été notamment, personnellement victime, d'agissements répétitifs précis abusifs, excessifs et vexatoires, qui seraient à l'origine de la dégradation de son état de santé, ou d'apprécier s'ils constituent objectivement des agissements de harcèlement moral et ne relèvent pas de situations ressenties subjectivement comme du harcèlement moral.
À cet égard, si des difficultés relationnelles ont indéniablement existé entre S. TA. (à son arrivée en mai 2008) et son équipe - M. GA., C. PE. et s. GI. (comptes rendus de ce dernier insuffisants, pièces n° 29, 131 mais échanges de mails entre les intéressés plus pertinents : pièces n° 148, 149, 150), ayant conduit la hiérarchie de la société A à organiser des réunions (pièces n° 60 à 64) et même à prévoir en décembre 2008 une procédure d'alerte (pièce n° 65) en cas d'incidents ou problèmes au sein de la direction des affaires juridiques, il n'en demeure pas moins que les éléments de la cause ne suffisent pas à caractériser l'existence d'un comportement harcelant à l'égard du demandeur au cours de l'année 2008 (« crise » du 16 octobre 2008 ne résultant pas des pièces n° 23 et 24 ; volonté d'humiliation non démontrée par les pièces n° 26, 27, 28 ; récits des faits par l'intéressé lui-même, non probants : pièces n° 25, 30 ; traitement d'une demande confiée quelques minutes plus tôt pouvant relever d'un changement de position : pièces n° 37 et 38), lequel aurait ensuite persisté en 2009 et 2010 (absence de preuve de violentes critiques sur le contrat d'apporteur d'affaires et de conseil : pièces n° 34 et 35 ; directives d'un chef de service, pièce n° 36, caractère répétitif du rappel des procédures non établi ; les évaluations un peu strictes de l'année 2008, s'inscrivant dans le contexte susévoqué, s'étant largement améliorées en 2009 et ne révélant pas une intention malveillante ou un dénigrement, question de « l'autonomie » mentionnée depuis l'année 2007 : pièces n° 45, 47 et 124, indépendamment des qualités du salarié et de la satisfaction apportée dans ses anciennes et nouvelles fonctions au service d'autres employeurs ; attestations trop générales, subjectives ou sans rapport avec des incidents concernant directement s. GI. : pièces n° 142, 143 et 144) jusqu'au 19 juillet 2010 (pièces 41 bis, 42 et 43 relatives à des demandes n'apparaissant pas excessives ; absence de démonstration de remontrances), et ce d'autant que les « problèmes relationnels professionnels liés à sa supérieure hiérarchique » évoqués par le demandeur en mars 2009 auprès du Docteur J. de l'OMT n'ont pas donné lieu à une nouvelle saisine de ce médecin du travail après cette date (pièce n° 12).
En outre, les synthèses d'entretien individuel avec M. GA. et C. PE. (septembre 2010), établies par la société C (pièce n° 35 et 66 de la société A), lesquelles confirment les difficultés professionnelles rencontrées par les deux employées qui impliquent nécessairement leur supérieure hiérarchique au regard des éléments précités (« problèmes de communication à tous les niveaux » ; « gros problèmes de communication », « tensions dans l'équipe », « climat anxiogène » en matière de consultations/conseil), ou dans le même sens, certains axes et conclusions de l'audit de cette même société concernant les relations au sein du service et avec sa responsable (« climat serein » « renforcer le mode collaboratif au sein des équipes », synthèse de séance de travail collective du 2 décembre 2010 : amélioration de la communication, « ressenti d'une solidarité à renforcer vis-à-vis du responsable » ; « notion d'appartenance reste à construire »), ne sont pas davantage susceptibles de démontrer la réalité d'un harcèlement moral subi par le salarié de la part de S. TA. dans la période qui aurait précédé l'arrêt de travail prescrit à compter du 20 juillet 2010, étant au demeurant souligné que le lien entre la décision de faire procéder à l'audit et la situation du demandeur n'est pas clairement avéré.
Pour autant, le Tribunal du Travail ne peut que constater que l'employeur, pourtant parfaitement conscient des problèmes existant à la fin de l'année 2008 au sein de la direction des affaires juridiques, pour lesquels il avait été décidé la mise en place d'une procédure d'alerte (au demeurant utilisée le 21 janvier 2009 par s. GI. lequel s'est finalement rétracté, et suivie précisément à cette époque par Ariel BA., Directeur des ressources humaines, pièce n° 31 du salarié), n'a pas agi de manière diligente et suffisamment rapide, dans le contexte particulier en cause, lorsque le demandeur a, dès le vendredi 2 juillet 2010, évoqué un nouvel incident avec S. TA. (rendez-vous avec MO. JO. le 5 juillet 2010, information donnée à Ariel BA. le 6 juillet 2010) et l'a laissé partir en congé vraisemblablement à la fin de la semaine suivante (9 juillet 2010) sans réaction particulière ou indication d'une prise en charge concrète de la difficulté. Il s'ensuit qu'à son retour de congé le 19 juillet 2010, le salarié, qui n'avait pas obtenu l'assurance du traitement de sa situation (indépendamment de l'existence avérée ou non du harcèlement moral), a estimé subir de nouvelles brimades et vexations puis a été placé en arrêt de travail dès le 20 juillet 2010, étant relevé que :
- la circonstance que s. GI. ait fait acte de candidature le 29 juin 2010 pour un autre poste ou ait pu avoir certaines ambitions ne permet pas de considérer que ses arrêts de travail seraient liés au fait que ses aspirations auraient simplement été déçues,
- les preuves invoquées par la société A (pièces n° 43, 44 et 47) n'excluent aucunement que des tensions aient pu exister entre le demandeur et sa supérieure.
Bien que la négligence sus évoquée engage la responsabilité pécuniaire de la défenderesse, qui n'a pas mis en œuvre des mesures appropriées pour tenter de régler le dernier différend ayant opposé le salarié à S. TA., elle ne constitue pas une violation suffisamment grave (dernier signalement remontant à plus d'une année) de ses obligations par l'employeur rendant impossible la poursuite du contrat de travail et justifiant de lui imputer la responsabilité de la rupture.
En conséquence, la rupture du contrat de travail doit s'analyser en une démission, les demandes en paiement de l'indemnité de licenciement, de l'indemnité de préavis et des congés payés sur préavis devant être rejetées.
Toutefois, s. GI. a indéniablement subi un préjudice moral - faute d'avoir été soutenu par sa hiérarchie dans un contexte ancien mais clairement connu - lequel a été aggravé par la réaction disproportionnée de la SAM A, qui a engagé, après une position tranchée sur la question du harcèlement moral (courrier du 1er septembre 2010, pièce n° 9 de la défenderesse « je suis à votre disposition pour examiner les preuves tangibles que vous me soumettrez pour étayer vos allégations. À défaut, je considèrerai que vos propos sont diffamatoires, et prendrai les dispositions nécessaires afin de défendre les intérêts de la société A Monaco et de ses collaborateurs ») et en dehors de toute volonté d'apaisement, une procédure inutile (et non nulle) de licenciement pour faute grave (jurisprudence en matière de rupture à l'initiative du salarié pourtant bien assise à l'époque des faits), quand bien même les choix procéduraux, affirmations et invectives du conseil du demandeur auraient pu paraître excessifs. Il est également regrettable que l'employeur n'ait pas envisagé des solutions permettant à s. GI. de faire valoir son argumentation devant le Conseil de discipline pendant une période d'arrêt de travail au demeurant sans rapport avec le harcèlement allégué, au-delà de la question des délais conventionnels en matière disciplinaire.
L'obligation résultant de l'article 25 de la Convention collective de travail du personnel des banques concerne l'insuffisance de travail ou l'insuffisance professionnelle éventuellement liée à un mauvais état de santé passager et non l'absence prolongée pour maladie, si bien qu'il ne peut être tiré aucune conséquence de l'argumentation développée sur ce point par le salarié, étant au demeurant précisé que l'obligation de recherche de solutions de reclassement ne concernerait que l'inaptitude définitive au poste de travail et que le médecin du travail n'a manifestement pas été avisé de la situation en l'espèce. Il ne peut au contraire être reproché au demandeur d'avoir pris acte de la rupture après avoir retrouvé un nouveau travail, et ce, ensuite de la réponse de la société A à sa correspondance du 9 octobre 2010 et après plusieurs mois d'arrêts de travail en rapport avec l'impossibilité de poursuivre une collaboration avec S. TA..
En l'état de ces éléments, le Tribunal estime à la somme de 10.000 euros le montant des dommages et intérêts destinés à réparer le préjudice moral ainsi subi par s. GI., les intérêts au taux légal courant à compter du présent jugement.
Par ailleurs, la présente juridiction ne peut nullement indemniser d'éventuels abus relatifs à l'introduction et la poursuite de procédures judiciaires parallèles à Monaco ou à l'étranger lesquelles ne la concernent pas directement.
De plus, la rédaction de l'article 44 de la loi n° 446 du 16 mars 1946, modifiée, ne permet pas de considérer que l'absence de justification d'un motif légitime en cas de non-comparution lors de l'audience de conciliation ouvrirait droit à dommages et intérêts.
Aucune demande n'a été formée quant à la suppression de tout ou partie des écritures judiciaires de la SAM A, alors qu'il n'est pas établi que l'argumentation développée excèderait celle du débat judiciaire.
L'ensemble des autres demandes en paiement de dommages et intérêts doit dès lors être rejetée.
Les conditions générales de la société A MONACO, dont le demandeur a déclaré avoir pris connaissance lors de l'ouverture de son compte, mentionnent en leur point 1.24 que « le compte peut être clôturé à l'initiative du Client ou de la Banque qui se réserve le droit de suspendre ou de cesser en tout temps ses rapports d'affaires avec effet immédiat et sans indication de motif », de telle sorte qu'aucun grief ne peut être formulé à l'encontre de la défenderesse sur la question de la clôture du compte ayant abouti à la perte financière alléguée, et ce d'autant que cette dernière avait pris certaines précautions pour obtenir les instructions du salarié (courriers des 28 mars et 26 avril 2011). La demande formée de ce chef n'a ainsi pas lieu de prospérer.
L'article 52 de la Convention collective de travail du personnel des banques se référant aux années de « présence » (et non d'ancienneté bancaire) et à l'« absence prolongée pour maladie », il y a lieu de tenir compte de la durée d'emploi à la société A ainsi que de période d'arrêts de travail successifs (sans référence à l'avenant n° 18 à la Convention collective nationale du travail qui constitue un texte distinct). s. GI. pouvait dès lors prétendre au plein traitement sur la période du 20 juillet 2010 au 19 septembre 2010 (2 mois), puis au demi-traitement du 20 septembre 2010 au 19 décembre 2010 (2 mois). Il résulte des bulletins de paie et du courrier de l'employeur du 12 août 2010 que le salarié n'a plus été pris en charge à plein traitement à compter du 14 août 2010. Le demandeur ne contestant pas avoir perçu ses indemnités journalières (50% de la rémunération) du 14 août 2010 au 3 janvier 2011 et n'ayant reçu les indemnités de prévoyance MERCER que sur la période du 18 octobre 2010 au 3 janvier 2011, il est fondé à solliciter la somme nette de 66,003 (indemnité journalière nette) x (18 + 19) = 2.442,11 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 30 mai 2012, date de la réception de la requête initiale par le secrétariat du Tribunal du Travail.
Il convient d'ordonner la délivrance du certificat de travail, de l'attestation Pôle Emploi et du reçu pour solde de tout rectifiés, le prononcé d'une astreinte n'apparaissant pas nécessaire.
Les prétentions de s. GI. étant partiellement fondées, la demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive ne peut être accueillie.
Les parties succombant chacune respectivement, le demandeur doit supporter les dépens du présent jugement à hauteur du 1/3 et la défenderesse à hauteur des 2/3.
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,
Statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort, après en avoir délibéré,
Ordonne la jonction des instances portant les numéros 8 de l'année 2012-2013 et 223 de l'année 2013-2014 ;
Dit que la rupture du contrat de travail conclu entre s. GI. et la société anonyme monégasque A s'analyse en une démission ;
Condamne la société anonyme monégasque A à payer à s. GI. la somme de 10.000 euros (dix mille euros) à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;
Condamne la société anonyme monégasque A à payer à s. GI. la somme nette de 2.442,11 euros (deux mille quatre cent quarante-deux euros et onze centimes) à titre de rappel de salaire pour la période du 14 août au 19 septembre 2010, et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 30 mai 2012 ;
Ordonne la délivrance à s. GI. par la société anonyme monégasque A du certificat de travail, de l'attestation Pôle Emploi et du reçu pour solde de tout rectifiés, et ce, dans le délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Fait masse des dépens et dit qu'ils seront supportés à hauteur du 1/3 par s. GI. et des 2/3 par la société anonyme monégasque A ;
Composition🔗
Ainsi jugé et prononcé en audience publique du Tribunal du Travail de la Principauté de Monaco, au Palais de Justice, le vingt-neuf septembre deux mille seize, par Mademoiselle Magali GHENASSIA, Vice-Président du Tribunal de Première Instance faisant fonction de Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, Madame Corine BERTANI et Monsieur Anthony GUICHARD, membres employeurs, Messieurs Silvano VITTORIOSO et Gilles UGOLINI, membres salariés, assistés de Madame Catherine CATANESE, Secrétaire en Chef.