Tribunal du travail, 3 avril 2008, La SNC Carrefour c/ w. BE. BA

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Abstract🔗

Abandon de poste par le salarié - Demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et dommages et intérêts de la part de l'employeur (oui)

Résumé🔗

Le contrat de travail reste soumis au Droit civil et son caractère synallagmatique qui sous-entend la condition résolutoire permet de solliciter sa résiliation judiciaire auprès du Tribunal.

Un salarié, engagé le 12 février 2003 en qualité d'assistant de caisse niveau 2a, puis promu au poste de conseiller de service niveau 3a ne s'était plus présenté à son travail à compter du 13 juillet 2006. Après avoir été vainement invité à justifier son absence, il avait été attrait par son employeur devant le Tribunal du travail aux fins de voir prononcer la résolution de son contrat de travail avec paiement d'un mois de salaire au titre du préavis qui aurait dû être respecté et de dommages et intérêts. La société employeur faisait notamment état de sa bienveillance passée à l'égard de ce salarié qui venait de recevoir une formation et dont les recherches effectuées faisaient apparaître qu'il avait été embauché par ailleurs. Son remplacement n'avait pu être effectué immédiatement et le préjudice était patent.

De son côté, le salarié soutenait que le droit civil ne s'applique pas à la relation de travail et que son employeur aurait dû le licencier pour faute grave. Il évoquait la force majeure qui l'avait contraint à s'engager dans un emploi plus rémunérateur et l'absence de preuve du préjudice allégué par l'employeur.

Le Tribunal du Travail vise tout d'abord la loi n° 729 dont les articles 1 et 2 rattachent le contrat de travail au droit commun pour toutes les dispositions qui n'y dérogent pas. La condition résolutoire, toujours sous- entendue dans les contrats synallagmatiques comme le contrat de travail, l'employeur avait bien la faculté de solliciter la résolution judiciaire du contrat de travail du salarié ayant abandonné son poste, sans être obligé de recourir au licenciement immédiat sans préavis prévu par le règlement intérieur de l'entreprise. En application de l'article 1039 du Code Civil, la partie victime de l'inexécution a le choix de poursuivre l'exécution forcée ou de demander des dommages et intérêts. Or, la faute grave, constituée ici par l'abandon de poste, permet de rechercher la responsabilité contractuelle du salarié. La société employeur justifiant de son préjudice, le Tribunal prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail et condamne le salarié au paiement de la somme de 1715€65 à titre de dommages et intérêts toutes causes confondues.


Motifs🔗

Le Tribunal,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu la requête introductive d'instance en date du 18 août 2006 reçue le même jour ;

Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 24 octobre 2006 ;

Vu les conclusions déposées par Maître Etienne LEANDRI, avocat-défenseur, au nom de la Société en Nom Collectif CARREFOUR MONACO, en date des 8 mars 2007, 5 juillet 2007 et 10 janvier 2008 ;

Vu les conclusions déposées par Maître Sophie BOUHNIK-LAVAGNA, avocat-défenseur, au nom de Monsieur w. BE. BA., en date des 31 mai 2007 et 4 octobre 2007 ;

Après avoir entendu Maître Etienne LEANDRI, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, au nom de la Société en Nom Collectif CARREFOUR MONACO, et Maître Sophie BOUHNIK-LAVAGNA, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, au nom de Monsieur w. BE. BA., en leurs plaidoiries ;

Lesdits avocats-défenseurs ayant repris et maintenu ce jour leurs conclusions en l'état de la composition différente du Tribunal ;

Vu les pièces du dossier ;

w. BE. BA. a été embauché par la S.N.C. CARREFOUR MONACO en qualité d'assistant de caisses du 7 décembre 1998 au 1er février 2001, date à laquelle il a démissionné de son emploi.

Ensuite de l'intervention auprès de la direction de la S.N.C. CARREFOUR MONACO de son ancien collègue, r. BE., w. BE. BA. a été à nouveau embauché, selon contrat de travail en date du 12 février 2003, par la S.N.C. CARREFOUR MONACO à compter du 24 février 2003 en qualité d'assistant de caisse niveau 2a.

Aux termes d'un avenant au contrat de travail en date du 11 août 2004, w. BE. BA. a été promu à compter du 1er août 2004 au poste de conseiller de service niveau III a, moyennant paiement d'une rémunération brute de base portée à 1.158,62 €, outre une indemnité compensatrice de 16,74 € et une indemnité monégasque de 57,86 €.

À compter du 13 juillet 2006, w. BE. BA. ne s'est plus présenté sur le lieu de son travail.

Après avoir invité en vain l'intéressé, par lettres recommandées avec accusé de réception en date des 19 et 29 juillet 2006, à justifier sans délai de son absence, la S.N.C. CARREFOUR MONACO, ensuite d'un procès-verbal de non-conciliation en date du 23 octobre 2006, a attrait w. BE. BA. devant le bureau de jugement du Tribunal du Travail à l'effet :

  • de voir prononcer la résiliation du contrat de travail, aux torts du salarié, en raison de l'interruption brutale de son exécution à compter du 13 juillet 2006,

  • d'obtenir paiement des sommes suivantes :

  • 1.409,81 €, en application des dispositions de l'article 11 de la loi n° 729,

  • 4.229,43 €, à titre de dommages et intérêts pour rupture brutale et abusive désorganisant l'entreprise,

  • 3.000,00 €, à titre de dommages et intérêts en réparation des frais générés par la saisine de la présente juridiction.

À l'audience fixée par les convocations les parties ont régulièrement comparu par leurs conseils.

Puis, après neuf renvois intervenus à leur demande à l'effet de leur permettre d'échanger pièces et moyens, l'affaire a été contradictoirement débattue lors de l'audience du 28 février 2008, à l'issue de laquelle le jugement a été mis en délibéré pour être prononcé ce jour 3 avril 2008.

La S.N.C. CARREFOUR MONACO soutient, à l'appui de ses prétentions, que l'article 1039 du Code Civil permet à l'une ou l'autre des parties à un contrat synallagmatique d'en demander la résolution judiciaire en cas d'inexécution des obligations qui en découlent.

Qu'en l'espèce w. BE. BA. a gravement manqué à ses obligations contractuelles en abandonnant sans autorisation son poste de travail à compter du 13 juillet 2006 et en ne justifiant pas du motif de son absence, nonobstant les demandes à cette fin qui lui avaient été adressées les 19 et 29 juillet 2006, dont il a respectivement accusé réception les 25 juillet et 1er août 2006.

Qu'il y a lieu par suite de prononcer, en application des dispositions de l'article 1039 du Code civil, la résiliation judiciaire de son contrat de travail, à ses torts exclusifs.

La S.N.C. CARREFOUR MONACO estime en outre être fondée à obtenir réparation par w. BE. BA. du préjudice et notamment de la désorganisation des services de l'entreprise que lui a causé le comportement adopté par ce salarié.

Elle souligne à cet effet :

  • que les investigations auxquelles elle a procédé ensuite d'une ordonnance rendue le 9 janvier 2007 par Madame le Président du Tribunal de Première Instance ont permis d'établir les raisons de l'absence depuis le 13 juillet 2006 de w. BE. BA., ce dernier ayant été embauché à compter du 10 juillet 2006 par la direction de la Fonction Publique et des Ressources Humaines de Monaco en qualité d'agent d'accueil suppléant,

  • qu'elle avait pourtant témoigné une particulière bienveillance à l'endroit de ce salarié en acceptant, en considération de sa situation personnelle, de le réintégrer dans ses effectifs postérieurement à sa démission et en lui accordant rapidement une promotion du poste d'assistant de caisses à celui de conseiller de service,

  • que w. BE. BA. avait en outre bénéficié à plusieurs reprises, et pour la dernière fois le 23 juin 2006, soit trois semaines avant son abandon de poste, de stages de formation destinés à améliorer ses compétences,

  • que le remplacement de w. BE. BA. au sein du service financier n'a pu matériellement être effectué qu'à compter du 9 octobre 2006.

La S.N.C. CARREFOUR MONACO sollicite par suite la condamnation de w. BE. BA. au paiement de la somme de 8.639,24 €, se décomposant comme suit, en réparation de son préjudice :

  • 1.409,81 €, représentant un mois de salaire, correspondant au délai de préavis que w. BE. BA. aurait dû respecter, en application des dispositions de l'article 11 de la loi n° 729,

  • 4.229,43 €, correspondant au préjudice matériel subi par l'entreprise,

  • 3.000,00 €, représentant le montant des frais nécessités par l'introduction de la présente procédure.

*

w. BE. BA. conclut pour sa part au débouté de l'intégralité des demandes formulées à son encontre par la S.N.C. CARREFOUR MONACO.

Il fait valoir en premier lieu à cet effet que le droit du travail déroge au droit commun ; que dans ces conditions lorsqu'un conflit né à l'occasion du contrat de travail est « prévu et résolu » dans le cadre du droit du travail, le droit civil ne reçoit plus application.

Qu'en l'espèce, dès lors que la sanction de l'abandon de poste, qui constitue une faute grave, est expressément prévue tant par le règlement intérieur de la S.N.C. CARREFOUR MONACO que par l'article 11 alinéa 2 de la loi n° 729, les dispositions de l'article 1039 du Code Civil relatives à la résolution judiciaire des contrats invoquées par la S.N.C. CARREFOUR MONACO ne peuvent recevoir application.

Qu'il appartenait en conséquence à la S.N.C. CARREFOUR MONACO de lui notifier son licenciement immédiat, sans préavis ni indemnité de rupture.

Que dans la mesure où aucune autre sanction que la privation du préavis et des indemnités de rupture n'est prévue à l'encontre du salarié qui s'est rendu coupable d'un abandon de poste, et donc d'une faute grave, tant par l'article 3 du titre VI du règlement intérieur que par l'alinéa 2 de l'article 11 de la loi n° 729, la S.N.C. CARREFOUR MONACO ne peut lui réclamer paiement de quelque indemnité ou de quelque pénalité financière que ce soit, ni encore moins l'allocation de dommages et intérêts.

Il soutient, en tout état de cause, qu'il ne saurait être considéré comme responsable de la rupture, alors que la situation à laquelle il s'est trouvé confronté constitue en droit un cas de force majeure, le nouvel emploi trouvé par ses soins s'avérant bien plus rémunérateur que celui qu'il occupait au sein de la S.N.C. CARREFOUR MONACO.

Il estime en outre qu'à partir du moment où la fonction des tribunaux consiste à juger les litiges individuels qui leur sont soumis et non à faire des exemples, l'argument tiré de l'importance quantitative des abandons de poste auxquels elle se trouve confrontée invoqué par la S.N.C. CARREFOUR MONACO se trouve dénué de toute pertinence.

Qu'au demeurant l'attestation établie par Madame CO. versée par ses soins aux débats démontre, si besoin était le comportement discriminatoire adopté par la S.N.C. CARREFOUR MONACO à son égard.

Il prétend enfin que le préjudice allégué par la S.N.C. CARREFOUR MONACO n'est pas démontré à défaut pour cette dernière d'une part de justifier s'être effectivement trouvée dans l'impossibilité de le remplacer rapidement dans ses fonctions, et d'autre part d'avoir établi la perte de chiffre d'affaires qu'aurait engendrée son départ.

Qu'en toutes hypothèses la S.N.C. CARREFOUR MONACO ne saurait lui imputer les conséquences de sa mauvaise gestion des ressources humaines, ni ses difficultés à trouver des salariés acceptant de s'investir dans son entreprise.

Que les innombrables abandons de postes auxquels elle indique avoir été confrontée démontrent, si besoin était, que les conditions de travail et d'évolution de carrière ne sont pas aussi attrayantes que celle-ci le prétend.

Qu'il lui appartient dès lors pour mettre fin aux abandons de postes qu'elle connaît actuellement de revoir sa politique salariale ou de modifier son règlement intérieur en alourdissant, dans le respect des limites légales, les sanctions susceptibles d'être infligées aux salariés dans de semblables circonstances.

La S.N.C. CARREFOUR MONACO réplique à ces arguments, après avoir sollicité le rejet des débats de l'attestation établie par Madame CO. par application des dispositions des articles 323 et 324 alinéa 1 du Code de Procédure Civile et de la pièce dénommée « analyse de la productivité par conseiller », au motif qu'il s'agit d'un document interne et confidentiel au service dont relevait w. BE. BA. :

  • que l'article 2 de la loi n° 729 dispose expressément que le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun,

  • que l'abandon de poste constitue précisément, tout comme la modification du contrat de travail, l'un des terrains de prédilection de l'application des dispositions de l'article 1039 du Code civil,

  • qu'à défaut de revêtir les caractères d'extériorité, d'imprévisibilité et d'irrésistibilité exigés par la jurisprudence, la situation à laquelle w. BE. BA. soutient avoir été confronté ne constitue pas un cas de force majeure, l'abandon de poste relevé à son encontre résultant de sa seule volonté de souscrire un nouvel engagement auprès d'un autre employeur,

  • que la disparité de traitement entre les différents salariés qui ont abandonné leur poste dénoncée par w. BE. BA. se justifie par le fait qu'alors que celui-ci avait été affecté, à l'issue de sessions de formation professionnelle, au sein d'un service ne comptant que quatre employés, les deux autres employés qui ont été effectivement licenciés faisaient partie d'un effectif de 110 personnes.

SUR CE,

Sur la demande de la S.N.C. CARREFOUR MONACO tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de w. BE. BA.

Si les dispositions des lois n° 729 du 16 mars 1963 et n° 845 du 27 juin 1968 accordent certes à chacune des parties au contrat de travail un droit unilatéral de résiliation habituellement dénommé, selon l'identité de la partie qui en a pris l'initiative, licenciement ou démission, dont elles réglementent l'exercice en fonction notamment – s'agissant du licenciement – de la qualification de la faute retenue à l'encontre du salarié et sanctionnent en outre le cas échéant les éventuels abus intervenus lors de sa mise en œuvre, ces dispositions, qui constituent l'ossature du droit du travail monégasque, n'excluent nullement, contrairement à ce que soutient erronément w. BE. BA., le contrat de travail du champ d'application du droit civil.

En effet, en énonçant dans les articles 1 et 2 de la loi n° 729 susvisée que la convention par laquelle une personne s'engage temporairement à exécuter un travail sous l'autorité et au profit d'une autre contre paiement d'un salaire déterminé est soumise aux règles du droit commun, le législateur monégasque a au contraire très clairement rappelé que le contrat de travail ne constitue qu'un type particulier de contrats et qu'il se trouve par suite soumis, non seulement à l'ensemble des règles qui constituent le droit du travail mais également, pour autant qu'elles ne lui soient pas contraires, aux dispositions du droit civil qui régissent les obligations contractuelles de droit commun, conformément au principe selon lequel les lois spéciales dérogent aux lois générales.

Dès lors qu'il comporte à la charge des parties contractantes des obligations réciproques résidant pour le salarié dans la fourniture d'une prestation de travail et pour l'employeur dans le paiement d'une rémunération, le contrat de travail est un contrat synallagmatique.

La condition résolutoire étant, aux termes de l'article 1039 du Code Civil, toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l'une des deux parties ne satisferait pas à son engagement, la partie envers laquelle l'obligation convenue n'a pas été exécutée a la faculté, en l'absence de dispositions contraires dans la loi n° 729, concurremment avec l'exercice de son droit de résiliation unilatérale (licenciement ou démission), de solliciter auprès du Tribunal du Travail la résiliation judiciaire du contrat de travail.

w. BE. BA. ne contestant pas s'être abstenu de se présenter à son travail à partir du 13 juillet 2006 et n'avoir apporté aucune réponse aux deux correspondances l'invitant à justifier des raisons de son absence qui lui ont été successivement adressées par son employeur, l'abandon de poste invoqué par la S.N.C. CARREFOUR MONACO est indiscutablement caractérisé en l'espèce.

Si l'abandon de poste figure certes au nombre des comportements du salarié énumérés par l'article 3 du règlement intérieur de la S.N.C. CARREFOUR MONACO susceptibles d'être qualifiés de faute grave et comme tels d'entraîner son licenciement immédiat sans préavis ni indemnité, cette clause ne lie toutefois l'employeur qu'en ce qu'elle lui interdit de prononcer à l'encontre de l'intéressé une sanction plus sévère que celle prévue par ledit règlement intérieur.

Par suite, l'existence d'une telle clause, contrairement à ce que soutient erronément w. BE. BA., n'excluait pas la faculté pour son employeur de solliciter la résiliation judiciaire du contrat de travail dans les termes du droit commun.

En cessant sans motif légitime à compter du 13 juillet 2006 de fournir à la S.N.C. CARREFOUR MONACO la prestation de travail convenue et en s'abstenant, nonobstant les deux mises en demeure qui lui ont été adressées à cet effet les 19 et 29 juillet 2006, de justifier des raisons de son absence, w. BE. BA., a contrevenu à l'obligation essentielle qu'il avait contractée à l'égard de son employeur.

L'attitude de ce salarié, dont il s'est avéré en cours de procédure qu'il avait été embauché dès le 10 juillet 2006 par un autre employeur sans avoir informé la S.N.C. CARREFOUR MONACO de cette situation, ne permettant pas le maintien du lien contractuel, il convient de faire droit à la demande de cette dernière en prononçant la résiliation, aux torts de w. BE. BA., du contrat de travail conclu le 12 février 2003 entre les parties.

Sur la demande de la S.N.C. CARREFOUR MONACO tendant à obtenir la condamnation de w. BE. BA. au paiement de dommages et intérêts

En application des dispositions de l'article 1039 du Code Civil susvisé la partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté a le choix, soit de forcer l'autre à l'exécution de la convention, lorsqu'elle est possible, soit d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.

Par ailleurs, si la responsabilité contractuelle du salarié n'est certes pas engagée sur le plan pécuniaire, compte tenu de sa situation de subordination justifiant l'application à son profit d'un régime dérogatoire au droit commun se caractérisant notamment par la prohibition des amendes ou des sanctions pécuniaires, lorsque celui-ci s'est rendu coupable d'un simple manquement ou d'une faute légère, la faute grave, outre la privation du droit aux indemnités de préavis et de congédiement qu'elle entraîne, permet à l'employeur de rechercher le cas échéant devant le Tribunal du Travail la responsabilité contractuelle du salarié (Tribunal du Travail : SNC BA. et Cie contre M.P. FE. - 16 mai 2002).

L'abandon de poste dont s'est rendu coupable w. BE. BA. ayant été qualifié par l'intéressé lui-même de faute grave, la S.N.C. CARREFOUR MONACO, sous réserve d'établir l'existence du préjudice dont elle se prévaut, est recevable à solliciter l'allocation de dommages et intérêts.

Cette dernière justifie à cet égard en premier lieu avoir fait dispenser à w. BE. BA. à SOPHIA ANTIPOLIS une formation d'une durée totale de 14 heures, les 22 et 23 juin 2006, destinée à développer les ventes de produits financiers pour fidéliser ses clients, à laquelle elle ne l'aurait certainement pas inscrit si elle avait été avisée, dans les délais prévus par la loi, de sa prochaine démission et dont elle n'a pu en tout état de cause concrètement retirer le bénéfice attendu puisque celui-ci a cessé ses fonctions dès le 13 juillet 2006.

Au titre de cette formation la S.N.C. CARREFOUR MONACO a réglé à w. BE. BA. des frais d'hôtel, de carburant, de péage et de restaurant à due concurrence de la somme de 176,20 €.

La S.N.C. CARREFOUR MONACO justifie en outre avoir maintenu à l'intéressé pendant la durée de cette formation le bénéfice de son salaire à hauteur de la somme de 14 x 9,26 € = 129,64 €.

La stratégie adoptée par w. BE. BA., en cessant à compter du 13 juillet 2006 d'accomplir toute prestation de travail au profit de la S.N.C. CARREFOUR MONACO sans pour autant avoir fait usage de son droit de résiliation unilatérale, a enfin privé la S.N.C. CARREFOUR MONACO du bénéfice du délai congé d'un mois que w. BE. BA. aurait eu l'obligation de respecter, en application des dispositions de l'article 8 de la loi n° 729, s'il avait démissionné de son emploi.

Par suite, si la S.N.C. CARREFOUR MONACO ne peut certes solliciter paiement par w. BE. BA. d'une indemnité de préavis sur le fondement des dispositions de l'article 11 de la loi n° 729, elle est fondée en revanche à obtenir réparation, à hauteur de la somme de 1.409,81 € représentant le montant du salaire mensuel de base de l'intéressé, du préjudice que lui a causé l'attitude adoptée par ce salarié.

Au vu de ces divers éléments le préjudice subi par la S.N.C. CARREFOUR MONACO consécutivement à l'interruption brutale par w. BE. BA. de l'exécution de son contrat de travail justifie l'allocation au profit de cette dernière de la somme de 1.715,65 € à titre de dommages et intérêts.

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,

Statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort, après en avoir délibéré.

Prononce la résiliation, aux torts de w. BE. BA., du contrat de travail conclu le 12 février 2003 entre les parties.

Condamne w. BE. BA. à payer à la S.N.C. CARREFOUR MONACO la somme de :

  • 1.715,65 euros, (mille sept cent quinze euros et soixante cinq centimes), à titre de dommages et intérêts toutes causes confondues en réparation de son préjudice.

Déboute la S.N.C. CARREFOUR MONACO du surplus de ses prétentions.

Condamne w. BE. BA. aux entiers dépens du présent jugement.

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