Tribunal du travail, 29 septembre 2005, a-m MI épouse SA c/ la SAM Partner's Service

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Abstract🔗

Reçu pour solde de tout compte - Réserves émises - Effet - Heures supplémentaires - Preuve - Repos compensateur inexistant à Monaco - Principe dit de parité inapplicable à une prime de transport

Résumé🔗

Lorsque des réserves émises sur le reçu pour solde de tout compte ne sont pas détaillées et portent sur la totalité du reçu, celui-ci ne vaut que comme simple reçu des sommes qui y figurent. La législation monégasque ne contient aucune disposition relative au repos compensateur d'heures supplémentaires ou de travail de nuit similaires ou comparables à celles existant en droit positif français.

Une salariée, agent de propreté, démissionne de son emploi, quelques mois après son embauche et soutient, devant le Tribunal du travail où elle a attrait son employeur, que sa démission a été contrainte en raison de conditions de travail trop rigoureuses, d'une rémunération réduite et d'un changement de lieu de travail impliquant d'autres horaires, alors qu'elle se trouvait sans moyen de locomotion. Devant cette juridiction, elle demande notamment un rappel de salaires et de primes, une indemnisation des repos compensateurs dont elle n'a pas bénéficié sur la base du principe de la parité des salaires avec la région économique voisine. L'employeur, de son côté, dénie toute pression sur le consentement de cette salariée qui a agi en justice plus de trois ans après la rupture et estime ne rien devoir, sur le fondement d'une Convention Collective française inapplicable.

Le tribunal du travail rejette toute forclusion, en raison des réserves qui figurent de façon générale sur le reçu pour solde de tout compte qui ne vaut ainsi que comme simple reçu des sommes versées. La demande de rappel de salaire est fondée, en application des dispositions de l'article 11 de la loi n° 739 du 16 mars 1963, voulant que les montants minimas des salaires, primes et indemnités de toute nature versées à Monaco, soient au moins égaux à ceux pratiqués en vertu de la règlementation ou de conventions collectives pour des conditions de travail identiques, dans les mêmes professions commerces ou industries de la région économique voisine. Dans la mesure où la Convention Collective française des Entreprises de propreté, étendue, prévoit un salaire horaire supérieur pour un agent travaillant au même coefficient dans les Alpes maritimes, la salariée peut prétendre à l'allocation d'un complément de salaire. En revanche le principe dit de parité ne peut recevoir application pour une indemnité de transport qui ne constitue pas la contrepartie d'un travail fourni par le salarié. Aucune allocation de dommages et intérêts n'est due pour non-respect du repos compensateur qui n'existe pas dans la législation monégasque actuelle.


Motifs🔗

LE TRIBUNAL,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu la requête introductive d'instance en date du 19 janvier 2004, reçue le 21 janvier 2004,

Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 24 février 2004,

Vu les conclusions déposées par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de Madame a-m MI-SA, en date des 13 mai 2004, 13 janvier 2005 et 17 mars 2005,

Vu les conclusions déposées par Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur, au nom de la SOCIÉTÉ ANONYME MONÉGASQUE PARTNER'S SERVICE, en date des 11 novembre 2004, 10 février 2005 et 28 avril 2005,

Après avoir entendu Maître Thomas GIACCARDI, avocat à la Cour d'Appel de Monaco, au nom de Madame a-m MI-SA, et Maître Frank MICHEL, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, au nom de la SOCIÉTÉ ANONYME MONÉGASQUE PARTNER'S SERVICE, en leurs plaidoiries ;

Vu les pièces du dossier ;

*

a-m MI épouse SA a été embauchée le 13 décembre 2000 par la SAM PARTNER'S SERVICE en qualité d'agent de propreté.

Par un courrier en date du 27 avril 2001 cette dernière a démissionné de son emploi, démission dont son employeur a pris acte le 9 mai 2001.

Le 30 mai 2001, a-m MI-SA a signé, « sous réserve de (ses) bons droits » le reçu pour solde de tout compte qui lui avait été présenté par son employeur, dont elle a officiellement dénoncé les termes le 30 juillet 2001.

Ensuite d'un procès-verbal de non-conciliation en date du 23 février 2004, a-m MI-SA a saisi le Bureau de Jugement du Tribunal du travail d'une demande tendant à obtenir la condamnation de la SAM PARTNER'S SERVICE au paiement des sommes suivantes :

  • 230,00 €, à titre du complément de salaire sur la base d'un taux horaire de 6,69 €,

  • 1.395,00 €, à titre de prime de transport,

  • 115,68 €, au titre de la formation suivie les 27 et 28 février 2001,

  • 2.000,00 €, à titre de dommages et intérêts pour non-respect du repos compensateur,

  • 10.000,00 €, à titre de dommages et intérêts pour préjudice matériel,

  • 5.000,00 €, à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

le tout avec intérêts au taux légal à compter de la date de la tentative de conciliation.

À l'audience fixée par les convocations les parties ont régulièrement comparu.

Puis, après onze renvois intervenus à la demande des avocats, l'affaire a été contradictoirement débattue lors de l'audience du 9 juin 2005 à l'issue de laquelle le jugement a été mis en délibéré pour être prononcé ce jour 29 septembre 2005.

a-m MI-SA soutient en substance, à l'appui de ses prétentions :

– qu'alors qu'il est de principe que la démission doit résulter d'une volonté claire et non équivoque du salarié en ce sens, il ressort en l'espèce, des pièces du dossier qu'elle s'est trouvée contrainte de quitter son emploi en raison de l'attitude adoptée à son égard par la SAM PARTNER'S SERVICE, laquelle, après l'avoir soumise à des conditions de travail particulièrement rigoureuses et réduit de manière drastique le montant de sa rémunération, l'a en dernier lieu unilatéralement affectée sur un autre site impliquant d'autres horaires de travail que ceux effectués par sa fille, laquelle ne disposait pas de moyen personnel de locomotion, l'obligeant ainsi chaque matin à se rendre en Principauté plus d'une heure avant le début de son activité ; que par suite, en ne respectant pas l'obligation qui lui était légalement faite d'exécuter de bonne foi le contrat de travail, la SAM PARTNER'S SERVICE porte la responsabilité de la rupture des relations contractuelles entre les parties et doit donc réparer l'important préjudice, tant matériel que moral, qui s'en est suivi,

– qu'elle n'a pas été intégralement remplie de ses droits au cours de l'exécution de son contrat de travail, dans la mesure où :

  • en violation des dispositions de l'article 11 de la loi n° 739 instituant le principe de la parité des salaires, primes et indemnités de toute nature versés en Principauté avec ceux pratiqués dans la région économique voisine, en vertu de la réglementation ou de conventions collectives, pour des conditions de travail identiques, elle n'a pas reçu paiement de la prime mensuelle de transport allouée par la « Convention Collective Française de Propreté » aux salariés qui utilisent pour se rendre sur leur lieu de travail un service public de transport, ou en l'absence d'un tel service un véhicule personnel, et se trouve par suite fondée à réclamer paiement à son ancien employeur à ce titre de la somme de 1.395,00 €,

  • au mépris du texte susvisé elle a été rémunérée sur la base d'un salaire horaire de 6,41 €, alors que la Convention Collective Française de référence prévoyait un salaire horaire de 6,69 €, ouvrant droit à son profit, au regard du nombre total d'heures effectuées de décembre à mai 2001, à un rappel de 230,00 €,

  • le temps qu'elle a consacré les 27 et 28 février 2001 à suivre les formations organisées par son employeur, dans l'intérêt de l'entreprise, n'a pas été rémunéré, ainsi qu'il aurait dû l'être, comme des heures normales de travail,

  • alors qu'elle a été amenée pendant toute la période où elle est demeurée au service de la SAM PARTNER'S SERVICE à travailler très dur, pendant de longues heures, sans faire de pause, elle n'a bénéficié d'aucun repos compensateur.

La SAM PARTNER'S SERVICE conclut pour sa part à titre principal à l'irrecevabilité et à titre subsidiaire au rejet des prétentions formulées à son encontre par a-m MI-SA.

Elle fait valoir à cet effet :

  • en ce qui concerne les moyens tendant à voir déclarer les demandes irrecevables :

– que le reçu pour solde de tout compte n'ayant été dénoncé que le 30 juillet 2001, soit postérieurement au délai légal de deux mois, a-m MI-SA est aujourd'hui forclose en ses demandes,

– qu'à défaut d'avoir sollicité la requalification de la rupture de son contrat de travail en un licenciement, cette dernière n'est pas recevable à réclamer à son employeur le paiement d'indemnités légales ou de dommages et intérêts.

  • En ce qui concerne les moyens tendant à voir rejeter les demandes comme infondées :

– qu'a-m MI-SA ne rapporte nullement la preuve, dont la charge lui incombe, des pressions et menaces exercées à son encontre en vue de la contraindre à démissionner, l'affectation sur un autre site ayant été décidée en considération des besoins de l'entreprise et dans le respect des prescriptions du règlement intérieur auquel tous les salariés sont soumis, consécutivement à la restructuration et à la réorganisation du GRIMALDI FORUM,

– que les accusations de harcèlement moral portées à l'encontre de l'employeur ne sont pas davantage justifiées, l'attestation de pure complaisance délivrée à cet effet par Madame AN se trouvant entachée de nullité sur le plan formel,

– que la rupture du contrat de travail d'a-m MI-SA, qui a attendu plus de trois années avant d'engager sa procédure, étant par suite intervenue à l'initiative exclusive de celle-ci, en des termes clairs et dépourvus d'équivoque, sans que son consentement n'ait pu être vicié par une quelconque contrainte exercée par son employeur, a-m MI-SA, qui a reçu paiement lors de son départ de l'entreprise des diverses sommes et indemnités auxquelles elle était en droit de prétendre, n'est pas fondée à solliciter la condamnation de ce dernier au paiement de dommages et intérêts, étant observé que le préjudice allégué n'est, en tout état de cause, nullement justifié,

– qu'a-m MI-SA, dont le salaire a été régulièrement calculé sur la base du communiqué n° 2000-6 du 7 juillet 2000 relatif à la valeur du SMIC au 1er juillet 2000, n'est pas recevable à solliciter le règlement d'un complément de salaire, ni d'une prime de transport, sur le fondement d'une Convention Collective Française dont le contenu n'est toujours pas justifié et qui n'a en tout état de cause pas vocation à s'appliquer en l'espèce, dès lors que son bénéfice n'a pas été étendu aux salariés par le contrat de travail ou par le règlement de l'entreprise approuvé par l'inspecteur du travail,

– qu'il apparaît à l'examen comparatif du tableau récapitulatif de ses horaires de travail établi pour le mois de février 2001 par a-m MI-SA elle-même et de la fiche de paie délivrée à l'intéressée pour le mois considéré, que cette dernière a bien été rémunérée pour les heures de formation qu'elle a effectuées,

– qu'a-m MI-SA ne prouve pas avoir été amenée à travailler pendant toute la durée de son contrat de travail, de façon continue et sans repos compensateur, le tableau des horaires versé par ses soins aux débats établissant le contraire.

a-m MI-SA réplique à ces divers arguments :

– que les délais de procédure ne comprenant pas, en application des dispositions de l'article 970 du Code de procédure civile, le jour d'où ils partent, le délai de forclusion de deux mois qui lui était imparti pour dénoncer son solde de tout compte par l'article 7 de la loi n° 638 a été respecté,

– qu'en tout état de cause le reçu soumis à sa signature ne lui permettait pas d'avoir connaissance du délai de forclusion prévu par la loi, puisqu'il y était simplement indiqué que « le reçu peut être dénoncé dans les deux mois de sa signature »,

– que sa demande en paiement de dommages et intérêts a pour fondement juridique l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail impartie à chacune des parties par les dispositions des articles 2 de la loi n° 729 et 989 alinéa 3 du Code civil.

SUR CE,

1) Sur la fin de non-recevoir tirée du non-respect des dispositions de l'article 7 de la loi n° 638 du 11 janvier 1958

Il est constant en droit que le reçu pour solde de tout compte a un effet libératoire pour l'employeur s'il a été régulièrement établi et non dénoncé par le salarié dans le délai de forclusion qui lui était imparti à cet effet.

En l'espèce, il apparaît à l'examen du reçu délivré le 30 mai 2001 à la SAM PARTNER'S SERVICE par a-m MI-SA que cette dernière a ajouté, à la suite de la mention « pour solde de tout compte » exigée à peine d'irrégularité par l'article 7 de la loi n° 638 et avant sa signature, la mention suivante : « sous réserve de mes bons droits ».

Dès lors que les réserves émises par a-m MI-SA ne sont aucunement détaillées et portent au surplus sur la totalité du reçu, cette indication, exclusive de tout accord de sa part, dénature le reçu pour solde de tout compte de son effet libératoire, lequel ne vaut par suite que comme simple reçu des sommes qui y figurent.

Aucune forclusion ne pouvant par suite être valablement opposée à a-m MI-SA, la fin de non-recevoir tirée du non-respect des dispositions de l'article 7 de la loi n° 638 soulevée par la SAM PARTNER'S SERVICE doit être rejetée.

2) Sur le moyen d'irrecevabilité tiré de l'absence de demande de requalification de la démission en un licenciement

Si l'octroi au salarié des indemnités de préavis, de congédiement et de licenciement prévues par les articles 1 et 2 de la loi n° 845 et 11 de la loi n° 729 suppose certes nécessairement une requalification préalable de la rupture en un licenciement, il n'en va pas de même des dommages et intérêts qui peuvent être valablement sollicités par le salarié, en tout état de cause, quelle que soit la forme de la rupture, dès lors que ce dernier rapporte la preuve :

– de la violation par l'employeur d'une obligation née du contrat de travail,

– du préjudice qui en est résulté pour lui,

– du lien causal existant entre la faute commise et le préjudice subi.

La demande formulée par a-m MI-SA tendant à obtenir l'allocation des sommes de 10.000 € et 5.000 €, en réparation des préjudices moral et matériel que lui aurait causé la violation par la SAM PARTNER'S SERVICE de son obligation de loyauté s'avère par suite recevable.

3) Sur le bien-fondé des demandes formulées par a-m MI-SA

A) Sur les demandes de rappel de salaire et de prime de transport

a) Rappel de salaire

En application des dispositions de l'article 11 de la loi n° 739 du 16 mars 1963, les montants minima des salaires, primes et indemnités de toute nature versés à MONACO doivent être au moins égaux à ceux pratiqués en vertu de la réglementation ou de conventions collectives pour des conditions de travail identiques dans les mêmes professions commerces ou industries de la région économique voisine.

Il est constant en l'espèce qu'a-m MI-SA a été recrutée par la SAM PARTNER'S SERVICE du 13 décembre 2000 au 1er mai 2001, en qualité d'agent de propreté, coefficient 150 (cf. indications portées sur la demande d'autorisation d'embauchage et de permis de travail).

Aux termes de la Convention Collective Française des Entreprises de Propreté (Accord du 10 novembre 1998 étendu par arrêté du 20 janvier 1999) le salaire horaire minimum versé à un agent de propreté classé au coefficient 150 exerçant ses fonctions dans le département Français des Alpes Maritimes, à compter du 1er juillet 2000, s'élevait à 43,94 F correspondant à 6,69 €.

a-m MI-SA ayant, au vu des bulletins de paie versés aux débats, été rémunérée sur la base d'un taux horaire de base de 42,02 F correspondant à 6,40 €, celle-ci, en application de la règle précitée, peut prétendre à l'allocation d'un complément de salaire calculé sur les bases suivantes :

  • 0,29 €, pour chaque heure normale de travail,

  • 0,36 €, pour chaque heure supplémentaire à 25 %,

  • 0,38 F, soit 0,05 €, pour chaque heure de travail effectuée le dimanche ou la nuit,

et représentant au vu des indications contenues dans les bulletins de paie délivrés à l'intéressée pour les mois de décembre 2000 à mai 2001 :

  • 761,66 x 0,29 = 220,88 €, en ce qui concerne les heures normales de travail,

  • 31,5 x 0,36 = 11,34 €, en ce qui concerne les heures supplémentaires à 25 %,

  • 338,25 x 0,05 = 16,91 € en ce qui concerne les majorations de salaires de 20 % pour les heures effectuées le dimanche ou de nuit.

Le Tribunal ne pouvant toutefois statuer ultra petita la condamnation prononcée à l'encontre de la SAM PARTNER'S SERVICE, ne peut excéder la somme de 230,00 €, sollicitée à ce titre par a-m MI-SA.

b) Heures de formation

Si le temps consacré par un salarié à suivre la formation professionnelle qui lui a été dispensée à la demande de son employeur dans l'intérêt de l'entreprise doit certes être considéré comme un temps de travail effectif et par suite rémunéré comme tel, force est de constater toutefois à l'examen des pièces produites (fiches horaire décembre 2000 à mars 2001) que les 7 x 2 = 14 heures accomplies à ce titre les 27 et 28 février 2001 par a-m MI-SA lui ont été payées par la SAM PARTNER'S SERVICE, et ce bien qu'aucune mention spécifique n'ait été apposée sur le bulletin de paie de février 2001.

Qu'en effet, alors que l'intéressée a effectué au total, en ce compris ces 14 heures de formation, 178 h 30 mn de travail au cours du mois considéré, sa rémunération a été calculée sur la base de 184 heures.

Que par suite sa demande tendant à obtenir paiement à ce titre de la somme de 115,68 € doit être rejetée.

c) Prime de transport

a-m MI-SA fonde sa demande sur les dispositions de la Convention Collective Française des Entreprises de Propreté, laquelle prévoit, en son article 34, l'attribution d'une prime mensuelle de transport à tous les salariés, à l'exclusion des cadres, qui utilisent pour se rendre sur leur lieu de travail un service public de transport ou, en l'absence d'un tel service, un véhicule personnel.

Dès lors que l'indemnité de transport ne constitue pas la contrepartie d'un travail fourni par le salarié mais est destinée à rembourser forfaitairement une partie des frais professionnels exposés par ce dernier pour l'exercice de ses fonctions, le principe de la parité minimale des salaires institué par l'article 11 de la loi n° 739 ne peut pas recevoir application en l'espèce.

Pour pouvoir prétendre au paiement de ladite prime, qui n'est pas mentionnée parmi les avantages alloués au salarié dans l'autorisation d'embauchage et de permis de travail et n'est pas davantage prévue par la réglementation monégasque du travail, ni par la Convention Collective Monégasque Nationale du Travail, a-m MI-SA doit donc démontrer que les parties ont entendu volontairement soumettre leurs relations aux dispositions de la Convention Collective Française des Entreprises de Propreté susvisée.

Force est de constater toutefois, en l'absence notamment de toute mention en ce sens dans le contrat de travail d'a-m MI-SA, dans le règlement intérieur applicable au sein de la SAM PARTNER'S SERVICE ou sur les fiches de paie de la demanderesse, que cette preuve n'est pas rapportée.

Que par suite les dispositions de cet accord collectif étranger s'avérant inapplicables en l'espèce, a-m MI-SA doit être déboutée de sa demande en paiement d'une prime de transport, étant observé, à titre surabondant, qu'à défaut d'avoir versé aux débats l'accord du 10 novembre 1998 étendu par arrêté du 20 janvier 1999, cette dernière ne justifie pas, en tout état de cause, du montant de ladite prime pour la période antérieure au 1er janvier 2002.

B) Sur la demande en paiement de dommages et intérêts pour non-respect du repos compensateur

a-m MI-SA justifie sa demande de dommages et intérêts par le fait que son employeur l'aurait, pendant toute la durée de son contrat de travail, contrainte à travailler de façon continue sans bénéficier du repos compensateur.

Si la législation monégasque fixe certes (cf. Ordonnance Loi n° 677 du 2 décembre 1959 modifiée) :

– la durée normale du travail,

– la durée maximale d'une semaine de travail,

– la durée moyenne maximale du travail sur plusieurs semaines,

– le régime des heures supplémentaires,

– la durée du repos entre deux journées consécutives de travail,

elle ne contient en revanche aucune disposition relative au repos compensateur d'heures supplémentaires ou du travail de nuit, similaire ou comparable à celles existant à ce jour en droit positif français.

a-m MI-SA n'établissant par suite nullement son droit à bénéficier d'un quelconque repos compensateur, sa demande de dommages et intérêts n'est pas fondée et sera donc rejetée.

C) Sur la demande de dommages et intérêts pour violation par l'employeur de son obligation de loyauté

En application des dispositions des articles 2 de la loi n° 729 du 16 mars 1963 et 989 alinéa 3 du Code civil, le contrat de travail, comme n'importe quelle convention, doit être exécuté de bonne foi.

La bonne foi contractuelle étant cependant présumée de la part de l'un et de l'autre des cocontractants, fût-il l'employeur, il appartient au salarié qui se prévaut d'une violation par l'employeur de son obligation de loyauté d'en rapporter la preuve.

Il incombe donc à a-m MI-SA, qui soutient avoir été contrainte de quitter son emploi à la suite des manœuvres qu'aurait exercées son employeur à son encontre, de démontrer que les diverses décisions la concernant prises par la SAM PARTNER'S SERVICE au cours de l'exécution de son contrat de travail, parmi lesquelles notamment son affectation à compter du 29 mars 2001 sur un nouveau site de travail, reposaient sur des considérations étrangères à l'intérêt de l'entreprise ou ont été mises en œuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle.

Force est de constater, toutefois, que cette preuve n'est en l'espèce nullement rapportée.

Qu'en effet en premier lieu, dès lors qu'elle ne comporte pas, rédigée de la main de son auteur, la mention exigée par l'alinéa 5 de l'article 324 du Code de procédure civile, l'attestation établie par Madame AN est entachée de nullité et se trouve comme telle dépourvue de tout effet probatoire.

Qu'en tout état de cause le contenu de cette attestation et notamment les allégations relatives à l'insuffisance et au mauvais état du matériel mis à la disposition d'a-m MI-SA pour effectuer son travail, se trouvent formellement contredites par les factures établies les 21 juillet 2000 et 26 janvier 2001 par l'établissement à l'enseigne MA PRODUCT MC, lesquelles démontrent au contraire que la SAM PARTNER'S SERVICE avait fait l'acquisition, spécifiquement pour le chantier du GRIMALDI FORUM, de nombreux matériels techniques (Aspirobrosseurs, Aspirateurs, Monobrosses, Autolaveuses…).

Que par ailleurs, en l'état :

– des dispositions de l'article 6 du règlement intérieur de la SAM PARTNER'S SERVICE, lequel prévoit expressément qu'en fonction des contraintes imposées par les clients l'employeur peut être amené non seulement à déplacer un salarié d'une équipe à une autre mais également à l'affecter provisoirement, ou pour une durée indéterminée, dans un autre site en Principauté, voire même dans les communes limitrophes,

– de la distance kilométrique (quelques centaines de mètres seulement) séparant l'ancien (GRIMALDI FORUM) et le nouveau (CAFE DE PARIS) lieu de travail d'a-m MI-SA,

– des incidences très limitées sur l'horaire antérieurement dévolu à a-m MI-SA de sa nouvelle affectation,

et en l'absence de tout élément contraire, cette dernière ne démontre pas en quoi la mutation décidée par son employeur dans le cadre de son pouvoir de direction serait constitutive d'une sanction à son égard plus que d'une décision d'organisation.

Que de même dès lors :

– qu'il résulte des correspondances en date du 28 mars 2001 échangées entre les parties que la modification de l'affectation de cette salariée n'a pas été mise en œuvre brutalement mais a été précédée de plusieurs entretiens avec ses responsables hiérarchiques,

– que l'affirmation d'a-m MI-SA, selon laquelle il aurait été clairement convenu avec son employeur lors de son recrutement qu'elle devrait pouvoir effectuer les transports entre son domicile et son lieu de travail avec sa fille, concomitamment embauchée, dans la mesure où cette dernière ne disposait pas de véhicule, n'est étayée par aucune pièce quelle qu'elle soit, le permis de travail et les fiches de paie de m SA n'ayant même pas été produits aux débats,

– que la baisse, à compter du mois de mars 2001, de la rémunération servie à a-m MI-SA n'est pas la résultante d'une diminution de l'horaire de travail contractuellement fixé à 35 heures par semaine, mais s'explique d'une part par la disparition des heures supplémentaires effectuées les deux mois précédents et d'autre part par les absences de la salariée (15 h 75 d'absence au cours du mois d'avril 2001),

cette dernière n'établit pas davantage que les décisions mises en œuvre par la SAM PARTNER'S SERVICE aient été prises dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle.

Aucun manquement de l'employeur à son obligation de loyauté n'apparaissant ainsi caractérisé a-m MI-SA, qui a en définitive librement démissionné de l'emploi qu'elle occupait au sein de la SAM PARTNER'S SERVICE, n'est pas fondée à solliciter l'allocation de dommages et intérêts et doit être par suite déboutée de la demande qu'elle a introduite de ce chef deux ans et demi après son départ de l'entreprise.

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,

Statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort, après en avoir délibéré.

Rejette la fin de non-recevoir tirée de la forclusion soulevée par la SAM PARTNER'S SERVICE.

Déclare recevables les demandes soumises à la présente juridiction par a-m MI-SA.

Condamne la SAM PARTNER'S SERVICE à payer à a-m MI-SA la somme de :

  • 230,00 euros, (deux cent trente euros), à titre de rappel de salaires, laquelle produira intérêts au taux légal à compter de la convocation en conciliation valant mise en demeure.

Déboute a-m MI-SA du surplus de ses prétentions.

Fait masse des dépens qui seront supportés à raison d'un quart par la SAM PARTNER'S SERVICE et des trois quarts restants par a-m MI-SA, et recouvrés, en ce qui concerne cette dernière, conformément à la législation régissant l'assistance judiciaire.

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