Tribunal du travail, 12 décembre 2002, a DE c/ la Société Étrangère SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED

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Résumé🔗

La charge de la preuve de la validité du motif de licenciement économique incombe à l'employeur dont la décision de restructuration doit émaner de lui et non d'une société tierce.

Un salarié engagé en qualité de technicien informatique, victime d'un licenciement dit économique, soutient à l'appui d'une demande d'indemnités de rupture, avoir été embauché avant la date officielle de son recrutement et licencié de fait avant la notification de la rupture. En indiquant de surcroit dans la lettre de rupture qu'un nouveau poste allait être crée en remplacement du sien, la société qui l'employait admettrait elle-même le caractère fallacieux des motifs invoqués par ses soins.

La société qui l'employait prétendait que le travail du demandeur antérieurement à la date d'embauche ne s'était pas effectué dans le cadre d'un contrat de travail, que le motif économique- une stratégie de restructuration nécessitée par une conjoncture économique défavorable- est réel et que le salarié ayant violé un accord dit de confidentialité est redevable à ce titre, reconventionnellement, de dommages et intérêts.

Le tribunal s'attache, en premier lieu, à la qualification du contrat pendant la période litigieuse et déduit le lien de subordination juridique des « termes injonctifs » d'un message électronique, d'ordres et de directives donnés par un « agent responsable », de fiches d'interventions comportant l'indication de son nom comme technicien intervenant ainsi que d'un accord de confidentialité « unilatéral ». La réalité d'un contrat de travail est ainsi démontrée avant sa conclusion formelle.

La juridiction saisie estime ensuite non rapportée la preuve de la réalité des difficultés financières alléguées. La décision de restructuration émane de surcroit, en l'espèce, d'une société tierce et, de toute façon, la société employeur n'établit pas en quoi la restructuration devait entrainer le licenciement du salarié concerné. Le motif économique n'est donc pas avéré et ceci d'autant plus que l'employeur, dans ses écrits, légitime la mesure prise par des menaces proférées par le salarié et une campagne de dénigrement menée par lui. Les indemnités de licenciement sous déduction de l'indemnité de congédiement ainsi que des dommages intérêts pour rupture abusive sont donc accordées, ces dernières au motif notamment « de la brutalité dont l'employeur a fait preuve en s'affranchissant de toutes les règles de droit social applicables en Principauté de Monaco ».

La clause de non concurrence qui ne comporte d'ailleurs aucune contrepartie, quant à elle, n'est pas valable et ne saurait produire effet.


Motifs🔗

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu la requête introductive d'instance en date du 7 mai 2001 ;

Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 29 mai 2001 ;

Vu les conclusions déposées par Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur, au nom de Monsieur a DE, en dates des 28 juin 2001, 2 mai 2002 et 27 mai 2002 ;

u les conclusions déposées par Maître Jean-Charles S. GARDETTO, avocat-défenseur, au nom de la Société Étrangère SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED, en date du 13 décembre 2001 ;

Vu les conclusions déposées par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de la Société Étrangère SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED SYSTEMS LIMITED, en date du 18 juillet 2002 ;

Après avoir entendu Maître Christophe SOSSO, avocat à la Cour d'Appel de Monaco, au nom de Monsieur a DE, et Maître Thomas GIACCARDI, avocat-stagiaire à la Cour d'Appel de Monaco, au nom de la Société Étrangère SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED, en leurs plaidoiries ;

Lesdits avocat et avocat-défenseur ayant repris et maintenu à ce jour leurs conclusions en l'état de la composition différente du Tribunal ;

Vu les pièces du dossier ;

Ensuite d'un procès-verbal de défaut en date du 28 mai 2001, a DE a attrait son ancien employeur, la société étrangère SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED, devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, afin :

  • de voir dire et juger

• qu'il est entré au service de ladite société le 16 juillet 1998, avec toutes conséquences légales,

• qu'il a été effectivement licencié le 5 avril 2001,

• que son licenciement officialisé par lettre en date du 20 avril 2001, allégué de licenciement pour motif économique, est intervenu pour un faux motif et revêt en outre un caractère abusif.

  • d'obtenir l'allocation à son profit des sommes suivantes :

• 21.780,00 F, à titre d'indemnité de licenciement,

• 33.000,00 F, à titre d'indemnité de préavis,

• 4.950,00 F, à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, dont à déduire la somme de 51.037,35 F perçue par ses soins le 20 avril 2001.

  • 600.000,00 F, à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, le tout avec intérêts de droit à compter du licenciement et sous le bénéfice de l'exécution provisoire.

  • d'obtenir, sous astreinte de 500 F par jour de retard ensuite de la date de dépôt de la requête introductive d'instance, la délivrance des documents suivants :

• certificat de travail,

• attestation ASSEDIC.

À la date fixée par les convocations les parties ont régulièrement comparu.

Puis, après onze renvois intervenus à la demande des avocats, l'affaire a été contradictoirement débattue le 7 novembre 2002, et le jugement mis en délibéré pour être prononcé ce jour 12 décembre 2002.

a DE soutient en premier lieu à l'appui de ses prétentions que s'il a certes été officiellement embauché par la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED le 9 mars 1999 en qualité de technicien informatique, il est en réalité entré au service de ladite société dès le 16 juillet 1998, ainsi que l'attestent les documents divers versés par ses soins aux débats.

Il fait valoir par ailleurs, que s'il a bien reçu notification le 20 avril 2001, en la forme recommandée avec avis de réception, d'une lettre de congédiement pour motif économique, son employeur, en lui demandant le 5 avril 2001 d'une part de restituer les clés des locaux et d'autre part de ne plus se représenter sur son lieu de travail, l'a licencié de fait dès cette date.

Il prétend en outre que le motif économique invoqué tardivement par la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED n'est pas avéré, aucun des éléments versés aux débats ne permettant d'établir l'existence de difficultés économiques ou d'une restructuration.

Qu'au surplus, en indiquant dans la lettre de rupture qu'un nouveau poste allait être créé en remplacement du sien, la société défenderesse admet elle-même le caractère fallacieux du motif invoqué par ses soins.

Il estime enfin qu'au regard des conditions factuelles particulièrement inadmissibles dans lesquelles la rupture de son contrat de travail est intervenue, l'employeur a en l'espèce fait un usage abusif du droit unilatéral de rupture qui lui est reconnu par la loi.

Soulignant pour sa part d'une part que les conditions d'intervention d'a DE au sein de l'entreprise antérieurement au 8 mars 1999 ne sont pas de nature à caractériser l'existence d'un contrat de travail, d'autre part que le licenciement intervenu le 20 avril 2001 repose sur un motif économique clair et indiscutable et enfin qu'à partir du moment où sa demande de restitution des clés était parfaitement légitime, compte tenu de l'attitude adoptée par a DE, aucune faute dans l'exercice de son droit unilatéral de rupture ne peut lui être sérieusement reprochée, la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED conclut au rejet de l'intégralité des prétentions formulées à son encontre par a DE.

Se prévalant par ailleurs de la violation par a DE de l'accord de confidentialité signé le 17 juillet 1998, la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED sollicite reconventionnellement la condamnation d'a DE au paiement d'une somme de 500.000,00 F à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice par elle subi.

Elle invoque, à l'appui de ses prétentions, les moyens suivants :

  • Sur l'existence d'un contrat de travail antérieurement au 8 mars 1999 :

  • la charge de la preuve d'un tel contrat incombe à celui qui s'en prévaut, et donc en l'espèce à a DE,

  • si ce dernier est effectivement intervenu au sein de l'entreprise à compter du 17 juillet 1998 pour se familiariser avec les logiciels et progiciels développés, cette activité ne suffit pas en l'absence d'une part de tout lien de subordination juridique (pas d'horaire de travail – entière liberté d'organisation) et d'autre part de perception d'un salaire à caractériser l'existence d'un contrat de travail.

  • En ce qui concerne la validité du motif économique de rupture :

  • le motif économique invoqué dans la lettre de licenciement du 20 avril 2001, à savoir une stratégie de restructuration nécessitée par une conjoncture économique défavorable, est valable au regard de la jurisprudence monégasque,

  • il est en outre réel et clairement établi par les pièces produites, à savoir les déclarations de TVA pour la période de janvier 2000 à avril 2001 d'une part et le procès-verbal d'assemblée de la société ENSYNERGY TECHNOLOGY datant de février 2001 d'autre part,

  • la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED, postérieurement au licenciement d'a DE, n'a embauché personne en remplacement.

  • En ce qui concerne le caractère abusif de la rupture :

  • en raison d'une part des menaces proférées par a DE quant à l'usage qu'il envisageait de faire de la correspondance privée de la société et d'autre part de l'absence de Monsieur B HA de MONACO, à compter du 5 avril 2001, la demande de restitution des clés du local de la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED à MONACO était parfaitement justifiée,

  • la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED s'est conformée non seulement aux dispositions du contrat de travail mais aussi à celles résultant des articles 6 et 7 de la loi n° 629 en proposant à a DE un poste au Royaume Uni correspondant à son profil, que celui-ci a refusé.

  • En ce qui concerne la demande reconventionnelle

Alors que l'article 17 de l'accord de confidentialité en date du 17 juillet 1998 interdit à a DE, sauf à avoir au préalable obtenu l'accord écrit de la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED, pendant la durée de l'accord ou pendant une période de trois ans au terme de celui-ci d'exercer ou d'avoir des intérêts dans une activité en concurrence directe ou indirecte de celle exercée par cette société, il résulte des pièces produites que l'intéressé a proposé ses services à deux sociétés concurrentes, et réalisé des interventions sur des logiciels développés par la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED.

a DE fait valoir à son tour en réplique aux arguments invoqués par son ancien employeur :

  • En ce qui concerne l'existence du contrat de travail à compter du 17 juillet 1998

Les pièces qu'il a versées aux débats démontrent clairement la réalité du travail qu'il a exécuté sous l'autorité de Monsieur b HA, lequel avait le pouvoir de lui donner des ordres et directives et ce contre paiement d'un salaire.

  • En ce qui concerne la validité du motif économique de rupture :

  • les documents communiqués qui ne comprennent même pas le nom de la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED, sont manifestement insuffisants pour établir la réalité des difficultés économiques alléguées,

  • en l'état des liens étroits existant entre les sociétés SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED et ENSYNERGY, l'appauvrissement allégué est purement artificiel,

  • la décision de restructuration n'a pas été prise par la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED mais par la société ENSYNERGY,

  • la société défenderesse ne démontre pas en tout état de cause en quoi la restructuration devait entraîner le licenciement d'a DE, alors que ce dernier possédait toutes les compétences nécessaires pour occuper le poste de consultant nouvellement créé.

  • En ce qui concerne la demande reconventionnelle :

  • l'accord de confidentialité, qui n'est pas signé par les parties et qui est en outre contraire au principe de la liberté du travail, ne peut créer aucune obligation à la charge du salarié,

  • le préjudice dont se prévaut la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED n'est pas démontré.

SUR CE,

1) Sur l'existence d'un contrat de travail antérieurement au 9 mars 1999

Alors que la date d'embauche portée sur son permis de travail est le 9 mars 1999, a DE soutient avoir en réalité été engagé en qualité de technicien informatique par la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED dès le 16 juillet 1998.

Il est constant en droit que l'exécution d'un travail pour autrui peut donner naissance à divers types de contrats, qui ne pourront être qualifiés de contrats de travail qu'en présence des critères essentiels que sont l'existence d'un lien de subordination juridique entre les parties, et donc l'absence corrélative d'indépendance de celui qui apporte sa force de travail, et le versement d'une rémunération par le donneur d'ouvrage au profit duquel le travail est effectué.

La présence d'a DE dès le 16 juillet 1999 au sein du bureau exploité en Principauté de MONACO par la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED n'étant pas contestée par cette société, il convient de rechercher, au vu des pièces versées aux débats par le demandeur, à qui incombe en l'espèce la charge de la preuve, si l'activité exercée par a DE pour le compte de la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED répondait aux deux critères ci-dessus mentionnés.

Il résulte en premier lieu clairement des termes injonctifs employés par Monsieur b HA dans le message électronique en date du 1er décembre 2001, aux termes duquel il assigne à a DE les tâches précises à accomplir au cours de la matinée, que les interventions réalisées par ce dernier pour le compte de la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED s'effectuaient en fonction des ordres et des directives qui lui étaient données par l'« agent responsable ».

Par ailleurs, en versant aux débats un ordre de virement en date du 26 août 1998 établi à son profit par la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED, a DE démontre que ses interventions pour le compte de la société défenderesse donnaient lieu à versement d'un salaire.

Combinées avec d'autres indices tels que la signature le 17 juillet 1998 d'un accord de confidentialité unilatéral et les nombreuses fiches d'intervention établies au cours des mois de juillet et août 1998 sur papier à entête de la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED, comportant l'indication du nom d'a DE comme technicien intervenant, ces deux éléments suffisent à caractériser l'existence dès le 17 juillet 1998 d'un contrat de travail entre ce dernier et la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED.

Force est de constater enfin et en tout état de cause que la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED, qui prétend qu'a DE n'aurait œuvré en son sein à compter du mois de juillet 1998 que pour « se familiariser avec les logiciels et progiciels développés » s'avère encore aujourd'hui incapable de préciser le cadre juridique précis, au regard de la législation monégasque, dans lequel s'inscrivait cette prétendue « collaboration ».

Il convient en définitive sur ce premier point de faire intégralement droit à la demande d'a DE en constatant avec toutes ses conséquences de droit l'existence d'un contrat de travail entre les parties à compter du 16 juillet 1998.

2) Sur le licenciement

a) Sur la validité du motif

Le motif économique de la rupture du contrat de travail d'a DE, tel qu'il a été énoncé par l'employeur dans la lettre du 20 avril 2001, réside dans « la restructuration des activités de la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED en Principauté de MONACO » qui entraînera la suppression du poste de technicien informatique de l'intéressé, dans la mesure où « la partie technique des activités de la société se trouvera dorénavant gérée principalement depuis le centre technique de la société situé au Royaume Uni ».

Il est également précisé, dans cette correspondance, d'une part que cette rationalisation a été rendue nécessaire par la conjoncture économique, et d'autre part que le nouveau poste que la société serait amenée à créer requiert des qualifications et une expérience de consultant qu'a DE ne possède pas.

Alors pourtant que la charge de la preuve de la validité du motif incombe à l'employeur, force est de constater en l'espèce que les quelques éléments versés aux débats (photocopies de déclarations de TVA dont l'authenticité n'est nullement garantie), ne suffisent pas, en l'état au surplus des relations extrêmement étroites existant entre la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED et la société ENSYNERGY, à établir la réalité des difficultés financières alléguées.

Que par ailleurs, si le chef d'entreprise est certes en droit, comme le rappelle la société défenderesse, lorsque des difficultés d'ordre économique l'y contraignent de prendre les dispositions nécessaires pour permettre à son entreprise de faire face à ces difficultés et le cas échéant d'assurer sa survie, encore faut-il toutefois que la décision de restructuration émane de l'employeur lui-même, et non comme c'est le cas en l'espèce, d'une société tierce.

Qu'en outre, à supposer que les difficultés économiques et la restructuration alléguées soient avérées, la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED n'établit pas en l'espèce en quoi cette restructuration devait nécessairement entraîner le licenciement d'a DE, dès lors qu'un poste de consultant devait être concomitamment créé.

Le motif économique allégué ne peut ainsi être considéré comme avéré.

Il est constant, en tout état de cause, que la notification du licenciement intervenue le 20 avril 2001 a été précédée d'une éviction brutale de l'intéressé de son poste de travail, qui lui a été oralement signifiée le 5 avril 2001 et dont la réalité a été ultérieurement constatée par Huissier, laquelle s'assimile en droit, en une mise à pied « conservatoire ».

En indiquant sans pour autant en avoir justifié, dans la lettre de rupture adressée à l'intéressé quinze jours après pour régulariser cette situation et dans ses écrits judiciaires que cette mesure avait été rendue nécessaire par les menaces proférées à son encontre par a DE et la campagne de dénigrement dont elle aurait été l'objet, la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED reconnaît elle-même le caractère fictif du motif économique de rupture invoqué par ses soins.

a DE, compte tenu d'une part de son ancienneté de services réelle au sein de la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED (deux ans et neuf mois) et d'autre part du montant de sa rémunération mensuelle (16.500 F à compter du mois d'octobre 2000) est donc en droit de prétendre à l'allocation des sommes suivantes :

  • au titre du préavis (deux mois) : 33.000 F soit 5.030,82 € somme qu'il a effectivement perçue le 20 avril 2001 ;

  • au titre de l'indemnité de licenciement :

  1. 500 x 33 (préavis inclus) / 25 = 21.780 F soit 3.320,34 €.

a DE ayant reçu de son employeur une indemnité de congédiement s'élevant à 3.776,67 F qui n'est pas cumulable avec l'indemnité de licenciement susvisée, ce dernier est en droit d'obtenir paiement par la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED de la somme de : 21.780 – 3.776,67 soit 18.003,30 F.

Le salarié, au vu des mentions contenues dans l'attestation ASSEDIC versée aux débats, ayant été rempli de ses droits à congés payés par le versement d'une somme de 9.175 F, il y a lieu de le débouter de sa demande en paiement à ce titre d'une somme de 4.950 F, laquelle n'est au demeurant ni explicitée, ni justifiée par la moindre pièce.

La société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED sera donc en définitive condamnée à régler à a DE la somme de 18.003,33 F soit 2.744,59 € au titre de l'indemnité de licenciement.

b) Sur le caractère abusif de la rupture

Au regard d'une part des circonstances factuelles particulièrement critiquables dans lesquelles est intervenue la rupture, et notamment de la brutalité dont l'employeur a fait preuve en s'affranchissant de toutes les règles de droit social applicables en Principauté de MONACO et d'autre part du caractère fallacieux du motif économique invoqué le licenciement intervenu revêt incontestablement un caractère abusif.

Compte tenu de l'ancienneté de services d'a DE (deux ans et neuf mois), de son âge (37 ans) lors de la rupture, du montant de sa rémunération (16.500 F), le préjudice essentiellement d'ordre moral subi par ce dernier, dont la situation professionnelle actuelle demeure inconnue de ce Tribunal sera justement réparé par l'allocation d'une somme de 8.000 € à titre de dommages et intérêts.

Les documents administratifs (certificat de travail et attestation ASSEDIC) remis à a DE par la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED comportant des informations erronées, notamment en ce qui concerne la date d'entrée en fonction de l'intéressé, cette dernière doit être condamnée à délivrer à son ancien salarié des documents conformes au dispositif de la présente décision, sans qu'il y ait toutefois lieu d'assortir cette condamnation d'une astreinte.

c) Sur la demande reconventionnelle

La demande reconventionnelle en paiement de la somme non négligeable de 500.000 F est fondée sur un accord dit de confidentialité, conclu le 17 juillet 1998 entre les parties, lequel fait notamment interdiction à a DE, pendant un délai de trois ans à compter de l'expiration de son contrat de travail, d'exercer ou d'avoir des intérêts en Principauté de MONACO dans une activité en concurrence directe ou indirecte avec celle de la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED.

Dans la mesure où elle constitue effectivement une entrave à la liberté du travail, une clause de non concurrence pour pouvoir produire effet doit satisfaire à certaines conditions.

Elle doit ainsi être libellée en des termes clairs et explicites démontrant que le salarié, lorsqu'il a signé le document comportant une telle clause, avait parfaitement conscience de la portée de son engagement.

Tel n'est assurément pas le cas en l'espèce, s'agissant d'un document TYPE rédigé en langue anglaise sur trois pages et comportant au total dix-sept articles différents, établi entre un propriétaire et un bénéficiaire, et non entre un employeur et un salarié, et dont l'engagement de non concurrence stipulé in fine ne constitue qu'une infime partie des obligations de tous ordres mises à la charge d'a DE, sans qu'aucune contrepartie n'ait été prévue à son profit.

Cet accord ne pouvant dans ces conditions produire aucun effet, la demande reconventionnelle en dommages et intérêts formée par la société SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED doit être rejetée.

L'exécution provisoire sollicitée par le demandeur n'étant ni nécessaire ni opportune, la demande à cette fin sera rejetée.

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,

Statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort, après en avoir délibéré.

Constate, avec toutes ses conséquences de droit, l'existence d'un contrat de travail entre les parties à compter du 16 juillet 1998.

Dit que le licenciement d'a DE a été mis en œuvre pour un motif non valable.

Dit que cette mesure revêt un caractère abusif.

Condamne, en conséquence, compte tenu des sommes versées pour solde de tout compte le 20 avril 2001, la Société Étrangère SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED à verser à a DE la somme de :

• 18.003,33 Francs, (dix-huit mille trois francs et trente-trois centimes), soit 2.744,59 euros, (deux mille sept cent quarante-quatre euros et cinquante-neuf centimes), au titre de l'indemnité de licenciement.

Constate qu'a DE a été rempli de ses droits en ce qui concerne l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés.

Condamne en outre la Société Étrangère SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED à verser à a DE la somme de :

• 8.000,00 euros, (huit mille euros), à titre de dommages et intérêts.

Ordonne à la Société Étrangère SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED de délivrer à a DE, dans le délai d'un mois suivant la signification de la présente décision, un certificat de travail et une attestation ASSEDIC conformes au dispositif de la présente décision.

Déboute a DE du surplus de ses prétentions.

Déboute la Société Étrangère SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts.

Condamne la Société Étrangère SOLUTION 6 SYSTEMS LIMITED aux entiers dépens.

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