Tribunal Suprême, 30 novembre 2009, Sieur A. S. c/ État de Monaco

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Abstract🔗

Compétence

Contentieux administratif - Recours en annulation - Acte administratif individuel

Procédure

Avis de la Commission médicale supérieure - Décision faisant grief (non) - Recours contre l'avis - Irrecevabilité


Motifs🔗

Le Tribunal Suprême

Siégeant et délibérant en assemblée plénière et statuant en matière administrative,

Vu la requête de M. A. S. enregistrée au greffe du Tribunal suprême le 3 octobre 2008 sous le n° 2009/01, et tendant à l'annulation de la décision de la commission médicale supérieure du 14 janvier 2008,

Ce faire,

Attendu que M. S., né à Nice le 25 mars 1979, de nationalité française, postulant en 2006 aux fonctions d'élève agent de police contractuel, a été soumis alors à divers examens médicaux, la Commission médicale de recrutement réunie le 14 décembre 2006 ayant estimé qu'il remplissait les conditions d'aptitude physique pour exercer lesdites fonctions ; qu'un an plus tard, se présentant cette fois au concours d'agent de police stagiaire, M. A. S. a été jugé médicalement inapte par cette même Commission, réunie le 5 décembre 2007 ;

Que le 13 décembre 2007, conformément aux dispositions de l'article 40 de l'ordonnance n° 6.365 du 17 août 1978 fixant les conditions d'application de la loi n° 975 du 12 juillet 1975 portant statut des fonctionnaires de l'État, M. S. a adressé une réclamation au Directeur de la fonction publique contestant le bien-fondé de la décision prise à son encontre, et demandant un avis médical contradictoire de la Commission médicale supérieure ; que cette dernière s'étant réunie le 14 janvier 2008, M. S. s'est vu notifier, par courrier du Directeur de la fonction publique en date du 16 janvier 2008, une décision confirmant celle qui avait été formulée le 5 décembre précédent par la Commission médicale de recrutement ; que c'est cette décision du 14 janvier 2008 qui se trouve contesté par M. S. ;

Attendu que celle-ci serait entachée de vices, tant sur le plan de sa légalité externe que sur celui de sa légalité interne ; que, sur le plan de sa légalité externe, la décision contestée contreviendrait d'abord aux dispositions de la loi n° 1.312 du 29 juin 2006 relative à la motivation des actes administratifs, la décision n'étant nullement motivée et n'expliquant pas en quoi M. S. serait devenu inapte à une fonction à laquelle il avait été jugé apte un an auparavant ; qu'en outre elle aurait été rendue par une autorité incompétente, la Commission médicale supérieure ne pouvant qu'émettre des avis, alors que c'est bien comme une décision qu'était présenté l'acte émanant de celle-ci dans différents courriers adressés à M. S. ; que sur le plan de la légalité interne, ladite décision s'avère entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, M. S. ayant été déclaré inapte par la même Commission qui l'avait reconnu apte un an plus tôt, bien que son état de santé physique et psychique ne se soit nullement dégradé au cours de cette période ;

Attendu enfin, et subsidiairement, que dans l'hypothèse où le Tribunal Suprême s'estimerait insuffisamment instruit, il lui est demandé de bien vouloir désigner un expert afin de prendre connaissance du dossier médical du requérant et de procéder aux examens nécessaires, afin de pouvoir indiquer audit Tribunal si l'état de santé de M. S. justifie bien que lui soit interdit l'accès au poste sollicité ;

Vu la contre requête de M. le Ministre d'État enregistrée au greffe le 5 décembre 2008 ;

Attendu qu'après que le Directeur des ressources humaines et de la fonction publique a notifié à M. S. par lettre du 18 décembre 2007, suite à l'avis de la Commission médicale de recrutement réunie le 5 décembre 2007, qu'il cesserait ses fonctions d'élève agent de police le 28 janvier 2008 après son service, celui-ci a demandé la saisine de la commission médicale supérieure en vertu de l'article 40 de l'ordonnance du 17 août 1978, laquelle a rendu, le 14 janvier 2008, un avis confirmant celui de la Commission médicale de recrutement, avis notifié à l'intéressé par lettre du 16 janvier 2008 ; que M. S. ayant formé un recours gracieux auprès du Ministre d'État demandant à ce dernier de bien vouloir reconsidérer la décision de la commission médicale supérieure du 14 janvier 2008, celui-ci a accepté de saisir à nouveau la Commission médicale supérieure, laquelle, ayant reçu M. S. le 3 juillet 2008, confirma finalement en tous points les avis rendus le 5 décembre 2007 puis le 14 janvier 2008 ; que, par décision du 6 août 2008, le ministre d'État a confirmé à M. S. qu'il ne remplissait pas les conditions d'aptitude exigées pour les fonctions d'agent de police avec port d'armes, et lui a notifié le rejet de son recours ; que M. S. a saisi le Tribunal Suprême d'une demande tendant à l'annulation de la décision de la Commission médicale supérieure en date du 14 janvier 2008 ;

Attendu qu'une telle demande est irrecevable en ce qu'elle est dirigée contre un avis de la Commission médicale supérieure, lequel ne constitue pas une décision faisant grief ;

Attendu, subsidiairement, que l'avis rendu par la Commission médicale supérieure le 14 janvier 2008, seul contesté par le requérant, n'avait pas à être motivé, un simple avis ne relevant pas des dispositions de la loi n° 1.312 du 29 juin 2006 ; que le reproche fait à cet avis, d'être entaché d'une erreur manifeste d'appréciation n'est pas plus recevable, l'avis initial émis en décembre 2006 par la Commission médicale de recrutement et les certificats établis à sa demande par les propres médecins de M. S. n'invalidant en rien la pertinence de l'avis rendu par ladite Commission un an plus tard ;

Vu la réplique de M. S., enregistrée le 5 janvier 2009, tendant aux mêmes fins et par les mêmes moyens que sa requête, alléguant en outre l'irrecevabilité de la contre requête, les pièces et documents visés par cette dernière n'ayant pas été joints, en infraction avec l'article 19 de l'ordonnance n° 2.984 sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême ;

Vu la duplique du Ministre d'État enregistrée le 6 février 2009, tendant au rejet de la requête par les mêmes moyens que précédemment, et contestant en outre l'irrecevabilité invoquée par la réplique au motif que deux pièces annoncées par le bordereau de production n'auraient pas été jointes, alors qu'elles l'étaient bien, comme en atteste une lettre du greffier en chef du Tribunal Suprême en date du 21 janvier 2009.

Vu la décision attaquée ;

Vu l'Ordonnance souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963 sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême modifiée ;

Vu la Constitution et notamment son article 90 B-1° ;

Vu la loi n° 975 du 12 juillet 1975 portant statut des fonctionnaires de l'État ;

Vu l'Ordonnance n° 6.365 du 17 août 1978, fixant les conditions d'application de la loi susvisée :

Vu la loi n° 1.312 du 29 juin 2006 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu l'ordonnance du 1er octobre 2009 par laquelle le Président du Tribunal Suprême a renvoyé la cause à l'audience du 18 novembre 2009 ;

Ouï M. Frédéric Rouvillois, membre suppléant du Tribunal Suprême, en son rapport ;

Ouï Me Frank Michel, avocat défenseur, pour M. A. S. ;

Ouï Me Jacques Molinié, avocat au conseil d'État et à la Cour de cassation français, pour l'État de Monaco ;

Ouï Monsieur le Procureur Général en ses conclusions ;

Après en avoir délibéré :

Considérant qu'aux termes de l'article 90 B-1° de la Constitution, le Tribunal Suprême statue souverainement « sur les recours en annulation pour excès de pouvoir formés contre les décisions des diverses autorités administratives » ; qu'il ressort de cette disposition que seules de véritables décisions faisant grief au requérant peuvent lui être déférées ;

Considérant que l'avis de la Commission médicale supérieure en date du 14 janvier 2008, seul contesté par M. S., ne constitue pas une décision au sens de l'article 90 B-1° précité de la Constitution, mais un acte préparatoire à la décision du Ministre d'État, non déférée, en date du 6 août 2008 ; qu'en conséquence la requête de M. A. S. est irrecevable.

Dispositif🔗

DÉCIDE :

Article 1er. – La requête de M. A. S. est rejetée.

Article 2. – Les dépens sont mis à la charge de M. A. S.

Article 3. – Expédition de la présente décision sera transmise à Son Excellence M. le ministre d'État.

Article 1er🔗

La requête de M. A. S. est rejetée.

Article 2🔗

Les dépens sont mis à la charge de M. A. S.

Article 3🔗

Expédition de la présente décision sera transmise à Son Excellence M. le ministre d'État.

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