Tribunal Suprême, 5 décembre 2007, Sieur O. C. c/ Centre Hospitalier Princesse Grace

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Abstract🔗

Compétence

Contentieux administratif - Recours en annulation - Acte administratif individuel

Recours pour excès de pouvoir

Établissement public - Agent stagiaire - Décision de refus de titularisation - Ordonnance souveraine n° 7.464 portant statut du personnel de service du Centre Hospitalier Princesse Grâce, du 25 juillet 1982 - Applicabilité


Motifs🔗

Le Tribunal Suprême

Siégeant et délibérant en assemblée plénière et statuant en matière administrative,

Vu la requête présentée par M. O. C., enregistrée au greffe général de la Principauté de Monaco le 19 février 2007, tendant à l'annulation de la décision prise le 18 décembre 2006 par le Directeur du Centre Hospitalier Princesse Grâce refusant de le titulariser dans le grade de Cadre de Santé et le réintégrant au grade de masseur-kinésithérapeute de classe normale, 5e échelon ;

CE FAIRE,

Attendu que M. C. a été engagé par un contrat de travail à durée déterminée à compter du 12 mars 2001 ; qu'il a ensuite été nommé kinésithérapeute classe normale stagiaire à compter du 1er juillet 2001 et titularisé dans cet emploi le 27 novembre 2002.

Que, depuis lors, par une décision en date du 10 décembre 2003, M. C. a été promu du 3e au 4e échelon à compter du 1er août 2003 ;

Que M. C. a également suivi, entre le 15 septembre 2003 et le mois de juin 2004, la scolarité en vue d'obtenir le diplôme d'État de Cadre de Santé à l'Université de Montpellier ; qu'il a obtenu son diplôme au mois de juin 2004 ; que c'est dans ces conditions que, par décision du 13 juillet 2004, M. C. a été nommé cadre de santé stagiaire, 1er échelon à compter du 1er juillet 2004 puis au 2e échelon à partir du 1er août 2004, et au 3e échelon par décision du 19 janvier 2006.

Attendu que le requérant expose que puisqu'il était déjà employé titulaire du Centre Hospitalier Princesse Grâce depuis le 27 novembre 2002, il ne pouvait plus faire l'objet d'une décision de refus de titularisation le 18 décembre 2006 dès lors qu'une mesure de titularisation – comme d'ailleurs une mesure de nomination en tant que stagiaire – ne peut être prise qu'une seule fois par application de l'article 20 du Titre II de l'Ordonnance souveraine n° 7.464 du 28 juillet 1982 portant Statut du personnel de service du Centre Hospitalier Princesse Grâce. Il en tire la conséquence que sa promotion au grade de cadre de santé ne devait être assortie ni d'une période de stage, ni d'une décision de titularisation dans ce cadre dès lors que les articles 43 à 54 du statut relatives à l'avancement ne prévoient aucune période probatoire.

Attendu que le requérant ajoute qu'en tout état de cause il pouvait d'autant moins être soumis à une période probatoire qu'il avait déjà assumé la responsabilité de cadre de santé depuis le mois de septembre 2002 en ayant « fait fonction » de cadre de septembre 2002 à septembre 2003, obtenu le diplôme de cadre de santé après un an de formation, été nommé cadre de santé à compter du 1er juillet 2004 et occupé effectivement ce poste pendant plusieurs mois. Il en déduit qu'il a, de fait, été victime d'une sanction disciplinaire déguisée, concrètement une décision de rétrogradation. Il invoque alors la violation des dispositions des articles 55 et 56 du statut et notamment l'absence de saisine préalable du Conseil de discipline.

Vu, enregistrée le 18 avril 2007, la contre-requête du Centre Hospitalier Princesse Grâce tend au rejet de la requête, par les motifs suivants :

– que dès sa prise de fonction au mois de juillet 2004, à son retour de l'École des Cadres de Montpellier, et de façon plus nette encore à compter du 1er trimestre 2005, M. C. est apparu inadapté aux fonctions de cadre de santé, comme cela ressort d'une note établie par la Direction des ressources humaines. C'est la raison pour laquelle, un avis favorable n'a pas été donné pour la titularisation de M. C. en qualité de cadre de santé et qu'une période probatoire supplémentaire a été demandée au mois de janvier 2006 ;

– que M. C. a lui-même demandé à être déchargé de ses fonctions de cadre de santé pour être réintégré dans celles de masseur-kinésithérapeute ;

– que la titularisation de M. C. n'était nullement acquise de façon automatique. Elle devait faire l'objet d'une décision expresse du Directeur, après appréciation de sa part du comportement de l'intéressé et après avis de la Commission paritaire, par application de l'article 20 de l'Ordonnance souveraine n° 7.464 portant statut du personnel de service du Centre Hospitalier Princesse Grâce du 28 juillet 1982 ; que, par voie de conséquence, M. C. devait bien également être soumis à un stage probatoire avant d'être éventuellement titularisé cadre de santé ;

– qu'en tout état de cause, M. C. ayant suivi une formation diplômante en France de cadre de santé dans la filière spécifique de Rééducation, il ne saurait être affecté dans un cadre de santé autre que celui relevant de sa filière de formation ;

– que la rétrogradation est intervenue à la demande de l'intéressé ce qui exclut sa qualification de sanction disciplinaire.

Vu, enregistrée le 23 mai 2007, la réplique de M. C. tendant aux mêmes fins que la requête et par les mêmes moyens, précisant :

– que l'Ordonnance souveraine n° 7.464 ne prévoit de titularisation qu'à la suite du recrutement ; que cette ordonnance ne prévoit pas de stage pour pouvoir bénéficier d'un avancement dès lors que son article 45 indique seulement que « l'avancement a lieu de façon continue d'échelon à échelon et de grade à grade » et que son article 46 prévoit que l'avancement de grade « a lieu exclusivement au choix d'après le tableau d'avancement » ; que c'est donc sa base légale que le CHPG aurait prévu une période de stage et que la décision critiquée aurait refusé une titularisation qui n'avait pas lieu d'être prononcée ;

– que le CHPG a, en réalité, appliqué à l'avancement de grade des dispositions du statut relatives au recrutement ;

– qu'en tout état de cause, l'article 18 de l'Ordonnance souveraine prévoit que « les agents ayant déjà accompli une année de service effectif au Centre Hospitalier Princesse de Grâce sont dispensés du stage » ;

– que le CHPG n'aurait pas pris véritablement en considération les correspondances que M. C. lui a adressées ;

– que le contenu du procès-verbal de la Commission paritaire démontre que c'est bien une Commission de discipline qui aurait du être saisie, cette Commission paritaire ayant, en tout état de cause, émis un avis favorable à la titularisation de M. C.;

– que le CHPG aurait du saisir la Commission médicale qui pouvait préconiser d'affecter M. C. dans un autre service sans rétrogradation ;

– que les notations obtenues par M. C. étaient « excellentes »;

Vu, enregistrée le 5 juillet 2007, la duplique du Centre Hospitalier Grâce de Monaco tend au rejet de la requête par les mêmes motifs que précédemment, précisant !

– que M. C. n'a plus souhaité être titularisé dans l'emploi de cadre de santé au service Médecine physique et rééducation fonctionnelle et qu'il a, au contraire, souhaité retrouver ses anciennes fonctions de masseur-kinésithérapeute ;

– que la décision critiquée vise non seulement l'insuffisance professionnelle de l'intéressé mais également de façon expresse les courriers de M. C. ;

– que c'est après avoir constaté qu'aucun autre poste n'était disponible correspondant à une activité de cadre de santé dans un autre service ou à une activité transversale que le Directeur du centre hospitalier a réintégrer M. C. dans ses fonctions initiales de masseur-kinésithérapeute ;

– que l'avis de l'Office de la Médecine du travail a confirmé l'inadaptation de M. C. au sein du service MPR ;

– qu'aucune faute disciplinaire n'a jamais été reprochée à M. C.;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu la Constitution et notamment sont article 90 ;

Vu l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963 modifiée sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême ;

Vu l'Ordonnance Souveraine n° 7.464 du 28 juillet 1982 portant statut du personnel du Centre Hospitalier Princesse Grâce et notamment ses articles 3, 17 à 20 et 45 à 49 ;

Vu l'Ordonnance du 15 octobre 2007 par laquelle le Président du Tribunal Suprême a renvoyé la cause à l'audience de ce Tribunal du 20 novembre 2007 ;

Ouï Madame Luc-Thaler, membre du Tribunal Suprême, en son rapport ;

Ouï, Maître Rieu, Avocat au Barreau de Nice, pour Monsieur C. ;

Ouï, Maître Michel pour le Centre Hospitalier Princesse Grâce ;

Ouï, Madame le Procureur général ;

Après en avoir délibéré :

Considérant que, par une décision en date du 18 décembre 2006, le Directeur du Centre Hospitalier Princesse Grâce a décidé de ne pas titulariser M. O. C. ; « cadre de santé, stagiaire » en Médecine Physique et Rééducation Fonctionnelle, dans le cadre de santé aux motifs, d'une part, que les rapports établis par ses supérieurs hiérarchiques directs faisaient état d'une incapacité à exercer les fonctions de cadre de santé, d'autre part, que M. C., par lettres en date du 17 mars et du 30 avril 2006, avait demandé dans un premier temps sa réintégration dans le grade de masseur-kinésithérapeute, puis dans un second temps sa nomination en qualité de cadre de santé dans un autre service que celui de Médecine Physique et de Rééducation Fonctionnelle, ou en charge d'une activité transversale ;

Considérant que par cette même décision, M. C. a été établi dans ses droits et obligations de masseur kinésithérapeute de classe normale, 4e échelon, puis classé au 5e échelon ;

Considérant que l'article 45 de l'Ordonnance n° 7.464 portant statut du personnel de service du Centre hospitalier Princesse Grâce dispose que « l'avancement des agents soumis au présent statut comprend l'avancement d'échelon et l'avancement de grade. L'avancement a lieu de façon continue d'échelon à échelon et de grade à grade » ; que l'article 47 du même texte dispose que « l'avancement de grade a lieu exclusivement au choix d'après le tableau d'avancement, dressé selon les dispositions des articles 48 et suivants  » ; que l'article 48 dispose que : « l'avancement de grade ne peut être accordé qu'aux agents inscrits au tableau d'avancement » ; que l'article 49 dispose que : « le tableau d'avancement de grade est établi compte tenu de la valeur professionnelle de l'agent, des notes obtenues par l'intéressé et des propositions motivées formulées par les chefs de service » ;

Considérant que les documents versés aux débats ne permettent pas de déterminer la situation de M. C., cadre de santé stagiaire, au regard de ces dispositions.

Considérant qu'il y a lieu, dès lors, en application de l'article 32 de l'Ordonnance souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963 de prescrire une mesure d'instruction pour permettre au Tribunal Suprême d'exercer son contrôle.

Dispositif🔗

Décide :

Article 1er🔗

Le Centre Hospitalier Princesse Grâce est invité à produire dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision l'ensemble des textes applicables aux cadres de santé ainsi que les éléments relatifs à la situation de M. C. au regard de ces textes et du tableau d'avancement prévu par les articles 47 et suivants de l'Ordonnance souveraine n° 7.464 du 28 juillet 1982 ;

Article 2🔗

Les dépens sont réservés ;

Article 3🔗

Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre d'État et au Centre Hospitalier Princesse Grâce.

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