Tribunal Suprême, 14 juin 2006, Syndicat des copropriétaires de l'immeuble « Le Sardanapale » c/ Ministre d'État

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Abstract🔗

Compétence

Contentieux administratif - Recours en annulation - Acte administratif réglementaire

Urbanisme et construction

Ordonnance souveraine portant délimitation, plans de coordination et règlement particulier d'urbanisme, de construction et de voirie d'un quartier ordonnancé - Ordonnance souveraine modificative - Protection du milieu marin - Travaux de nature à préserver les dommages susceptibles d'être causés au sol et au sous-sol

Recours pour excès de pouvoir

Ordonnance souveraine prévoyant la réalisation d'ouvrages nécessaires à la protection des constructions contre la mer - Disposition rattachable à la notion de travaux destinés à prévenir les dommages (oui) - Édiction de l'Ordonnance souveraine sans consultation préalable du Conseil de la Mer - Décision illégale (oui)


Motifs🔗

Le Tribunal Suprême

Siégeant et délibérant en assemblée plénière et statuant en matière administrative,

Vu la requête enregistrée au Greffe général de la Principauté de Monaco le 26 juillet 2005, par laquelle le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « Le Sardanapale » a déféré au Tribunal Suprême aux fins d'annulation, l'Ordonnance souveraine n° 15 du 10 mai 2005, publiée au Journal de Monaco le 27 mai 2005, modifiant l'Ordonnance souveraine n° 15630 du 13 janvier 2003 portant délimitation, plans de coordination et règlement particulier d'urbanisme, de construction et de voirie du quartier ordonnancé du Port Hercule ;

Ce faire :

Attendu que l'immeuble « Le Sardanapale » est situé à la hauteur de l'Anse du Portier à quelques dizaines de mètres de la mer, de laquelle il n'est séparé que par des parcelles faisant naguère partie du domaine public ; que l'Ordonnance souveraine du 13 janvier 2003, par son article 2, ne permettait dans la zone n° 7, dite de l'Anse du Portier, que la construction d'ouvrages et équipements maritimes, techniques ou légers, ce qui assurait à l'immeuble « Le Sardanapale » à la fois une vue sur la mer et une grande valeur patrimoniale ; que cette situation est remise en cause par la réalisation d'un projet, dont l'initiative provient d'un promoteur privé, portant sur l'édification dans cette zone d'un centre de loisirs destiné à la jeunesse monégasque ; qu'après l'abandon d'un premier projet de dimensions modestes, un nouveau projet de grande ampleur a été établi, pour la réalisation duquel les pouvoirs publics ont pris plusieurs mesures ; que la loi n° 1294 du 29 décembre 2004 a prononcé la désaffection de 7 parcelles du domaine public de l'État, identifiées par un plan annexé ; que, selon l'exposé des motifs du projet de loi « la réalisation d'un complexe de loisirs dans un lieu conforme aux aspirations de la jeunesse en matière de divertissement a été la préoccupation majeure du Gouvernement depuis plusieurs années », cette réalisation passe par la conclusion d'un bail à construction, qui, n'étant pas possible sur le domaine public, implique le transfert de terrains dans le domaine privé « l'utilité publique qui justifie le déclassement du domaine public vers le domaine privé, réside dans la mise à disposition de la population et notamment de la jeunesse, d'un lieu de loisirs correspondant aux aspirations contemporaines, ainsi que des retombées économiques que ne manquerait pas de susciter une telle infrastructure » ;

Que l'Ordonnance souveraine n° 15 du 10 mai 2005 a modifié l'Ordonnance souveraine n° 15 630 du 13 janvier 2003 pour ajouter à son article 2 la possibilité d'édifier dans la zone de l'Anse du Portier « un complexe de loisirs pour les jeunes, sous réserve de réaliser les ouvrages maritimes nécessaires à la protection des constructions contre la mer » et préciser dans ses articles 3 à 10, les obligations d'ordre urbanistique s'imposant au constructeur du complexe de loisirs ;

Que l'Ordonnance souveraine attaquée a été prise au terme d'une procédure irrégulière, n'ayant pas été précédée de la consultation du Comité supérieur d'urbanisme ni de celle du Conseil de la mer, alors qu'est consacrée la possibilité d'un projet d'aménagement urbain de vastes dimensions, devant avoir des effets sur le milieu marin et son environnement, protégé par l'Accord « Ramoge », instrument international auquel est partie la Principauté, qui couvre l'Anse du Portier ;

Que l'Ordonnance souveraine attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, permettant la construction d'un bâtiment dont les caractéristiques sont radicalement contraires au contraires au caractère et à l'intérêt du site et du paysage, en méconnaissance du Règlement général de voirie adopté par l'Ordonnance souveraine n° 3647 du 9 septembre 1966 (art. 7) et de toute l'évolution de la réglementation applicable à l'Anse du Portier ; que les parcelles constituant l'Anse du Portier sont expressément affectées à l'usage du public en qualité de plage publique, qui n'est reconnue à Monaco qu'à deux autres plages, dont les eaux sont d'une qualité supérieure aux leurs et qui est la seule plage publique naturelle ;

Que l'Ordonnance souveraine attaquée est également entachée de détournement de pouvoir, ayant pour but de favoriser le projet d'un promoteur immobilier, la puissance publique s'étant mise au service de celui-ci par une série de décisions dont la première a été la loi de déclassement du 29 décembre 2004, laquelle, alors les lois du 18 févier 1971 déclassaient des parcelles du domaine public à la suite de travaux publics, déclasse des parcelles en vue de la réalisation d'un projet privé ; que la protection du domaine public est assurée à Monaco par l'article 33 de la Constitution, l'inaliénabilité étant liée à l'affectation ; que la loi du 29 décembre 2004 ne procède pas de la constatation de la disparition de l'usage public de l'Anse du Portier ; que l'existence d'un « délaissé » résulte d'un constat établi par un fonctionnaire, qui est inexact ; que l'utilité publique du complexe de loisirs est discutable ; que la loi du 29 décembre 2004 relative au déclassement de parcelles de l'Anse du portier doit être rapprochée d'une deuxième loi du même jour déclassant des terrains de la Poterie, comme un des éléments d'un échange négocié par le Gouvernement avec un promoteur privé qui, en contrepartie de la cession de terrains en pleine propriété, doit réaliser un certain nombre de prestations, parmi lesquelles un club de loisirs ; que l'opération est toute à l'avantage du promoteur ; que détournement de pouvoir rejoint l'erreur manifeste d'appréciation ; que le promoteur pourrait d'ailleurs réaliser son projet sur un terrain lui appartenant ;

Vu la contre-requête enregistrée le 29 septembre 2005, par laquelle le Ministre d'État conclut au rejet de la requête aux motifs que, depuis de nombreuses années l'État et la Ville souhaitent implanter à Monaco un complexe de divertissement et de loisirs destiné à la jeunesse ; qu'après l'échec de plusieurs projets, notamment en 2002, en raison de, l'insuffisante prise en compte de la protection contre la houle, un nouveau projet plus important (4 000 m2 sur cinq niveaux), comportant cette protection, a été présenté et accepté par le Gouvernement ; que sa mise en œuvre impliquait deux ajustements préalables : le déclassement des terrains de l'Anse du Portier par la loi du 29 décembre 2004 afin de rendre possible un bail à construction, la modification de l'Ordonnance souveraine du 13 janvier 2003, pour permettre d'édifier un complexe de loisirs pour les jeunes, ce qu'a fait l'Ordonnance attaquée du 10 mai 2005 ;

Que celle-ci a été prise pour l'application de l'article 12 modifié de l'Ordonnance souveraine n° 3647 du 9 septembre 1966 concernant l'urbanisme, la construction et la voirie ; que la consultation du Comité supérieur d'urbanisme n'est pas prévue pour les Ordonnances souveraines portant plan de coordination des quartiers ordonnancés ; que la consultation du Conseil de la mer institué par l'article L. 110-1 du Code de la mer n'est prévue par les articles L. 230-1 et L. 230-2 que pour les Ordonnances souveraines précisant les mesures ayant pour objet d'assurer la conservation et le développement de la faune et de la flore marines, de préserver de tous troubles le milieu marin et de prévenir les dommages susceptibles d'être causés au sol et au sous-sol, en ce qui concerne la navigation, la pratique des sports nautiques et de la pêche, les conditions d'exercice de toute activité susceptible de nuire au maintien de la qualité écologique, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

Que le règlement général de voirie adopté par l'Ordonnance souveraine du 9 septembre 1966 ne peut être opposé à l'Ordonnance souveraine attaquée, qui a le même rang dans la hiérarchie des normes juridiques, et qui, portant règlement particulier pour les quartiers ordonnancés, a vocation à déroger au règlement général ; que son article 7, relatif aux demandes individuelles d'autorisation et d'accord préalable ne peut être opposé aux décisions réglementaires fixant le contenu même des règles d'urbanisme, comme c'est le cas de l'Ordonnance souveraine attaquée ;

Que la réglementation d'urbanisme antérieure ne peut être invoquée car elle ne crée aucun droit acquis à son maintien ; qu'elle ne peut faire apparaître une erreur manifeste d'appréciation, d'autant moins que la réalisation d'un complexe destiné aux loisirs correspond à une nécessité ; que l'exiguïté du territoire la rend difficile en un autre emplacement ; que le moyen tiré de la prétendue disponibilité d'un autre terrain est inopérant pour faire apparaître une erreur manifeste ;

Qu'il n'y a pas non plus détournement de pouvoir ; qu'en matière d'urbanisme, celui-ci n'est reconnu que lorsqu'il s'agit de favoriser un intérêt étranger à l'urbanisme et notamment un intérêt privé ; que l'intérêt privé n'est pas exclusif de l'intérêt général ; qu'en l'espèce la réalisation d'un complexe de loisirs destiné aux jeunes correspond à un intérêt général ;

Vu la réplique, enregistrée le 3 novembre 2005, par laquelle le syndicat des copropriétaires de l'immeuble « Le Sardanapale » persiste en ses conclusions au motif que la consultation du Comité supérieur de l'urbanisme était nécessaire parce que l'Ordonnance souveraine attaquée, par ses précisions, est manifestement destinée à un projet de construction déterminé, au sujet duquel devait s'appliquer l'obligation de consultation du Comité supérieur d'urbanisme imposée par l'article 28 de l'Ordonnance souveraine n° 3647 du 9 septembre 1966, ainsi que par l'article 12 de l'Ordonnance-loi du 3 novembre 1959 ; que la consultation du Conseil de la mer était également nécessaire car, selon le second alinéa de l'article L. 230-1 du Code de la mer, les dispositions s'appliquant « à l'ensemble des rivages, des eaux intérieures et des eaux territoriales » ; que, l'Ordonnance souveraine attaquée portant atteinte au domaine public maritime, et en particulier au rivage, comme le prouve notamment la nécessité de construire un mur brise houle, le Conseil de la mer devait être consulté ; qu'à cela s'ajoutent les risques de pollution marine dus au déversement d'eaux de ruissellement ;

Que de l'économie des dispositions de l'Ordonnance souveraine n° 3647 du 9 septembre 1966 et de l'Ordonnance-loi n° 674 du 3 novembre 1959 concernant l'urbanisme, la construction et la voirie, il résulte qu'une Ordonnance souveraine prise pour réglementer un quartier ordonnancé ne peut déroger à l'Ordonnance souveraine n° 3647 qu'à la condition d'être examinée par le Comité supérieur d'urbanisme ;

Que, s'agissant de l'erreur manifeste, l'absence de droit au maintien en vigueur de la réglementation d'urbanisme ne peut empêcher de constater que l'instabilité de la réglementation, successivement modifiée en 2003 et en 2005, révèle la volonté de favoriser un promoteur privé ; que l'intérêt public allégué n'est pas suffisamment puissant pour qu'il soit porté atteinte à l'un des derniers vestiges du rivage naturel monégasque ; qu'il existe d'autres sites permettant de réaliser un centre de loisirs ;

Que celui qui est projeté ne présente pas un intérêt public ; que combiné avec le projet de La Poterie, également couvert par une autre loi de déclassement, il doit donner à son promoteur un profit considérable ; que, d'ailleurs, pour l'opération de La Poterie, a été demandé et obtenu un permis de construire sur une dépendance qui n'avait pas encore été déclassée du domaine public ; que le détournement de pouvoir est donc avéré ;

Vu la duplique, enregistrée le 2 décembre 2005, par laquelle le Ministre d'État conclut de nouveau au rejet de la requête, par les motifs que : sur la légalité externe, l'avis du Comité supérieur d'urbanisme n'est requis que dans des hypothèses limitativement prévues à l'article 12, alinéa 2, de l'Ordonnance-loi n° 674 du 3 novembre 1959 modifiée, couvrant l'octroi des permis de construire dérogeant aux dispositions d'une Ordonnance souveraine portant règlement d'urbanisme d'un quartier réglementé, non l'adoption d'une telle Ordonnance souveraine ; de même, aucune disposition n'impose la consultation du Conseil de la mer pour une Ordonnance souveraine portant réglementation d'urbanisme ; sur la légalité interne, le requérant confond l'emprise du complexe de loisirs litigieux sur les terrains du domaine public non maritime qui ont été désaffectés et les ouvrages de protection contre la mer qui seront établis sur le domaine public maritime non désaffecté, en vertu d'une autorisation délivrée par l'État en tant que gestionnaire de ce domaine ; le contrôle du bilan coûts/avantages invoqué par la requête pour contester l'utilité publique est inopérant en matière d'urbanisme, ne permet pas de comparer un projet par rapport à un autre et de glisser sur le terrain de l'opportunité ; l'implantation à Monaco d'un ouvrage à vocation collective et touristique présente un intérêt public incontestable ; la référence au projet de La Poterie, au bénéfice qui en résulterait, à la chronologie des opérations, est inopérante dès lors que la situation du complexe de loisirs correspond à un intérêt public ; la modification des règles d'urbanisme pour le permettre ne constitue pas un détournement de pouvoir dès lors qu'il présente cet intérêt ;

Vu, autorisée par Ordonnance du Président du Tribunal Suprême du 27 décembre 2005, la réplique enregistrée le 26 janvier 2006, par laquelle le syndicat requérant persiste en ses conclusions par les motifs que : sur la légalité externe, l'Ordonnance souveraine attaquée, constituant en réalité une véritable autorisation de construire déguisée, et non un texte réglementaire, devait être précédée de la consultation du Comité supérieur d'urbanisme ; la consultation du Conseil de la mer est nécessaire pour des Ordonnances souveraines qui ont des conséquences directes et immédiates pour le rivage marin, ce qui est le cas de l'Ordonnance souveraine attaquée, ayant pour effet de faire disparaître une portion naturelle du rivage de la mer et une plage publique ; sur la légalité interne, les parcelles sur lesquelles doit être réalisé le projet font partie à la fois du rivage et du domaine public maritime ; le législateur a intitulé désaffectation une loi qui constitue en réalité un déclassement, les parcelles en cause n'étant pas désaffectées ; l'Ordonnance souveraine attaquée est donc illégale en ce qu'elle permet une construction sans rapport avec la vocation du domaine public ; la désaffectation a été décidée au profit d'un promoteur privé, ce qui révèle le détournement de pouvoir ; les deux lois du 29 décembre 2004 prononçant la désaffectation de dépendances du domaine public aux lieux dits La Poterie et l'Anse du Portier ont été votées pour permettre la réalisation des deux opérations combinées ; les modifications substantielles des dispositions d'urbanisme n'ont été effectuées que pour permettre leur réalisation ; le dépôt d'une demande d'autorisation pour une opération portant sur des terrains qui n'avaient pas été déclassés montre que ce déclassement n'a été décidé que pour permettre de la réaliser ; le comportement de l'Administration révèle des errements qui confirment le détournement de pouvoir résultant des deux lois de déclassement et de l'Ordonnance souveraine attaquée ; le club de jeunes ne saurait être regardé comme présentant un intérêt public ; le Tribunal Suprême exerce en matière d'urbanisme un contrôle approfondi ; l'opération projetée ne présente pas d'utilité publique ; d'autres terrains permettraient sa réalisation dans des conditions équivalentes ; le bilan avantages/inconvénients est négatif ;

Vu les ultimes observations, enregistrées le 28 février 2006, par lesquelles le Ministre d'État conclut de nouveau au rejet de la requête, aux motifs que l'Ordonnance souveraine attaquée constitue un acte de nature réglementaire et non une autorisation de construire qui aurait dû être précédée de la consultation du Comité supérieur d'urbanisme, ne fait pas partie des Ordonnances souveraines spécifiques à la protection du milieu marin qui doivent être soumises au Conseil de la mer ; que les parcelles du terrain devant servir d'assiette au projet de complexe pour les jeunes ne font partie ni du domaine public maritime naturel ni du domaine public maritime artificiel ; que le législateur peut procéder à un déclassement sans qu'il y ait au préalable désaffectation ; qu'il y a lieu de renvoyer aux précédentes écritures en ce qui concerne l'intérêt général du projet et l'absence de détournement de pouvoir ;

Vu l'Ordonnance souveraine attaquée ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu la Constitution, notamment son article 90 B 1° ;

Vu l'Ordonnance souveraine n° 2984 du 16 avril 1963 modifiée sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême ;

Vu le Code de la mer, notamment ses articles L. 110-1, L. 230-1 et L. 230-2 ;

Vu l'Ordonnance-loi n° 674 du 3 novembre 1959 concernant l'urbanisme, la construction et la voirie, modifiée ;

Vu l'Ordonnance souveraine n° 3647 du 9 septembre 1966 concernant l'urbanisme, la construction et la voirie, modifiée ;

Vu l'Ordonnance souveraine n° 15630 du 13 janvier 2003 portant délimitation, plans de coordination et règlement particulier d'urbanisme, de construction et de voirie du quartier ordonnancé du Port Hercule ;

Vu la loi n° 1294 du 29 décembre 2004, prononçant, au quartier de Monte-Carlo, la désaffectation de parcelles du domaine public de l'État ;

Vu l'Ordonnance du 21 mars 2006 par laquelle le Président du Tribunal Suprême a renvoyé la cause à l'audience du 12 juin 2006 ;

Ouï M. Pierre Delvolvé, Vice-Président du Tribunal Suprême en son rapport ;

Ouï Me Boré, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour le Syndic des copropriétaires de l'immeuble « Le Sardanapale » ;

Ouï Me Molinié, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour le Ministre d'État ;

Ouï Mme le Procureur Général en ses conclusions ;

Après en avoir délibéré ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant que l'article L. 230-1 du Code de la mer prévoit l'adoption de mesures appropriées ayant pour objet notamment « de préserver de tous troubles le milieu marin et de prévenir les dommages susceptibles d'être causés au sol et au sous-sol... » ; que l'article L 230-2 du même code, dispose que « les conditions d'application de l'article précédent sont déterminées, après avis du Conseil de la mer, par des Ordonnances souveraines... » dont il ne précise pas l'objet de manière limitative ; que l'Ordonnance souveraine attaquée n'a permis d'édifier dans la zone n° 7 dite de l'Anse du Portier « un complexe de loisirs pour les jeunes » que « sous réserve de réaliser les ouvrages nécessaires à la protection des constructions contre la mer » ; que cette réserve constitue une mesure destinée à « prévenir les dommages susceptibles d'être causés au sol et au sous-sol » ; que, par suite, l'Ordonnance souveraine attaquée devait être précédée de la consultation du Conseil de la mer ; qu'en l'absence de cette consultation, elle est entachée d'excès de pouvoir et doit être annulée ;

Dispositif🔗

Décide :

Article 1er🔗

L'Ordonnance souveraine n° 15 du 10 mai 2005 est annulée.

Article 2🔗

Les dépens sont mis à la charge de l'État.

Article 3🔗

Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre d'État.

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