Tribunal Suprême, 24 mai 1973, sieur G. H. c/ Monsieur le Ministre d'État
Abstract🔗
Compétence
Contentieux administratif - Recours susceptibles d'être déférés au Tribunal Suprême - Recours en indemnité - Incompétence du Tribunal Suprême
Fonctionnaires et agents publics
Sortie du service - Rupture ou non-renouvellement d'un engagement - Recours en indemnité - Irrecevabilité
Travail
Contrat de travail - Rupture ou non-renouvellement - Incompétence du Tribunal Suprême
Motifs🔗
Le Tribunal Suprême
Vu la requête présentée le 6 octobre 1972 par le sieur G. H., tendant à ce que l'Administration soit condamnée à lui payer la somme de 36 000 francs, représentant 24 mois de traitement mensuel attaché à des fonctions de surveillant au collège d'enseignement secondaire technique mixte, dont il a été privé par une rupture abusive de contrat de travail et à ce que l'Administration soit condamnée aux dépens, ladite demande se fondant sur ce que le sieur H. a été engagé successivement pour une durée indéterminée dans les fonctions de surveillant général au Lycée A., puis à la rentrée scolaire de 1969, dans les fonctions de surveillant au collège d'enseignement secondaire technique mixte, et qu'il a été mis fin à son engagement par une rupture unilatérale de contrat de travail, sans motif et sans préavis ; que cette rupture de contrat a fait tort à la réputation du sieur H. auprès des parents d'élèves ;
Vu la contre-requête présentée le 6 décembre 1972, tendant :
1° à ce que le Tribunal Suprême se déclare incompétent au motif que la demande du sieur H. se fonde non sur l'illégalité d'une décision administrative, mais sur une faute dans l'exécution d'un contrat ;
2° très subsidiairement, à ce que la requête soit rejetée aux motifs que le sieur H. n'avait été engagé que pour une année scolaire, ainsi que cela résulte de la publicité faite en vue du recrutement et d'une lettre adressée par l'Administration, le 21 octobre 1969, au sieur H., et que l'Administration n'a pu commettre aucune faute en s'abstenant de renouveler un engagement parvenu à expiration ;
3° à ce que le sieur H. soit condamné aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître J. Ch. Marquet, avocat-défenseur, et à ce que l'arrêt soit publié au « Journal de Monaco » ;
Vu la réplique présentée le 3 janvier 1973, par laquelle le sieur H. s'en rapporte au Tribunal Suprême sur la compétence et conclut à l'annulation de la décision du 8 août 1972, lui refusant l'indemnisation demandée, et ce en faisant valoir :
1° qu'en ce qui concerne son engagement de 1965, le « Journal de Monaco » et l'avis publié dans la presse ne précisaient pas la durée de l'engagement ;
2° qu'en ce qui concerne l'engagement au collège d'enseignement secondaire technique mixte, sa durée indéterminée résulte de la lettre de l'Administration du 30 septembre 1969, qui ne comporte pas la mention d'une durée annuelle ;
3° que la lettre du 21 octobre 1969 est suspecte et aurait été tardive ;
4° que la direction du travail a délivré au sieur H. le 23 janvier 1970, un permis de travail pour une durée indéterminée ; que le service des prestations médicales a payé au sieur H., le 30 septembre 1970, des ordonnances des 31 août et 11 septembre 1970 ; que la Caisse autonome des retraites a envoyé au sieur H., le 9 novembre 1972, un relevé de points retraite couvrant les périodes octobre 1969-septembre 1970 et octobre 1970-septembre 1971 ;
5° que le sieur H. a été engagé non pas à la suite de l'avis de vacance d'emploi du 6 juin 1969, mais sur appel du directeur de l'Éducation nationale du 22 septembre 1969, pour mettre fin aux discussions consécutives à l'éviction sans motif de l'intéressé de l'emploi de surveillant général en concluant une transaction où le sieur H. acceptait un poste inférieur, l'administration dérogeant en contrepartie à la règle de l'engagement annuel ;
6° que le préjudice subi par le sieur H. résulte des deux évictions abusives ;
Vu la duplique présentée le 2 février 1973, tendant d'une part à l'irrecevabilité de la requête du fait qu'elle ne met en cause qu'une responsabilité contractuelle ; qu'elle n'est pas dirigée contre une décision administrative et que les conclusions en annulation de la décision du 8 août 1972 sont tardives ; ladite duplique faisant valoir, d'autre part, très subsidiairement :
1° que la lettre de l'Administration du 12 septembre 1966 précise que le renouvellement de l'engagement était limité à l'année scolaire 1966-1967 ;
2° que le dernier engagement était bien intervenu sur la base de l'avis de vacance d'emploi publié au « Journal de Monaco » du 6 juin 1969, sans qu'il y ait à tenir compte de la circonstance que le sieur H. aurait été engagé après la date de clôture ou qu'il n'aurait pas fait acte de candidature dans la forme prescrite ;
3° que la lettre du 30 septembre 1969 avait pour objet d'inviter le sieur H., vu l'imminence de la rentrée, à se mettre en rapport d'urgence avec la directrice ; qu'ainsi la lettre du 21 octobre 1969 adressée au sieur H. le jour de l'enregistrement de son engagement par la direction de la Fonction publique, répondait à un objet différent en confirmant la fin de l'engagement à la date du 30 juin 1970 ;
4° que les documents ayant trait à la situation du sieur H. en matière de retraite ou de prestations médicales sont muets sur la durée de l'engagement et sont totalement étrangers au contrat ;
5° que le permis de travail provisoire délivré au sieur H. constitue une mesure de police administrative ; que l'obligation à ce permis est indépendante de la durée du contrat du travail et que le permis ne saurait faire preuve de cette durée ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier :
Vu l'ordonnance constitutionnelle du 17 décembre 1962, notamment ses articles 89 à 92 ;
Vu l'Ordonnance Souveraine n° 2984 du 16 avril 1963, modifiée, sur l'Organisation et le Fonctionnement du Tribunal Suprême :
Oui M. Alfred Potier, Membre du Tribunal Suprême, en son rapport :
Oui Maître Vial au nom du sieur H. et Maître George, au nom de Monsieur le Ministre d'État, en leurs observations ;
Oui Monsieur le Procureur Général en ses conclusions ;
Statuant en matière administrative ;
Considérant qu'aux termes de l'article 90-B de la Constitution du 17 décembre 1962 « en matière administrative, le Tribunal Suprême statue souverainement : 1° sur les recours en annulation pour excès de pouvoir formés contre la décision des diverses autorités administratives et les Ordonnances Souveraines prises pour l'exécution des lois, ainsi que sur l'octroi des indemnités qui en résultent » ;
Considérant que le requérant demande que l'Administration soit condamnée à lui payer une indemnité de 36 000 francs en réparation du préjudice qu'il a subi du fait de la perte d'un emploi de surveillant au collège d'enseignement secondaire technique mixte ;
Considérant que le requérant soutient qu'il était lié à l'Administration, dans l'emploi de surveillant au collège, par un engagement de travail à durée indéterminée et que l'Administration l'a privé de cet emploi dans des circonstances qui sont constitutives de la rupture abusive d'un contrat ; qu'il résulte de ces assertions du requérant, que la responsabilité dont l'Administration serait tenue envers lui résulterait de la violation des clauses d'un contrat, et non de l'illégalité d'une décision administrative de nature à faire l'objet d'un recours en annulation pour excès de pouvoir ; qu'il s'ensuit qu'en vertu des dispositions précitées de la constitution, le Tribunal Suprême n'est pas compétent pour connaître des conclusions de la requête ;