Tribunal Suprême, 3 février 1971, sieur B. c/ Ministre d'Etat
Abstract🔗
Compétence
Contentieux administratif - Recours en annulation - Silence gardé par l'administration sur des lettres ne comportant pas de véritables réclamations - Caractère de décisions administratives (non) - Irrecevabilité du recours
Procédure
Demandes nouvelles présentées par le requérant dans sa réplique - Violation des droits de la défense - Irrecevabilité
Motifs🔗
Le Tribunal Suprême
Vu la requête présentée par le sieur B., le quatorze avril mil neuf cent soixante-dix, tendant à annuler la décision implicite du Service du Logement refusant au requérant l'autorisation de diviser en deux appartements celui dont il est propriétaire, autorisation sollicitée par demande en date du vingt-deux octobre mil neuf cent soixante-neuf, accorder à l'exposant l'autorisation sollicitée et condamner l'administration aux dépens, motif pris de ce qu'un tel refus ne peut s'inspirer que des considérations d'utilité publique qui sont le but et la raison d'être de la législation des loyers ;
Vu la contre-requête en date du huit juin mil neuf cent soixante-dix, tendant à rejeter la requête comme irrecevable premièrement comme étant dépourvue d'objet faute d'être dirigée contre une décision faisant grief au requérant, celui-ci s'étant borné à informer l'administration de ses intentions et n'étant au surplus assujetti à aucune autorisation pour procéder à la division de son appartement -, en second lieu et subsidiairement, comme n'étant pas motivée en droit contrairement aux exigences de l'article 17 de l'Ordonnance Souveraine n° 2984 du 16 avril 1963, modifiée - et concluant en outre à la publication de la décision à intervenir au « Journal de Monaco » et à la condamnation du requérant aux entiers dépens ;
Vu la réplique en date du vingt-neuf juin mil neuf cent soixante-dix, modifiant la demande et tendant à ce qu'il plaise au Tribunal Suprême, premièrement annuler pour excès de pouvoir les décisions du Service du Logement des sept août et quatre septembre mil neuf cent soixante-neuf, en tant que statuant sur une demande d'autorisation de division de l'appartement en cause, et refusant celle-ci, alors que selon les déclarations de la contre-réplique une telle division n'est pas assujettie à une autorisation et en tant qu'elles ont refusé de retarder la déclaration de vacance en considération du projet de division envisagé ; deuxièmement annuler en tant que de besoin la décision résultant de la non-réponse par le Service du logement à la lettre du vingt-deux octobre mil neuf cent soixante-neuf, décision confirmant les refus des décisions précédentes ; troisièmement, recevoir l'exposant dans un recours de plein contentieux basé sur la faute de service résultant du comportement de l'Administration induisant en erreur le requérant sur la nécessité d'une autorisation en vue de le conduire à une déclaration immédiate de vacance pour le faire renoncer à son projet, comportement aggravé par la plainte déposée contre le requérant, et en conséquence condamner Monsieur le Ministre d'État à payer à l'intéressé cinq mille francs à titre de dommages-intérêts ainsi qu'au paiement de tous les dépens et ordonner la publication de l'arrêt à intervenir au « Journal de Monaco », aux frais de l'État ;
Vu la duplique en date du trois août mil neuf cent soixante-dix, par laquelle Monsieur le Ministre d'État persiste dans ses précédentes conclusions et tend à faire déclarer irrecevables les nouvelles conclusions de la duplique en tant qu'elles s'insèrent dans un recours
initialement irrecevable et si elles sont considérées comme valant requête introductive d'instance, comme tardives, aucun recours gracieux ou hiérarchique n'étant venu prolonger les délais ouverts pour recourir contre les décisions des sept août et quatre septembre mil neuf cent soixante-neuf, et notamment la lettre du requérant du vingt-deux octobre mil neuf cent soixante-neuf, ne présentant pas les caractères d'un recours gracieux ; qu'au surplus, la réplique viole l'article 17 de l'Ordonnance Souveraine n° 2984 ainsi que les droits de la défense en raccourcissant indûment par des demandes nouvelles dans la réplique, le déroulement de la procédure ; qu'enfin, la demande en dommages-intérêts ne peut être examinée par le Tribunal Suprême selon l'article 90 B 1° de la Constitution et l'article 35 de l'Ordonnance Souveraine n° 2984, que dans la mesure où a été prononcée l'annulation des décisions attaquées et que pour cette raison elle est, en l'espèce, irrecevable ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu l'Ordonnance constitutionnelle du 17 décembre 1962,
Vu l'Ordonnance Souveraine n° 2984 du 16 avril 1963 sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême, modifiée ;
Ouï M. Paul Reuter, Membre du Tribunal Suprême, en son rapport ;
Ouï Maître Hélène Marquilly avocat-défenseur, ainsi que Maître G. H. George, avocat au Conseil d'État français et à la Cour de Cassation, en leurs observations ;
Ouï Monsieur le Procureur Général en ses conclusions ;
Sur la validité de la demande tendant à l'annulation de la décision implicite résultant du silence gardé par l'Administration à l'égard de la lettre du 22 octobre 1969 :
Considérant que par sa lettre du vingt-deux octobre mil neuf cent soixante-neuf, le requérant s'est borné à communiquer à l'Administration ses intentions en ce qui concerne tant la division de son appartement que la déclaration de vacance prévue par l'Ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1959, sans solliciter de celle-ci aucune décision et que le silence de l'Administration ne saurait être regardé, dans ces conditions, comme une décision faisant grief susceptible d'être l'objet d'un recours en annulation,
Que pour ce motif, la demande en annulation de la décision implicite de rejet qui résulterait du silence gardé par l'Administration au regard de la lettre du vingt-deux octobre mil neuf cent soixante-neuf est irrecevable ;
Sur la recevabilité des demandes en annulation dirigées contre les décisions résultant des lettres du service du logement en date des 7 août 1969 et 4 septembre 1939, et sur la recevabilité de la demande en dommages-intérêts dirigée contre l'Administration :
Considérant que ces demandes présentées pour la première fois dans la réplique du vingt-neuf juin mil neuf cent soixante-dix, sont tardives ;
Qu'au surplus, leur prise en considération porterait atteinte aux droits de la défense, tels qu'ils résultent de l'article 17 de l'Ordonnance Souveraine n° 2984 du 16 avril 1963, modifiée, en ce qu'ils priveraient le défendeur d'articuler sa défense dans une procédure comportant deux pièces écrites ;
Que pour ces motifs ces demandes sont irrecevables ;
Dispositif🔗
Note🔗
Voir la note publiée après la décision du 3 février 1972