Tribunal Suprême, 30 mai 1928, B. c/ M. le Directeur des Services Judiciaires

  • Consulter le PDF

Abstract🔗

Procédure

Délai de recours - Point de départ : connaissance acquise de l'acte attaqué - Recours tardif - Impossibilité d'invoquer une interruption du délai - Déchéance


Motifs🔗

Le Tribunal Suprême,

Ouï M. Moreau Membre rapporteur dans son rapport verbal ;

Ouï Me Auréglia, avocat-défenseur et Me Torrès, avocat du barreau de Paris, au nom de B. ; et Me Lambert, pour M. le Secrétaire d'État, Directeur des Services Judiciaires en leurs plaidoiries et conclusions ;

Ouï le Ministère Public en ses conclusions ;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes de la requête introductive d'instance que le Tribunal Suprême est appelé à statuer sur la constitutionnalité de l'arrêté de M. le Directeur des Services Judiciaires du 28 novembre 1927, qui a désigné M. le Juge de Paix, comme membre du Tribunal criminel appelé à juger B., inculpé d'assassinat et de meurtre ;

Considérant qu'aux termes de l'Ordonnance Souveraine du 21 avril 1911, art. II, le recours du Tribunal Suprême doit être formé, à peine de déchéance, dans les deux mois à partir du jour où a eu lieu le fait sur lequel il est fondé ou à partir du jour où ce fait a pu être connu de l'intéressé ;

Que l'arrêté du 28 novembre 1927 a été connu par B. au plus tard le 9 janvier 1928, date à laquelle il a comparu devant le Tribunal criminel renouvelé par cet arrêté ; que, le 21 janvier 1928, B. invoquait l'irrégularité prétendue de cet arrêté comme moyen de révision contre l'arrêt rendu par le Tribunal criminel le 11 janvier 1928

Que la requête de B. au Tribunal Suprême porte la date du 23 mars 1928, qu'elle a donc été formée plus de deux mois après la connaissance acquise par B. de l'acte qu'il attaque ;

Que le recours de B. est donc atteint par la déchéance qu'édicte l'Ordonnance souveraine du 21 avril 1911, art. II, et doit être déclaré non recevable ;

Que pour échapper à cette déchéance formellement prévue, on ne saurait soutenir que le délai de deux mois accordé à B. constituait une prescription susceptible d'être interrompue par une autre voie de recours dirigée contre le même acte et devant une autre juridiction, en l'espèce le Conseil de Révision ;

Qu'il résulte de l'examen des textes que l'article II de l'Ordonnance souveraine du 21 avril 1911 n'a pas institué une action assortie d'une prescription, mais a conféré une faculté dont l'exercice est exposé à une déchéance, laquelle aux termes du droit commun, n'est soumise à aucune espèce d'interruption ;

Qu'il échet donc pour le Tribunal Suprême d'appliquer la disposition de l'article II de l'Ordonnance du 21 avril 1911 sans avoir la possibilité ni même le droit d'envisager la constitutionnalité de ce texte, question dont il n'est d'ailleurs pas saisi ;

Considérant que, dans ces conditions, il n'échet d'examiner les autres moyens invoqués de part et d'autre dans le présent débat ;

Considérant que les circonstances de l'affaire permettent d'écarter comme conséquence du rejet du pourvoi la condamnation à l'amende prévue par la loi et qu'il suffira de prononcer la condamnation du requérant aux dépens.

Dispositif🔗

Décide :

Article 1er🔗

La requête de B., en date du 23 mars 1928, est rejetée ;

Article 2🔗

B. est condamné aux dépens.

  • Consulter le PDF