Tribunal de première instance, 31 octobre 2024, La Société Anonyme Monégasque dénommée S. A. M. I c/ La Société à Responsabilité Limitée de droit luxembourgeois dénommée J S. A. R. L.

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Abstract🔗

Compétence civile et commerciale - Compétence territoriale - Clause attributive de compétence applicable (non) - Action en responsabilité délictuelle

Concurrence déloyale - Marques - Détermination de l'antériorité - Risque de confusion (oui) - Activités identiques - Intention de nuire - Annulation de l'enregistrement

Procédure civile - Demande reconventionnelle - Irrecevabilité - Défense à la demande principale (non) - Compensation (non) - Identité de cause (non)

Résumé🔗

La demanderesse sollicite l'annulation de l'enregistrement de la marque « O » au motif d'un dépôt frauduleux opéré dans le cadre d'actes de concurrence déloyale. Elle agit donc sur le terrain délictuel et non contractuel. Le seul fait que la défenderesse revendique la paternité sur le signe « O » ne peut suffire à considérer que l'action de la demanderesse entre dans le champ de la clause attributive de compétence, le tribunal de Monaco est donc territorialement compétent.

Le litige porte essentiellement sur la paternité du signe « O », chacune des parties revendiquant une antériorité dont dépend la validité de son dépôt à titre de marque par la défenderesse. Les avenants successifs conclus entre les parties avaient pour objet de redéfinir l'assiette servant de base au calcul à la redevance due par le licencié qui avait désormais le droit d'associer l'image du chef aux établissements ouverts postérieurement à la signature du contrat initial de collaboration. Dans ces conditions, la communication du demandeur autour de ces établissements, et plus particulièrement, du restaurant « O » mettait nécessairement en avant le savoir-faire du chef sans que le Tribunal puisse considérer que la demanderesse a, ce faisant reconnu à ce dernier, la paternité du signe « O ». Il ne peut davantage être tiré argument des expériences antérieures du chef sur le territoire nippon en l'absence de tout autre élément produit par la défenderesse qui viendrait établir que le chef utilisait le signe « O » antérieurement à son choix pour l'exploitation du restaurant monégasque. Au regard de l'ensemble de ces considérations, il convient de juger que l'usage à titre d'enseigne et de nom commercial du signe « O » par la demanderesse constituait une antériorité opposable à la défenderesse. Il existe bien un risque de confusion auprès du public, les activités des sociétés étant les mêmes. De plus, le dépôt de la marque est intervenu au moment de la rupture du contrat, ce qui caractérise l'intention de nuire de la défenderesse.

La demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat est irrecevable dans la mesure où elle ne procède pas de la même cause que la demande principale en annulation de la marque « O », fondée sur la responsabilité délictuelle. Elle ne constitue pas davantage une défense à la demande principale dans la mesure où, à supposer le préjudice établi, sa réparation n'aurait pas pour conséquence le rejet de la demande d'annulation de la marque « O ». Elle n'entre pas non plus dans le mécanisme de la compensation qui suppose des dettes réciproques de sommes d'argent.


TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

N° 2022/000050 (assignation du 15 juin 2021)

JUGEMENT DU 31 OCTOBRE 2024

En la cause de :

  • La Société Anonyme Monégasque dénommée S. A. M. I, dont le siège social se trouve x1 à Monaco, prise en la personne de son Président Administrateur Délégué en exercice, demeurant en cette qualité audit siège ;

DEMANDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Patricia REY, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par la R représentée par Maître e.G ainsi que par la SAS Q représentée par Maître a.B, avocats au barreau de Paris ;

d'une part ;

Contre :

  • La Société à Responsabilité Limitée de droit luxembourgeois dénommée J S. A. R. L., dont le siège social se trouve x2 (Luxembourg), prise en la personne de son gérant en exercice, demeurant en cette qualité audit siège ;

DÉFENDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Stephan PASTOR, avocat près la même Cour ;

d'autre part ;

En présence du :

  • PROCUREUR GÉNÉRAL, près la Cour d'Appel, séant en son Parquet, Palais de Justice, 5 rue Colonel Bellando de Castro à Monaco ;

COMPARAISSANT EN PERSONNE,

Visa🔗

LE TRIBUNAL,

Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 15 juin 2021, enregistré (n° 2022/000050) ;

Vu les conclusions récapitulatives de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur, au nom de la SARL J S. A. R. L., en date du 7 février 2023 ;

Vu les conclusions récapitulatives de Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de la SAM S. A. M. I, en date du 3 avril 2023 ;

Vu les conclusions du Ministère public en date du 21 juin 2024 ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 21 mai 2024 ;

À l'audience publique du 27 juin 2024, les conseils de la partie demanderesse et le Ministère public ont été entendus en leurs plaidoiries, celui de la partie défenderesse a déposé son dossier, et le jugement a été mis en délibéré pour être prononcé le 31 octobre 2024, par mise à disposition au Greffe.

Motifs🔗

FAITS ET PROCÉDURE :

La SAM S. A. M. I qui a notamment pour objet l'exploitation de l'I situé à Monte-Carlo, offre divers services de restauration et exploite dans ce cadre le restaurant O proposant une cuisine japonaise, ouvert en 2008.

La SARL J S. A. R. L., anciennement P, est une société de droit luxembourgeois dont l'objet est notamment la gestion de l'ensemble des droits immatériels du chef j.K, décédé le jma.

Elle est titulaire de la marque verbale française « j.K » n°xxx déposée le 18 mai 1993 notamment en classe 43 pour désigner des « Services de restauration ; restaurants ; services de traiteur ».

Ces deux sociétés ont signé, le 24 février 2004, un contrat de collaboration aux termes duquel la P concède à la SAM S. A. M. I notamment le droit d'utiliser, moyennant le paiement d'une redevance basée sur le chiffre d'affaires du licencié, le nom patronymique « j.K », son image et son savoir-faire, ainsi que la marque éponyme.

Trois avenants ont été successivement signés les 5 avril 2006, 9 juillet 2008 et 9 juillet 2012 ayant pour objet l'intégration du chiffre d'affaires des trois nouveaux établissements ouverts par la SAM S. A. M. I (le bar dénommé zz, le restaurant O et le restaurant ZA) dans le calcul de la redevance due par le licencié.

Le 19 septembre 2018, suite au décès de j.K, la SAM S. A. M. I a adressé un courrier à la SARL J S. A. R. L., afin de lui proposer une renégociation des modalités de résiliation du contrat.

Les négociations entre les parties n'ayant pas abouti, le 26 février 2020, la SAM S. A. M. I a notifié à la SARL J S. A. R. L., la résiliation du contrat à l'issue d'un délai de préavis de six mois.

Puis, ayant appris le dépôt à Monaco, le 6 mai 2020, de la marque verbale « O » en classe 43 pour désigner notamment des « Restaurants haut de gamme ; restaurants ; services de restauration haut de gamme » et considérant qu'il s'agissait là d'un dépôt frauduleux, la SAM S. A. M. I a fait citer la SARL J S. A. R. L., devant ce Tribunal aux fins, notamment, d'en obtenir l'annulation.

Dans ses dernières conclusions, elle demande au Tribunal de :

  • REJETER l'exception d'incompétence soulevée par la SARL J S. A. R. L. ;

  • DÉCLARER le Tribunal de Première Instance compétent ;

  • RECEVOIR la SAM S. A. M. I en toutes ses demandes, fins et conclusions et l'en déclarer bien fondée ;

  • CONSTATER l'antériorité du nom commercial et de l'enseigne « O » exploités par la SAM S. A. M. I sur le dépôt de la marque « O » par la SARL J S. A. R. L. ;

  • CONSTATER que la SAM S. A. M. I disposait du droit d'utiliser la dénomination « O » à titre de nom commercial et d'enseigne ;

  • DÉCLARER la SARL J S. A. R. L. irrecevable en ses demandes portant sur une prétendue résiliation fautive du contrat de collaboration ou un préavis insuffisant ;

  • Si, par extraordinaire, la SARL J S. A. R. L. n'était pas jugée irrecevable en ses demandes portant sur une prétendue résiliation fautive du contrat de collaboration, DÉCLARER irrecevable la demande de nullité de l'article 13 du Contrat de Collaboration du 24 février 2004 de la SARL J S. A. R. L. par l'effet de la prescription ;

  • DÉBOUTER la SARL J S. A. R. L. de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

En conséquence :

  • DIRE que la SARL J S. A. R. L. a déposé la marque « O » à Monaco aux fins de parasiter l'utilisation du signe « O » nécessaire à l'exploitation de nom commercial et de l'enseigne « O » par la société SAM S. A. M. I ;

  • DIRE que la SARL J S. A. R. L. a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la SAM S. A. M. I ;

  • PRONONCER l'annulation de l'enregistrement de la marque « O » n° xxx déposée par la SARL J S. A. R. L. le 6 mai 2020 ;

  • PRONONCER l'interdiction pour la SARL J S. A. R. L. de se prévaloir des droits attachés au dépôt de la marque « O » n° xxx dont l'enregistrement sera annulé ;

  • DÉBOUTER la SARL J S. A. R. L. de ses demandes, fins et conclusions au titre de la résiliation fautive du contrat de collaboration ;

  • DÉBOUTER la SARL J S. A. R. L. de ses demandes, fins et conclusions au titre de la contrefaçon de marque ;

  • DÉBOUTER la SARL J S. A. R. L. de ses demandes, fins et conclusions au titre de la concurrence déloyale et parasitaire ;

  • DÉBOUTER la SARL J S. A. R. L. de ses demandes, fins et conclusions au titre de la procédure abusive ;

  • DÉBOUTER la SARL J S. A. R. L. de l'ensemble de ses demandes indemnitaires ;

En tout état de cause,

  • CONDAMNER la SARL J S. A. R. L. à payer à la SAM S. A. M. I la somme de 30.000 euros au titre de l'article 238-1 du Code de procédure civile ;

  • CONDAMNER la SARL J S. A. R. L. aux entiers frais et dépens de la présente instance, lesquels comprendront notamment les frais et accessoires, frais d'huissiers, d'expertise et traductions éventuels dont distraction au profit de Maître Patricia REY, Avocat-Défenseur, sous sa due affirmation ;

  • ORDONNER l'exécution provisoire du jugement à intervenir.

Aux termes de ses dernières écritures, la SARL J S. A. R. L., demande au Tribunal de :

  1. Sur les demandes de la SAM S. A. M. I

À titre principal,

  • JUGER que le Tribunal de Première Instance n'est pas compétent ;

  • SURSOIR à statuer tant que la juridiction étrangère compétente n'a pas été saisie ;

À titre subsidiaire,

  • DÉBOUTER la SAM S. A. M. I de toutes ses demandes, fins et conclusions.

  • 2. Sur les demandes reconventionnelles de la SARL J S. A. R. L.

2.1. La résiliation fautive du Contrat de Collaboration

À titre principal,

  • DÉCLARER nul l'article 13 du Contrat de Collaboration du 24 février 2004 entre la SARL J S. A. R. L. et la SAM S. A. M. I ;

  • CONDAMNER la SAM S. A. M. I à payer 778.528 euros à la SARL J S. A. R. L. au titre des dommages et intérêts pour rupture fautive du Contrat de Collaboration ;

À titre subsidiaire,

  • CONDAMNER la SAM S. A. M. I à payer 542.830 euros à la SARL J S. A. R. L. au titre des dommages et intérêts pour préavis de rupture insuffisant ;

2.2 La contrefaçon

  • CONDAMNER la SAM S. A. M. I à payer 258.068 euros à la SARL J S. A. R. L. au titre des dommages et intérêts pour contrefaçon de marque, à parfaire jusqu'au jour où les faits de contrefaçon cesseront ;

  • INTERDIRE à la SAM S. A. M. I de poursuivre l'utilisation, à quelque titre et dans quelques conditions que ce soit, du terme O, ou d'un signe s'en rapprochant, seuls ou en association avec d'autres termes, couleurs ou éléments graphiques, sous astreinte de 500 euros par infraction commise à compter du huitième jour de la signification du jugement à intervenir ;

2.3. La concurrence déloyale et le parasitisme

  • CONDAMNER la SAM S. A. M. I à payer 150.000 euros à la SARL J S. A. R. L., au titre des dommages et intérêts pour concurrence déloyale et parasitisme ;

2.4. La procédure abusive

  • CONDAMNER la SAM S. A. M. I à payer 5.000 euros à la SARL J S. A. R. L. au titre des dommages et intérêts pour procédure abusive ;

  • 3. Dans tous les cas

  • CONDAMNER la SAM S. A. M. I à verser la somme de 20.000 euros à la SARL J S. A. R. L. au titre de l'article 238-1 du Code de procédure civile ;

  • DÉBOUTER la SAM S. A. M. I de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

  • CONDAMNER la SAM S. A. M. I aux entiers dépens distraits au profit de Maître Olivier MARQUET, Avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Une ordonnance de clôture a été rendue le 5 avril 2024 et l'affaire fixée à l'audience du 11 avril 2024. À cette date, la réouverture des débats a été ordonnée afin de permettre au Ministère Public de conclure sur l'exception d'incompétence soulevée par la défenderesse.

Dans ses conclusions déposées le 21 mai 2024, le Procureur Général a demandé au Tribunal de se déclarer compétent pour connaître du litige en relevant que celui-ci ne relevait pas de la clause d'attribution de compétence d'attribution aux juridictions luxembourgeoises prévue au contrat de licence.

L'affaire a été clôturée par ordonnance du 21 juin 2024 et fixée pour plaider à l'audience du 27 juin 2024. À cette date, les conseils de la SAM S. A. M. I a plaidé l'affaire et la SARL J S. A. R. L. a déposé son dossier. L'affaire a été mise en délibéré au 31 octobre 2024.

SUR CE,

  • Sur l'exception d'incompétence

La SARL J S. A. R. L. soulève l'incompétence de la juridiction monégasque en rappelant que le contrat liant les parties stipule expressément que les juridictions luxembourgeoises connaîtront les différends portant notamment sur son interprétation dans l'hypothèse où la demande émanerait du licencié et relève qu'au cas d'espèce, la SAM S. A. M. I revendiquant la paternité du signe « O », elle invite ce faisant, le Tribunal, à procéder à l'interprétation de l'avenant du 9 juillet 2008.

La SAM S. A. M. I réplique que le contrat n'est rappelé que pour l'interprétation du contexte du litige mais n'est pas invoqué au fondement des griefs de concurrence déloyale de sorte que la clause d'attribution invoquée par la défenderesse ne trouve pas, ici, à s'appliquer. Elle rappelle qu'en application des règles de droit international privé, en matière délictuelle, le Tribunal de première instance de Monaco doit se déclarer compétent pour connaître des demandes lorsque le fait dommageable sur lequel elles sont fondées s'est produit dans la Principauté ou que le dommage y a été subi et que tel est le cas, en l'espèce.

Sur ce,

L'article 6 du Code de droit international privé dispose que « Les tribunaux de la Principauté sont également compétents, quel que soit le domicile du défendeur :

(…)

  • en matière délictuelle, lorsque le fait dommageable s'est produit dans la Principauté ou que le dommage y a été subi ; (…) ».

L'article 9 du même Code précise que « Si les parties sont convenues, (…), de la compétence d'une juridiction étrangère, la juridiction monégasque saisie en méconnaissance de cette clause sursoit à statuer tant que la juridiction étrangère désignée n'a pas été saisie ou, après avoir été saisie ».

En l'espèce, si l'article 18 du contrat de collaboration signé par les parties le 24 février 2004 attribue compétence aux tribunaux du Luxembourg pour connaître des différends portant sur la validité, l'interprétation ou l'exécution du contrat lorsque les demandes émanent du licencié, force est de constater que la SAM S. A. M. I sollicite l'annulation de l'enregistrement de la marque « O » au motif d'un dépôt frauduleux opéré dans le cadre d'actes de concurrence déloyale et qu'elle agit donc sur le terrain délictuel et non contractuel.

Le seul fait que la SARL J S. A. R. L. revendique la paternité sur le signe « O » en se fondant sur l'avenant signé le 9 juillet 2008, ne peut suffire à considérer que l'action de la demanderesse entre dans le champ de l'article 18 précité.

Le présent litige échappant à la clause d'attribution de compétence, le Tribunal se déclarera territorialement compétent pour en connaître.

  • Sur la demande d'annulation de l'enregistrement de la marque « O »

La SAM S. A. M. I qui rappelle que la disponibilité d'un signe choisi à titre de marque est une condition de validité de celle-ci -ce qui doit amener le déposant à effectuer une recherche d'antériorité- fait valoir qu'au cas d'espèce, la SARL J S. A. R. L. ne pouvait ignorer que le signe « O » était utilisé par ses soins à titre de nom commercial et d'enseigne de son restaurant de cuisine japonaise depuis 2008. En réplique à la défenderesse, elle soutient que l'avenant au contrat de collaboration portait exclusivement sur l'élargissement de la base de calcul de la redevance due en contrepartie non de l'autorisation d'utiliser tel ou tel signe mais de la prestation de conseil que la défenderesse s'était obligée à fournir dans le cadre de l'ouverture et de l'exploitation du restaurant O dont elle n'a aucunement choisi la dénomination. Elle considère donc que le dépôt litigieux, intervenu opportunément immédiatement après la résiliation du contrat de collaboration, a été réalisé à des fins parasitaires avec pour unique objectif de porter atteinte à l'exploitation paisible par ses soins du signe « O » et de profiter indûment de la notoriété de son restaurant ou de la contraindre à renoncer à son exploitation sous ce signe. Elle ajoute que sa reprise à l'identique pour des services identiques ou à tout le moins hautement similaires, dans la zone dans laquelle le nom commercial et l'enseigne sont exploités, caractérise l'existence d'un risque de confusion dans l'esprit du public et constitue donc un acte de concurrence déloyale justifiant l'annulation de l'enregistrement de la marque.

La SARL J S. A. R. L. réplique que le choix du signe « O » pour l'exploitation du restaurant litigieux résulte de la signature de l'avenant du 9 juillet 2008 qui démontre qu'elle a choisi ce signe et en a contractuellement permis l'usage, contre rémunération, à la SAM S. A. M. I qui, dans le cadre de sa communication, l'a reconnu à maintes reprises avant de procéder, graduellement, à un changement de position lui permettant aujourd'hui de revendiquer indument la paternité du signe « O ». La défenderesse considère donc que la SAM S. A. M. I ne rapporte la preuve ni d'une faute caractérisée par l'emploi d'un procédé déloyal, ni de l'existence d'un préjudice consistant en un détournement de clientèle et pas davantage d'un lien certain de causalité entre la faute et le dommage invoqué.

Sur ce,

L'ordonnance Souveraine n° 5.687 du 29 octobre 1975 a rendu exécutoire dans la Principauté la Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle du 20 mars 1883, qui prévoit en son article 6 que « Les conditions de dépôt et d'enregistrement des marques de fabrique ou de commerce seront déterminées dans chaque pays de l'Union par sa législation nationale » or, la loi n° 1.058 du 10 juin 1983 sur les marques de fabrique, de commerce ou de service entrée en vigueur le 1er octobre 1983 dispose en son article 3 que « La propriété de la marque s'acquiert par un premier usage public et notoire. Toutefois, nul ne peut se prévaloir de la propriété exclusive d'une marque si, dans les conditions déterminées par arrêté ministériel, il n'en a pas effectué le dépôt auprès du service de la Propriété industrielle et obtenu l'enregistrement ».

Par ailleurs, l'article 8 de la Convention précitée dispose que « Le nom commercial sera protégé dans tous les pays de l'Union sans obligation de dépôt ou d'enregistrement, qu'il fasse ou non partie d'une marque de fabrique ou de commerce ».

Il est par ailleurs constant que l'utilisation significative, c'est-à-dire manifeste et durable, d'un sigle à titre de nom commercial constitue, sous l'empire de la loi n° 1.058 en date du 10 juin 1983, une antériorité faisant obstacle à son dépôt à titre de marque dès lors qu'elle tend à la remise en cause de l'exploitation du nom commercial identique et qu'elle implique l'accomplissement d'actes de concurrence déloyale générateurs d'un préjudice commercial à la condition, toutefois, qu'un danger de confusion existe entre le nom commercial et la marque postérieure.

Il est enfin précisé que la concurrence déloyale, fondée sur le principe général de responsabilité édicté par l'article 1229 du Code civil consiste notamment, d'une part dans des agissements qui s'éloignent de la conduite normale d'un professionnel avisé et qui, faussant l'équilibre dans les relations concurrentielles, rompt l'égalité des chances devant exister entre les concurrents dans un système d'économie libre et d'autre part, dans des agissements parasitaires visant à s'approprier de façon injustifiée et sans contrepartie une valeur économique résultant d'un savoir-faire, de travaux ou d'investissements. La valeur économique acquise peut également résulter d'une notoriété, d'une réputation de qualité et d'une image entretenue auprès du public.

En l'espèce, le litige porte essentiellement sur la paternité du signe « O », chacune des parties revendiquant une antériorité dont dépend la validité de son dépôt à titre de marque par la SARL J S. A. R. L.

Ce signe a fait l'objet d'un enregistrement à l'office des marques de Monaco sous le numéro xxx suite à son dépôt par la SARL J S. A. R. L. le 6 mai 2020.

Il n'est cependant pas contesté qu'il était précédemment utilisé à titre d'enseigne et de nom commercial du restaurant de cuisine japonaise, depuis son ouverture en 2008 par la demanderesse, au sein de l'établissement de la SAM S. A. M. I.

La SARL J S. A. R. L. toutefois, considère que la signature du contrat de collaboration et de son avenant le 9 juillet 2008 démontre que la SAM S. A. M. I avait été expressément autorisée à utiliser ce signe, ce qui implique selon elle, que cette dernière n'était pas à l'origine de son choix.

L'article 1er de ce contrat de collaboration définit les droits concédés en ces termes « (…) d'utiliser, - aux conditions des présentes, le nom patronymique « j.K » l'image et le savoir-faire de Monsieur j.K, ainsi que la marque « j.K », telle que déposée dans les pays et classe indiqués en Annexe A ou devant être déposée conformément à l'article 6 du Contrat ».

L'article 6 précise que « M j.K est propriétaire de la marque française « j.K », n° xxx dont le descriptif ainsi que la copie du renouvellement sont joints en Annexe A.

Le Concédant garantit que M. j.K effectuera ou fera effectuer des dépôts complémentaires de ladite Marque pour protéger les Produits sous Licence au moins dans les classes et produits visés en Annexe A et pour la Principauté de Monaco, dans un délai maximum de 3 (trois) mois, à compter de la signature du présent acte ».

La licence de marque concernait donc uniquement le signe « j.K ». Il n'en demeure pas moins que les parties auraient pu convenir d'étendre les droits à d'autres signes dont j.K lui-même ou son équipe, au travers de sa société, seraient à l'origine. Pour démontrer que tel a bien été le cas avec le signe « O », la SARL J S. A. R. L. se fonde sur les termes de l'avenant du 9 juillet 2008 qui démontrerait que c'est bien j.K qui a décidé d'attribuer au nouveau restaurant, la dénomination « O ».

Cet avenant indique « Le licencié envisage d'ouvrir dans l'enceinte de l'hôtel de l'I un restaurant de cuisine japonaise. Ce point de restauration serait dénommé « O » mais pourrait prendre, au choix du licencié, toute autre dénomination pour son exploitation ».

Contrairement à ce que soutient la SARL J S. A. R. L. il ne s'infère pas nécessairement de la possibilité pour le licencié d'opter pour un autre nom, que le signe « O » n'a pas été librement choisi par la SAM S. A. M. I.

Il sera d'ailleurs à cet égard relevé que le contrat initial, pour sa part, indiquait « les parties conviennent que le nom commercial du Restaurant sera « j.K cm » ou, en cas de changement de dénomination, tout autre nom commercial défini d'un commun accord entre les parties », ce dont il résulte que j.K ayant effectivement participé au choix de ce nom commercial, la société de gestion de ses droits a souhaité que cela soit clairement mentionné au contrat et que le changement de dénomination ne puisse être librement décidé par le licencié.

A contrario, une telle mention n'apparaissant pas dans l'avenant du 9 juillet 2008, il doit être considéré que j.K n'a pas participé au choix de la dénomination « O ». Et force est de constater que tel est également le cas s'agissant du bar ouvert courant 2006 sous la dénomination « zz » objet de l'avenant du 5 avril 2006 mais également du restaurant ouvert en 2012, sous la dénomination « ZA » objet de l'avenant du 9 juillet 2012 qui présentent une rédaction similaire à celle de l'avenant de 2008 mais n'ont pourtant pas conduit la SARL J S. A. R. L. à revendiquer la paternité des signes « zz » et « ZA » ni a fortiori à les déposer à titre de marque.

En définitive, ces avenants successifs n'avaient pas pour objet d'étendre les droits concédés mais seulement de redéfinir l'assiette servant de base au calcul à la redevance due par le licencié qui avait désormais le droit d'associer l'image de j.K aux établissements ouverts postérieurement à la signature du contrat initial de collaboration. Dans ces conditions, la communication de la SAM S. A. M. I autour de ces établissements, et plus particulièrement, du restaurant « O » mettait nécessairement en avant le savoir-faire de j.K sans que le Tribunal puisse considérer que la demanderesse a, ce faisant reconnu à ce dernier, la paternité du signe « O ».

Il ne peut davantage être tiré argument des expériences antérieures de j.K sur le territoire nippon en l'absence de tout autre élément produit par la SARL J S. A. R. L. qui viendrait établir que le chef utilisait le signe « O » antérieurement à son choix pour l'exploitation du restaurant monégasque.

Au regard de l'ensemble de ces considérations, il convient de juger que l'usage à titre d'enseigne et de nom commercial du signe « O » constituait une antériorité opposable à la défenderesse.

Le dépôt de la marque litigieuse est donc susceptible d'engager la responsabilité délictuelle de la SARL J S. A. R. L. s'il est démontré l'existence d'un risque de confusion auprès du public concerné. Or, outre l'identité des signes qui n'est pas contestée, force est de constater que les services pour lesquels la marque « O » a été déposée sont identiques à l'activité de restauration de la SAM S. A. M. I ce qui caractérise un risque évident dans l'esprit du public concerné qui est ici constitué de clients d'établissements haut de gamme.

Par ailleurs, la date (le 6 mai 2020) et le contexte du dépôt de la marque, intervenu alors que la SAM S. A. M. I venait de rompre le contrat de collaboration liant les parties, caractérisent l'intention de nuire de la SARL J S. A. R. L. qui, dès le 2 décembre 2020, a notifié à la demanderesse l'interdiction d'utiliser le signe « O » pour l'exploitation de son restaurant de cuisine japonaise.

Dans ces conditions, les actes de concurrence déloyale apparaissent suffisamment constitués.

À titre de mesure réparatrice, la SAM S. A. M. I sollicite à bon droit l'annulation de l'enregistrement de la marque « O » n° xxx qui sera donc prononcée.

Il sera en conséquence et par ailleurs interdit à la SARL J S. A. R. L. de se prévaloir des droits attachés au dépôt de la marque dont l'enregistrement est annulé.

  • Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat

La SARL J S. A. R. L. qui sollicite la condamnation de la SAM S. A. M. I à lui payer des dommages et intérêts, fait valoir que celle-ci a mis en oeuvre sa faculté de résiliation de mauvaise foi en se prévalant très tardivement du décès de j.K alors que dans un premier temps, elle avait opté pour la poursuite du contrat. Elle ajoute que la clause dont la demanderesse revendique l'application doit être jugée nulle dès lors qu'elle réserve à une seule partie la faculté d'une résiliation assortie d'un préavis qui est unilatéralement déterminé et à titre subsidiaire, demande au Tribunal de considérer qu'un délai de préavis de 10 mois au moins, devait être respecté. En réplique à la SAM S. A. M. I, elle soutient que sa demande doit être déclarée recevable dès lors qu'elle procède de la même cause que les demandes principales, constitue une défense contre ces dernières et tend à obtenir le bénéfice de la compensation.

La SAM S. A. M. I qui rappelle que le litige porte sur la responsabilité extracontractuelle de la SARL J S. A. R. L. et ne procède donc pas de la même cause que cette demande reconventionnelle, conclut à son irrecevabilité en relevant que le fait de requérir la résiliation fautive ou l'insuffisance de préavis du contrat ne permet en rien de démontrer que la SARL J S. A. R. L. aurait des droits sur le terme « O » et que dans ces conditions, elle ne peut être considérée comme formant une défense à la demande d'annulation de la marque litigieuse.

Elle ajoute que par ailleurs, elle ne tend pas à obtenir le bénéfice d'une compensation et qu'en tout état de cause, la demande visant à remettre en cause les stipulations du contrat est prescrite par application des dispositions de l'article 2044 du Code de procédure civile. Sur le fond, enfin, la SAM S. A. M. I rappelle que le contrat de collaboration a été conclu en raison de la personnalité de j.K et qu'elle avait donc toute possibilité de revendiquer sa résiliation après le décès de ce dernier. Elle indique que si elle avait, dans un premier temps, opté pour sa poursuite, elle avait conditionné sa décision à une renégociation des conditions de résiliation qui n'a finalement pas abouti, ce qui n'est pas de nature à remettre en cause sa bonne foi.

Sur ce,

L'article 382 du Code de procédure civile dispose que « Les demandes reconventionnelles ne seront reçues que dans les cas suivants :

  • Si elles procèdent de la même cause que la demande principale ;

  • Si elles forment une défense contre cette demande ;

  • Si elles tendent à obtenir le bénéfice de la compensation. ».

En l'espèce, la demande formée au principal par la SAM S. A. M. I vise à obtenir l'annulation de la marque « O » au motif qu'elle porte atteinte à son nom commercial et à son enseigne et génère un risque de confusion auprès du public concerné qui engage la responsabilité délictuelle de son auteur. C'est donc à bon droit que la SAM S. A. M. I relève qu'elle ne procède pas de la même cause que la demande reconventionnelle qui vise pour sa part, à voir juger que les conditions dans lesquelles elle s'est prévalue de la résolution du contrat engage sa responsabilité contractuelle.

Cette demande reconventionnelle ne constitue pas davantage une défense à la demande principale dans la mesure où, à supposer le préjudice établi, sa réparation n'aurait pas pour conséquence le rejet de la demande d'annulation de la marque « O ».

Il ne peut enfin être considéré que la demande de dommages et intérêts présentée par la SARL J S. A. R. L., entre dans le cadre du mécanisme de la compensation alors que l'article 1137 du Code civil suppose l'existence de dettes réciproques et exigibles de sommes d'argent et qu'au cas d'espèce, la SAM S. A. M. I se contente de solliciter, à titre de réparation des actes de concurrence déloyale, l'annulation de la marque litigieuse.

Il s'ensuit que la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat ne peut qu'être déclarée irrecevable.

  • Sur les demandes reconventionnelles formulées au titre de la contrefaçon de la marque « O »

La SARL J S. A. R. L., fait valoir que la reproduction par la SAM S. A. M. I de la marque « O » à l'identique, postérieurement à la résiliation du contrat de collaboration, est constitutive de contrefaçon.

La SAM S. A. M. I réplique que dans la mesure où la défenderesse ne disposait pas d'un droit privatif sur le signe « O » dont le dépôt à titre de marque doit être jugé frauduleux, aucun acte de contrefaçon ne peut être retenu à son encontre.

Sur ce,

Le Tribunal ayant prononcé l'annulation de l'enregistrement de la marque en litige prenant effet au jour de son dépôt, la SARL J S. A. R. L., qui ne détient plus aucun droit privatif sur le signe « O » ne peut utilement reprocher à la SAM S. A. M. I des actes de contrefaçon.

Les demandes formées à ce titre seront en conséquence rejetées.

  • Sur la demande de dommages et intérêts fondée sur la concurrence déloyale

La SARL J S. A. R. L., considère que la SAM S. A. M. I s'est placée dans son sillage en conservant le signe « O » associé à l'image du chef j.K pour désigner son restaurant étoilé japonais, dont elle rappelle qu'il est le premier du genre ouvert par ce dernier en Europe et a bénéficié, à ce titre, d'une très grande exposition médiatique.

En réplique, la SAM S. A. M. I demande au Tribunal de constater l'absence de faits distincts des actes de contrefaçon allégués et fait valoir qu'en tout état de cause, la SARL J S. A. R. L., ne démontre ni la réalité d'une faute ni son préjudice mais cherche, au travers de ses demandes, à compenser la perte financière que la résolution du contrat a entraînée.

Sur ce,

Il sera à titre liminaire observé que la SARL J S. A. R. L., ne peut pertinemment reprocher à la SAM S. A. M. I d'avoir associé dans sa communication, l'image de j.K à son restaurant « O » alors qu'il s'agissait là de l'objet même du contrat de collaboration signé par les parties.

Ensuite, dès lors que la demande présentée au titre du parasitisme est uniquement fondée sur les droits privatifs qu'elle revendique sur le signe « O » mais dont il s'évince de la présente décision qu'elle n'en dispose plus compte-tenu de l'annulation rétroactive de l'enregistrement de la marque, sa demande ne peut qu'être rejetée.

  • Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

Compte tenu de la solution du litige, la procédure initiée par la SAM S. A. M. I ne saurait être qualifiée d'abusive de sorte que la demande de dommages et intérêts présentée sur ce fondement sera pareillement rejetée.

  • Sur les demandes accessoires

La SARL J S. A. R. L., qui succombe, sera condamnée aux dépens qui seront distraits au profit de Maître Patricia REY, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

L'article 238-1 du Code de procédure civile prévoit que « Le juge condamnera la partie tenue aux dépens ou qui perdra son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il déterminera, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ».

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SAM S. A. M. I les frais qu'elle a dû exposer pour se défendre. La SARL J S. A. R. L., sera en conséquence condamnée à lui payer la somme de 5.000 euros à ce titre.

Compte tenu de la nature du litige la présente décision ne sera pas assortie de l'exécution provisoire.

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL,

Statuant par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,

Se déclare territorialement compétent ;

Annule l'enregistrement de la marque verbale monégasque « O » numéro xxx déposée par la SARL J S. A. R. L., le 6 mai 2020 en classe 43 ;

Dit que la décision sera transmise à l'Office de la Propriété Industrielle, Direction du Développement Économique, Division de la propriété intellectuelle située 9 rue du Gabian à Monaco aux fins que de droit, par la partie la plus diligente, une fois la décision devenue définitive ;

Interdit à la SARL J S. A. R. L., de se prévaloir des droits attachés au dépôt de la marque dont l'enregistrement est annulé ;

Déclare irrecevable la demande reconventionnelle de dommages et intérêts fondée sur la résolution abusive du contrat de collaboration signé le 24 février 2004 ;

Rejette les demandes fondées sur la contrefaçon de la marque numéro xxx et la concurrence déloyale ;

Rejette la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Condamne la SARL J S. A. R. L., à payer à la SAM S. A. M. I la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 238-1 du Code de procédure civile ;

Dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire ;

Déboute les parties pour le surplus des demandes ;

Condamne la SARL J S. A. R. L., aux dépens distraits au profit de Maître Patricia REY, avocat-défenseur, sous sa due affirmation ;

Ordonne que les dépens distraits seront provisoirement liquidés sur état par le greffier en chef, au vu du tarif applicable ;

Composition🔗

Après débats en audience du Tribunal de Première Instance de la Principauté de Monaco, et qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement,

Ainsi jugé et rendu au Palais de Justice, à Monaco, le 31 OCTOBRE 2024, par Madame Evelyne HUSSON, Vice-Président, Madame Catherine OSTENGO, Juge, Monsieur Maxime MAILLET, Magistrat Référendaire, assistés de Madame Cécile BRANCHE, Greffier stagiaire, en présence du Ministère Public.

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