Tribunal de première instance, 19 janvier 2017, M. s. G c/ La SAM A et autres

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Abstract🔗

Responsabilité civile - Médecin - Intervention chirurgicale - Faute (oui) - Responsabilité partagée - État pathologique antérieur du patient - Évaluation des préjudices

Résumé🔗

Il n'existe pas de présomption d'imputabilité exclusive entre la faute et les dommages, en cas de faute grave, excluant tout partage de responsabilité. En conséquence, à défaut pour le demandeur de rapporter la preuve que les manquements commis par le chirurgien sont les seuls faits générateurs de son état séquellaire, à l'exclusion de la pathologie dégénérative dont il était affecté antérieurement, il y a lieu de dire, conformément aux conclusions du rapport d'expertise, que le médecin est responsable des dommages subis par le demandeur à hauteur d'un tiers. Le médecin sera donc tenu solidairement avec son assureur de responsabilité civile, et dans cette même proportion de réparer les conséquences dommageables pour le demandeur. Les fautes ont été commises lors de l'opération et aucun manquement n'est imputable à la clinique.

Il n'y a pas lieu de retenir au titre du déficit fonctionnel temporaire total, la période d'immobilisation totale qui a suivi l'intervention chirurgicale litigieuse, laquelle était inhérente à cette opération non contre-indiquée au regard de l'état pathologique antérieur du patient. S'agissant du point de départ de la période de déficit fonctionnel temporaire partiel imputable aux manquements du chirurgien, dès lors que l'intervention chirurgicale, bien que prématurée, n'était pas totalement contre-indiquée, le demandeur aurait dû nécessairement subir une période d'incapacité partielle de 6 mois. C'est donc la période postérieure à cette date qui doit être prise en compte. La douleur provoquée par l'opération chirurgicale litigieuse n'a pas lieu d'être indemnisée dès lors que celle-ci n'était pas totalement contre-indiquée et que le demandeur aurait dû nécessairement endurer la souffrance inhérente à cette intervention. Il sera alloué 10.000 euros en considération de la longue rééducation subie. Il y a lieu de fixer la cessation d'activité professionnelle au jour de l'intervention fautive et de dire que la perte de gains qui s'en est suivie est imputable au médecin fautif, mais dans les proportions déterminées par l'expert en raison de l'évolution naturelle de la pathologie du demandeur. L'incidence professionnelle liée à sa dévalorisation sur le marché du travail doit être prise en compte. En revanche, il n'est pas établi de perte de chance sérieuse d'une évolution de carrière professionnelle.


Motifs🔗

TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

N° 2014/000245 (assignation du 30 octobre 2013)

JUGEMENT DU 19 JANVIER 2017

En la cause de :

  • M. s. G, né le 23 août 1970 à Nice, de nationalité française, chef d'atelier, domicilié en France - X1 - 06240 Beausoleil,

DEMANDEUR, ayant élu domicile en l'Étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Christine DIOP, avocat au barreau de Nice,

d'une part ;

Contre :

  • 1 - La Société Anonyme Monégasque dénommée « A », dont le siège social est sis à Monaco - X2, prise en la personne de son Président délégué en exercice, le Docteur p B, ou tout autre, domicilié en cette qualité audit siège,

  • 2 - Le Docteur b. MA., neurochirurgien, exerçant au sein de la SAM A, domicilié en cette qualité audit siège de la SAM A - X2 à Monaco,

  • 3 - La Société Anonyme de droit français dénommée B, société au capital de 53.193.775 euros, dont le siège social est X3 à Paris (75456) France, inscrite au Registre du Commerce de Paris sous le n° X, prise en la personne de son Président du Conseil d'Administration et Directeur Général en exercice domicilié en cette qualité audit siège,

DÉFENDEURS, ayant élu domicile en l'Étude de Maître Sophie LAVAGNA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Sophie KERZERHO, avocat au barreau de Paris, substituant Maître Gilles GARIOU, avocat en ce même barreau,

d'autre part ;

LE TRIBUNAL,

Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 30 octobre 2013, enregistré (n° 2014/000245) ;

Vu le jugement avant-dire-droit de ce Tribunal en date du 8 mai 2014 ayant renvoyé la cause et les parties à l'audience du 11 juin 2014 ;

Vu le jugement avant-dire-droit de ce Tribunal en date du 22 janvier 2015 ayant notamment ordonné une mesure d'expertise confiée au docteur Jean AUQUE ;

Vu les conclusions de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, au nom de s. G, en date des 13 janvier 2016 et 11 mai 2016 ;

Vu les conclusions de Maître Sophie LAVAGNA, avocat-défenseur, au nom de la SAM A , le Docteur b. MA. et la SA B, en date des 9 mars 2016 et 23 juin 2016 ;

À l'audience publique du 10 novembre 2016, les conseils des parties ont été entendus en leurs plaidoiries et le jugement a été mis en délibéré pour être prononcé ce jour 19 janvier 2017 ;

CONSIDÉRANT LES FAITS SUIVANTS :

Le 17 février 2010, s. G employé en qualité de technicien niveau II Volvo, a été victime d'un accident du travail, à la suite d'un mouvement de torsion effectué alors qu'il était couché sous un véhicule, ayant entraîné un blocage au niveau du dos ;

Présentant une hernie discale L5 S1, il était opéré le 18 mars 2010 par le docteur b. MA., neurochirurgien exerçant son activité au sein de la SAM A , afin de mettre en place deux prothèses carbones destinées à remplacer le disque lombaire et à permettre ainsi la fusion entre les vertèbres et la prothèse ;

Suite à l'intervention chirurgicale, s. G ne voyait pas son état s'améliorer, ressentait au contraire des douleurs lombaires importantes et subissait des blocages réguliers du dos ;

Après plusieurs analyses en juillet 2010, le docteur b. MA. lui indiquait qu'il était victime de l'effondrement d'une des cages dans une vertèbre et que si la fusion entre la vertèbre et la prothèse ne se réalisait pas dans les trois mois à venir, la réalisation d'une deuxième intervention chirurgicale serait indispensable ;

Après avoir fait procéder le 27 septembre 2010 à la réalisation d'un scanner 3D, le docteur FO. et le docteur LI., neurochirurgiens et spécialistes en prothèse vertébrale exerçant au CHU de Nice posaient le diagnostic d'un mauvais positionnement de la prothèse précédente nécessitant une reprise chirurgicale par voie antérieure ;

Ce diagnostic était confirmé par le docteur FRESSYNET, désigné en qualité d'expert médical par la compagnie d'assurances de s. G, intervenant dans le cadre de la garantie protection juridique souscrite par celui-ci ;

Dans son rapport du 10 novembre 2010, ce médecin concluait :

  • - la réalisation technique de l'intervention du 18 mars 2010 n'a pas permis d'obtenir le but désiré,

  • - toute la partie inférieure du disque vertébral n'a pas été curetée,

  • - les greffes mises en place n'ont pas été positionnées dans l'espace discal, mais dans la partie inférieure du plateau vertébral de L5,

  • - de ce fait la lombosciatalgie de Monsieur s. G a persisté ;

Le 2 décembre 2010, s. G subissait au sein du CHU PASTEUR à Nice une deuxième intervention chirurgicale réalisée par le docteur LITRICO, consistant en une arthrodèse L5 S1 par voie antérieure, compte tenu de la mise en place déficiente des cages postérieures qui n'avait pas permis de stabilisation ;

Des soins (port d'un corset, kinésithérapie, balnéothérapie) se poursuivaient avec une bonne rémission, s. G souffrant toutefois d'une inflammation des talons causée par le repositionnement des vertèbres ;

Le 28 mars 2011, s. G se plaignait de douleurs abdominales et de la formation d'une boule au niveau de la cicatrice abdominale résultant de la seconde intervention chirurgicale ;

Après qu'un diagnostic d'éventration de 2 cm puis 4 cm ait été posé suite à la réalisation de deux échographies les 30 mars 2011 et 4 mai 2011, s. G subissait une troisième intervention chirurgicale le 16 juin 2011 au sein du pôle digestif de l'hôpital L'Archet de Nice, aux fins de mise en place d'une plaque de Prolène en rétromusculaire fixée par des points de prolène 2-0 ;

Le 14 novembre 2012, il présentait des symptômes similaires à ceux constatés lors de son éventration, sans qu'une nouvelle opération chirurgicale ne soit préconisée ;

En arrêt de travail depuis le 17 février 2010 et consolidé avec séquelles le 31 mai 2013, malgré les douleurs lombaires et abdominales persistantes, sans amélioration notable de la protusion et un état anxio-dépressif persistant, il était licencié le 19 mars 2012 ;

Aucun accord amiable n'ayant pu intervenir, s. G, par acte d'huissier en date du 30 octobre 2013, a assigné la SAM A , le docteur b. MA. et la SA B, assureur des deux premiers, devant le Tribunal de première instance de Monaco aux fins de mise en cause de leur responsabilité et de condamnation solidaire des défendeurs à lui payer des dommages et intérêts ;

En défense, la SAM A , le docteur b. MA. et la SA B, ont, avant toute défense au fond, formé une demande d'appel en garantie contre le Centre Hospitalier Universitaire de Nice-Hôpital Pasteur ;

Suivant jugement en date du 8 mai 2014, le Tribunal de Première Instance a débouté les défendeurs de leur demande d'appel en garantie et a renvoyé l'affaire pour leurs conclusions au fond ;

Suivant jugement en date du 22 janvier 2015, la présente juridiction a :

  • - Ordonné un sursis à statuer sur la responsabilité du docteur b. MA. et l'A,

  • - Avant dire droit au fond, ordonné une mesure d'expertise médicale et désigné le docteur AUQUE pour y procéder,

  • - Rejeté la demande de provision de s. G,

  • - Réservé les dépens en fin de cause ;

Suivant rapport en date du 17 avril 2015 et réponses aux dires en date du 15 juin 2015, le tout déposé au greffe le 22 juin 2015, l'expert AUQUE a retenu notamment que :

  • 1) Dans son pré-rapport :

    • - « Le Docteur MA. est intervenu en qualité de médecin libéral.

    • - La nature de l'intervention chirurgicale pratiquée par le Docteur MA. ainsi que les conditions de sa réalisation ont été décrites. Il semble qu'une information complète ait été donnée à Monsieur G ce dernier a pris connaissance et signé un formulaire d'information.

    • - L'intervention chirurgicale pratiquée le 02/12/2010 par le Docteur LI. a été décrite. Elle était motivée par une mauvaise consultation (pseudarthrose) et une malfaçon de l'intervention du Docteur MA..

    • - L'intervention du 16/06/2011 a été décrite. Elle est en rapport direct avec l'intervention du Docteur LI. et indirect avec celle du Docteur MA..

    • - Les soins dispensés par le Docteur MA. n'ont pas été attentifs, diligents et conformes aux données acquises de la science et de la pratique médicale en vigueur au jour où ils ont été pratiqués, pour les raisons suivantes :

      • Nous estimons que l'indication opératoire n'était pas justifiée car d'une part, il existait une sciatalgie gauche non expliquée par l'imagerie. D'autre part, jusqu'à la veille de l'intervention, Monsieur G poursuivait ses activités professionnelles. Il n'y a donc pas eu de période de repos préopératoire qui aurait pu atténuer la symptomatologie douloureuse. Lors de l'intervention, il n'a été retrouvé aucun stigmate de hernie discale. Enfin, les signes radiologiques de souffrance corporelle sous forme d'un discret hyper signal des coins postérieurs de L5 et S1 étaient minimes.

      • La réalisation technique de l'intervention n'a pas été conforme aux règles de l'art. Les cages intersomatiques ont été mal positionnées, ce qui constitue une malfaçon technique. La mise en place de cages arthrodésantes sans ostéosynthèse associée génère un risque important de pseudarthrose c'est-à-dire de non fusion de l'espace intercorporéal et donc d'une pérennisation de la symptomatologie douloureuse. Enfin, sur les différentes imageries postopératoires, il apparaît que le curetage discal a été insuffisant.

      • D'autre part, le suivi postopératoire n'a pas été conforme aux règles de l'art puisqu'il n'a pas été retrouvé de radiographies standard post chirurgicales immédiates, ni lors des consultations qui ont suivi et pour lesquelles nous n'avons pratiquement aucun document écrit.

      • L'I. R. M. lombaire du 10/06/2010 a été demandée par le médecin traitant du patient et non par le Docteur MA. alors que I' évolution clinique n'était pas favorable.

      • L'intervention réalisée à Nice le 02/12/2010 est totalement imputable à l'échec de la première intervention du Docteur MA.. La deuxième intervention (cure chirurgicale de l'éventration du 16/06/2011) est partiellement imputable (50 %) à l'intervention du Docteur MA. En effet, si cette deuxième intervention du Docteur LI. n'avait pas été nécessaire, l'éventration ne serait pas survenue.

    • - Les séquelles actuelles qui ont été décrites sont imputables pour un tiers à l'intervention du Docteur MA. et pour les deux tiers à l'évolution naturelle de la maladie.

    • - La date de consolidation des blessures peut être fixée, en accord avec le Docteur PARIENTI et le médecin traitant au 30/05/2013, à partir de cette date, les troubles cliniques du patient sont devenus stationnaires.

    • - Le déficit fonctionnel temporaire total (DFTT) imputable est en rapport avec l'intervention du Docteur LITRICO, la rééducation au centre des Lauriers Roses plus l'intervention pour l'éventration. Ce DFTT imputable va donc du 01/12/2010 au 06/12/2010 puis du 06/12/2010 au 06/01/2010 puis du 15/06/2011 au 18/06/2011.

    • - Le déficit fonctionnel temporaire partiel (DFTP) habituel après une spondylodèse est en moyenne de six mois compte tenu de la profession de l'intéressé. Il y a donc un DFTP théorique qui aurait dû aller du 20/03/2010 au 20/09/2010. Le DFTP imputable, abstraction faite des DFTT déjà décrites va du 21/09/2010 au 30/05/2013, date de consolidation.

    • - De même, l'arrêt de travail imputable couvre la même période car le patient n'a jamais repris d'activités professionnelles.

    • - Ces déficits fonctionnels sont imputables pour un tiers à l'intervention du Docteur MA. et pour deux tiers à l'évolution naturelle de la maladie.

    • - Le pretium doloris avant consolidation est constitué par deux interventions et une longue rééducation. Il peut être qualifié de moyen et quantifié à 4/7.

    • - Il existe un préjudice esthétique avant consolidation constitué par une cicatrice chirurgicale d'éventration avec voussure en regard. Ce préjudice esthétique peut être qualifié de très léger à léger et quantifié à 1,5/7.

    • - Pour la phase après consolidation, il existe un déficit fonctionnel permanent sous forme des troubles qui ont été décrits et qui peut être fixé à 10 % (dix pour cent) conformément aux barèmes habituellement utilisés en droit commun.

    • - Il existait un retentissement professionnel puisque l'état clinique actuel du patient n'est pas compatible avec une reprise intégrale de ses activités professionnelles antérieures (mécanicien automobile).

    • - Il n'y a pas de soins futurs à prévoir en dehors de séances de kinésithérapie intermittentes.

    • - Il existe un préjudice esthétique permanent quantifié à 1, 5/7.

    • - Il existe un préjudice d'agrément car Monsieur G ne peut plus se livrer aux activités sportives antérieures. Il faut cependant préciser qu'avant l'intervention du Docteur MA., en raison de la symptomatologie que le patient présentait, ces activités sportives étaient devenues impossibles.

    • - Il n'y a pas de manquements imputables à la clinique 1M2S » ;

  • 2) Dans ses réponses aux dires des parties :

    • - Aux dires du conseil du Docteur b. MA. et de la clinique A : « [l'expert] persiste à dire qu'il y a eu manquement du Docteur MA. : d'une part, l'indication opératoire était très prématurée, le patient poursuivait ses activités professionnelles, la prise en charge non chirurgicale (kinésithérapie etc.) n'avait pas été à son terme. [il] rappelle que la malfaçon technique consistait en l'absence d'ostéosynthèse postérieure associée à la spondylodèse ce qui explique le déplacement des cages en mauvaise position ainsi que la non consolidation. Le suivi radiologique a été déficient d'autant que Monsieur G se plaignait de douleurs persistantes ;

    • Effectivement, en ce qui concerne les préjudices liés à la survenue de l'éventration la part de 50 % doit s'imputer sur le tiers restant à la charge du Docteur MA..

    • Pour les souffrances endurées, [l'expert estime]avoir été clair sur ce poste de préjudice.

    • Taux du DFTT du 21/09/2010 au 30/11/2010; 15 %.

    • Taux du DFTT du 07/01/2011 au 14/06/2011 15 %.

    • Taux du DFTT du 19/06/2011 au 30/05/2013 12 %.

    • Le préjudice esthétique temporaire et le préjudice esthétique permanent sont identiques.

    • Monsieur G n'a pas repris ses activités professionnelles antérieures car il a été licencié le 19/03/2013.

    • [Il] rappelle qu'avant l'intervention du Docteur MA., il n'était pas en arrêt de travail. ».

    • - Aux dires du conseil de s. G : « l'intervention du Docteur MA. ne peut être qualifiée de désastreuse. Elle n'a tout simplement pas amélioré l'état clinique du patient car l'indication opératoire ainsi que sa réalisation technique étaient inappropriées. On ne peut occulter l'état antérieur préopératoire de Monsieur G qui a été décrit. La responsabilité totale du Docteur MA. n'aurait pu être retenue que si Monsieur G avait été, avant l'intervention, totalement asymptomatique, ce qui n'était pas le cas.

    • Pour les autres postes de préjudice, [l'expert s'en est] expliqué, la répartition entre l'état antérieur du patient, l'intervention inappropriée du Docteur MA. et ses suites insatisfaisantes a été fixée.

    • Il n'y avait aucune certitude sur le devenir de chef d'atelier de Monsieur G compte tenu des troubles qu'il présentait avant l'intervention du Docteur MA. et de l'évolution prévisible de sa maladie.

    • [Il s'est] expliqué sur le préjudice d'agrément, les douleurs préopératoires de l'intéressé n'étaient plus compatibles avec les sports qu'il pratiquait.

    • Au total, ces dires ne modifient qu'à la marge les conclusions [du] pré-rapport à savoir :

      • La part du préjudice à 50 %, liée à l'éventration doit être imputée sur le tiers restant à la charge du docteur MA..

      • Les pourcentages de taux de DFTT ont été précisés » ;

s. G a conclu les 13 janvier et 11 mai 2016 ;

Aux termes de ses écritures, il demande au Tribunal de :

  • - DIRE ET JUGER que le docteur MA. a commis des fautes dans l'exercice de ses fonctions au sein de l'établissement A engageant sa responsabilité ainsi que celle de la société A, à son égard ;

  • - DIRE ET JUGER qu'il existe un lien direct et certain entre les fautes commises par le docteur MA. et les préjudices qu'il a subis ;

  • - DÉCLARER le docteur MA. entièrement responsable des préjudices qu'il lui a causés conjointement avec la société A ;

  • - DIRE ET JUGER que la Compagnie d'assurance B devra relever et garantir les condamnations prononcées à l'encontre du docteur MA. et de l'A ;

  • - CONDAMNER solidairement le docteur MA., l'A et la compagnie B à lui payer les sommes suivantes en réparation de son préjudice :

    • 1.125 euros au titre du DFTT,

    • 14.062,50 euros au titre du DFTP,

    • 12.000 euros titre des souffrances endurées,

    • 2.500 euros au titre du préjudice esthétique,

    • 15.000 euros au titre du préjudice d'agrément,

    • 16.000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent (10 %),

    • 5.283,96 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels jusqu'à la date de consolidation,

    • 23.406,09 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs jusqu'au 31/12/2015,

    • 236.549 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs capitalisés,

    • 130.000 euros en réparation de la perte de chance de retrouver un emploi à hauteur de ses compétences ;

  • - ORDONNER l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant toute voie de recours ;

En défense, le docteur b. MA., la SAM A et la SA B ont déposé des écritures les 9 mars et 23 juin 2016 ;

Aux termes de leurs différents jeux de conclusions, ils sollicitent :

  • - le débouté de s. G de l'ensemble de ses demandes en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de la Clinique A ;

  • - qu'il soit statué ce que de droit sur l'engagement de la responsabilité du Docteur b. MA. ;

Le cas échéant :

  • - le débouté de s. G des demandes qu'il formule en indemnisation des postes de préjudice suivants :

    • Préjudice esthétique temporaire,

    • Préjudice d'agrément,

    • Pertes des gains professionnels avant consolidation,

    • Pertes de gains professionnels futurs,

    • Incidence professionnelle et perte de chance de retrouver un emploi correspondant à ses compétences ;

  • - La réduction à de plus justes proportions et dans les termes des motifs des écritures lesquels font corps avec le dispositif, les sommes allouées à s. G en indemnisation des postes de préjudice suivants, en tenant compte des préjudices strictement imputables aux manquements retenus :

    • Déficit fonctionnel temporaire,

    • Souffrances endurées,

    • Déficit fonctionnel permanent,

    • Préjudice esthétique permanent ;

MOTIFS

  • I. Sur la responsabilité

Selon l'article 997 du Code civil, toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts, en cas d'inexécution de la part du débiteur ;

Aux termes de l'article 1002 du même code, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement des dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part ;

s. G estime que la responsabilité du docteur b. MA. doit être retenue au regard des fautes qu'il aurait commises, lesquelles seraient établies par le rapport de l'expert judiciaire AUQUE ; cependant, il estime que cet expert n'aurait pas tiré toutes les conséquences de ses propres constatations en ayant considéré que les séquelles dont il serait atteint ne seraient imputables qu'à hauteur d'un tiers à l'intervention de docteur b. MA. et pour deux tiers à l'évolution naturelle de la maladie ;

Il soutient que l'opération chirurgicale pratiquée par le docteur b. MA. lui aurait ôté toute autre possibilité de thérapie moins invasive et moins traumatisante qui aurait sans doute fait évoluer sa maladie différemment et ne lui aurait pas causé de préjudices ; il considère que la responsabilité totale du docteur b. MA. doit être retenue pour toutes les séquelles qu'il a subies, compte tenu de la nature et la gravité des fautes commises et de la perte de chance de se soigner autrement ;

Il fait grief à l'expert judiciaire d'avoir retenu que la cure de l'éventration n'était imputable qu'à 50% au docteur b. MA., alors que selon lui, la deuxième intervention chirurgicale n'a pu être réalisée par voie antérieure et a provoqué l'éventration, qu'en raison de la malfaçon de la première intervention ;

Ainsi, il prétend que les deux dernières opérations qu'il a subies ne seraient que la conséquence de la faute commise par le docteur b. MA. et que les préjudices qui en résultent doivent lui être imputés en totalité ;

Enfin, il affirme que la faute commise par le docteur b. MA. dans l'exercice de ses fonctions engage la SAM A ;

Les défendeurs s'en rapportent à justice quant aux manquements commis par le docteur b. MA., mais ils contestent les prétentions du demandeur tendant à lui imputer la totalité de ses préjudices;

Ils soulignent que l'expert médical a, dans son dire en réponse au conseil de s. G, précisément répondu sur ce point et écarté la responsabilité totale du docteur b. MA. ; ils prétendent qu'il doit être tenu compte de l'état antérieur de s. G et s'opposent à l'indemnisation des préjudices imputables à l'évolution naturelle de la maladie ;

  • Sur le fait générateur

En l'espèce, au regard des conclusions de l'expert médical précitées et en l'absence de contestation des parties sur ce point, il convient de dire que le docteur b. MA. a commis des fautes lors de l'opération chirurgicale de s. G le 18 mars 2010, et lors de son suivi pré et post opératoire ;

De même, il est constant que le docteur b. MA. a agi dans l'exercice de ses fonctions en qualité de médecin libéral, de sorte que la responsabilité de la SAM A dans les fautes commises par celui-ci ne saurait être retenue ;

En outre, l'expert a souligné qu'aucun manquement n'était imputable à la clinique A;

s. G sera donc débouté de ses demandes à l'encontre de cette dernière;

  • Sur la causalité

En l'espèce, l'expert AUQUE a retenu dans son rapport que les séquelles dont est atteint s. G ne sont imputables que pour un tiers aux manquements commis par le docteur b. MA., considérant que les deux tiers restants résultaient de l'évolution naturelle de la maladie;

En effet, il ressort des éléments du dossier que s. G a été amené à consulter le docteur b. MA., à la suite d'un accident du travail (blocage du dos) qui a été favorisé par une discopathie dégénérative;

Il s'agit d'une pathologie irréversible ;

Ainsi, le demandeur souffrait d'un état pathologique antérieur aux fautes commises par le docteur b. MA., et dont le processus morbide devait nécessairement se développer ;

D'ailleurs, en réponse au dire en date du 9 juin 2015 du conseil de s. G qui soutenait la même argumentation que celle présentement déroulée, l'expert AUQUE a expressément rappelé l'existence de l'état antérieur du patient, pour indiquer que « la responsabilité totale du docteur MA. n'aurait pu être retenue que si Monsieur G avait été, avant l'intervention, asymptomatique, ce qui n'était pas le cas » ;

Puis, il a expliqué qu'il en avait tenu compte dans l'évaluation des différentes postes de préjudices, réaffirmant qu'un tiers de ceux-ci incombait au docteur b. MA. ;

Or pour critiquer le rapport d'expertise médicale sur ce point et pour prétendre que la responsabilité du médecin devait être totale, le demandeur, qui ne verse aucune pièce médicale nouvelle, postérieure au rapport d'expertise, se borne à déduire de la gravité des fautes commises par le docteur b. MA. un rôle causal exclusif dans les préjudices qu'il a subis ;

Mais il n'existe pas de présomption d'imputabilité exclusive entre la faute et les dommages, en cas de faute grave, excluant tout partage de responsabilité ;

En conséquence, à défaut pour s. G de rapporter la preuve que les manquements commis par le docteur b. MA. sont les seuls faits générateurs de son état séquellaire, à l'exclusion de la pathologie dégénérative dont il était affecté antérieurement, il y a lieu de dire, conformément aux conclusions du rapport d'expertise, que le médecin est responsable des dommages subis par le demandeur à hauteur d'un tiers ;

Il sera donc tenu solidairement avec la SA B, qui couvre sa responsabilité civile, et dans cette même proportion de réparer les conséquences dommageables pour s. G ;

  • II. Sur la réparation des préjudices

    • 1) Sur le déficit fonctionnel temporaire

      • Sur le déficit fonctionnel temporaire total :

Le demandeur, s'il s'accorde sur les deux premières périodes retenues par l'expert, prétend néanmoins que le DFTT doit aussi inclure l'immobilisation totale consécutive à l'intervention inadaptée et non indiquée du docteur b. MA., soit du 17/03/2010 au 20/03/2010 ;

Les défendeurs ne contestent pas les périodes retenues dans l'expertise judiciaire et ne répondent pas aux prétentions du demandeur quant à l'immobilisation consécutive à l'intervention du docteur b. MA. ; ils offrent la somme de 260 euros, après calcul de la part incombant au docteur b. MA. ;

En l'espèce, l'expert AUQUE a retenu les périodes suivantes:

  • - Du 1/12/2010 au 6/12/2010 : hospitalisation pour la reprise chirurgicale ;

  • - Du 6/12/2010 au 6/01/2011 : séjour en centre de convalescence ;

  • - Du 15/06/2011 au 18/06/2011 qui correspond à l'intervention pour la cure de l'éventration (dont il ne faudra retenir que 50%) ;

Si l'indication opératoire a été qualifiée par le docteur AUQUE d'injustifiée, de très prématurée ou d'inappropriée en raison d'un suivi préopératoire défaillant de la part du docteur b. MA., elle n'a pas été considérée comme totalement contre-indiquée, l'expert se basant sur l'état pathologique antérieur de s. G ;

En outre c'est, selon l'expert judiciaire, la malfaçon technique réalisée par le médecin défendeur et le suivi post-opératoire déficient qui ont entraîné le déplacement des cages et la non-consolidation du demandeur ;

Ainsi, il n'y a pas lieu de retenir au titre du déficit fonctionnel temporaire total, la période d'immobilisation totale qui a suivi l'intervention chirurgicale réalisée par le docteur b. MA., laquelle était inhérente à cette opération non contre-indiquée au regard de l'état pathologique antérieur du patient ;

Il convient donc d'évaluer le montant du préjudice subi par s. G de ce chef à la somme forfaitaire de 1.000 euros, tenu compte tenu des 50% pour la cure d'éventration;

  • Sur le déficit fonctionnel temporaire partiel :

Le demandeur fait grief à l'expert de n'avoir pas évalué ce poste de préjudice selon la classification jurisprudentielle habituelle qui retiendrait trois classes : 50%, 25% et 10% ; en outre, il estime que le chiffrage retenu par l'expert ne tiendrait pas compte de la perte de sa qualité de vie pendant ces longues périodes, ponctuées de diverses interventions chirurgicales ; aussi, propose-t-il de fixer le taux de son incapacité partielle pendant ces périodes à 50 % ; enfin, il sollicite que soit pris en compte la période du 20/03/2010 au 20/09/2010, s'appuyant sur les termes du rapport d'expertise qui fait état d'un DFTP théorique de 6 mois pour ce type d'opération chirurgicale ;

Les défendeurs estiment que les conclusions de l'expert doivent être homologuées et offrent la somme de 512,40 euros, après calcul de la part incombant au docteur b. MA.;

En l'espèce, l'expert AUQUE a chiffré ce poste de préjudice comme suit :

  • - Du 21/09/2010 au 30/11/2010, 15% ;

  • - Du 7/01/2011 au 14/06/2011, 15% ;

  • - Du 19/06/2011 au 30/05/2013, 12% ;

s. G n'argumente pas avec des considérations concrètes, ni ne justifie avec des pièces, sa demande tendant à voir fixer le taux de son incapacité partielle avant consolidation à 50% ; les taux proposés par l'expert seront donc retenus ;

S'agissant du point de départ de la période de DFTP imputable aux manquements du docteur b. MA., il faut se référer aux motifs développés ci-avant : dès lors que l'intervention chirurgicale, bien que prématurée, n'était pas totalement contre-indiquée, s. G aurait dû nécessairement subir une période d'incapacité partielle de 6 mois allant du 20/03/2010 au 20/09/2010 ;

C'est donc la période postérieure à cette date qui doit être prise en compte, comme une période d'incapacité préjudicielle, puisqu'en l'état des manquements commis par b. MA., l'état de s. G n'était pas consolidé;

En conséquence, le montant du préjudice subi par s. G de ce chef sera évalué à la somme forfaitaire de 3.000 euros ;

  • 2) Sur les souffrances endurées

s. G demande que soit également prise en considération la douleur occasionnée par l'intervention chirurgicale non indiquée du docteur b. MA. ;

Les défendeurs ne formulent aucune observation et offrent la somme de 2.000 euros, après calcul de la part incombant au docteur b. MA.;

En l'espèce, pour chiffrer à 4/7 ce poste de préjudice, le docteur AUQUE a retenu les deux interventions chirurgicales et la longue rééducation subies par s. G ;

Il sera rappelé comme précédemment que la douleur provoquée par l'opération chirurgicale litigieuse n'a pas lieu d'être indemnisée dès lors que celle-ci n'était pas totalement contre-indiquée et que s. G aurait dû nécessairement endurer la souffrance inhérente à cette intervention;

Au vu de ces considérations médicales retenues par l'expert, il y a lieu d'évaluer à la somme de 10.000 euros ce chef de préjudice ;

  • 3) Sur le déficit fonctionnel permanent

Le docteur AUQUE a fixé à 10% l'incapacité permanente et partielle dont demeure atteint s. G: celui-ci souffrant de lombalgies, d'une raideur du rachis lombaire et d'une sciatalgie gauche;

Les défendeurs offrent la somme de 4.167 euros, après calcul de la part incombant au docteur b. MA.;

Eu égard à l'état séquellaire de s. G et à son âge à la date de la consolidation (42 ans), il y a lieu d'évaluer à la somme de 16.000 euros ce chef de préjudice;

  • 4) Sur le préjudice esthétique

L'expert a fixé à 1,5/7 le préjudice esthétique permanent de s. G ;

Les défendeurs offrent la somme de 500 euros, après calcul de la part incombant au docteur b. MA.;

Il convient de chiffrer à la somme de 2.000 euros l'indemnité réparatrice correspondante à ce poste de préjudice ;

  • 5) Sur le préjudice d'agrément

s. G fait valoir qu'il exerçait diverses activités sportives de haute montagne jusqu'en 2009 et que compte tenu de son jeune âge, il pouvait prétendre continuer ce type d'activité pendant encore 20 années;

Le docteur b. MA., la SAM A et la SA B soutiennent que le préjudice d'agrément, s'il était établi, n'est pas imputable aux manquements du premier, en raison de l'état antérieur du demandeur, mais à son accident du travail;

En l'espèce, le docteur AUQUE a reconnu le principe d'un préjudice d'agrément tout en précisant qu'avant l'intervention du docteur b. MA., la pratique des activités sportives auxquelles s. G s'adonnait était devenue impossible en raison de sa symptomatologie, ajoutant « les douleurs préopératoires de l'intéressé n'étaient plus compatibles avec les sports qu'il pratiquait »;

Les pièces versées par s. G établissent qu'il a pratiqué pendant plusieurs années des activités sportives de haute montagne mais sans précision de date de terme, hormis une attestation qui fixe l'interruption de ces activités à mars 2010, et ce alors que le demandeur mentionne à plusieurs reprises dans ses écritures avoir cessé sa pratique en 2009, quelques mois avant l'intervention du médecin défendeur ;

Au regard des conclusions de l'expert, des constatations qui précèdent et de l'état de s. G antérieurement à sa consultation auprès du docteur b. MA. (discopathie dégénérative et blocage du dos), il y a lieu de dire que le préjudice d'agrément du demandeur n'est pas imputable au docteur b. MA. ;

s. G sera débouté de sa demande d'indemnisation de ce chef;

  • 6) Sur le préjudice économique

    • Sur la perte de gains professionnels

s. G fait état d'une perte de gains professionnels avant consolidation de 5.283,96 euros, soutenant que son arrêt de travail est consécutif à l'intervention du docteur b. MA.;

S'agissant de sa perte de gains après consolidation, il fait valoir qu'ayant été licencié le 19 mars 2013, il a été pris charge par Pôle emploi, puis a exercé un emploi à temps partiel en contrat à durée déterminée, avant de se retrouver de nouveau au chômage, qu'il s'est vu reconnaître le statut de travailleur handicapé ;

Il estime son licenciement imputable à l'intervention fautive et à ses suites, soutenant qu'un mois auparavant, il avait été reconnu apte à son poste de travail ;

Il chiffre la perte de gains depuis la consolidation jusqu'au 31 décembre 2015 à 23.406,09 euros ;

S'agissant de sa perte de gains jusqu'à la retraite, il évalue son préjudice à la somme de 236.549 euros ;

Pour s'opposer à ces demandes, le docteur b. MA., la SAM A et la SA B prétendent qu'au vu des pièces produites par s. G, la cessation de son activité professionnelle n'est imputable qu'à son accident du travail; ils soutiennent que la reconnaissance de son aptitude à son activité avant son accident ne permet pas de présumer qu'il l'était encore après, et que si le demandeur a voulu continuer à travailler, malgré la douleur le contraignant à un fort traitement antalgique selon ses dires, ce choix personnel n'est pas de nature à imputer sa perte de gains aux fautes du médecin défendeur;

De même, ils s'étonnent que le licenciement de s. G n'ait pas été prononcé pour cause d'inaptitude professionnelle ;

Enfin, ils rappellent, à titre subsidiaire, que le docteur b. MA. ne doit couvrir qu'un tiers des pertes de revenus alléguées ;

En l'espèce, dans son rapport, l'expert a noté que s. G n'était pas en arrêt de travail avant l'intervention du docteur b. MA. et qu'au moment de l'expertise, il n'avait pas repris d'activité professionnelle.

De plus, hormis l'attestation de l'employeur en date du 11 août 2011 qui indique que s. G a cessé ses activités professionnelles le jour de l'accident du travail, les autres documents (médicaux et assuranciels) fixent au 18 mars 2010, date de l'intervention fautive, le début de la période d'arrêt de travail;

Les défendeurs ne communiquent aucune pièce démontrant le contraire ;

En outre, la lettre de licenciement de s. G fait expressément référence aux interventions chirurgicales qu'il a subies, l'ayant mis dans l'impossibilité de reprendre son poste de mécanicien pour une durée indéterminée, pour motiver la rupture du contrat de travail ;

Ainsi, au vu de ces éléments et des conclusions du rapport d'expertise, ayant expressément retenu parmi les manquements du docteur b. MA., une indication opératoire très prématurée en ce que le patient a poursuivi ses activités professionnelles jusqu'à la veille de l'opération (conclusions non contestées par les défendeurs), il y a lieu de fixer la cessation d'activité professionnelle au jour de l'intervention fautive et de dire que la perte de gains qui s'en est suivie est imputable au médecin fautif, mais dans les proportions déterminées par l'expert comme développé précédemment en raison de l'évolution naturelle de la pathologie de s. G ;

Il convient en conséquence de chiffrer l'indemnité réparatrice correspondante à ce poste de préjudice comme suit :

  • - pour la perte de salaire avant consolidation : au vu du salaire perçu par s. G en janvier 2010 et des indemnités qu'il a reçues de l'assureur-loi de son employeur, la perte est justement calculée à la somme de 5.283,96 euros ;

  • - pour la perte de salaire après consolidation : au vu du salaire perçu par s. G en janvier 2010 et des indemnités versées par Pôle Emploi, la perte est justement calculée à la somme de 23.406,09 euros;

  • - pour la perte de gains jusqu'à l'âge de la retraite : au vu du salaire perçu par s. G en janvier 2010, des indemnités qu'il reçoit désormais de Pôle Emploi, de son âge (46 ans), la perte doit être évaluée à la somme de 229.340,75 euros ;

  • Sur l'incidence professionnelle

s. G prétend qu'il ne pourra pas retrouver un emploi correspond à ses compétences, soutenant qu'il était promis à une brillante carrière de chef d'atelier qui a été interrompue par l'intervention fautive du docteur b. MA. ; que de fait, il exerçait déjà ces fonctions même s'il n'en avait pas encore le titre ; qu'il avait suivi diverses formations qui devaient s'achever en mars 2010 ; qu'en exerçant cette fonction, il aurait perçu un salaire deux fois supérieur ;

Il expose qu'il ne peut plus exercer son activité de mécanicien ne pouvant plus porter des charges supérieures à 5 kilogrammes et qu'il n'est pas qualifié pour exercer un emploi plus sédentaire ;

Les défendeurs estiment que si s. G exerçait auparavant des fonctions de chef d'atelier sans en avoir le titre, il aurait pu reprendre son poste, s'agissant d'un emploi moins pénible et plus adapté à son état de santé et qu'a contrario, cela démontre qu'il n'en exerçait pas les fonctions et ne peut prétendre à une indemnisation de ce chef ; ils affirment que la formation de chef d'atelier que le demandeur suivait, n'a été interrompue que par l'accident du travail et n'est donc pas imputable aux manquements du docteur b. MA. ;

Ils soulignent que la rémunération de chef d'atelier, réclamée par le requérant, est approximative et hypothétique, incluant une participation aux bénéfices ;

Enfin selon le docteur b. MA., la SAM A et la SA B, s. G n'est pas atteint d'un handicap l'empêchant d'exercer toute activité professionnelle ;

En l'espèce, l'expert AUQUE a relevé l'existence d'un retentissement professionnel, dans la mesure où l'état actuel de s. G n'est pas compatible avec une reprise intégrale de son emploi antérieur de mécanicien automobile ;

s. G justifie d'ailleurs de ce qu'il s'est vu reconnaitre le statut de travailleur handicapé et que les postes de travail qu'il peut occuper doivent être aménagés avec des pauses assises régulières, sans dépasser 7 heures par jour ;

Cependant si le demandeur rapporte la preuve de ce qu'il était considéré par son employeur comme le chef d'atelier même s'il n'en avait pas le titre et qu'il avait suivi des formations en ce sens, il n'en demeure pas moins que selon l'expert judiciaire, il existe une incertitude sur le devenir de chef d'atelier de s. G compte tenu des troubles qu'il présentait avant l'intervention fautive et de l'évolution prévisible de la maladie ;

Ainsi au vu de ces éléments, il y lieu de dire que s. G subit une incidence professionnelle liée à sa dévalorisation sur le marché du travail compte tenu de sa fatigabilité ; ce préjudice sera imputé dans les proportions retenues précédemment, à savoir un tiers, au docteur b. MA. ;

En revanche, il n'est pas établi de perte de chance sérieuse d'une carrière de chef d'atelier imputable directement aux manquements commis par le docteur b. MA., en raison de l'état pathologique antérieur de s. G et de son évolution prévisible ;

En conséquence, compte tenu de l'emploi exercé par le demandeur (mécanicien automobile), de l'incidence de son handicap (fatigabilité), de ses perspectives professionnelles et de son âge (46 ans), il convient d'évaluer à la somme de 50.000 euros l'incidence professionnelle subie par s. G

  • III. Sur le recours de la victime

En définitive, le préjudice global subi par s. G doit être évalué à la somme de 340.030,80 euros;

Il convient en conséquence de condamner le docteur b. MA., solidairement avec la SA B à payer au demandeur la somme de 340.030,80 : 3 soit 113.343,60 euros à titre de dommages-intérêts, compte tenu de la part de responsabilité mise à sa charge, et ce, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

  • IV. Sur l'exécution provisoire

Les conditions de l'article 202 du Code de procédure civile n'étant pas réunies, il ne sera pas fait droit à la demande d'exécution provisoire ;

  • V. Sur les dépens

Ayant succombé à l'instance, le docteur b. MA. et la SA B seront condamnés solidairement aux dépens de l'instance, par application des dispositions de l'article 232 du Code de procédure civile ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL,

Statuant publiquement, contradictoirement, après jugements avant dire droit des 8 mai 2014 et 22 janvier 2015, et en premier ressort,

Homologue le rapport d'expertise déposé le 22 juin 2015 par le docteur AUQUE ;

Déclare le docteur b. MA. responsable du préjudice subi par s. G à hauteur d'un tiers ;

Dit qu'il sera donc tenu solidairement avec la SA B, dans cette même proportion de réparer les conséquences dommageables subies par s. G ;

Déboute s. G de ses demandes formées contre la SAM A ;

Le déboute de sa demande d'indemnisation au titre du préjudice d'agrément ;

Condamne solidairement b. MA. et la SA B à payer à s. G à titre de dommages-intérêts, la somme de CENT TREIZE MILLE TROIS CENT QUARANTE TROIS EUROS ET SOIXANTE CENTIMES (113.343,60 €), compte tenu de la part de responsabilité laissée à sa charge, et ce, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

Les condamne, également, solidairement aux dépens avec distraction au profit de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur, sous sa due affirmation ;

Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le greffier en chef, au vu du tarif applicable ;

Composition🔗

Ainsi jugé par Madame Martine COULET-CASTOLDI, Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Françoise DORNIER, Premier Juge, Madame Séverine LASCH, Juge, qui en ont délibéré conformément à la loi assistées, lors des débats seulement, de Madame Emmanuelle PHILIBERT, Greffier ;

Lecture du dispositif de la présente décision a été donnée à l'audience du 19 JANVIER 2017, dont la date avait été annoncée lors de la clôture des débats, par Madame Martine COULET-CASTOLDI, Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Madame Carole FRANCESCHI, Greffier stagiaire, en présence de Monsieur Olivier ZAMPHIROFF, Premier Substitut du Procureur Général, et ce en application des dispositions des articles 15 et 58 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires.

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