Tribunal de première instance, 1 décembre 2016, La SAM A c/ M. h. r. DA.
Abstract🔗
Jugement – Réputé contradictoire (oui)
Contrat – Cautionnement – Demandes en paiement
Résumé🔗
h. r. DA., défendeur domicilié X1, Abidjan 18 (Cote D'ivoire) n'a comparu à aucune des audiences auxquelles la cause a été appelée. Cité selon les modalités de l'article 150 du Code de procédure civile, le dossier du demandeur ne contient aucun retour au Parquet Général de l'acte transmis selon la voie diplomatique. De même, la lettre recommandée avec avis de réception envoyée par l'huissier monégasque en application du dernier alinéa du texte suscité est revenu avec la mention « adresse incomplète ». Pour autant, le demandeur a également fait délivrer au défendeur, directement par le ministère de Maître LO. BA., huissier de justice près le Tribunal de Première Instance d'Abidjan Plateau, une « notification d'un exploit d'assignation par devant le Tribunal de Première Instance de Monaco ». En premier lieu, un tel acte a été délivré le 13 mai 2016 à l'épouse de h. r. DA., laquelle a déclaré que son époux était malade et ne pouvait recevoir l'acte. Une seconde notification a été délivrée à r. h. DA. le 30 juin 2016, à sa personne, celui-ci déclarant que « la SARL D n'est pas en cessation des paiements pour que son engagement personnel soit engagé » (sic). Si la Convention de la Haye du 15 novembre 1965 relative à la signification et la notification à l'étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale, rendue exécutoire à Monaco par Ordonnance Souveraine n° 1.059 du 13 avril 2007, prévoit en son article 10 la possibilité de faire procéder à des significations ou notifications d'actes judiciaires directement par les soins des officiers ministériels, fonctionnaires ou autres personnes compétents de l'État de destination, la Côte d'Ivoire n'est pas partie à cette Convention, si bien qu'il ne peut être considéré que l'acte introductif de la présente instance a été, formellement, délivré à la personne du défendeur, au sens de l'article 214 alinéa 1er du Code de procédure civile. En revanche, les notifications réalisées par l'huissier ivoirien permettent de caractériser la situation visée par l'article 214 alinéa 2 du Code de procédure civile, au sens où il est établi que le défendeur a eu, par ce biais, connaissance de l'assignation initiale. En conséquence, le jugement à intervenir sera qualifié de réputé contradictoire.
La SAM A, demanderesse, produit aux débats 19 factures du 24 septembre 2012 au 11 février 2013, pour un montant de 461.680,42 euros relatives à la fourniture de matériel, (papiers, autocollants, cartons) adressées à la SARL de droit ivoirien D. Selon la demanderesse, des paiements auraient été réalisés à cet égard, mais resterait due une somme de 403.578,67 euros (soit 264.729.814 francs CFA), qu'elle a mise la SARL D en demeure de payer par acte du 22 juillet 2014. La certitude de cette créance est en outre démontrée par la production aux débats d'un courrier de la SARL D en date du 11 août 2014 et signé « La Direction r. DA. père » par lequel la société reconnait devoir la somme de 264.729.814 francs CFA à la SAM A et présente des propositions de paiement échelonné. Est également produit aux débats un contrat de cautionnement personnel et solidaire conclu entre h. r. DA. et la SAM A, par lequel le premier se portait caution au bénéfice de cette dernière, du paiement par la SARL D des 19 factures suscitées, dans la limite d'une somme de 461.444,33 euros, outre intérêts, frais et accessoires. Les clauses du contrat caractérisent bien un cautionnement solidaire par lequel la caution « sera tenue de payer au bénéficiaire ce que doit le débiteur principal en cas de défaillance de ce dernier à son obligation de règlement pour un motif quelconque » (article 3) ; qu'elle s'engage « à renoncer au bénéfice de discussion et de division » (article 5). L'article 12 du contrat prévoit une attribution de compétence exclusive aux Tribunaux de la Principauté de Monaco et l'application du droit monégasque au contrat. Il ressort de l'analyse des pièces produites aux débats que 16 factures demeurent impayées et qu'elles figurent bien dans le cautionnement des dettes déterminées qui lient les parties ; qu'en revanche une facture de la société B pour un montant de 4.901,71 euros au titre de frais de transports facturés à la SAM A suite à l'annulation d'une commande ne figure pas dans la liste, limitative, des dettes cautionnées. De même la société demanderesse sollicite paiement d'une somme de 204.857,99 euros au titre des intérêts de retard contractuellement dus, sur une base de 19 % par an ; si l'engagement de caution mentionne bien l'inclusion des intérêts, frais et accessoires dans le périmètre des dettes cautionnées, aucun contrat n'est versé aux débats et certaines factures ne font nullement mention d'un tel taux d'intérêts, qui n'apparait que sur d'autres et qui, de surcroit, est usuraire au regard des dispositions de l'article 357 du Code pénal et de l'Ordonnance Souveraine n° 4.195 du 20 février 2013 applicable en l'espèce. En conséquence, h. r. DA. sera donc condamné au paiement d'une somme de 398.676,96 euros et le surplus des demandes en paiement de la SAM A sera rejeté.
Motifs🔗
TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
N° 2016/000528 (assignation du 18 janvier 2016)
JUGEMENT DU 1er DÉCEMBRE 2016
En la cause de :
La société anonyme de droit monégasque dénommée A, inscrite au RCI sous le numéro XX, dont le siège social est sis « X1 », X1 à Monaco, prise en la personne de son Administrateur Délégué en exercice, M. m. KH., domicilié en cette qualité audit siège ;
DEMANDEUR, ayant élu domicile en l'Étude de Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Antoine DELABRIERE, avocat au barreau de Paris ;
d'une part ;
Contre :
M. h. r. DA., né le 8 mai 1952 à Bamako (Mali), de nationalité ivoirienne, gérant de société, demeurant Abidjan X2 (Côte d'Ivoire) ;
DÉFENDEUR, NON COMPARANT,
d'autre part ;
LE TRIBUNAL,
Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, huissier, en date du 18 janvier 2016, enregistré (n° 2016/000528) ;
À l'audience publique du 13 octobre 2016, Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur, a été entendu en sa plaidoirie, nul n'ayant comparu pour h. r. DA., défendeur défaillant et le jugement a été mis en délibéré pour être prononcé ce jour 1er décembre 2016 ;
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte en date du 18 janvier 2016, la société anonyme de droit monégasque A faisait citer h. r. DA., de nationalité ivoirienne, demeurant à Abidjan (Côte d'Ivoire) devant le Tribunal de Première Instance, en sollicitant sa condamnation, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, au paiement en principal d'une somme de 403.578,67 euros correspondant à 16 factures impayées d'un montant de 398.676,96 euros et à une facture de la société B du 17 mai 2013 d'un montant de 4.901,71 euros, outre condamnation au paiement d'une somme de 204.857,99 euros au titre des intérêts de retard contractuellement dus selon décompte arrêté au 31 décembre 2015.
À l'appui de ses demandes, la SAM A fait valoir que dans le cadre de son objet social, le commerce de gros, elle entretient des relations commerciales avec la société à responsabilité limitée de droit ivoirien D, dirigée par h. DA., qui a pour objet l'imprimerie et la réalisation graphique.
Au cours des années 2012 et 2013, elle a émis 19 factures pour un montant total de 461.680,42 euros et malgré plusieurs relances, la SARL D n'a pas procédé à la totalité de leur règlement. La SAM A a donc mis en demeure, le 22 juillet 2014, la SARL D de régler la somme résiduelle de 403.578,67 euros (soit 264.729.814 francs CFA).
h. DA. s'étant porté caution personnelle et solidaire de la SARL D, laquelle a au demeurant reconnu la dette, la créance est incontestable.
En défense, h. DA. n'a pas comparu. Le conseil du demandeur a indiqué qu'outre les formalités d'assignation d'un défendeur domicilié à l'étranger, réalisées selon les modalités prévues par l'article 150 du Code de procédure civile, il avait fait assigner le défendeur par un huissier ivoirien.
SUR QUOI
- Sur la nature du jugement :
Attendu que h. r. DA., défendeur domicilié X1, Abidjan 18 (Cote D'ivoire) n'a comparu à aucune des audiences auxquelles la cause a été appelée ; que cité selon les modalités de l'article 150 du Code de procédure civile, le dossier du demandeur ne contient aucun retour au Parquet Général de l'acte transmis selon la voie diplomatique ; que de même, la lettre recommandée avec avis de réception envoyée par l'huissier monégasque en application du dernier alinéa du texte suscité est revenu avec la mention « adresse incomplète » ;
Attendu pour autant que le demandeur a également fait délivrer au défendeur, directement par le ministère de Maître LO. BA., huissier de justice près le Tribunal de Première Instance d'Abidjan Plateau, une « notification d'un exploit d'assignation par devant le Tribunal de Première Instance de Monaco » ; qu'en premier lieu, un tel acte a été délivré le 13 mai 2016 à l'épouse de h. r. DA., laquelle a déclaré que son époux était malade et ne pouvait recevoir l'acte ;
Qu'une seconde notification a été délivrée à r. h. DA. le 30 juin 2016, à sa personne, celui-ci déclarant que « la SARL D n'est pas en cessation des paiements pour que son engagement personnel soit engagé » (sic) ;
Attendu que si la Convention de la Haye du 15 novembre 1965 relative à la signification et la notification à l'étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale, rendue exécutoire à Monaco par Ordonnance Souveraine n°1.059 du 13 avril 2007, prévoit en son article 10 la possibilité de faire procéder à des significations ou notifications d'actes judiciaires directement par les soins des officiers ministériels, fonctionnaires ou autres personnes compétents de l'État de destination, la Côte d'Ivoire n'est pas partie à cette Convention, si bien qu'il ne peut être considéré que l'acte introductif de la présente instance a été, formellement, délivré à la personne du défendeur, au sens de l'article 214 alinéa 1er du Code de procédure civile ;
Attendu en revanche que les notifications réalisées par l'huissier ivoirien permettent de caractériser la situation visée par l'article 214 alinéa 2 du Code de procédure civile, au sens où il est établi que le défendeur a eu, par ce biais, connaissance de l'assignation initiale ;
Attendu en conséquence que le jugement à intervenir sera qualifié de réputé contradictoire ;
- Sur les demandes en paiement présentées par la SAM A :
Attendu que la SAM A, demanderesse, produit aux débats 19 factures du 24 septembre 2012 au 11 février 2013, pour un montant de 461.680,42 euros relatives à la fourniture de matériel, (papiers, autocollants, cartons) adressées à la SARL de droit ivoirien D ;
Que selon la demanderesse des paiements auraient été réalisés à cet égard, mais que resterait due une somme de 403.578,67 euros (soit 264.729.814 francs CFA), qu'elle a mise la SARL D en demeure de payer par acte du 22 juillet 2014 ;
Que la certitude de cette créance est en outre démontrée par la production aux débats d'un courrier de la SARL D en date du 11 août 2014 et signé « La Direction r. DA. père » par lequel la société reconnait devoir la somme de 264.729.814 francs CFA à la SAM A et présente des propositions de paiement échelonné ;
Attendu qu'est également produit aux débats un contrat de cautionnement personnel et solidaire conclu entre h. r. DA. et la SAM A, par lequel le premier se portait caution au bénéfice de cette dernière, du paiement par la SARL D des 19 factures suscitées, dans la limite d'une somme de 461.444,33 euros, outre intérêts, frais et accessoires ;
Attendu que les clauses du contrat caractérisent bien un cautionnement solidaire par lequel la caution « sera tenue de payer au bénéficiaire ce que doit le débiteur principal en cas de défaillance de ce dernier à son obligation de règlement pour un motif quelconque » (article 3) ; qu'elle s'engage « à renoncer au bénéfice de discussion et de division » (article 5) ;
Attendu que l'article 12 du contrat prévoit une attribution de compétence exclusive aux Tribunaux de la Principauté de Monaco et l'application du droit monégasque au contrat ;
Attendu qu'il ressort de l'analyse des pièces produites aux débats que 16 factures demeurent impayées et qu'elles figurent bien dans le cautionnement des dettes déterminées qui lient les parties ; qu'en revanche une facture de la société B pour un montant de 4.901,71 euros au titre de frais de transports facturés à la SAM A suite à l'annulation d'une commande ne figure pas dans la liste, limitative, des dettes cautionnées ;
Que de même la société demanderesse sollicite paiement d'une somme de 204.857,99 euros au titre des intérêts de retard contractuellement dus, sur une base de 19% par an ; que si l'engagement de caution mentionne bien l'inclusion des intérêts, frais et accessoires dans le périmètre des dettes cautionnées, aucun contrat n'est versé aux débats et certaines factures ne font nullement mention d'un tel taux d'intérêts, qui n'apparait que sur d'autres et qui, de surcroit, est usuraire au regard des dispositions de l'article 357 du Code pénal et de l'Ordonnance Souveraine n°4.195 du 20 février 2013 applicable en l'espèce ;
Attendu en conséquence que h. r. DA. sera donc condamné au paiement d'une somme de 398.676,96 euros et que le surplus des demandes en paiement de la SAM A sera rejeté ;
- Sur les autres chefs de demande :
Attendu qu'aucune urgence ne justifie le prononcé de l'exécution provisoire de la présente décision et qu'il ne peut être tiré du courrier signé par « M. r. DA. père » ès-qualités de dirigeant de la SARL D, une promesse reconnue, au sens de l'article 202 du Code de procédure civile, de payer son engagement personnel de caution, si tant est qu'il s'agisse de la même personne ;
Attendu qu h. r. DA., qui succombe à l'instance, sera condamné aux dépens en application des dispositions de l'article 231 du Code de procédure civile ;
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL,
Statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,
Condamne h. r. DA. à payer à la société anonyme monégasque A la somme de 398.676,96 euros au titre de son engagement de caution de certaines dettes de la SARL de droit ivoirien D ;
Déboute la SAM A du surplus de ses prétentions ;
Dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du présent jugement ;
Condamne h. r. DA. aux dépens, avec distraction au profit de Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur, sous sa due affirmation ;
Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le greffier en chef, au vu du tarif applicable ;
Composition🔗
Ainsi jugé par Madame Martine COULET-CASTOLDI, Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Monsieur Sébastien BIANCHERI, Premier Juge, Madame Françoise DORNIER, Premier Juge qui en ont délibéré conformément à la loi assistés lors des débats seulement, de Madame Carole FRANCESCHI, Greffier stagiaire ;
Lecture du dispositif de la présente décision a été donnée à l'audience du 1er DÉCEMBRE 2016, dont la date avait été annoncée lors de la clôture des débats, par Madame Martine COULET-CASTOLDI, Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Mademoiselle Marine PISANI, Greffier en Chef Adjoint, en présence de Olivier ZAMPHIROFF, Premier Substitut du Procureur Général, et ce en application des dispositions des articles 15 et 58 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires.