Tribunal de première instance, 16 avril 2015, a. AL. épouse CA. c/ M. c. CA.
Abstract🔗
Divorce – Délaissement moral de l'épouse (oui) – Dénigrement de l'époux (oui) – Violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage (oui) – Torts partagés (oui)
Prestation compensatoire (oui) – Conditions
Demandes en restitution – Recevabilité (non)
Résumé🔗
L'article 197, 1° du Code civil prévoit que le divorce peut être prononcé à la demande de l'un des époux pour faute, lorsque des faits imputés au conjoint constituent une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune. Il ressort des attestations concordantes et circonstanciées émanant des proches de Mme a. AL. épouse CA. que peu après le mariage, l'attitude de M. c. CA. envers son épouse s'est détériorée, en ce qu'il est devenu froid, distant et méprisant, à telle enseigne que celle-ci en a développé un syndrome dépressif. Bien qu'ils doivent être considérés avec circonspection, les témoignages du père, de la mère et du frère de Mme a. AL. épouse CA. n'en sont pas moins recevables et leur caractère précis et concordant les rend totalement pertinents. Les multiples attestations communiquées par la partie adverse ne permettent pas de contredire ces témoignages. Certaines personnes indiquent certes n'avoir jamais été témoins d'un quelconque comportement négatif de M. c. CA. envers son épouse mais s'agissant d'amis du couple ou de l'époux, ayant fréquenté M. et Mme CA. dans le cadre de leur vie sociale, ils peuvent tout à fait être restés dans l'ignorance des relations entretenues par les parties dans le cadre plus intime de leur vie conjugale. Le délaissement moral dont M. c. CA. s'est rendu coupable envers son épouse constitue une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage, rendant intolérable le maintien de la vie commune. Par ailleurs, il ressort des attestations multiples, circonstanciées et concordantes versées aux débats par M. c. CA. qu'en diverses occasions, dont les auteurs des dites attestations ont été personnellement les témoins, Mme a. AL. épouse CA., souvent sous l'emprise d'une consommation excessive d'alcool, s'est montrée irrespectueuse et injurieuse, tant envers son mari qu'envers ses filles et plus généralement envers son entourage familial. Le dénigrement de son époux en public et la grossièreté de l'épouse lors de fêtes de famille à l'occasion desquelles elle s'était enivrée, et ce à plusieurs reprises, constituent une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage, rendant intolérable le maintien de la vie commune.
Le divorce des époux CA., n'étant pas prononcé aux torts exclusifs de Mme a. AL. épouse CA., cette dernière est en droit de prétendre à l'examen de sa demande de prestation compensatoire. Il résulte des éléments de la cause une évidente disparité dans les conditions de vie respectives des parties suite à leur séparation. Par l'effet du divorce, l'épouse se trouve en effet privée de toute ressource alors qu'elle a bénéficié durant le mariage d'un train de vie confortable, rendu possible par l'aisance financière de son conjoint Pour sa part, l'époux dispose de revenus confortables et omet délibérément de justifier de la nature et de l'étendue de son patrimoine, soutenant en être dépourvu alors que les pièces versées aux débats et notamment les articles de presse démontrent qu'il est un entrepreneur ayant parfaitement réussi dans ses affaires. L'existence d'une disparité créée par la rupture du mariage rend acquis le droit à prestation compensatoire au profit de Mme a. AL. Le quantum de cette prestation doit toutefois être modéré au regard des éléments suivants : la faible durée du mariage ; l'absence d'enfant commun à élever ; la différence d'âge entre les époux, dont il résulte que Mme a. AL. a vocation à reprendre une activité professionnelle tandis que M. c. CA., bien qu'encore actif, est d'ores et déjà en âge de cesser toute activité ; le fait que Mme a. AL. possède une qualification et une expérience professionnelles avérées et n'allègue ni ne justifie d'aucun empêchement à la reprise d'une activité ; le fait que le choix de Mme a. AL. de cesser de travailler n'était pas destiné à l'éducation des enfants et n'a pas eu pour conséquence de favoriser d'une quelconque manière la carrière de son mari mais résultait d'un choix fait conjointement par les époux et rendu possible par l'aisance financière de M. c. CA. ; le régime matrimonial de séparation de biens, conventionnellement choisi par les époux et que les dispositions relatives à la prestation compensatoire n'ont pas pour objet de contourner.
Les parties se réclament mutuellement la restitution de divers objets et bijoux dont chacune revendique la propriété et la conteste à l'autre. Ces demandes relèvent de la liquidation du régime matrimonial et, à défaut d'accord, du tribunal de céans, saisi de toute difficulté, en application des dispositions de l'article 204-4 du Code civil. Il en résulte qu'elles sont irrecevables devant le juge du divorce.
Motifs🔗
TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
R.
JUGEMENT DU 16 AVRIL 2015
En la cause de :
Mme a. AL. épouse CA., née le 19 février 1972 à Trolhattan (Suède), de nationalité suédoise, sans profession, demeurant à X1 à Monaco,
DEMANDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Sarah FILIPPI, avocat en cette même Cour,
d'une part ;
Contre :
M. c. CA., né le 29 mai 1949 à Newbury (Grande Bretagne), de nationalité britannique, gérant de société, demeurant à X2 à Monaco,
DÉFENDEUR, ayant élu domicile en l'étude de Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur ;
d'autre part ;
LE TRIBUNAL,
Vu l'ordonnance de non conciliation en date du 9 novembre 2012 ;
Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 7 décembre 2012, enregistré (n° 2013/000227) ;
Vu les conclusions de déconstitution de Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur, au nom de c. CA., en date du 9 octobre 2013 ;
Vu les conclusions de Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur, au nom de c. CA., en date des 28 novembre 2013, 16 mai 2014, 5 novembre 2014 et 29 janvier 2015 ;
Vu les conclusions de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de a. AL., en date des 27 février 2014 et 3 septembre 2014 ;
À l'audience du 12 mars 2015, tenue hors la présence du public, les conseils des parties ont été entendus en leurs plaidoiries à l'issue desquelles le jugement a été mis en délibéré pour être prononcé ce jour 16 avril 2015 ;
FAITS ET PROCÉDURE
M. c. CA. et Mme a. AL. ont contracté mariage le 26 juin 2010 devant l'officier d'état civil de la mairie de Monaco et ont fait précéder leur union d'un contrat de mariage en séparation de biens, reçu le 10 juin 2010 par Maître Aureglia-Caruso, Notaire à Monaco.
Aucun enfant n'est issu de cette union.
Le 18 septembre 2012, Mme a. AL. épouse CA. a déposé une requête en divorce, sur le fondement de l'article 197 du Code civil, et a été autorisée à faire citer son époux en conciliation par ordonnance présidentielle du 19 septembre 2012.
Par ordonnance rendue par défaut le 9 novembre 2012, le juge conciliateur a constaté le maintien de la demande en divorce et statué ainsi qu'il suit sur les mesures provisoires :
autorisation accordée à l'épouse de résider seule en dehors du domicile conjugal ;
condamnation de l'époux au paiement d'une pension alimentaire d'un montant mensuel de 4.000 euros ;
attribution à l'épouse de la jouissance du chien ;
autorisation accordée à l'épouse de récupérer ses effets personnels au domicile conjugal.
Par exploit d'huissier délivré le 7 décembre 2012, Mme a. AL. épouse CA. a fait assigner son époux en divorce.
Par ordonnance du 1 mars 2013, le président du Tribunal de première instance a fait droit à la requête déposée le 27 février 2013 par M. c. CA., tendant à se voir autoriser à faire procéder par huissier à l'inventaire des biens mobiliers emportés par Mme a. AL. épouse CA. dans son nouveau logement.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Mme a. AL. épouse CA. sollicite tout d'abord le rejet à raison de leur nullité, des pièces adverses suivantes :
attestations des deux filles de l'époux, issues d'une précédente union, sur le fondement de l'article 200-15 alinéa 2 du code civil, qui interdit aux enfants d'être entendus sur les griefs invoqués par les époux (pièces n° 9 et 10) ;
attestations non correctement traduites de l'anglais, en raison de distorsions entre les témoignages manuscrits et leurs retranscriptions dactylographiées soumises au traducteur (pièces n° 3 à 8, 11 et 12) ;
attestation non traduite de l'italien (pièce n° 19).
Sur le fond, elle demande principalement le prononcé du divorce aux torts exclusifs de son époux, en faisant valoir :
que peu après le mariage, il a changé de comportement et est devenu méprisant voire insultant envers elle ;
qu'il s'est mis à la délaisser, non seulement par ses absences répétées du fait de déplacements professionnels, dont il ne la tenait pas informée, mais aussi par son indifférence et l'absence de loisirs en commun ;
qu'il a changé d'avis quant à son intention initiale de fonder une famille avec elle ;
qu'elle a été évincée par la famille de son mari, tenue à l'écart et méprisée.
S'agissant des dispositions accessoires au prononcé du divorce, elle réclame :
l'allocation d'une somme de 500.000 euros à titre de prestation compensatoire ;
l'attribution de la jouissance du chien ;
la restitution de divers bijoux, en application des stipulations du contrat de mariage.
S'agissant de sa demande de prestation compensatoire, elle fait valoir que :
dès le début de sa vie commune avec M. c. CA. en 2004, elle a cessé toute activité professionnelle pour se consacrer à sa vie de famille et se trouve en conséquence dépourvue de ressources ;
le couple a mené un train de vie confortable durant la vie commune ;
les charges importantes exposées par l'époux, notamment pour le loyer et l'emploi d'une aide-ménagère, démontrent qu'il dispose de revenus d'un montant significatif.
En défense, M. c. CA. conclut au débouté de l'intégralité des prétentions adverses, à l'exception de celle relative au chien, et il demande le rejet des pièces adverses n° 2, n° 15 à 25 et n° 32, nulles à défaut de respecter certaines exigences de l'article 324 du Code de procédure civile.
Sur le fond, il conteste les griefs invoqués par son épouse, aux motifs suivants :
les attestations versées au soutien des allégations de Mme a. AL. épouse CA. ne sont pas probantes, en ce que, soit elles n'allèguent pas de faits précis, soit elles émanent de membres de la famille proche de l'épouse ;
l'époux verse aux débats de multiples attestations venant contredire la réalité de l'ensemble des griefs qui lui sont reprochés.
S'agissant de la demande de prestation compensatoire, il invoque subsidiairement l'absence de disparité au sens de l'article 204-5 alinéa 2 du Code civil en raison :
de la courte durée du mariage (deux ans) ;
de l'absence d'enfant commun ;
du régime matrimonial de séparation de biens ;
du fait que l'épouse, plus jeune que lui, est infirmière de profession ;
de l'absence d'économies de l'époux ;
de ses capacités contributives, moins élevées qu'allégué par la demanderesse.
Reconventionnellement, il demande le prononcé du divorce aux torts exclusifs de son épouse, en faisant valoir :
le comportement injurieux, agressif et méprisant de son épouse vis-à-vis de lui-même, de ses filles et de son entourage ;
la violation de la vie privée dont se serait rendue coupable son épouse lors d'un dîner le 27 octobre 2012, à l'occasion de l'anniversaire de la fille aînée de M. c. CA. ;
la consommation excessive d'alcool de son épouse ;
le déplacement non autorisé des meubles de l'ancien domicile conjugal par son épouse.
Accessoirement, M. c. CA. réclame la restitution de divers objets et bijoux, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, sur le fondement de l'article 205-1 alinéa 2 qui dispose que « l'époux contre lequel le divorce est prononcé perd tous les avantages que son conjoint lui avait consentis par contrat de mariage ou autrement ».
En réplique sur les griefs qui lui sont imputés, Mme a. AL. épouse CA. soutient :
que les attestations versées pour rapporter la preuve de son comportement injurieux et de son alcoolisme prétendus sont irrecevables ;
que s'agissant du grief d'alcoolisme, son père et son frère attestent en sens contraire et elle communique des analyses sanguines négatives sur ce point ;
que s'agissant du déplacement non autorisé d'objets mobiliers, l'époux ne rapporte la preuve ni de ce que les objets trouvés chez elle par l'huissier lors de son inventaire provenaient de l'ancien domicile conjugal ni de ce qu'il serait propriétaire des bijoux ;
qu'en tout état de cause, le contrat de mariage stipule une présomption de propriété des bijoux dont chaque époux a l'usage personnel.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les demandes de rejet de pièces :
Sur les pièces dont Mme a. AL. épouse CA. demande le rejet :
Conformément à la demande formée par la partie défenderesse, les attestations établies les 10 et 20 novembre 2013 par Antonia et Katharine CA., filles issues d'une précédente union de M. c. CA. (pièces n° 9 et 10), ne pourront qu'être écartées des débats en application des dispositions de l'article 200-15 du code civil.
Ce texte dispose en effet en son alinéa 2 que « les enfants ne peuvent jamais être entendus sur les griefs invoqués par les époux. »
Cette interdiction s'entend en ce sens qu'aucune déclaration des enfants, sous quelque forme que ce soit, ne peut être produite au cours de la procédure.
Aucune distinction n'est à faire, à cet égard :
suivant l'âge des enfants concernés ;
entre les enfants communs aux deux époux et ceux de l'un d'entre eux ;
entre les déclarations recueillies par attestation ou dans le cadre d'une enquête.
Il a ainsi été jugé par la juridiction de céans, au visa de l'ancien article 206-6 du code civil que « tous témoignages, même indirects, émanant des descendants sont exclus, qu'il s'agisse d'enfants légitimes, naturels, voire issus d'un premier lit… ».
S'agissant des pièces n° 3 à 8, 11 et 12, prétendument mal traduites, il ressort de leur examen :
que les distorsions initialement constatées entre la version manuscrite des attestations critiquées et leur version dactylographiée telle que soumise au traducteur sont minimes et sans incidence sur la teneur de ces témoignages ;
que ces distorsions ont pour l'essentiel été rectifiées en cours d'instance ;
qu'en tout état de cause l'apposition, tant sur les exemplaires manuscrits que sur leur retranscription dactylographiée, du tampon du traducteur assermenté démontre que ce dernier a eu accès aux deux versions de chacune des attestations litigieuses.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, aucun motif ne commande d'écarter ces pièces des débats.
Enfin, la pièce n° 19 a, en cours d'instance, fait l'objet d'une traduction libre de l'italien, de sorte que la demande tendant à son rejet des débats est devenue sans objet.
Mme a. AL. épouse CA. ne sera en conséquence accueillie qu'en sa demande de rejet des pièces adverses n° 9 et 10.
Sur les pièces dont M. c. CA. demande le rejet :
L'article 324 du Code de procédure civile énonce que :
« L'attestation doit, à peine de nullité :
1° être établie par une personne remplissant les conditions requises pour être entendue comme témoin ;
2° être écrite, datée et signée de la main de son auteur ;
3° mentionner les nom, prénoms, date et lieu de naissance, demeure et profession de son auteur, ainsi que l'existence ou l'absence de liens de parenté, d'alliance, de lien de subordination ou d'intérêt avec les parties ;
4° préciser si son auteur a quelque intérêt au procès ;
5° indiquer qu'elle est établie en vue de sa production en justice et que son auteur sait qu'une fausse attestation l'exposerait aux sanctions prévues par l'article 103 du Code pénal ;
6° être accompagnée de tout document officiel, en original ou photocopie, justifiant de l'identité de son auteur et comportant sa signature. »
Sur le moyen de nullité tiré de ce que les attestations n° 15, 16, 19, 20, 20 bis et 22 omettent d'indiquer qu'elles sont établies en vue de leur production en justice et que leur auteur sait qu'une fausse attestation l'exposerait aux sanctions prévues par l'article 103 du Code pénal :
Cette omission a été régularisée en cours de procédure, de sorte que les attestations critiquées comportent désormais la mention manuscrite exigée par la loi.
Il s'ensuit que ce moyen de nullité ne pourra qu'être écarté.
Sur l'attestation de Mme l. JO. (pièce non numérotée) :
Cette attestation n'est pas manuscrite mais dactylographiée, de sorte que c'est à juste titre que le défendeur en soulève la nullité.
Sur l'attestation de M. et Mme DI. (pièces n° 21 et 21 bis) :
Cette attestation unique est rédigée au nom des deux époux DI. et comporte leurs deux signatures, de sorte qu'il est impossible d'en identifier l'auteur.
C'est donc également à juste titre que le défendeur en soulève la nullité.
Sur les attestations de Mme j. AL. (pièces n° 22 et 25) :
Aucune de ces deux attestations ne mentionne la profession de leur auteur, de sorte qu'elles encourent la nullité de ce chef.
Sur les attestations de Mme k. PI. (pièces n° 20, 20 bis et 24) :
Aucune des attestations établies par Mme k. PI. ne mentionne sa profession, de sorte qu'elles encourent la nullité de ce chef.
Sur les attestations de M. b. AL. (pièces n° 15 et 17 + pièce non numérotée) :
Contrairement à ce qui est soutenu en défense, les attestations établies par le père de l'épouse comportent son état civil et son adresse.
Les attestations n° 15 et 17 mentionnent sa profession sous sa signature, de sorte que celle-ci est parfaitement connue et aucune nullité n'est donc encourue de ce chef.
Sur le moyen résiduel tiré de l'absence de mention de la profession et de l'existence d'un quelconque intérêt au procès (pièces n° 16, 18, 18 bis, 19, 23 et 32) :
S'agissant tout d'abord de la mention relative à de l'existence ou de l'absence d'un quelconque intérêt au procès, il est exact que les attestations critiquée en sont dépourvues.
Toutefois chacun de leur auteur a pris soin de préciser son lien familial ou amical avec l'épouse, de sorte que leur intérêt au procès peut tout de même être déduit de la qualité en laquelle ils témoignent.
S'agissant de leur profession, elle se trouve mentionnée, suivant le cas, sous leur signature ou dans le corps de l'attestation.
Dans ces conditions, les pièces n° 16, 18, 18 bis, 19, 23 et 32 doivent être jugées régulières.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient d'écarter des débats les pièces n° 20, 20 bis, 21, 21 bis, 22, 24 et 25 communiquées par Mme a. AL. épouse CA., ainsi que l'attestation non numérotée établie au nom de Mme l. JO..
M. c. CA. sera débouté du surplus de sa demande de rejet de pièces adverses.
Sur la demande principale en divorce :
L'article 197, 1° du code civil prévoit que le divorce peut être prononcé à la demande de l'un des époux pour faute, lorsque des faits imputés au conjoint constituent une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune.
Il ressort des attestations concordantes et circonstanciées émanant des proches de Mme a. AL. épouse CA. que peu après le mariage, l'attitude de M. c. CA. envers son épouse s'est détériorée, en ce qu'il est devenu froid, distant et méprisant, à telle enseigne que celle-ci en a développé un syndrome dépressif.
Bien qu'ils doivent être considérés avec circonspection, les témoignages du père, de la mère et du frère de Mme a. AL. épouse CA. n'en sont pas moins recevables et leur caractère précis et concordant les rend totalement pertinents.
Ils sont au demeurant corroborés par l'attestation de Mme s. AB., amie de l'épouse (pièce n° 18) qui écrit :
« M. CA. est devenu de plus en plus distant et froid envers Mme CA., ce qui l'a rendue très triste et elle se sentait seule. Elle n'a jamais voulu divorcer mais la situation était devenue intenable. Mme CA. m'a souvent dit que, lorsque M. CA. rentrait de ses voyages, il s'enfermait dans son bureau sans lui parler, certaines fois sans même lui dire bonjour et il ne ressortait que lorsque le dîner était servi. Cela tourmentait Mme CA..
(…)
M. CA. ne voulait jamais sortir dîner à Monaco. Il sortait rarement avec Mme CA. les dernières années.
(…)
Au début de leur relation, M. et Mme CA. étaient ensemble tout le temps et faisaient des choses ensemble telles que voyager en Italie, passer l'été sur leur bateau, des dégustations de vins, cuisiner et assister à des ventes aux enchères pour trouver des pièces et objets pour leur appartement. Soudainement, M. CA. n'a plus voulu rien faire avec son épouse, laissant Mme CA. confuse, triste et très seule chez elle. »
Les multiples attestations communiquées par la partie adverse ne permettent pas de contredire ces témoignages.
Certaines personnes indiquent certes n'avoir jamais été témoins d'un quelconque comportement négatif de M. c. CA. envers son épouse mais s'agissant d'amis du couple ou de l'époux, ayant fréquenté M. et Mme CA. dans le cadre de leur vie sociale, ils peuvent tout à fait être restés dans l'ignorance des relations entretenues par les parties dans le cadre plus intime de leur vie conjugale.
Le délaissement moral dont M. c. CA. s'est rendu coupable envers son épouse constitue une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage, rendant intolérable le maintien de la vie commune.
Il commande d'accueillir la demande principale en divorce, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs invoqués par Mme a. AL..
Sur la demande reconventionnelle en divorce :
Il ressort des attestations multiples, circonstanciées et concordantes versées aux débats par M. c. CA. qu'en diverses occasions, dont les auteurs des dites attestations ont été personnellement les témoins, Mme a. AL. épouse CA., souvent sous l'emprise d'une consommation excessive d'alcool, s'est montrée irrespectueuse et injurieuse, tant envers son mari qu'envers ses filles et plus généralement envers son entourage familial.
Cela résulte notamment des attestations n° 3, 4, 5, 7 et 11 et n'est contredit par aucune pièce adverse.
Le dénigrement de son époux en public et la grossièreté de l'épouse lors de fêtes de famille à l'occasion desquelles elle s'était enivrée, et ce à plusieurs reprises, constituent une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage, rendant intolérable le maintien de la vie commune.
Ils commandent d'accueillir la demande reconventionnelle en divorce, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs invoqués par M. c. CA..
Les demandes principale et reconventionnelle étant accueillies, le divorce sera prononcé aux torts partagés des époux CA..
Sur la demande de prestation compensatoire :
L'article 204-5 du Code civil prévoit que :
« L'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation compensatoire destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives. Cette prestation a un caractère forfaitaire et définitif. Elle prend la forme d'un capital dont le montant est fixé en fonction des besoins de l'époux à qui elle est versée et des ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution prévisible de celle-ci.
À cet effet, sont notamment pris en considération :
la durée du mariage ;
l'âge et l'état de santé des époux ;
leur qualification et leur situation professionnelles ;
les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière du conjoint au détriment de la sienne ;
le patrimoine estimé ou prévisible des époux ; tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ;
leurs droits existants et prévisibles en matière de couverture sociale et de pension de retraite. »
L'article 205-1 du Code civil précise que « le divorce est prononcé contre un époux s'il a lieu à ses torts exclusifs ».
L'article 205-2 du même code dispose que « l'époux contre lequel le divorce est prononcé n'a droit à aucune prestation compensatoire ».
Le divorce des époux CA., n'étant pas prononcé aux torts exclusifs de Mme a. AL. épouse CA., cette dernière est en droit de prétendre à l'examen de sa demande de prestation compensatoire.
Il est en l'espèce non contesté :
que Mme a. AL. épouse CA. est infirmière de profession et a quitté son emploi en Suède pour vivre avec M. c. CA. dès l'année 2004. ;
que depuis lors, elle n'exerce aucune activité professionnelle et que son mari a subvenu à l'intégralité de ses besoins ;
qu'elle se trouve actuellement dépourvue de ressource ;
que durant la vie commune, le couple a mené une vie confortable, rendue possible par la situation aisée de M. c. CA..
Il ressort par ailleurs des pièces versées aux débats que :
M. c. CA., de nationalité britannique, est âgé de 65 ans.
Il a fondé une « start-up » A, cédée en 2000, date à laquelle il a cessé temporairement toute activité professionnelle pour vivre de ses rentes.
En 2008, il a repris une activité professionnelle et a fondé une nouvelle société B, dont le siège social se trouve au Royaume Uni et dont il est actuellement le « Chief Executive ».
Il ne justifie pas de l'étendue de son patrimoine et soutient avoir investi l'intégralité de ses avoirs dans sa nouvelle société, laquelle connaîtrait actuellement des difficultés.
Il justifie en revanche de revenus d'un montant mensuel de 16.326 euros, composés de son salaire versé par la société B et d'une pension de retraite (pièces n° 26 et pièce adverse n° 7).
Outre les charges de la vie courante, il expose un loyer mensuel de 9.849 euros, en principal et charges, pour son appartement et un parking X à Monte-Carlo (pièces n° 28 et 29).
Mme a. AL. épouse CA., de nationalité suédoise, est âgé de 43 ans.
Infirmière de profession, elle a cessé toute activité professionnelle en 2004 au début de sa vie commune avec M. c. CA. et se trouve dépourvue de revenus.
Elle ne justifie pas de ses charges, notamment de logement.
Il n'est pas contesté qu'elle ne dispose d'aucun patrimoine.
Le mariage a duré moins de cinq années, étant précisé que la vie commune a pris fin deux ans après sa célébration.
Il n'y a pas d'enfant commun.
Les époux CA. sont mariés sous le régime de la séparation de biens et n'ont aucun patrimoine indivis.
Il résulte de ces éléments une évidente disparité dans les conditions de vie respectives des parties suite à leur séparation.
Par l'effet du divorce, l'épouse se trouve en effet privée de toute ressource alors qu'elle a bénéficié durant le mariage d'un train de vie confortable, rendu possible par l'aisance financière de son conjoint
Pour sa part, l'époux dispose de revenus confortables et omet délibérément de justifier de la nature et de l'étendue de son patrimoine, soutenant en être dépourvu alors que les pièces versées aux débats et notamment les articles de presse démontrent qu'il est un entrepreneur ayant parfaitement réussi dans ses affaires.
L'existence d'une disparité créée par la rupture du mariage rend acquis le droit à prestation compensatoire au profit de Mme a. AL..
Le quantum de cette prestation doit toutefois être modéré au regard des éléments suivants :
la faible durée du mariage ;
l'absence d'enfant commun à élever ;
la différence d'âge entre les époux, dont il résulte que Mme a. AL. a vocation à reprendre une activité professionnelle tandis que M. c. CA., bien qu'encore actif, est d'ores et déjà en âge de cesser toute activité ;
le fait que Mme a. AL. possède une qualification et une expérience professionnelles avérées et n'allègue ni ne justifie d'aucun empêchement à la reprise d'une activité ;
le fait que le choix de Mme a. AL. de cesser de travailler n'était pas destiné à l'éducation des enfants et n'a pas eu pour conséquence de favoriser d'une quelconque manière la carrière de son mari mais résultait d'un choix fait conjointement par les époux et rendu possible par l'aisance financière de M. c. CA. ;
le régime matrimonial de séparation de biens, conventionnellement choisi par les époux et que les dispositions relatives à la prestation compensatoire n'ont pas pour objet de contourner.
Au de l'ensemble de ces éléments, la disparité susmentionnée sera justement compensée par l'allocation à Mme a. AL. d'une somme de 75.000 euros.
Sur les demandes en restitution :
Les parties se réclament mutuellement la restitution de divers objets et bijoux dont chacune revendique la propriété et la conteste à l'autre.
Ces demandes relèvent de la liquidation du régime matrimonial et, à défaut d'accord, du tribunal de céans, saisi de toute difficulté, en application des dispositions de l'article 204-4 du Code civil.
Il en résulte qu'elles sont irrecevables devant le juge du divorce.
En revanche, les parties s'accordent sur l'attribution à Mme a. AL. de la jouissance du chien, ce dont il leur sera donné acte.
Sur les dépens :
Compte tenu de la nature familiale du présent litige et du prononcé du divorce aux torts partagés, les dépens de l'instance seront partagés par moitié entre les parties.
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL,
Statuant publiquement par jugement contradictoire et en premier ressort,
Vu l'ordonnance du 9 novembre 2012 ayant autorisé la résidence séparée ;
Écarte des débats les pièces n° 9 et 10 communiquées par M. c. CA. ;
Écarte des débats les pièces n° 20, 20 bis, 21, 21 bis, 22, 24 et 25 communiquées par Mme a. AL., ainsi que l'attestation non numérotée établie au nom de Mme l. JO. ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes de rejet de pièces ;
Prononce aux torts partagés des époux le divorce de :
c. CA., né le 29 mai 1949 à Newbury (Royaume Uni)
a. AL., née le 19 février 1972 à Trollhattan (Suède)
mariés à Monaco le 26 juin 2010 ;
Ordonne, en tant que de besoin, la liquidation des intérêts communs ayant pu exister entre les époux ;
Commet à cet effet Maître Nathalie AUREGLIA-CARUSO, Notaire, et dit que toutes difficultés seront tranchées conformément aux dispositions de l'article 204-4 alinéa 3 du Code civil ;
Dit qu'en cas d'empêchement du notaire ainsi commis, il sera procédé à son remplacement par simple ordonnance ;
Rappelle qu'en application des dispositions de l'article 203-4 du Code civil, dès que la décision de divorce est devenue irrévocable, son dispositif est, à la requête de la partie la plus diligente, transcrit sur les registres de l'Etat-civil et mentionné en marge de l'acte de mariage et de l'acte naissance des époux ;
Déclare les parties irrecevables en leurs demandes de restitution d'objets mobiliers ;
Donne acte aux parties de leur accord quant à l'attribution à a. AL. de la jouissance du chien ;
Condamne M. c. CA. à payer à Mme a. AL. la somme de 75.000 euros (soixante quinze mille euros) à titre de prestation compensatoire ;
Fait masse des dépens et dit qu'ils seront partagés par moitié entre les parties ;
Composition🔗
Ainsi jugé par Mme Michèle HUMBERT, Premier Juge chargé des fonctions de Vice-Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Madame Emmanuelle CASINI-BACHELET, Juge, Madame Léa PARIENTI, Magistrat référendaire, qui en ont délibéré conformément à la loi assistées lors des débats seulement, de Mme Isabelle TAILLEPIED, Greffier ;
Lecture du dispositif de la présente décision a été donnée à l'audience du 16 AVRIL 2015, dont la date avait été annoncée lors de la clôture des débats, par Mme Michèle HUMBERT, Premier Juge chargé des fonctions de Vice-Président, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, assistée de Mme Isabelle TAILLEPIED, Greffier, en présence de Mademoiselle Alexia BRIANTI, Substitut du Procureur Général, et ce en application des dispositions des articles 15 et 58 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires.