Tribunal de première instance, 10 juillet 2014, SAM F c/ M. g. kh et Mme t. ni. épouse kh
Abstract🔗
Contrat - Convention de maîtrise d'ouvrage déléguée - Nullité - Absence de cause (non) - Dol (non) - Demande de paiement - Exception d'inexécution
Résumé🔗
La société demanderesse agit en paiement du solde des sommes dues au titre des différents contrats la liant aux maîtres de l'ouvrage. Les défendeurs sollicitent au principal une mesure d'expertise et subsidiairement concluent au débouté de l'action en paiement en raison de la nullité de la convention de maîtrise d'ouvrage déléguée, puis de l'inexécution du contrat. Il convient de se prononcer en premier lieu sur la validité du contrat ou sur son exécution avant de statuer sur une demande d'expertise qui ne peut être ordonnée que s'il existe un contrat valable.
En juillet 2007, les époux KH. et NI. ont conclu avec la société demanderesse un contrat de promotion immobilière "afin de lui confier l'étude complète de la réhabilitation de la villa "S", de la mise en sécurité de la falaise située à l'amont de ladite villa et de la mise en souterrain de la voie [...]". Le promoteur avait donc la charge d'entreprendre l'ensemble des études techniques et architecturales en vue de constituer un dossier administratif et d'obtenir les autorisations de construire de rigueur. Ce contrat se rapporte exclusivement aux études et formalités préalables à l'opération de construction jusqu'au stade compris du dépôt des dossiers de demande d'autorisation de construire et n'était nullement relatif aux travaux ultérieurs de rénovation et/ou construction. Cette convention a été exécutée puisque le permis de construire a été accordé le 30 janvier 2009 et les maîtres de l'ouvrage ont réglé les honoraires prévus. Les parties ont ensuite conclu une convention de maîtrise d'ouvrage déléguée qui rappelle que le permis de construire concernant la réhabilitation de la villa a été accordé, par laquelle les époux KH. et NI. ont chargé la SAM R de les représenter "pour l'ensemble du suivi du chantier Tous Corps d'État, son organisation jusqu'à sa livraison". Ce contrat ne fait pas double emploi avec le précédent, alors que les parties ne se trouvent plus au stade des études préalables mais à celui de la réalisation des travaux. L'article 2 définit les missions spécifiques du maître de l'ouvrage délégué. Il n'est pas anormal d'y trouver l'organisation des études techniques et la gestion tant financière que technique, missions qui sont relatives désormais à la phase d'exécution, alors que le chantier s'inscrit dans un site classé avec des travaux se rapportant à l'immeuble qui était en très mauvais état, mais aussi à son environnement (falaise), à la mise en souterrain d'une voie d'accès et impliquant au surplus des relations avec les services concessionnaires, la mairie et l'organisme privé chargé de la gestion d'un service public V. Ce contrat est par ailleurs totalement étranger dans son contenu aux marchés de travaux eux-mêmes, qui seront ensuite signés et il ne peut pas être retenu qu'il ne serait pas causé alors que son objet est tout à fait différent. L'article quatre de la convention fixe la rémunération du maître de l'ouvrage délégué à la somme forfaitaire de 904.500 euros outre la TVA, laquelle comprend tous les partenaires devant intervenir dans le cadre de l'exécution des travaux, architecte compris. Cette somme ne paraît pas exagérée au regard du coût des travaux à réaliser (les époux KH. et NI. déclarent avoir réglé une somme de 10 000 000 euros) et de la difficulté que représente l'opération immobilière dans son ensemble. La qualité ou non de profane des maîtres de l'ouvrage est sans pertinence quant à l'existence ou non d'une cause. Les défendeurs invoquent l'arrêt rendu le 10 octobre 2012 par la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation alors que les faits de l'espèce ne sont pas transposables, la SAM R n'ayant pas emprunté des qualités qui n'entrent pas dans les missions qu'elle déclare ; elle a au contraire fait preuve d'une totale transparence. Elle n'a pas, à cette date, été poursuivie pénalement pour escroquerie. Les défendeurs avant d'être attraits en justice n'ont jamais soutenu que la convention n'avait pas de cause et l'ont au contraire partiellement exécutée. Les époux g. KH. et t. NI. soutiennent par ailleurs que le représentant du maître de l'ouvrage ne peut pas être la même personne que l'entreprise chargée de la réalisation des travaux mais cette double qualité est sans conséquence sur la notion même de cause de la convention. Ils n'établissent par ailleurs pas qu'une règle d'ordre public interdisait à la société requérante d'être investie d'une mission de maître d'ouvrage délégué.
Le dol est défini par l'article 971 du Code civil comme "les manœuvres pratiquées par l'une des parties telles qu'il est évident que sans ces manœuvres l'autre partie n'aurait pas contracté". Il ne résulte d'aucune des pièces produites que la SAM R se serait livrée à des manœuvres pour contraindre les maîtres de l'ouvrage à signer les conventions litigieuses (dont l'objet n'est pas identique), ni pour imposer un prix qualifié par les défendeurs de "totalement outrancier" alors qu'il a été accepté par eux en pleine connaissance de cause. La convention de maîtrise d'ouvrage déléguée datée du 6 mai 2009, a été signée le 5 août 2009, après un délai de réflexion de trois mois. L'existence d'un dol n'est pas établi et il est allégué sans preuve d'un abus de position dominante, étant observé que les maîtres de l'ouvrage ne peuvent pas être considérés comme des consommateurs en position de faiblesse ou de vulnérabilité. Ce moyen sera également rejeté.
La société demanderesse a exécuté les contrats qui lui avaient été confiés sans avoir commis de manquements de nature à justifier un refus de paiement pour inexécution. Les époux KH. Et NI. concluent enfin au rejet de l'action en paiement, faute pour la société demanderesse de ne pas les avoir incités à souscrire une assurance dommage ouvrage. Les faits de la cause de l'arrêt rendu par la 3ème Chambre civile de la Cour de Cassation soit totalement différents de ceux de l'espèce dans la mesure notamment où l'action engagée se situait dans le cadre d'une destruction d'un bien suite à un attentat et sur la responsabilité en découlant. En l'espèce, aucun risque n'est réalisé et les demandeurs n'établissent pas le lien de causalité entre l'absence de souscription d'une assurance dommage ouvrage et le non-paiement des travaux. Ce chef de demande rejeté. L'entreprise a exécuté les contrats qui lui avaient été confiés relatifs aux paiements sollicités et les maîtres de l'ouvrage ne caractérisent pas d'un manquement de nature à justifier un refus de paiement pour inexécution. Les défendeurs seront donc condamnés à régler les sommes ci-dessus avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 10 décembre 2012, les sommes réclamées étant dues.
Motifs🔗
TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
JUGEMENT DU 10 JUILLET 2014
En la cause de :
La société anonyme monégasque SAM F, dont le siège social se trouve 1X, à MONACO, inscrite au répertoire du commerce et de l'industrie de Monaco sous le numéro X, agissant poursuites et diligences de son président délégué en exercice, M. p. PA. y demeurant en cette qualité,
DEMANDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Evelyne KARCZAG-MENCARELLI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Jean-Louis FACCENDINI, avocat au barreau de Nice ;
d'une part ;
Contre :
1- M. g. KH., né le 6 mai 1950 à GOMEL REGION (Biélorussie), de nationalité russe, demeurant 2X à MONACO,
2- Mme t. NI. épouse KH., née le 25 février 1972 à MOSCOU, (Russie), de nationalité russe, demeurant 3X à MONACO,
DÉFENDEURS, ayant élu domicile en l'étude de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Jean-Marc SZEPETOWSKI, avocat au barreau de Nice, substitué par Maître Noreddine ALIMOUSSA, avocat en ce même barreau ;
d'autre part ;
LE TRIBUNAL,
Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, huissier, en date du 13 février 2013, enregistré (n° 2013/000346) ;
Vu les conclusions de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur, au nom de M. g. KH. et Mme t. NI. épouse KH., en date des 20 juin 2013, 30 janvier 2014 et 9 avril 2014 ;
Vu les conclusions de Maître Evelyne KARCZAG-MENCARELLI, avocat-défenseur, au nom de la SAM F, en date du 9 octobre 2013 ;
À l'audience publique du 15 mai 2014, les conseils des parties ont été entendus en leurs plaidoiries, et le jugement a été mis en délibéré pour être prononcé ce jour 10 juillet 2014 ;
FAITS :
Le 10 avril 2007, M. g. KH. a acquis au prix de 3.500.000 € la propriété dénommée «S», sise à Eze-Sur-Mer, X, comprenant :
une villa en très mauvais état d'entretien,
une terrasse en encorbellement au dessus du Domaine Public Maritime,
une piscine,
une petite maison alentour en nature de jardin d'agrément,
* étant précisé :
que les occupants de la copropriété contiguë (L.) utilisent le passage se trouvant derrière la villa pour accéder tant à pied qu'au moyen de tout véhicule audit immeuble ;
que le terrain d'assiette de la propriété forme les lots 2, 5 et 6 du cahier des charges du lotissement de la SA X.
Les époux g. KH. et t. NI. ont conclu avec la SAM F les contrats suivants :
le 26 juillet 2007, un contrat de promotion immobilière,
le 6 mai 2009 signée le 5 août 2009, une convention de maîtrise d'ouvrage déléguée,
le 3 mai 2011, un marché de travaux portant sur l'aménagement intérieur de la villa et la réalisation du tunnel d'accès à la villa voisine,
le 18 novembre 2011, un marché de travaux intitulé «aménagements intérieurs et équipements techniques».
Les permis de construire suivants ont été accordés :
le 30 janvier 2009, après autorisation du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, autorisant la réhabilitation de la villa «S »,
le 4 juin 2010, modificatif pour la couverture de la voie d'accès et la réalisation d'un programme paysager,
le 3 décembre 2012, pour la demande en modification en sous-sol de la villa (création de locaux techniques de 70 m² en sous-sol de la maison).
La SCI C a formé une requête en annulation du permis de construire du 30 janvier 2009 ; le 25 mars 2011 un protocole d'accord a été signé portant désistement de l'instance et des engagements sur les conditions de réalisation des travaux et des modifications de la servitude.
Le 3 août 2012, un procès-verbal de réception des travaux était signé entre le maître d'ouvrage délégué et le maître d'œuvre représenté par M. S avec des réserves.
Le 12 décembre 2012, la réception des travaux a été prononcée avec effet au 27 novembre 2002, sans réserves.
La déclaration d'achèvement des travaux au 1er février 2013 a été effectuée le 5 février 2013.
Le 23 mai 2013, le certificat de conformité des travaux au permis de construire et à ses modificatifs a été délivré concernant l'implantation des constructions, la destination, la nature, l'aspect extérieur, les dimensions et l'aménagement des abords.
PROCÉDURE :
Le 13 février 2013, la SAM F fait assigner les époux g. KH. et t. NI. en paiement de travaux.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
La SAM F,
*expose :
que le 10 avril 2007, M. g. KH. (parfois orthographié g. KH.) a acheté une propriété dénommée «S » à Eze-Sur-Mer, Chemin des Pins, en mauvais état en vue de faire réaliser des travaux de restructuration et de rénovation et de la revendre ;
que les époux g. KH. et t. NI. ont acquis le 26 août 2005 la villa X à Monaco, dont ils ont confié les travaux à la concluante, raison pour laquelle ils ont pris attache avec elle pour ceux à réaliser à Eze ;
que les parties ont conclu :
le 26 juillet 2007, une convention de promotion immobilière, l'entreprise ayant, en application de l'article 2, mission d'obtenir l'autorisation de réhabilitation, modifier le bâtiment et de concevoir l'ouvrage de mise en souterrain de la voie d'accès dans le cadre du lotissement SA X ; convention qui a été exécutée ;
le 5 août 2009, une convention de maîtrise d'ouvrage déléguée pour un montant forfaitaire de 904.500 € HT outre TVA, avec échéancier de règlement ;
le 7 janvier 2010, un marché de travaux réalisé partiellement à la demande du maître de l'ouvrage, objet de la situation n° 6 d'un montant de 759.535,59 € TTC ;
le 3 mai 2011, un autre marché de travaux pour 1.081.316,06 € HT, (facture du 19 avril 2011 et réalisation du tunnel) ;
le 18 novembre 2011, un marché de travaux portant sur les aménagements intérieurs et les équipements techniques pour 2.104.504,91 € HT ;
que le maître de l'ouvrage a demandé la réalisation de travaux supplémentaires ;
qu'elle a, le 3 août 2012, agissant en qualité de maître d'ouvrage délégué, avec M. S, architecte, réceptionné les travaux avec des réserves qui ont été levées ;
que les sommes dues n'ont pas été réglées ;
* fait valoir :
que les époux g. KH. et t. NI. se sont présentés comme étant propriétaires de la villa « S » alors qu'elle appartient en fait à l'époux seul ; qu'ils ont pris la qualité de co-maîtres d'ouvrage dans toutes les conventions qui ont été signées ;
que M. g. KH. est un homme d'affaire avisé, qui avait déjà acquis une villa à Beaulieu-Sur-Mer pour 23.800.000 Frs, revendue 13.000.000 € ;
que l'opération immobilière envisagée était complexe, compte tenu de la configuration du site, de la présence d'un chemin d'accès desservant un immeuble et de la situation du bien dans un site classé ;
que l'existence de contrats successifs s'explique par le fait que les travaux que les époux g. KH. et t. NI. ont entendu réaliser, ont varié, passant d'une finition intérieure brute de décoffrage à des aménagements intérieurs ;
que tous les travaux ont été décidés par les défendeurs au vu des devis chiffrés fournis et approuvés ;
* soutient :
A) sur les conventions :
sur le contrat du 26 juillet 2007 :
que les maîtres de l'ouvrage connaissaient l'ampleur des travaux à réaliser et qu'ils ont convenu dès l'origine de lui confier une mission d'étude puis, en cas d'obtention du permis de construire, la charge de les représenter et d'effectuer les travaux ;
que la convention a été exécutée et que la rémunération a été versée ;
sur la convention de maîtrise d'ouvrage déléguée du 6 mai 2009, signée le 5 août 2009 :
que M. g. KH. et Mme t. NI. avaient signé une convention similaire pour la villa X ;
que les défendeurs ont convenu d'un tel contrat en raison de la complexité des travaux à exécuter et de la situation de l'immeuble dans un site classé ;
que cette mission n'avait pas pour unique finalité de représenter le maître de l'ouvrage auprès des entreprises ; qu'il suffit de se reporter à l'article 2 pour s'en convaincre ;
que la rémunération convenue de 904.500 € HT incluant l'architecte, les bureaux d'études, les études d'électricité, de climatisation, le paysagiste et les honoraires du bureau de contrôle, est inférieure à ce qu'elle aurait été si les époux g. KH. et t. NI. avaient conclu des contrats séparés avec chacun de ces intervenants ;
sur les marchés de travaux :
que M. g. KH. et t. NI. lui ont demandé d'établir des devis décrivant et chiffrant les nouveaux travaux, qu'ils ont approuvés et faits réaliser ;
qu'il en a été ainsi pour les contrats successifs conclus ;
qu'ils ne se sont pas mépris sur le rôle de la concluante ;
B) sur l'achèvement des travaux en juillet 2012 :
que les travaux ont bien été totalement achevés au mois de juillet 2012 ;
que lors d'une réunion qui s'est tenue le 11 octobre 2012, les défendeurs ont émis quatorze réserves mineures, lesquelles n'étaient pas un obstacle à la réception des travaux à la fin du mois de juillet 2012 ;
que la concluante a levé les dites réserves ;
que d'autres réserves ont été formulées le 17 mai 2013, qu'elle a effectué les travaux et que des visites contradictoires ont été effectuées au cours du mois de juin 2013 ; que lors de la dernière en date du 25 juin 2013, il a été constaté que les travaux de levée des réserves étaient terminés ;
qu'en tout état de cause, ces réserves ne pouvaient pas justifier le non paiement de la somme de 1.356.240,23 € ;
C) sur le caractère infondé de la demande d'expertise :
que le rapport de M. L du 13 mai 2013 ne lui est pas opposable ;
que la liste des malfaçons et non conformités alléguées par le conseil des défendeurs le 17 mai 2013, ont fait l'objet de travaux de reprise tels qu'énumérés dans ses écritures sur seize points ;
D) sur l'absence de nullité du contrat de maîtrise d'ouvrage déléguée :
qu'il est allégué d'une absence de cause et d'un montage s'analysant «en une véritable escroquerie» ;
que M. g. KH. n'est pas un acquéreur profane mais un homme d'affaire qui entend réaliser des investissements immobiliers ;
que le contrat litigieux a été conclu dans le cadre complexe de l'opération envisagée tel que développé plus haut ;
que les défendeurs ne voulaient pas se charger personnellement de la très importante et très complexe opération de restructuration et qu'ils ont entendu être représentés par un professionnel compétent ;
qu'au titre de la convention de maîtrise d'ouvrage déléguée du 6 mai 2009, la concluante devait représenter celle-ci au mieux de ses intérêts avec la mission de l'article 2 notamment ;
que cette convention n'a été signée que le 5 août 2009, laissant quatre mois à M. g. KH. pour réfléchir ;
que l'ensemble des honoraires pour la maîtrise d'œuvre est d'environ 10 % du montant des travaux, soit un montant nullement exorbitant ; son intervention couvrant le domaine administratif, l'organisation des études techniques, la gestion financière et technique du projet ;
qu'elle a également dû gérer les difficultés inhérentes au recours en annulation formé devant le Tribunal administratif par la SCI C, à l'encontre du permis de construire délivré le 30 janvier 2009, puis trouver une solution transactionnelle le 25 mars 2011 pour mettre un terme à ce contentieux, avec dépôt puis obtention d'un permis de construire modificatif ;
qu'elle a dû gérer également la deuxième demande de permis modificatif déposée le 4 janvier 2012 pour la réalisation de locaux techniques enterrés ;
que le certificat de conformité pour les travaux exécutés a été délivré le 23 mai 2013 ;
que la concluante a exécuté l'ensemble de sa mission et qu'il ne peut être valablement soutenu que le contrat ne serait pas causé ;
que l'arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de Cassation du 10 octobre 2012, non publié au Bulletin, n'a aucun rapport avec les relations contractuelles de présent litige ; qu'elle ne s'est jamais présentée comme étant architecte et que la convention de maîtrise d'ouvrage déléguée du 5 août 2009, correspond à la mission que les maîtres de l'ouvrage entendaient lui confier ; qu'il en va de même pour les marchés de travaux ;
que la partie de la mission relative à la soumission des documents à un contrôleur technique et à la nécessité d'avoir sur place un technicien qualifié ne signifie pas qu'elle assure la maîtrise d'œuvre du chantier dans son ensemble ;
que les marchés de travaux privés conclus sont compatibles avec la convention de maîtrise d'ouvrage déléguée ; qu'il n'existe pas de réglementation propre au contrat de maîtrise d'ouvrage déléguée en droit privé, lequel est régi par le principe de la liberté contractuelle ;
E) sur le caractère infondé de la demande de nullité pour dol :
que les défendeurs ont «l'outrecuidance» de soutenir qu'elle aurait usé de manœuvres dolosives pour multiplier les conventions afin de cumuler des fonctions soit disant incompatibles et d'exiger un prix «outrancier» et ce sans apporter le moindre commencement de preuve ;
que lorsqu'une partie exécute une convention entachée de nullité, elle la confirme et ne peut valablement en solliciter l'annulation, en application de l'article 1185 du Code civil ;
que les défendeurs ont exécuté une grande partie de la convention litigieuse pour devoir 214.682 € sur 1.080.782 € et que donc, même si elle avait été entachée de nullité, ils ne peuvent plus s'en prévaloir ;
G) sur l'assurance dommages ouvrage :
qu'elle n'a pas été investie d'une mission de maîtrise d'œuvre ;
* conclut
à la condamnation de M. g. KH. et Mme t. NI. à lui payer :
la somme de 1.666.260,70 € TTC avec intérêts au taux légal à compter de la sommation de payer du 10 décembre 2012, se décomposant comme suit :
1.356.240,23 € au titre du solde des travaux d'aménagement de la villa, du jardin et de la piscine ;
95.338,55 € au titre du solde des travaux relatifs à la construction du tunnel d'accès ;
214.692 € au titre des honoraires de maîtrise d'ouvrage déléguée ;
la somme de 100.000 € à titre de dommages et intérêts en raison du non-paiement des sommes dues depuis l'achèvement des travaux survenu en juillet 2012 ; ce manquement contractuel lui occasionnant un préjudice pour avoir été privée des sommes dues, non réparé par les intérêts de retard ;
au débouté de M. g. KH. et Mme t. NI. de l'ensemble de leurs demandes ;
à l'exécution provisoire de la décision à intervenir.
M. g. KH. et Mme t. NI.,
* font valoir :
que la SAM F leur a fait signer un nombre incalculable de contrats, entretenant sciemment une confusion sur les travaux à réaliser, sur le rôle de la SAM F et sur le coût total du marché ;
qu'elle n'aurait pas dû proposer une telle solution dans laquelle l'ensemble de ses agissements ne pouvait qu'être parasité par le conflit d'intérêts existant entre l'entreprise et le maître de l'ouvrage ;
que la SAM F a signé un chantier avec les concluantes et qu'elle est intervenue tous corps d'état ; qu'elle est censée les représenter avec la société réalisant le chantier, c'est à dire elle même ;
que la demanderesse s'est assurée que les concluants ne puissent ni contrôler l'exécution du marché, ni le faire contrôler par un véritable maître d'œuvre, validant elle-même ses situations de travaux ;
que ces intérêts contradictoires constituent une faute contractuelle et déontologique ;
* soutiennent :
sur la nécessité d'une expertise :
que l'expertise de M. L révèle que la SAM F a commis des malfaçons et trompé les concluants sur les matériaux et sur le travail effectivement réalisé (points 4-1 à 4-15) ;
que des infiltrations et des lézardes affectent les murs ; qu'il y a des remontées d'eau par capillarité ;
que les travaux de peinture intérieure n'ont jamais été réalisés et que les menuiseries ne correspondent pas «au standing» facturé ;
que des ouvrages ont été facturés de manière disproportionnée ;
que les règles et normes de construction et d'urbanisme françaises s'appliquent ;
que le coût du tunnel va augmenter dans une proportion totalement injustifiée ;
que la SAM F a réalisé la réception de ses propres travaux ;
que les travaux sont entachés de malfaçons et de désordres qui sont établis par le rapport de l'expert LAGRULA ;
À titre subsidiaire :
sur la nullité de la convention de maîtrise d'ouvrage déléguée :
que la cause d'obligations créées par les contrats à titre onéreux est la considération d'une contre prestation ;
que dès lors que la SAM F entendait agir en tant qu'entreprise générale et faire son affaire personnelle de la maîtrise d'œuvre de ses travaux, la convention de maîtrise d'ouvrage déléguée ne repose sur aucune cause ;
que le représentant du maître de l'ouvrage ne peut pas être la même personne que l'entreprise chargée de la réalisation des travaux, dont il doit surveiller le chantier ;
que l'intervention de l'architecte et du géomètre était déjà prévue dans le contrat de promotion immobilière ; que celle de l'architecte s'est faite sous la coupe de la SAM F dont il était l'employé ;
que les études d'électricité, plomberie, espaces verts, étaient inclues dans les marchés de travaux subséquents ; qu'il en est de même pour la surveillance des travaux ;
que la SAM F a profité de la qualité de profane des concluants, sachant que M. g. KH. ne maîtrisait pas le français ;
qu'il convient de sanctionner ce type de montage qui commence à se généraliser en Principauté, alors qu'il s'analyse en une véritable «escroquerie» ;
qu'un architecte installé en Principauté a procédé de la même manière et a été poursuivi pour escroquerie, l'arrêt de la Cour de Cassation du 10 octobre 2012 vient de confirmer la condamnation de cet architecte, prononcée par arrêt de la Cour d'Aix-En-Provence ; que les faits sont similaires ou identiques au présent litige ;
que la nullité pour absence de cause sera prononcée au regard de cette concentration de qualités incompatibles d'entrepreneur, de maître d'œuvre et de maître d'ouvrage délégué ;
qu'en application de l'article 971 du Code civil, la nullité du contrat est encourue car la SAM F a usé de manœuvres dolosives et a multiplié les conventions dans le temps pour cumuler des fonctions incompatibles de manière à pouvoir exiger un prix «totalement outrancier par rapport au coût réel des travaux réalisés» ;
que la demanderesse ne prouve pas avoir réalisé un ouvrage exempt de vices lui permettant de réclamer des factures prétendument impayées ;
que le procès-verbal de réception et celui de levée des réserves n'ont aucune valeur car les époux g. KH. et t. NI. n'ont jamais été convoqués et qu'il n'y a pas eu de réception contradictoire des travaux ;
que M. L a relevé que de nombreuses factures étaient indues ;
qu'ils sont bien fondés à exciper de l'exception non adimpleti contractus et de faire application de la jurisprudence (cf. Cour de Cassation, 14 janvier 2003 - B. C. I. n° 9, 2 avril 1996 - B. C. I. n° 170) ;
que le décompte produit par la SAM F est faux, car plusieurs marchés de travaux se recoupent ;
qu'en effet, les postes électricité, étanchéité, maçonnerie, revêtements, plomberie….. ont été facturés deux fois (cf. marchés des 7 janvier 2010, 3 mai 2011 et 18 novembre 2011) ;
que rien ne vient justifier les honoraires de l'architecte, lequel se fait rembourser les primes d'assurance ;
que la qualité des matériaux est inférieure à celle facturée ;
que la SAM F a manqué à son devoir de conseil en ne les incitant pas à souscrire une assurance dommage ouvrage, obligatoire en France, en application de l'article L 242-1 du Code des Assurances (Cf. Cour de Cassation, 3° civ, 17 novembre 1999) ;
* concluent
au principal à une mesure d'expertise et au sursis à statuer ;
à titre subsidiaire au cas où il serait fait droit seulement à la demande d'expertise :
au débouté de la SAM F ;
à la condamnation de la SAM F à leur payer la somme de 1.081.782 € ;
à titre plus subsidiaire au cas où il ne serait pas fait droit à leur demande d'expertise :
au débouté de la SAM F ;
à la condamnation de la SAM F à leur payer la somme de 1.081.782 € ;
en tout état de cause à l'allocation de la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour avoir dû engager des frais dans le cadre d'une procédure abusive.
SUR QUOI LE TRIBUNAL,
Les époux g. KH. et t. NI. sont propriétaires de la villa X à Monaco, dont ils ont confié les travaux de rénovation à la SAM F ; satisfaits de la qualité de la prestation, ils ont pris attache avec elle pour l'opération de rénovation de la villa « Shangri La » à Eze-Sur-Mer.
M. g. KH. n'est pas un professionnel du bâtiment mais un homme d'affaire averti investi dans l'immobilier puisque, outre les achats cités ci-dessus, il avait acheté le 30 janvier 1998, un immeuble à Beaulieu-Sur-Mer pour le prix de 23.800.000 Frs qu'il a revendu le 7 mars 2005, au prix de 13.000.000 €.
La société demanderesse agit en paiement du solde des sommes dues au titre des différents contrats la liant aux maîtres de l'ouvrage.
Les défendeurs sollicitent au principal une mesure d'expertise et subsidiairement concluent au débouté de l'action en paiement en raison de la nullité de la convention de maîtrise d'ouvrage déléguée, puis de l'inexécution du contrat.
Il convient de se prononcer en premier lieu sur la validité du contrat ou sur son exécution avant de statuer sur une demande d'expertise qui ne peut être ordonnée que s'il existe un contrat valable.
Sur la nullité de la convention de maîtrise d'ouvrage déléguée :
* pour absence de cause :
Le 26 juillet 2007, M. g. KH. et son épouse Mme t. NI. ont conclu avec la société demanderesse un contrat de promotion immobilière »afin de lui confier l'étude complète de la réhabilitation de la villa «S», de la mise en sécurité de la falaise située à l'amont de ladite villa et de la mise en souterrain de la voie d'accès servitudée dans le cadre du lotissement de la SA X, en vue de l'obtention des autorisations de construire«.
Le promoteur avait donc la charge « d'entreprendre l'ensemble des études tant techniques, qu'architecturales en vue de constituer un dossier administratif complet et d'obtenir les autorisations de construire de rigueur ».
L'objet précis de la mission est défini à l'article 2 et le coût était fixé à une somme forfaitaire de 150.000 € comprenant également la rémunération de l'architecte M. S, du bureau d'études E & G, du contrôleur technique A, du géomètre T et du bureau d'études Techniques Fluides.
Ce contrat se rapporte donc exclusivement aux études et formalités préalables à l'opération de construction jusqu'au stade compris du dépôt des dossiers de demande d'autorisation de construire et n'était nullement relatif aux travaux ultérieurs de rénovation et/ou construction.
Cette convention a été exécutée puisque le permis de construire a été accordé le 30 janvier 2009 et les maîtres de l'ouvrage ont réglé les honoraires prévus.
Les parties ont ensuite conclu une convention de maîtrise d'ouvrage déléguée qui rappelle que le permis de construire concernant la réhabilitation de la villa a été accordé, par laquelle les époux g. KH. et t. NI. ont chargé la SAM F de les représenter … « pour l'ensemble du suivi du chantier Tous Corps d'État, son organisation jusqu'à sa livraison ».
Ce contrat ne fait pas double emploi avec le précédent, alors que les parties ne se trouvent plus au stade des études préalables mais à celui de la réalisation des travaux.
L'article 2 définit les missions spécifiques du maître de l'ouvrage délégué.
Il n'est pas anormal d'y trouver l'organisation des études techniques et la gestion tant financière que technique, missions qui sont relatives désormais à la phase d'exécution, alors que le chantier s'inscrit dans un site classé avec des travaux se rapportant à l'immeuble qui était en très mauvais état, mais aussi à son environnement (falaise), à la mise en souterrain d'une voie d'accès et impliquant au surplus des relations avec les services concessionnaires, la mairie et l'organisme privé chargé de la gestion d'un service public V.
Ce contrat est par ailleurs totalement étranger dans son contenu aux marchés de travaux eux-mêmes, qui seront ensuite signés et il ne peut pas être retenu qu'il ne serait pas causé alors que son objet est tout à fait différent.
L'article quatre de la convention fixe la rémunération du maître de l'ouvrage délégué à la somme forfaitaire de 904.500 € outre la TVA, laquelle comprend tous les partenaires devant intervenir dans le cadre de l'exécution des travaux, architecte compris.
Cette somme ne paraît pas exagérée au regard du coût des travaux à réaliser (les époux g. KH. et t. NI. déclarent avoir réglé une somme de 10.000.000 €) et de la difficulté que représente l'opération immobilière dans son ensemble.
La qualité ou non de profane des maîtres de l'ouvrage est sans pertinence quant à l'existence ou non d'une cause.
Les défendeurs invoquent l'arrêt rendu le 10 octobre 2012 par la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation alors que les faits de l'espèce ne sont pas transposables, la SAM F n'ayant pas emprunté des qualités qui n'entrent pas dans les missions qu'elle déclare ; elle a au contraire fait preuve d'une totale transparence.
Elle n'a pas, à cette date, été poursuivie pénalement pour escroquerie.
Les défendeurs avant d'être attraits en justice n'ont jamais soutenu que la convention n'avait pas de cause et l'ont au contraire partiellement exécutée.
Les époux g. KH. et t. NI. soutiennent par ailleurs que le représentant du maître de l'ouvrage ne peut pas être la même personne que l'entreprise chargée de la réalisation des travaux mais cette double qualité est sans conséquence sur la notion même de cause de la convention.
Ils n'établissent par ailleurs pas qu'une règle d'ordre public interdisait à la société requérante d'être investie d'une mission de maître d'ouvrage délégué.
La convention litigieuse est bien causée et ce moyen de nullité sera rejeté.
* pour dol :
Le dol est défini par l'article 971 du Code civil comme »les manœuvres pratiquées par l'une des parties… telles qu'il est évident que sans ces manœuvres l'autre partie n'aurait pas contracté«.
Il ne résulte d'aucune des pièces produites que la SAM F se serait livrée à des manœuvres pour contraindre les maîtres de l'ouvrage à signer les conventions litigieuses (dont il sera redit que l'objet n'est pas identique), ni pour imposer un prix qualifié par les défendeurs de «totalement outrancier » alors qu'il a été accepté par eux en pleine connaissance de cause.
La convention de maîtrise d'ouvrage déléguée est datée du 6 mai 2009 et n'a été signée et approuvée que le 5 août 2009, soit après un délai de réflexion de trois mois.
L'existence d'un dol n'est pas établi et il est allégué sans preuve d'un abus de position dominante, étant observé que les maîtres de l'ouvrage ne peuvent pas être considérés comme des consommateurs en position de faiblesse ou de vulnérabilité.
Ce moyen sera également rejeté.
Sur l'action en paiement et sur l'exception d'inexécution :
La SAM F sollicite le paiement du solde
des travaux d'aménagement de la villa, du jardin et de la piscine
des travaux relatifs à la réalisation du tunnel,
des honoraires de maîtrise d'ouvrage déléguée.
* sur les travaux relatifs à la réalisation du tunnel d'accès :
Ce marché a été signé le 3 mai 2011, paraphé et signé par les maîtres de l'ouvrage et donc accepté par eux.
Il s'élève à la somme de 944.834,90 € HT.
Il sera rappelé que ce contrat est totalement indépendant de celui du 7 janvier 2010 (ce qui est bien précisé) et si le montant des travaux a augmenté ce n'est pas à la suite d'une « refacturation » ou « ne facturation disproportionnée« m » s parce que leur nature a changé à la suite de la transaction ayant mis fin au litige administratif d'annulation du permis de construire.
Le tunnel ne fait pas partie de la liste des ouvrages à reprendre envoyée par le conseil des défendeurs le 17 mai 2013.
Les époux g. KH. et t. NI. avaient d'ailleurs par lettre du 9 janvier 2013 indiqué à l'entreprise, que suite aux réparations effectuées, « il n'y a pas eu de nouveaux désordres. Nous acceptons en conséquence de vous verser le solde sur ce poste ».
Marché TTC de 1.130.022,54 €
Moins value de 27.658,65 €
_____________
1.102.363,89 €
Sommes réglées 1.007.025,34 €
_____________
Reste dû 95.338,55 €
* sur les autres travaux et sur l'exception d'inexécution :
Le marché des travaux du 18 novembre 2011 porte sur les lots 1- 2- 4- 5- 6- 8- 9 pour un montant de 2.104.504,91 € HT se décomposant comme suit :
Lot 1 : 253.303,90 €
Lot 2 : 338.740,00 €
Lot 4 : 538.667,12 €
Lot 5 : 145.990,67 €
Lot 6 : 345.410,73 €
Lot 8 : 385.195,59 €
Lot 9 : 97.196,91 €
Soit un total TTC : 2.220.252,68 € (TVA à 5,5 %)
L'ensemble des documents contractuels ont été soumis à la signature du maître de l'ouvrage qui les a donc acceptés.
Il n'est pas discuté que M. g. KH. et Mme t. NI. ont demandé à l'entreprise des travaux supplémentaires.
* document du 3 octobre 2011 signé le 10 décembre 2011 :
serrurerie - métaillerie extérieure - volets roulants - porte de garage - métaillerie :
135.266 € HT - 142.705,63 € TTC
* document du 30 novembre 2011 signé le 10 décembre 2011 :
aménagement de la piscine :
150.264,87 € HT - 158.529,44 € TTC
* le 16 décembre 2011 :
travaux de marbrerie :
461.125,77 € HT - 486.487,69 € TTC
* le 1er décembre 2011 signé le 10 décembre 2011 :
estimation d'un budget pour travaux de jardin :
986.716,97 € HT - 1.180.113,50 € TTC (TVA à 19,6 %)
* le 18 avril 2012 signé le 19 avril 2012 :
cuisine - marbrerie :
154.331,94 € HT - 162.820,20 € TTC
* le 8 mars 2012 signé le 19 avril 2012 :
travaux d'électricité relatifs aux installations de vidéo-surveillance et d'anti-intrusion :
87.300 € HT - 104.410,80 € TTC ( TVA 19,6 %)
* le 13 juin 2012 :
réalisation d'une installation de relevage des eaux usées :
101.145,22 € HT - 120.969,68 € TTC (TVA à 19,6 %)
* le 13 juillet 2012 :
travaux de peinture :
375.272,60 € HT - 448.826,02 € TTC
Il s'agit de travaux nouveaux dont il n'est pas soutenu qu'ils auraient été fautivement omis par l'entreprise dans les marchés initiaux et qui ne font pas double emploi avec les documents analysés ci-dessus.
Le 3 août 2012, le maître d'ouvrage délégué et l'architecte (M. S) ont signé le procès-verbal de réception des travaux avec des réserves qui ont été levées par les mêmes parties le 12 décembre 2012 avec effet au 27 novembre 2012 pour la réception définitive faisant courir les délais de garantie de parfait achèvement, de bon fonctionnement et la responsabilité décennale.
Le 26 novembre 2012, la SAM F a mis en demeure les époux g. KH. et t. NI. d'avoir à lui payer la somme de 1.666.260,78 € TTC
1.356.240,23 € phase 2
95.338,55 € tunnel
214.682,00 € situation 5 et maîtrise d'ouvrage déléguée.
Les maîtres de l'ouvrage n'ont pas réglé les sommes demandées et ont fait des observations sur la qualité des travaux exécutés.
L'entreprise, le 24 avril 2013 et dans le cadre de la visite de contrôle avant la fin de la période de parfait achèvement, a listé contradictoirement les remarques faites lors de la réunion du 22 avril 2013 et offert de corriger toutes les défectuosités ainsi relevées.
Les époux g. KH. et t. NI. ont demandé à un technicien de réaliser une expertise et M. L a établi son rapport, lequel n'est pas contradictoire, le 13 mai 2013.
Le 17 mai 2013, le conseil des époux g. KH. et t. NI., s'appuyant sur ce rapport, a contesté la qualité de l'exécution des travaux sur seize points qui seront examinés successivement afin de déterminer si une mesure d'expertise est justifiée.
Etanchéité et évacuation des eaux pluviales du balcon côté est (point 1) :
Le 12 juin 2013, lors d'une réunion de chantier, la liste des ouvrages à reprendre a été établie, laquelle comprend les travaux de reprise ci-dessus, lesquels ont été effectués et terminés ainsi qu'il résulte de la réunion contradictoire de levée des réserves du 25 juin 2013 où le maître de l'ouvrage était représenté par son mandataire, M. S.
Il n'est produit aucun document postérieur de nature à établir que ces travaux auraient été mal effectués et que de nouveaux désordres seraient apparus.
Mortier de jonction des murets des terrasses des étages poreux et « fuyard »; revêtements de façades et modénatures et tâches d'humidité, fissures sur la façade (points 2, 6 et 11) :
Les travaux de reprise ont été effectués, et lors de la visite de levée des réserves du 25 juin 2013, il a été constaté qu'ils étaient terminés sans observation négative sur le travail effectué.
L'A a transmis « son CR89 avis favorable sur procédures et fiches techniques ».
L'entreprise a de plus justifié des fiches techniques relatives aux produits utilisés (REP PLUS - Calixtone Fixalit), expliquant que les maçonneries existantes avaient dû être conservées.
La preuve n'a pas été rapportée que les travaux de reprise seraient défectueux et que de nouveaux désordres seraient apparus.
Huisseries des portes et portes-fenêtres pour ne pas présenter des prises d'air frais (point 3) :
Le 22 mai 2013, l'entreprise a fait savoir qu'elle a installé une ventilation double flux »…plus efficace que les classiques entrées d'air, bien plus adaptée au site … et à notre époque s'agissant des progrès environnementaux« et a ainsi estimé que la qualité des travaux ne souffrait pas d'observation.
Elle n'a pas intégré ce poste dans la liste des ouvrages à reprendre.
M. g. KH. et Mme t. NI. n'ont fait aucune observation critique sur cette appréciation, ni lors de la levée des réserves du 25 juin 2013.
Il n'est pas établi que les travaux réalisés soient contraires aux règles de l'article.
Déformation du parquet des chambres (point 4) :
Les défauts ont été repris, sans observation.
Relevés d'étanchéité dans les jardins (point 5) et fuites d'eau des jardinières de l'étage (point 8) :
Les travaux ont été repris et étaient terminés le 12 juin 2013, sans observation sur leur qualité et sans que de nouveaux désordres soient signalés.
Frises sur corniches extérieures (point 7) qui auraient été prévues en « Sgraffito » et n'auraient pas reçu de traitement :
L'entreprise a, le 22 mai 2013, contesté les affirmations ci-dessus, en indiquant que les travaux avaient été réalisés conformément au contrat, à savoir « réalisation de poncifs, piquages et traçage sur support, mise en peinture décorative en camaïeu de sepia ».
Ces explications n'ont pas été discutées par le maître de l'ouvrage.
Il a été indiqué dans le cadre de la réunion de levée de réserves du 25 juin 2013, sans discussion, que ce poste était « sans objet ».
Mauvais fonctionnement des détecteurs de mouvement - problèmes d'électricité (point 9) :
Les travaux afférents aux détecteurs de mouvements étaient réalisés le 12 juin 2013 ;
Ce fait n'a pas été discuté lors des réunions ultérieures.
Le 19 juin 2013, le représentant du maître de l'ouvrage a constaté que les éclairages extérieures fonctionnaient.
La qualité des travaux n'a pas été discutée lors de la levée des réserves.
Défectuosité des portes de placards dans la chambre de maîtres (point 10) :
Les travaux de reprise étaient achevés le 12 juin 2013, sans observation ultérieure et sont bien compris dans la levée de réserves du 25 juin 2013.
Non conformité au CCTP du lot 8 des huisseries « menuiseries intérieures bois » pour ne pas avoir été réalisées en chêne massif (point 12) :
L'entreprise a fait valoir en réponse que le conseil des époux g. KH. et t. NI. se référait à un projet refusé par ses clients ; que le devis du 10 novembre 2011 ne prévoyait pas des portes en chêne massif mais des portes finition à peindre comprenant deux panneaux, ce qui a été réalisé.
Le marché de travaux relatif aux menuiseries est bien le lot 6 et non 8 et le devis accepté mentionne bien « la fourniture et pose de portes finition à peindre comprenant deux panneaux ».
La demande de reprise a dès lors été considérée sans objet, sans que cela soit discuté lors des réunions de chantier ultérieures.
Non conformité au CCTP des quincailleries des huisseries intérieures (point 13) :
Cette observation a fait l'objet de la même réponse que ci-dessus relative à l'erreur commise sur le CCTP.
Le budget de fourniture de poignée prévu au lot 6 est bien de 150 € la porte.
Il n'est pas démontré que les « quincailleries » posés ne sont pas conformes à la description contractuelle, lot accepté par M. g. KH..
Ce poste a été porté « sans objet » au titre des reprises, ce qui n'a pas été discuté.
Planéité du revêtement de sol en marbre de la salle de réception (point 15) :
L'entreprise s'est engagée à faire intervenir le Bureau d'étude technique E, lequel a, au mois de juin 2013, établi un rapport et qui conclut que « l'ensemble des mesures effectuées sont inférieures aux tolérances données dans le DTU [52-2] concernant la pose collée de revêtement céramique ou assimilé et pierre naturelle ».
Il en résulte que la planéité du revêtement en marbre est conforme à la réglementation applicable.
Lors de la réunion de levée de réserves du 25 juin 2013, les parties étaient encore en attente du rapport.
Bibliothèque et étagères des placards en bois massif alors que les ouvrages livrés ne correspondent pas à cette exigence (points 15 et 16) :
Le 22 mai, la SAM F a répondu :
que la bibliothèque avait été réalisée suivant le projet de l'architecte, conforme aux spécificités du devis accepté, repeinte à deux reprises à ses frais à la demande de son client et qu'elle n'avait jamais été prévue en chêne massif ;
que les tablettes des placards sont conformes au devis validé en finition chêne vernis naturel et qu'elles n'étaient pas prévues en chêne naturel ;
Il n'est pas indiqué dans le devis que ces »ouvrages« étaient réalisés en bois de chêne massif.
Les époux g. KH. et t. NI. n'ont ensuite émis aucune objection, ces deux postes ont été portés sans objet sans que cela soit contesté.
Les travaux défectueux ou non conformes aux dispositions contractuelles ont été repris.
M. L fait état d'infiltration provenant du bac à poissons ; il ressort des documents produits que le 19 décembre 2012 le problème relatif à cet ouvrage avait été résolu, ce que reconnaît M. g. KH. dans son courrier du 9 janvier 2013.
Le conseil des époux g. KH. et t. NI. n'a pas repris tous les points relevés par M. L dans son courrier du 17 mai 2013, concernant particulièrement la piscine et les écarts dans les surfaces réelles et facturées.
Il peut en être déduit que les maîtres de l'ouvrage ne considéraient pas ces observations comme pertinentes.
Il sera observé que le problème du réglage de la piscine (observé lors de la visite contradictoire du 11 octobre 2012, devait être effectué pour le 26 octobre 2012 - courrier du 12 octobre 2012), le contrat d'entretien Aqualift a été adressé le 26 octobre 2012.
Ce problème n'a plus été évoqué dans tous les courriers ultérieurs et nombreux échanges entres parties.
Il n'est pas plus fait état d'un écart entre les prestations facturées et celles réalisées.
Il demeure le problème des peintures dont la qualité de certaines a été mises en cause dans le courrier des époux g. KH. et t. NI. du 9 janvier 2013, pour une mauvaise préparation des murs, travaux qui auraient été effectués par une autre entreprise pour un montant de 132.814,60 € ramenant la facture à la somme de 280.128,77 € au lieu de 412.943,37 € TTC.
Les maîtres de l'ouvrage avaient antérieurement mis en cause les prix pratiqués et l'entreprise leur avait envoyé la comparaison entre ceux-ci et les travaux réalisés dans la villa " X» (pour un prix supérieur antérieurement au chantier litigieux) (courrier de la SAM F du 26 novembre 2012).
Le 10 décembre 2012, les défendeurs n'ont plus formulé d'observation sur ce point.
La SAM F, le 21 janvier 2013, a fait observer :
que les murs en cause n'étaient pas localisés ;
qu'elle laissait aux époux g. KH. et t. NI. le soin de produire un rapport du décorateur A «qui confirmera que les préparations réalisées au rez-de-chaussée et dans la cage d'escalier n'ont pas été correctement réalisés et ont nécessité des reprises de leur part».
Lors des réunions contradictoires qui se sont déroulées du 17 mai 2013 à la fin du mois de juin 2013, ce poste de «malfaçon» n'a jamais été repris par les représentants du maître de l'ouvrage.
Il n'est pas rapporté la preuve des manquements allégués, laquelle ne peut résulter du mail du 13 février 2013 de AC MATIERE qui ne fournit pas les factures afférentes aux prestations non prévues qu'elle aurait dû effectuer.
Le document du 15 novembre 2012 est un simple devis.
Il n'y a dès lors pas lieu d'ordonner de mesure d'expertise.
Il reste dû à l'entreprise la somme de : 1.356.240,23 €.
* sur la convention de maîtrise d'ouvrage déléguée :
Le montant prévu des honoraires est de 904.500 € HT (et non 1.029.918,06 €) soit 1.081.782 € TTC.
Il a été librement convenu entre les parties après un délai de réflexion de trois mois et ne paraît pas exagéré au regard de la complexité de l'opération de construction telle que rappelée au paragraphe relatif à la demande de nullité.
Elle a au demeurant été partiellement exécutée puisque les époux g. KH. et t. NI. ont réglé les situations 1 à 4 pour un montant total de 876.100 € (situation n° 5 du 1er août 2012), soit un solde dû de 205.682 €.
Les époux g. KH. et t. NI. opposent une exception d'inexécution pour ne pas régler les sommes dues, alors que dans le courrier du 9 janvier 2013 - et sauf le compte à faire qu'ils sollicitaient sur les peintures - ils reconnaissaient devoir la somme de 1.370.214,70 € TTC ; qu'ils étaient disposés à régler après réalisation des travaux de reprise et la réception du certificat de conformité.
L'entreprise, dans le cadre de sa mission a bien établi, déposé et obtenu le permis de construire initial et modificatif.
Il n'est pas discuté qu'elle a bien assisté les maîtres de l'ouvrage dans le cadre des négociations consécutives à l'action en annulation du permis de construire du 30 janvier 2009, ayant abouti au protocole d'accord du 25 mars 2011.
Il n'est pas démontré qu'elle ait été défaillante dans la coordination, ni la réalisation des travaux.
L'entreprise ne démontre pas avoir convoqué les époux g. KH. et t. NI. lors de la réception des travaux les 3 août puis 12 décembre 2012.
Elle a, en sa qualité de maître de l'ouvrage délégué, dressé un certain nombre de réserves qui ont été ensuite levées.
Il n'est pas établi qu'elle ait été défaillante dans l'établissement de cette liste, alors que les désordres allégués ultérieurement n'ont pu apparaître qu'après l'écoulement du temps (fuites, fentes…).
Elle a en tout état de cause répondu aux demandes du maître de l'ouvrage et effectué les travaux pouvant être exigés dans le cadre de la garantie de parfait achèvement et/ou de bon fonctionnement et ce jusqu'à la levée des «réserves» contradictoire qui a été faite à la fin du mois de juin 2013.
Elle a adressé
au mois d'octobre 2012 les rapports effectués par divers organismes ou entreprises (SAM E, SAM O, A) et les différents contrats d'entretien (courrier du 26 décembre 2012), le contrat d'assurance souscrit par elle ;
le 2 novembre 2012, les attestations de garantie concernant le matériel installé dans la villa.
Elle a le 6 décembre 2012, dit être intervenue pour remplacer les quatre sèche-serviettes défectueux.
Le certificat de conformité au permis de construire et ses modificatifs a été délivré le 23 mai 2013.
La société demanderesse a exécuté les contrats qui lui avaient été confiés sans avoir commis de manquements de nature à justifier un refus de paiement pour inexécution.
Les époux g. KH. et t. NI. concluent enfin au rejet de l'action en paiement, faute pour la société demanderesse de ne pas les avoir incités à souscrire une assurance dommage ouvrage.
Les faits de la cause de l'arrêt rendu par la 3ème Chambre civile de la Cour de Cassation soit totalement différents de ceux de l'espèce dans la mesure notamment où l'action engagée se situait dans le cadre d'une destruction d'un bien suite à un attentat et sur la responsabilité en découlant.
En l'espèce, aucun risque n'est réalisé et les demandeurs n'établissent pas le lien de causalité entre l'absence de souscription d'une assurance dommage ouvrage et le non paiement des travaux.
Ce chef de demande sera également rejeté.
L'entreprise a exécuté les contrats qui lui avaient été confiés relatifs aux paiements sollicités et les maîtres de l'ouvrage ne caractérisent pas d'un manquement de nature à justifier un refus de paiement pour inexécution.
Les défendeurs seront donc condamnés à régler les sommes ci-dessus avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 10 décembre 2012, les sommes réclamées étant dues.
Sur la demande de paiement de dommages et intérêts complémentaires :
La SAM F n'établit pas avoir subi un préjudice non réparé par l'octroi des intérêts légaux.
Elle sera déboutée de ce chef de demande.
Sur la demande de dommages et intérêts présentée par les époux g. KH. et t. NI.
Ceux-ci étant déboutés de l'ensemble de leurs demandes, ne sont pas bien fondés à solliciter des dommages et intérêts pour avoir dû engager des frais dans le cadre d'une procédure n'ayant pas de caractère abusif.
Sur la demande d'exécution provisoire :
Les conditions de l'article 202 du Code de procédure civile n'étant pas remplies, cette demande sera rejetée.
Sur les dépens :
Les dépens seront mis à la charge des époux g. KH. et t. NI. qui succombent.
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL,
Statuant publiquement par jugement contradictoire et en premier ressort,
Déboute les époux g. KH. et t. NI. de l'ensemble de leurs demandes ;
Condamne les époux g. KH. et t. NI. à payer à la société SAM F les sommes de :
- 95.338,55 € TTC au titre du solde des travaux relatifs à la construction du tunnel d'accès ;
- 205.682 € TTC au titre du solde des honoraires du contrat de maîtrise d'ouvrage déléguée ;
- 1.356.240,23 € au titre du solde des travaux d'aménagement de la villa, du jardin et de la piscine ;
avec intérêts au taux légal à compter du 10 décembre 2012 ;
Déboute la SAM F de ses demandes de dommages et intérêts complémentaires et d'exécution provisoire ;
Mets les dépens à la charge des époux g. KH. et t. NI., dont distraction au profit de Maître Evelyne KARCZAG-MENCARELLI, avocat-défenseur, sous sa due affirmation ;
Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le greffier en chef, au vu du tarif applicable ;
Composition🔗
Ainsi jugé par Madame Michèle HUMBERT, Premier Juge chargé des fonctions de Vice-Président, Monsieur Sébastien BIANCHERI, Premier Juge, Madame Patricia HOARAU, Juge, qui en ont délibéré conformément à la loi assistés, lors des débats seulement, de Madame Antoinette FLECHE, Greffier ;
Lecture du dispositif de la présente décision a été donnée à l'audience du 10 JUILLET 2014, dont la date avait été annoncée lors de la clôture des débats, par Madame Michèle HUMBERT, Premier Juge chargé des fonctions de Vice-Président, assistée de Madame Isabelle TAILLEPIED, Greffier, en présence de Monsieur Jean-Jacques IGNACIO, Substitut du Procureur Général, et ce en application des dispositions des articles 15 et 58 de la loi n° 1.398 du 18 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires.