Tribunal de première instance, 30 janvier 2014, SAM O c/ SAS C
Abstract🔗
Contrats et obligations - Contrat de prestations de services - Résolution pour inexécution (non) - Condamnation à paiement des prestations effectuées (oui).
Résumé🔗
C'est en vain que la société cliente, qui a chargé une société de conseil en management des risques et gestion des infrastructures informatiques de l'assister pour élaborer un plan de continuation d'activité, demande la résolution du contrat aux torts du prestataire. Ce dernier justifie avoir exécuté l'essentiel de sa mission, sans réserve de la part de la cliente, jusqu'à ce que celle-ci mette fin au contrat. Le prestataire doit donc recevoir paiement des prestations effectivement réalisées.
Motifs🔗
TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
JUGEMENT DU 30 JANVIER 2014
En la cause de :
La société SAM O, Société Anonyme Monégasque au capital de 1.687.640 € dont le siège social est 1X 98000 Monaco, immatriculée au Répertoire du Commerce et de l'Industrie de Monaco sous le n° 2X, agissant poursuites et diligences de son Président délégué en exercice, domicilié ès-qualités audit siège,
DEMANDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Vanessa HAURET, avocat au barreau de Nice,
d'une part ;
Contre :
La société SAS C , société par actions simplifiée, au capital de 150.000 €, dont le siège social est 3X Paris (France), immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés sous le n° 4X RCS Paris, prise en la personne de son Président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège,
DÉFENDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Yann LAJOUX, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Serge GRIFFON, avocat au barreau de Paris,
d'autre part ;
LE TRIBUNAL,
Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 21 septembre 2011, enregistré (n° 2012/000133) ;
Vu les conclusions de Maître Yann LAJOUX, avocat-défenseur, au nom de la société SAS C , en date des 22 mars 2012, 13 février 2013 et 27 juin 2013 ;
Vu les conclusions de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de la société SAM O, en date des 17 octobre 2012 et 24 mars 2013 ;
À l'audience publique du 28 novembre 2013 les conseils des parties ont été entendus en leurs plaidoiries, et le jugement a été mis en délibéré pour être prononcé ce jour 30 janvier 2014 ;
FAITS :
Le 18 février 2011 la société SAS C a établi un document intitulé « Complément d'assistance pour l'élaboration du PCA (soit plan de continuation d'activité) de la SAM O » pour un budget de 60.000 € HT -71.760 € TTC.
La mission comportait les trois phases suivantes :
initialisation de la mission,
analyse des risques et des besoins continuités (BIA),
élaboration du PCA.
Le 21 mars 2011, la société SAM O a passé commande de ladite prestation.
La société SAM O a par courrier du 5 juillet 2011 notifié à la société SAS C « la résolution » de sa mission.
PROCÉDURE :
Par assignation du 21 septembre 2011, la société SAM O a fait assigner la société SAS C en résolution de contrat et en paiement.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
La société SAM O,
expose :
- qu'elle est l'unique titulaire de la concession du service public de télécommunications sur la Principauté de Monaco et qu'il lui est impératif, en cas de survenance de risque, de sinistre ou de crises, d'assurer la pérennité de ses services raison pour laquelle elle a contracté avec la société SAS C compte tenu de son expertise affirmée dans le secteur des télécommunications ;
- que la pièce n° 93 communiquée par la société SAS C , rédigée en langue anglaise n'est pas traduite alors que par application de l'article 8 de la Constitution, la langue française est la langue officielle de l'État ;
fait valoir :
- sur le niveau d'expertise de la société SAS C :
qu'il ne suffit pas de s'affirmer spécialiste pour établir l'expertise de ses intervenants,
que lorsque la concluante achète des services de conseils spécialisés, elle attend des résultats calés sur sa réalité et son contexte, utilisables pour améliorer et sécuriser l'exploitation courante de ses activités ;
que c'est parce que la société SAS C se présentait comme « pionnière » dans le domaine du conseil en management des risques et gestion que sa prestation a été jugée extrêmement déceptive ;
qu'elle attendait du bilan d'impact sur les activités (BIA) l'analyse de sa situation particulière et la production de recommandations spécifiques et pertinentes alors que sa co-contractante s'est contentée d'appliquer des schémas génériques présentant des failles indiscutables ;
- sur l'absence de qualité du travail fourni :
qu'elle attendait du « sur mesure » ;
que le document intitulé Plan de continuité d'activités est une simple adaptation d'un document établi pour une autre société (pièce n° 15),
qu'elle ne pouvait constater le caractère complet ou non du contenu des livrables et leur qualité qu'en phase finale de projet de telle sorte que l'argumentation sur son absence de manifestions d'insatisfaction est fallacieuse ;
que la concluante dès réception des livrables finaux a émis des réserves et que les problèmes s'étaient manifestés dès la phase de recueil d'informations ;
qu'il suffit de se reporter aux échanges intervenus début juin 2011 ; que ce n'est que parce que la société SAS C s'est révélée incapable de pallier ses carences que la concluante a notifié sa décision d'obtenir la résolution du contrat ;
que les corrections apportées sur les comptes-rendus des personnes entendues démontrent que la restitution faite par la société SAS C était déficiente ( pièces 11, 12, 13, 14) ;
que la société SAS C ne peut se contenter d'invoquer l'application de la norme internationale de référence BS 25999, qu'elle n'en a appliqué que les principes généraux sans les décliner sur le cas spécifique litigieux ;
que société SAS C n'a jamais été en mesure d'expliquer la liste de scénarios de crise, laquelle ne peut-être que le résultat d'un travail d'analyse, de compréhension et de gestion des priorités propre à chaque entreprise ; qu'il est étonnant de noter que cette liste n'évoque pas, par exemple, le risque de cyber attaque plus vraisemblable que celui de perte d'un bâtiment ;
qu'en l'absence de définition des critères ayant présidé à cette sélection, elle manque d'un élément clé pour prendre des décisions impliquant des investissements en faveur de la prévention et de la gestion de la crise ;
que le schéma d'alerte ne fait que reprendre des documents établis et fournis par la concluante (pièces 16 et 17) ;
que la création d'une cellule de crise et sa localisation avaient été identifiées, définies et mises en place par la concluante dès 2009 ( pièces 8 et 9) ;
que la société SAS C n'a fait que reprendre les activités et les priorités qui lui avaient été communiquées ; que l'absence de description du lien entre les activités internes de l'entreprise et le service à fournir à ses clients rend impossible la détermination des priorités de rétablissement ;
que la liste des mesures à mettre en œuvre n'est accompagnée d'aucune explication, ni hiérarchisation pas plus que des dispositifs adéquats ; que cette absence de motivation interdit une réelle appréciation du risque et la prise de décision associée ;
que la commande n'avait pas pour but de satisfaire à des consignes générales de sécurité mais d'assurer la continuité de ses activités ;
que la société SAS C ne rapporte pas la preuve d'un travail de qualité ;
qu'il y a lieu de faire application de l'article 1039 du Code civil ;
que l'attitude de la défenderesse lui a causé un préjudice ;
conclut :
à ce que la pièce adverse n° 93 soit écartée des débats :
à l'absence d'exécution du contrat dans les règles de l'art ;
à la résolution du contrat ;
à la condamnation de la société SAS C à lui rembourser la somme de 18.000 € HT soit 21.528 € TTC sous astreinte de 180 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;
à l'exécution provisoire ;
à l'allocation de la somme de 8.000 € à titre de dommages et intérêts ;
La société SAS C ,
expose
- que l'objet de son activité est d'assurer la continuité des entreprises en garantissant la sécurité des personnes et l'intégrité des biens, en maîtrisant l'évolution des infrastructures informatiques et en gérant les risques environnementaux et sociétaux ;
- qu'elle a été contactée dans ce cadre par la société SAM O ;
fait valoir :
que la rupture unilatérale d'un contrat en cours d'exécution suppose l'existence de manquements graves du co-contractant ; qu'elle n'a commis aucun manquement mais qu'elle a au contraire parfaitement exécuté l'ensemble des prestations prévues conformément aux stipulations contractuelles ;
que la mise en cause de son niveau d'expertise est infondée alors qu'elle a déjà réalisé de telles missions pour des entreprises ayant des activités identiques ou autrement plus complexes ;
que les prestations prévues au titre de la première phase «initialisation du projet» ont été réalisées et que les livrables correspondant ont été fournis et validés ;
qu'il en va de même pour la deuxième phase « analyse des risques et besoins de continuité » sans qu'aucune remarque d'insatisfaction n'ait été faite ;
que la troisième phase « élaboration du plan de continuité d'activité et du plan de continuité informatique » était planifiée en mai et juin 2011 ;
que ce n'est qu'au mois de juin 2011 que la société demanderesse a fait part de son prétendu mécontentement ;
que de toute évidence ce sont des considérations d'ordre interne à la société SAM O qui l'ont conduite du jour au lendemain à changer d'attitude ;
que les reproches qui lui sont faits par leur caractère général et abstrait sont vides de sens ;
qu'elle a suivi la méthodologie conforme à la norme PCA en vigueur depuis décembre 2006 ;
que le caractère élaboré et pragmatique des résultats comme la plus-value apportée résultent de l'ensemble des livrables fournis ; que la société SAM O dispose aujourd'hui d'un PCA correspondant à la norme BS 25999, ce qui n'était pas le cas auparavant ; que la cellule de crise existante était embryonnaire et non opérationnelle au regard des risques identifiés par la concluante ;
que les comptes-rendus des entretiens ont été soumis - comme cela était prévu - pour correction et validation ;
que les scénarii des crises majeures ont été sélectionnés suivant des critères précis et donnés ;
que Monsieur H. dans le mail du 7 juin 2011 a voulu privilégier une démarche diplomatique et collaborative plutôt que de créer une polémique et qu'il ne reconnaît pas l'existence de manquements ;
que si elle a été confrontée à des dysfonctionnements internes de la société SAM O, cela ne l'a pas empêché de poursuivre sa mission ;
que les documents présentés le 20 mai 2011 au comité consultatif de la demanderesse constituaient des intermédiaires susceptibles de modifications puisque sa mission n'était pas terminée ; que si la société SAM O avait réellement eu des critiques à formuler sur les livrables de tels changements auraient pu être effectués ;
que le coût de la prestation était fixé à 60.000 € HT soit 71.760 € TTC outre les frais de mission ;
qu'il lui reste dû au titre des honoraires impayés, la somme de 50.232 € (43.056 € + 7.176 €) et celle de 6.482,85 € au titre des frais de mission ;
que la rupture du contrat est manifestement abusive et préjudiciable ;
qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles ;
que l'urgence et l'absence de paiement justifient le prononcé de l'exécution provisoire au regard de l'impact négatif sur la trésorerie que cela implique ;
conclut
- à la condamnation de la société SAM O à lui payer les sommes de :
50.232 €
6.482,85 €
avec intérêts au taux légal à compter du 4 août 2011 et capitalisation à compter de cette date ;
5.000 € en réparation de son préjudice moral ;
10.000 € de dommages et intérêts en raison des frais irrépétibles ;
- au débouté de la société SAM O ;
- à l'exécution provisoire du jugement à intervenir.
SUR QUOI LE TRIBUNAL,
Sur la pièce n° 93 :
Cette pièce produite par la société défenderesse a bien été traduite en français ; il n'y a dès lors pas lieu de l'écarter des débats.
Sur le fond :
La société SAS C créée en 2002 est une société de conseil en management des risques et gestion des infrastructures informatiques. L'objet de son activité est d'assurer la continuité des entreprises :
- en garantissant la sécurité des personnes et l'intégrité des biens ;
- en maîtrisant l'évolution des infrastructures informatiques ;
- en gérant les risques environnementaux et sociétaux.
Elle a pour mission d'aider un entreprise à identifier les risques et mettre en œuvre des plans d'action pour les réduire.
Elle a été contactée au cours de l'année 2010 par la société SAM O pour élaborer un plan de continuité d'assistance, ce projet a été abandonné pour des raisons financières à la fin de l'année 2010.
Le 18 février 2011, à la demande de la société SAM O, la société SAS C a élaboré « un complément proposition d'assistance pour l'élaboration du PCA de la SAM O ».
L'objectif visé est « d'identifier les impacts potentiels qui menacent la SAM O et de la doter des capacités de réponses efficaces à des sinistres en sauvegardant ses activités vitales et critiques, sa réputation et les intérêts de ses clients et partenaires » (pièce n° 1).
Le projet devait se dérouler en trois phases :
initialisation de la mission,
analyse des risques et des besoins en continuité (BIA),
élaboration du Plan de Continuation d'activité (PCA).
La méthode suivie devait être conforme à la norme BSI 25999 - 1 et 2.
Cette norme est produite au dossier par la défenderesse et il n'est pas soutenu qu'elle n'aurait pas été respectée par elle, la société SAM O reconnaissant au contraire son application reprochant une analyse seulement générale.
La mission comprenait trois phases qui seront successivement analysées.
La phase intitulée « Initialisation de la mission » a bien été remplie alors que la société SAS C a émis une note de lancement le 18 mars 2011 (pièce n° 35 de la défenderesse intitulée V1.4 - 23.03.2011).
Il s'agit d'un document détaillé de 22 pages sur les objectifs, les acteurs de la mission, la méthodologie, l'ensemble ayant été établi pour les besoins spécifiques de la SAM O et non dans le cadre d'une grille qui pourrait être commune à tous les co-contractants de la SAS C .
À ce document est annexé le guide d'entretien avec le questionnaire de recueil des besoins utilisateurs de 8 pages et une page complémentaire pour les commentaires et le complément d'information qui pourrait être jugé utile.
Ce guide qui a été communiqué à la société SAM O dès le début de la mission, n'a appelé aucun commentaire de sa part quant à sa pertinence.
Il lui était facile s'il lui semblait insuffisant de le faire savoir à sa co-contractante afin qu'elle l'améliore.
La réunion de lancement du projet s'est tenue le 4 avril 2011 (pièce n° 36 - SAS C ), dont la teneur a été reprise dans un document de 21 pages comportant :
- les définitions et les objectifs,
- l'organisation du projet avec un planning précis se déroulant de la semaine 14 à la semaine 25 (soit la dernière semaine du mois de juin incluse).
Ce document contient en page 9 la liste des personnes destinataires des questionnaires.
Les actes de malveillance - contrairement à ce que soutient la demanderesse - figurent bien dans le « répertoire » de la catégorie des risques.
La mission de la phase 1 a donc été remplie par la société SAS C sans aucun manquement fautif.
La phase deux s'intitule « Analyse des risques et des besoins en continuité - BIA ».
Elle devait se dérouler sur les semaines 16 à 20, la dernière semaine du mois de mai (n° 21) était prévue en CoPil avec ComEX.
C'est durant cette période que se sont déroulés, ainsi qu'il l'était contractuellement prévu, les entretiens.
La société SAS C a établi la liste des entretiens avec la date et le temps prévu, leur validation devant être réalisée pour le 11 mai 2011.
Cette société a effectivement élaboré les questionnaires (pièces n° 39 à 61) qu'elle a adressés aux personnes dont la compétence avait été retenue ; leur rédaction n'est pas faite en termes généraux mais diffère selon les différentes activités de la société SAM O, ce qui démontre qu'il a été procédé antérieurement à leur envoi à l'analyse des besoins spécifiques de celle-ci (20 services ou directions différents).
Il apparaît de la pièce n° 38 que leur retour - à l'exception d'une personne - a été effectué avec leur validation quoique avec un retard pour certaines des personnes entendues allant du 12 mai au 23 mai alors que le 11 mai avait été prévu.
La société SAM O ne peut avancer comme preuve d'une faute commise par la SAS C , le fait que certains des entretiens ont été corrigés lors de leur relecture par les personnes concernées alors que les documents contractuels le prévoyaient expressément.
Le document 35 en page 8 au titre de la phase 2 de collecte d'informations stipule au paragraphe « Remarques » : « les notes d'interview, une fois recueillies et corrigées seront remises à leur relecture et approbation avant toute exploitation ».
Il ne résulte pas des documents produits que les modifications apportées aient été substantielles - ce qui aurait jeté un doute sur la qualité du travail - et la preuve contraire résulte des documents produits par la défenderesse et de la validation des entretiens.
À la suite de ces entretiens, la société SAS C a, au mois de mai 2011 (sans que la date précise ne soit donnée) dressé un tableau récapitulatif des différentes activités et des différents lieux où elles s'opèrent géographiquement avec la localisation des équipes, le processus ou les activités critiques, le temps d'arrêt maximal supportable et la période critique (pièce n° 63).
Elle a, en pièce n° 64, dressé un tableau pour les différentes directions avec l'indication des activités critiques et la reprise du temps d'arrêt supportable.
Elle a par ailleurs, en pièces n° 65 à 71, dressé des tableaux de risques en détaillant pour chacun de ces documents :
BIA - arrêt des activités
BIA - perte de la zone J
BIA - perte Tête de Réseau TV
BIA - perte de la Ruche
BIA - arrêt Billing
BIA - perte globale Courant sur la Principauté.
La société SAM O ne peut donc pas soutenir que la société SAS C se serait contentée d'une analyse générale (laquelle serait une reprise de celle faite pour d'autres entreprises clientes) alors que les travaux portent à la fois sur les différentes activités, leur siège géographique, l'analyse des activités concernées en cas de crise, les périodes critiques spécifiques et le niveau global de l'impact de l'arrêt d'activité de l'entreprise concernée.
Elle a, en pièce n° 72, dressé un « tableau des risques majeurs et de leur conséquence » dans tous les cas de perte retenus avec les conséquences matérielles et techniques, les principales conséquences sur les services et le délai minimum pour rétablir un mode dégradé.
Il ne s'agit pas dans ce cas non plus, d'une analyse générale mais spécifique et rentrant dans l'acception du terme « sur mesure » requis par la SAM O.
Le 20 mai 2011 (conformément au planning prévu), le projet a été présenté à ComEX (à cette date 70 % des comptes-rendus d'entretiens avaient été validés ainsi qu'une partie des activités critiques).
Il sera observé que les risques couverts dans le PCA sont rappelés dans ce document avec la nécessaire mise en place de plans de continuation d'activités spécifiques sur des risques clairement énumérés, qui étaient ceux figurant déjà sur des documents antérieurs à savoir :
perte de la zone J
perte de la Costa,
perte de tête Réseau TV
perte de la Ruche
arrêt du Billing
panne générale d'électricité.
Le critère de sélection de ces risques majeurs y est expliqué.
La société SAM O ne démontre pas avoir fait la moindre observation à ce stade de la mission.
La société SAS C a bien procédé à l'analyse des risques et des besoins en continuité.
La phase 3 est l'élaboration du plan de continuation d'activité ; elle devait se dérouler durant tout le mois de juin.
Le 1er juin 2011 a été élaboré un document « validation activités critiques » après validation ComEX, se référant à une liste de « 89 activités représentant l'exhaustivité de l'activité MONACO board » avec la somme des activités et des temps d'arrêt supportables au maximum.
Ce document énumère les 3 catégories d'activité ne pouvant supporter une interruption supérieure à 4 heures et les activités non critiques, avec une demande de validation.
Il n'est pas justifié de la réponse apportée à cette demande par la société SAM O.
La restitution finale était programmée pour le 15 juin 2011.
Le 3 juin 2011, le représentant de la SAM O a fait savoir au représentant de la société SAS C « le fort mécontentement » de l'équipe « sur le déroulement du projet BCM pour la SAM O. Les BIA - Business Import Analysis fournissent un rendu des informations recueillies pendant les entretiens … d'une façon pauvre et sans valeur ajoutée ».
Il demande une « grille d'interprétation complète et structurée » de l'entreprise « d'un point de vue continuité d'activités » ……. et « les priorités et les besoins qui en découlent ».
En réponse à ce courrier, Monsieur HA. a précisé que les documents fournis étaient intermédiaires et sollicité une discussion avec un planning avec des dates et heures précises allant du 9 au 16 juin 2015.
Les critiques faites par la société SAM O sont rédigées en termes généraux alors que depuis le début de la mission aucune observation n'avait été opposée à la SAS C .
Il sera relevé que les comptes-rendus des entretiens ne se limitent pas à une simple reprise et qu'une analyse y est opérée.
La société SAS C a bien listé les activités critiques et celles qui ne le sont pas avec les temps d'arrêt et leurs conséquences.
À la date du 3 juin 2011, la mission n'était pas terminée et entrait dans sa phase finale de telle sorte qu'il ne pouvait pas être demandé à ce stade que le plan soit fourni dans sa version définitive.
La société SAS C a proposé de mieux expliquer le travail fourni et proposé un planning précis sur les livrables, les modifications éventuelles et la restitution ComEX.
La société SAM O ne produit aucun document relatif à la réponse donnée à ce message.
Son conseil, par courrier du 5 juillet 2011, reproche à la société SAS C de n'avoir pas donné de suite aux demandes d'amélioration et de changement des livrables alors qu'au contraire il s'évince des documents produits que la société SAS C a été réactive et a fait une proposition que la société SAM O a laissée sans réponse.
La société SAS C alors que le contrat n'avait pas été résilié, a édité au mois de juin 2011 (sans autre date plus précise) et donc au cours de la 3ème phase, trois documents :
deux intitulés plan général PCA SAM O pièce n° 9 de la demanderesse et 84 de la défenderesse,
au plan de continuité informatique et télécom (pièce n° 85).
Ce fait n'est pas discuté par les parties.
La pièce n° 9 diffère de la pièce n° 84 sans qu'aucune explication ne soit fournie et il peut être conclu de la comparaison de leur étude que la société SAS C a modifié et amélioré son projet en faisant disparaître la mention figurant sur certaines des pages du document 9 « Plan de continuité d'activités de L. SA » - ce qui était difficilement explicable pour une société qui se prévaut d'une expertise dans un domaine très spécifique et peu courant - et en complétant et étoffant certaines des parties du document notamment sur les « scénarios de crise retenues », la gravité du sinistre, la cellule de crise pour répondre à la demande qui avait été faite par Monsieur MA. le 3 juin 2011.
Ce document explique les scénarios de crise retenus (page 10) et en donne les raisons :
- les niveaux de gravité (page 13) avec le schéma d'alerte,
- l'organisation de la crise avec une cellule de crise, sa composition, les responsables, les missions spécifiques,
- l'organisation de continuité et de reprise des activités,
- l'analyse de l'impact de l'arrêt (BIA) suivant les zones concernées,
- la stratégie de reprise et continuité en cours d'indisponibilité des sites clés,
- les scénarios retenus,
étant précisé que ce document n'était pas définitif et pouvait être amélioré.
Il ne s'agit donc pas de préconisations générales, non argumentées et elles ne constituent pas une reprise pure et simple de la cellule de crise qui avait été antérieurement mise en place par la société SAM O ; il n'était pas interdit à la société SAS C de conserver certaines des propositions ou décisions déjà prises si elles étaient adaptées aux besoins de la SAM O.
Ce document est complété par le plan de continuité informatique et télécom.
La pièce n° 85 comprend également la présentation effectuée le 16 juin 2011, qui constitue la synthèse des propositions relatives au projet BCM SAM O dont :
- les scénarios retenus,
- l'expression des besoins notamment en ressources humaines,
- les stratégies de continuité et reprise globale,
- l'organisation d'alerte et de crise,
les recommandations sur les mesures à prendre.
La société SAM O n'a formulé aucune remarque ou critique à l'encontre des documents remis et de la présentation qui a été faite ni le jour même, ni dans les jours qui ont suivi.
Elle a mis fin à la mission qu'elle avait confiée à la défenderesse par le courrier de son conseil du 5 juillet 2011.
Les documents remis à l'issue de la phase 2 comprennent bien un chiffrage de l'impact sur les activités et le document contractuel ne prévoit pas explicitement de chiffrage en terme de coût financier ; si la SAM O entendait qu'il y soit procédé, il lui suffisait de le demander ce qu'elle n'a pas fait.
Sur le document intitulé « Rapport Flash - 30 juin 2011 » remis par la société SAS C pour le décompte de l'activité, figure la liste des livrables attendus et fournis et notamment au cours de la dernière phase avec la mention à modifier sauf pour la stratégie globale de reprise qui est à valider.
La rédaction du rapport PCA global et du rapport PCA SI & Telecom est prévu en semaine 23 (soit la 2ème semaine du mois de juin) et le déplacement à Monaco le 16 juin pour la présentation est bien indiqué.
Il résulte de la page 4 de cette pièce que des modifications avaient été demandées, cette analyse se déduit de la lecture des tâches restantes sur certains points.
Il n'est pas démontré que les aménagements sollicités aient été substantiels et de nature à établir que la société SAS C avait manqué à ses obligations contractuelles essentielles.
Entre la date d'envoi du message du 3 juin 2011 et du courrier du 5 juillet 2011, la SAM O n'a adressé à la société SAS C aucune lettre ou mail mettant en cause le travail ou les explications fournies, ni critique argumentée.
La société défenderesse n'a pas failli à ses obligations contractuelles et la société SAM O n'est donc pas bien fondée à se prévaloir des dispositions de l'article 1039 du Code civil.
Elle sera déboutée de sa demande de résolution du contrat et de restitution des sommes versées.
Sur la demande reconventionnelle :
Le contrat avait été conclu pour un montant de 60.000 € HT - 71.760 € TTC.
La société SAM O a payé la somme de 18.000 € HT - 21.528 € TTC (facture du 31 mars 2011).
La société SAS C justifie avoir effectué au total 90 % de son travail, soit la somme complémentaire de 36.000 € HT - 43.056 € TTC (60 %) laquelle n'a pas été réglée.
Elle n'a pas effectué les 10 % restant du fait de la rupture du contrat dont elle ne peut demander le paiement au titre d'un travail effectué ; elle ne base pas sa demande sur un autre fondement et elle en sera déboutée.
La société SAM O reconnaît dans son assignation que les frais de déplacement seraient remboursés en sus du montant forfaitaire de la consultation.
Il est justifié à ce titre, la somme de 6.422,85 €.
Les sommes allouées produiront intérêts au taux légal à compter de l'écoulement du délai de 15 jours accordé par la lettre du 4 août 2011, soit le 20 août 2011, avec capitalisation des intérêts échus en application de l'article 1009 du Code civil.
Sur les demandes de dommages et intérêts :
La société SAM O qui succombe sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
La procédure engagée n'est pas de nature à causer un préjudice moral à la société SAS C .
Le droit monégasque ne connaît pas la notion de frais irrépétibles.
La société demanderesse n'a fait qu'user de son droit à agir en justice sans qu'un abus soit caractérisé.
Sur la demande d'exécution provisoire :
Les conditions de l'article 202 du Code de procédure civile ne sont pas remplies, l'urgence n'est pas caractérisée et la demande présentée sera rejetée.
Sur les dépens :
Les dépens seront mis à la charge de la société SAM O en application de l'article 231 du Code de procédure civile.
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL,
Statuant publiquement, par jugement contradictoire, et en premier ressort,
Déboute la société SAM O de sa demande relative à la pièce n° 93 produite par la société SAS C ;
Déboute la société SAM O de sa demande de résolution du contrat conclu avec la société SAS C ;
Déboute la société SAM O de sa demande de remboursement de sommes et de dommages et intérêts ;
Condamne la société SAM O à payer à la société SAS C les sommes de 43.056 € TTC et 6.422,85 € au titre des frais avec intérêts au taux légal à compter du 20 août 2011 et capitalisation des intérêts échus en application de l'article 1009 du Code civil ;
Déboute la société SAS C du surplus de ses demandes ;
Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;
Met les dépens à la charge de la société SAM O dont distraction au profit de Maître Yann LAJOUX, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.
Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le greffier en chef, au vu du tarif applicable ;
Composition🔗
Ainsi jugé par Madame Michèle HUMBERT, Premier Juge chargé des fonctions de Vice-Président, Madame Stéphanie VIKSTRÖM, Premier Juge, Madame Patricia HOARAU, Juge, qui en ont délibéré conformément à la loi assistées, lors des débats seulement, de Madame Antoinette FLECHE, Greffier ;
Lecture du dispositif de la présente décision a été donnée à l'audience du 30 JANVIER 2014, dont la date avait été annoncée lors de la clôture des débats, par Madame Michèle HUMBERT, Premier Juge chargé des fonctions de Vice-Président, assistée de Madame Isabelle TAILLEPIED, Greffier, en présence de Madame Aline BROUSSE, Magistrat référendaire faisant fonction de Substitut du Procureur Général, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, et ce en application des dispositions des articles 15 et 58 de la loi n° 1.398 du 18 juin 2013 relative à l'administration et à l'organisation judiciaires.