Tribunal de première instance, 20 octobre 2011, E. C. c/ Crédit Foncier de Monaco

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Abstract🔗

Banque

Responsabilité (non) : respect des obligations d'information et de conseil du client profane - aléa des risques de perte financière supporté par le client qui gérait seul ses avoirs en l'absence de contrat de gestion

Résumé🔗

Les obligations du banquier vis-à-vis de son client sont des obligations de moyens et non de résultat en matière de compte de portefeuille titres dans la mesure où ce type d'investissement présente forcément un aléa dont la banque ne saurait être tenue à garantie totale ; ces obligations varient suivant que la banque se voit ou non confier un mandat de gestion par le client et, dans l'affirmative, suivant le type de mandat conféré ;

Même en l'absence de mandat de gestion, la banque demeure tenue d'une obligation générale d'information et de conseil envers ses clients sauf à prouver l'excellente connaissance des milieux financiers de ceux-ci ; le professionnel ne saurait s'affranchir de ses obligations par des clauses contractuelles figurant dans ses conditions générales de tenues de compte ;

Si E.C. disposait depuis le 19 août 2002 d'un portefeuille dans un autre établissement bancaire dénommée BSI, il n'est pas établi qu'elle disposait d'une connaissance approfondie des milieux financiers et marchés boursiers de nature à exonérer la banque de ses propres obligations ;

Cependant elle a choisi de gérer elle-même son portefeuille et de ne pas en déléguer la gestion à un professionnel de la banque, en sorte qu'elle devait assumer les risques liés à son éventuelle inexpérience malgré les informations et conseils que la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO justifie lui avoir délivrés ; en effet, cette banque démontre qu'elle a fourni à sa cliente une documentation complète contenant une information loyale et non mensongère sur les risques encourus sur les marchés financiers et les différents titres dans lesquels E.C. envisageait d'investir ;

E.C. allègue, sans en rapporter la preuve, qu'elle a signé des ordres en blanc afin de permettre à des conseillers de les remplir du fait de sa résidence à l'étranger ;

Si la demanderesse se prévaut d'ordres d'achat et de vente passés à son insu dans la période courant du 23 août 2007 au 18 novembre 2009, les éventuelles pertes dont elle se plaint ont été enregistrées sur des titres acquis antérieurement à août 2007, soit à une période durant laquelle elle a été régulièrement informée de la teneur de ses avoirs lors de ses visites à la banque où elle a pu prendre connaissance de la correspondance qu'elle avait souhaité être laissée en « banque restante » ;

Elle ne conteste pas avoir été informée avant cette période des opérations réalisées sur son compte et n'a pas remis en cause avant le dernier trimestre 2008 le contenu de son portefeuille et les opérations réalisées sur ses instructions ;

Son mécontentement est né lors de la crise financière qui a affecté l'ensemble des places boursières avec une acuité sans précédent depuis la crise économique de 1929 ; qu'au cours de cette période troublée, il est incontestable que les marchés financiers ont enregistré de lourdes pertes et qu'il en a été de même des investissements effectués dans la gestion dite alternative dont les produits détenus par E.C. sont majoritairement à l'origine du litige même si le but premier de ce type d'investissement est d'être déconnecté des marchés ;

L'analyse évolutive de son portefeuille depuis l'origine, après ajout des sommes investies en cours de tenue du compte et après déduction des montants retirés en espèces et de la valeur des titres transférés ou restant inscrits en compte et ce, sans qu'il puisse être fait grief au CRÉDIT FONCIER DE MONACO de la gestion d'un titre issu d'un autre établissement dont la valeur à l'entrée en portefeuille au CRÉDIT FONCIER DE MONACO n'est pas établie et qui a été vendu sur instructions expresses de la cliente laquelle ne démontre pas avoir donné auparavant instruction pour ce faire, ne met pas en évidence de perte du capital d'E.C. malgré les aléas de l'économie au cours de la période d'ouverture du compte titres et fait au contraire apparaître, ainsi que le démontre la banque, l'existence d'une plus-value ;

Ainsi, E.C. qui a toujours géré elle-même ses avoirs ne saurait faire grief à la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO d'avoir manqué à ses obligations de conseil et d'information et d'être à l'origine d'un quelconque préjudice subi de ce fait ; ainsi, la résistance opposée par la banque aux demandes d'indemnisation de sa cliente était justifiée ;

E.C. sera en conséquence déboutée de sa demande en paiement des sommes de 49 097,83 euros au titre du préjudice matériel et de 50 000 euros au titre du préjudice moral et pour résistance abusive et injustifiée.


Motifs🔗

TRIBUNAL

DE PREMIÈRE INSTANCE

R.

JUGEMENT DU 20 OCTOBRE 2011

En la cause de :

Madame E. C., de nationalité italienne, demeurant X (Italie)

DEMANDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Yann LAJOUX, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur,

d'une part ;

Contre :

La société anonyme monégasque CREDIT FONCIER DE MONACO, dont le siège social se trouve 11 boulevard Albert Ier à MONACO, prise en la personne de son président du conseil d'administration en exercice, demeurant en cette qualité audit siège,

DÉFENDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur,

d'autre part ;

LE TRIBUNAL,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 23 septembre 2009, enregistré (n° 2010/000101) ;

Vu les conclusions de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de la société CREDIT FONCIER DE MONACO, en dates des 25 mars 2010, 9 décembre 2010, 6 avril 2011 et 9 juin 2011 ;

Vu les conclusions de Maître Yann LAJOUX, avocat-défenseur, au nom d E. C., en dates des 23 juin 2010 et 12 janvier 2011 ;

Ouï Maître Yann LAJOUX, avocat-défenseur, pour E. C., en ses plaidoiries et conclusions ;

Ouï Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, pour la société CREDIT FONCIER DE MONACO, en ses plaidoiries et conclusions ;

Ouï le ministère public ;

CONSIDÉRANT LES FAITS SUIVANTS :

Les faits, la procédure et les prétentions des parties.

Par exploit du 23 septembre 2009, E.C. a fait assigner pardevant ce Tribunal la société anonyme monégasque CRÉDIT FONCIER DE MONACO aux fins de voir :

– déclarer recevable et justifiée sa demande,

– dire et juger qu'au vu des négligences constatées, la responsabilité de la société CREDIT FONCIER DE MONACO est manifestement engagée, et ce en raison de son obligation d'information et de conseil,

– condamner en conséquence la société CREDIT FONCIER DE MONACO à lui payer la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices moral et financier,

– condamner la société CREDIT FONCIER DE MONACO à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts complémentaires pour résistance manifestement abusive et injustifiée ;

À l'appui de ses demandes, E.C. expose que :

– elle a ouvert en 2002 un compte n° 0108105 dans les livres de l'agence de Fontvieille du CREDIT FONCIER DE MONACO,

– sur les conseils de la banque, elle a procédé à différentes opérations financières et a subi des pertes importantes à la suite d'opérations boursières effectuées par la banque sans aucun ordre de sa part et en l'absence de mandat de gestion,

– elle a signé plusieurs ordres en blanc sur les conseils de la banque afin de « faciliter administrativement » la passation des ordres de bourse,

– ses pertes se sont élevées à plus de 50 000 euros du fait de la gestion catastrophique du CRÉDIT FONCIER DE MONACO,

– à titre d'exemple, la banque a acquis le 14 mai 2008 sans aucun ordre de sa cliente des titres GW WEEKLY pour un montant de 99 470 euros en complétant un ordre signé en blanc, ces titres ayant été revendus et rachetés le même jour,

– après qu'elle ait manifesté son mécontentement, et sollicité la revente de ces titres, la banque lui a rétrocédé les 700 euros de commission mais conservé les titres dans son portefeuille,

– lesdits titres n'avaient plus le 31 décembre 2008 qu'une valeur de 85 473 euros générant ainsi une perte de 14 000 euros en 7 mois,

– elle avait également sollicité la revente de certains titres en mai 2008 dont ceux CFM ÉQUILIBRE afin de limiter son exposition aux risques mais la banque n'avait procédé à leur vente que plusieurs mois plus tard après la chute du titre,

– selon les rapports de gestion, son portefeuille était évalué à 246 763,98 euros en août 2007 et à 193 826,67 euros au 2 janvier 2009, son patrimoine ayant diminué de manière injustifiée depuis décembre 2007 suite à des opérations incompréhensibles et risquées, cette baisse s'était accentuée au second semestre 2008 et la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO avait été à l'encontre de ses ordres et avait réalisé des opérations qu'elle n'avait pas sollicitées,

– elle est de nationalité italienne, ne parle pas français et est âgée, en sorte qu'elle ne pouvait appréhender les conséquences des investissements réalisés, et ce, alors qu'elle ne dispose d'aucune compétence en matière de marchés financiers et n'a pas été informée du caractère aléatoire des opérations et de l'étendue des risques pris,

– si elle avait été informée et avait bénéficié d'un délai de réflexion, elle n'aurait pas accepté une telle prise de risque,

– la banque n'a pas veillé à ce qu'elle ait connaissance des risques et devait se renseigner sur sa situation financière et son expérience en matière d'investissement, ce qui n'a pas été le cas,

– la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO, débitrice d'une obligation d'information incluant renseignements et mise en garde et d'une obligation de conseil en fonction de l'inexpérience de sa cliente qui était profane ne prouve pas qu'elle s'est acquittée de son devoir,

– la jurisprudence impose au banquier de mettre en garde son client inexpérimenté contre la spéculation boursière, et dans une affaire similaire, les juridictions monégasques ont admis une faute de la banque résultant du défaut de délivrance de l'obligation de conseil et d'information,

– elle a, par courrier recommandé avec accusé de réception du 13 juillet 2009, sollicité de la banque divers documents et n'en a reçu qu'une partie par courrier du 3 août 2009 dans lequel la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO indiquait que la cliente avait eu la maîtrise des choix de ses investissements tout en ne faisant aucune allusion aux ordres signés en blanc, malgré plusieurs relances, elle n'a pas obtenu la totalité des documents demandés,

– la banque n'a pas fait droit à sa demande de dédommagement puisque la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO estime que sa responsabilité n'est pas engagée,

– en l'absence de mandat, la banque était censée gérer le portefeuille de manière prudente alors qu'elle a profité de son âge, de sa nationalité étrangère, de son éloignement et de son inexpérience ;

Par conclusions du 25 mars 2010, la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO demande au Tribunal de :

– constater qu'E.C. ne peut faire valoir aucun préjudice,

– qu'en conséquence, son action est irrecevable faute d'intérêt à agir,

– subsidiairement, la débouter de l'ensemble de ses demandes,

– en toute hypothèse, condamner E.C. à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et vexatoire ;

Au soutien de ses demandes, la banque défenderesse fait valoir que :

– E.C. a ouvert un compte le 19 août 2002 en demandant que l'ensemble des informations relatives audit compte soient conservées en « banque restante » et s'est réservée la possibilité de transmettre ses ordres par tous moyens en s'abstenant de cocher la case de refus de transmission par un moyen autre que par un écrit original,

– cette cliente a reconnu avoir reçu un exemplaire des conditions générales et les a lues et approuvées,

– le 19 juillet 2004, E.C. a reconnu avoir pris connaissance de la note d'information du CRÉDIT FONCIER DE MONACO sur les risques généraux d'investissements dans les produits financiers,

– le 30 juillet 2004, elle a consenti procuration à M.C.,

– la banque a régulièrement édité, en langue italienne, les documents d'information relatifs à l'évolution des avoirs de sa cliente à savoir situations de portefeuille, relevés de comptes en dollars et en euros, qui s'ajoutaient aux rapports de gestion également rédigés en italien qui ont été régulièrement remis à E.C. lors de ses visites à la banque,

– après avoir passé différents ordres pendant plusieurs années, E.C. a, le 21 novembre 2008, accusé la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO d'avoir procédé à son insu à des opérations ayant généré des pertes et sollicité diverses informations,

– la banque a apporté les « éclaircissements » sur la situation déjà connue de sa cliente et un échange a commencé entre la banque et les conseils successifs d'E.C.,

– après plusieurs réponses, la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO a expliqué le 3 août 2009 pour la énième fois les raisons pour lesquelles elle a contesté avoir engagé sa responsabilité à l'occasion de la tenue du compte et des transmissions d'ordres et a opposé un fin de non-recevoir à la demande de dédommagement présentée par E.C.,

– E.C. n'a subi aucun préjudice et aucun mandat de gestion n'a jamais été confié à la banque,

– la banque défenderesse s'étonne de ce qu'E.C. sollicite la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice tant moral que financier sans formuler de prétention chiffrée au titre du préjudice financier, ce qui dénote le peu de sérieux de la demande,

– pour constituer son portefeuille, E.C. a injecté en 6 ans la somme totale de 182 395 euros :

  • 51 750 euros le 19 août 2002

  • 51 645 euros le 23 juin 2003

  • 25 000 euros le 19 juillet 2004

  • 20 000 euros le 19 août 2005

  • 15 000 euros le 2 janvier 2007

  • 9 000 euros le 30 avril 2007

  • 10 000 euros le 13 août 2007,

– E.C. a géré son compte en achetant des titres et en utilisant le produit de leur revente pour investir sur d'autres produits, au besoin, en rajoutant des liquidités,

– E.C. a également opéré des retraits en espèces :

  • 1 000 euros le 22 août 2005

  • 12 000 euros le 29 mai 2006

  • 1 000 euros le 23 août 2007

  • 2 000 euros le 19 août 2009,

– ces retraits impliquaient qu'elle connaissait exactement ses avoirs,

– suite à la vente progressive de ses avoirs au cours de l'année 2009, E.C. a opéré le 25 novembre 2009 un retrait de 149 635,84 euros,

– au 31 décembre 2009, le compte courant en dollars présentait un solde créditeur de 26 886,18 dollars soit 18 790,75 euros et le compte en euros un solde créditeur de 519,52 euros,

– au 31 décembre 2009, le portefeuille d E.C. comprenait les titres :

  • 330 GREEN WAY Ltd C1 B € Liq. valorisés 9 393,10 €

  • 179 GREEN WAY Ltd C1 A $ Liq. valorises 5 337,02 €

  • 5,1011 GREEN WAY ARBITRAGE 2 C1 D. $ Liq valorisés 3 320,85 €

  • 7,3702 GREEN WAY ARBITRAGE C1 B € valorisés 7 284,78 €

  • 7,3702 GREEN WAY ARBITRAGE C1. A $ Liq valorisés 2 917,57 €,

– en conséquence, en réintégrant les sommes retirées par E.C. à la suite de la vente de la plus grande partie des titres, ses avoirs représentaient au 31 décembre 2009 :

  • retraits espèces : 165 635,84 euros

  • solde du compte courant (devises cumulées) : 19 310,27 euros

  • valeur du portefeuille : 28 223,32 euros

soit un total de 213 169,43 euros,

– ce montant étant à comparer avec la somme « misée » par E.C. soit 182 395 euros,

– le capital investi a donc fructifié en pleine débâcle des marchés financiers,

– il est de jurisprudence constante que si un client subi un préjudice, la réparation de celui-ci ne peut être égale à la perte subie, ce qui reviendrait à l'affranchir de tout risque mais que la jurisprudence exprime la perte d'une chance,

– que cette question ne se pose pas en l'espèce dans la mesure où la demanderesse n'a subi aucun préjudice et est toujours cliente de cette banque ce qui démontre sa satisfaction,

– faute de préjudice, l'action d E.C. doit être déclarée irrecevable à défaut d'intérêt à agir,

– subsidiairement, la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO n'a commis aucune faute,

– E.C. se contredit en affirmant que : « sur les conseils de la banque (...) » elle aurait « procédé à diverses opérations financières » et aurait « perdu d'importantes sommes d'argent suite à des opérations boursières effectuées par le CFM » alors qu'elle n'aurait « émis aucun ordre en ce sens, ni même signé de mandat de gestion »,

– elle indique n'avoir jamais confié de mandat de gestion au CRÉDIT FONCIER DE MONACO alors qu'elle mentionne que « la gestion du portefeuille par le CFM s'est révélée catastrophique »,

– E.C. ne fournit aucune liste des ordres qui auraient été passés à son insu,

– en l'absence de mandat de gestion, la banque était uniquement chargée de tenir le compte ouvert dans ses livres, réceptionner et transmettre toute opération sur titres ordonnée par sa cliente,

– en l'absence d'un tel mandat, le client gère personnellement son portefeuille,

– la banquier est tenu d'une obligation d'information qui revêt deux aspects : l'envoi des documents prévus au contrat informant le client des opérations réalisées et de l'évolution de ses avoirs et en l'espèce E.C. a demandé à la banque de conserver ces documents en « banque restante » en sorte qu'il appartenait à celle-ci d'en prendre connaissance régulièrement, et en second lieu d'une obligation générale d'information du client sur les risques excessifs générés par des opérations spéculatives, obligation limitée à la nature spéculative du placement et en fonction de l'expérience du client, qu'en toute hypothèse en remettant à sa cliente notice d'information, document publicitaire, brochure du produit l'informant des risques éventuels, la banque l'a objectivement éclairée en sorte qu'elle a rempli son devoir de conseil, que si la cliente l'estimait utile, il lui appartenait de solliciter des conseils plus approfondis, ce qu'E.C. n'a pas fait,

– la banque cite en exemple plusieurs titres ayant généré des plus-values à la revente,

– s'agissant des produits GREEN WAY qui semblent « focaliser l'attention » d'E.C., la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO insiste sur le fait que la demanderesse a très rapidement orienté ses investissements vers la gestion alternative et a été séduite par les actifs de la gamme GREEN WAY car ils permettaient à des particuliers d'investir dans des fonds de fonds et par le biais d'une diversification assuraient une meilleure protection contre les pertes à la différence des hedge funds purs,

– ces produits sont peu risqués car peu volatils comme le confirment les performances enregistrées depuis leur création,

– le 30 juin 2003, E.C. a placé 10 000 euros dans le fonds GREEN WAY ARBITRAGE EURO après avoir signé un bulletin de souscription revêtu de la mention de sa main « letto et approvato » et a reconnu avoir reçu la notice d'information de ce produit,

– le 5 septembre 2003, la demanderesse a investi 15 000 euros dans le fonds GREEN WAY LIMITED et a rempli de la même façon le bulletin de souscription,

– elle a également signé un ordre d'achat de 13 000 $ dans le fonds GREEN WAY ARBITRAGE $ qui sera exécuté le 27 août 2004,

– les 25 novembre 2008, 23 décembre 2008 et 18 février 2009, E.C. a été informée de l'évolution de la Sicav GREEN WAY ARBITRAGE par des lettres accompagnées d'une notice de l'émetteur en français et en italien,

– elle n'a alors émis aucune protestation ni argué ne pas être informée qu'elle détenait des parts de ces fonds,

– il en a été de même pour la Sicav GREEN WAY LIMITED pour laquelle elle a reçu une note explicative le 23 décembre 2008,

– E.C. a sollicité la vente de ces titres le 16 janvier 2009 sans déplorer leur présence dans son portefeuille,

– elle a donné le 2 mai 2008 un ordre d'achat du produit GREEN WAY WEEKLY et il n'y a pas eu d'achat et revente le même jour mais la correction d'une erreur de code qui a conduit à extourner et repasser l'opération,

– la vente de ce titre demandée par E.C. le 13 mars 2009 a été dénouée le 25 mars 2009 avec une moins-value,

– l'accusation selon laquelle E.C. aurait signé des ordres en blanc est diffamatoire,

– s'agissant du titre EMTN, E.C. a pris connaissance de sa notice d'information avant de décider d'investir 44 000 euros le 9 mai 2008,

– la demanderesse a également sollicité l'achat le 3 janvier 2006 de 3 parts du produit CFM ÉQUILIBRE, cet ordre ayant été passé téléphoniquement et confirmé par écrit, après une vente partielle sollicitée le 16 juin 2008 (1 925,26 euros), E.C. a demandé sa liquidation qui a été faite le 17 mars 2009 pour la somme de 16 138,67 euros, la moins value résultant exclusivement des choix de la cliente,

– le 23 juillet 2004, E.C. a acquis 550 parts d'un OPCVM MORGAN STANLEY US EQUITY GW A $ pour la somme de 11 838,14 euros et n'a émis aucune contestation après avoir pris connaissance le 3 janvier 2006 de l'évaluation de portefeuille,

– E.C. est à l'origine de chacune des opérations et ne peut, compte tenu du fait qu'elle a accepté la transmission des ordres par tous moyens, contester la clause qui prévoit que le défaut de confirmation ne puisse être invoqué par le client pour contester l'ordre exécuté,

– la vente du titre MULTI OPP. BSI FOCUS MODER EUR qui n'avait pas été acquis dans le cadre du portefeuille du CRÉDIT FONCIER DE MONACO a été décidée par E.C. après transfert de ce titre depuis un autre portefeuille ouvert auprès de la BSI et que ce titre démontre que cette cliente était familière des placements financiers et nullement une profane,

– en conséquence, la banque n'a pas manqué à son obligation de conseil,

– E.C. connaissait parfaitement ses avoirs et a annoté plusieurs rapports de gestion après examen lors de ses venues à la banque sans en contester les opérations, en sorte que la banque a parfaitement rempli son devoir d'information,

– la banque n'était pas tenue d'apprécier l'opportunité des placements ou de prodiguer des conseils à E.C. qui était habituée depuis 203 à intervenir sur des produits de gestion alternative et agissait en pleine connaissance de cause,

– elle a accepté les conditions d'ouverture de compte rédigées en italien aux termes desquelles « l'intervention de la Banque dans la transmission des ordres du client n'impliquera aucune appréciation de sa part sur leur opportunité qui relèvera de la responsabilité exclusive du client »,

– la gestion menée par E.C. n'était pas de nature à alerter la banque, cette cliente a privilégié le marché des obligations et fonds communs de placement avant de se lancer en 2003 dans la gestion alternative, la part des produits de gestion alternative avoisinait 30 % entre janvier 2006 et avril 2007 puis à compter du mois d'août 2007, devant les bons résultats, E.C. a opté pour ce type d'investissement à hauteur de 46 % en août 2007, 44 % en mai 2008 pour atteindre 69 % en octobre 2008,

– à l'automne 2008, la crise financière sans précédent qui a frappé les marchés financiers a conduit E.C. à délaisser la gestion alternative et en août 2009, la part de celle-ci était retombée à 17,53 %,

– durant toute cette période, E.C. a maintenu des placements en obligations et fonds communs de placement qui représentaient entre 45 % et 26 % entre janvier 2006 et octobre 2008, optant peu pour la marché d'actions, en sorte que son portefeuille était équilibré et très peu spéculatif sans jamais concerner les pays émergents,

– malgré la crise financière, E.C. n'a pas perdu d'argent,

– la demanderesse n'établit aucun lien entre les manquements prétendus de la banque et son prétendu préjudice,

– son action est abusive et E.C. s'est laissée aller à des accusations particulièrement graves et attentatoires à l'honorabilité du CRÉDIT FONCIER DE MONACO ;

Dans ses écritures du 23 juin 2010, E.C. sollicite le bénéfice de son exploit introductif d'instance et conclut :

– au rejet des demandes de la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO comme inopérantes et sans fondement,

– demande le bâtonnement du paragraphe 3 page 5 des conclusions de la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO en date du 25 mars 2010 s'agissant d'un écrit injurieux et particulièrement outrageant ;

Elle allègue :

– avoir intérêt à agir alors que la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO ose prétendre qu'elle aurait réalisé un gain total de 30 774,43 euros depuis l'ouverture du compte, cette affirmation est infondée, spécieuse et inacceptable et procède d'erreurs de calcul et de date,

– l'ordre communiqué indique la vente le 2 mai 2008 de 500 actions MULTI OPP et 51,436 CFM PRUDENCE et l'achat de 100 GREEN WAY WEEKLY alors que le relevé de compte de l'année 2008 mentionne que la vente ne s'est effectuée que le 6 mai 2008, l'achat des GREEN WAY WEEKLY uniquement le 30 mai et le nom de CFM PRUDENCE changé en PRUDENCE LUX,

– aucune explication n'est donnée concernant le changement de dénomination des titres CFM PRUDENCE et CFM PRUDENCE LUX alors qu'il apparaît sur l'ordre du 3 janvier 2006 que les titres CFM PRUDENCE ont été vendus et remplacés par les titres CFM PRUDENCE LUX et qu'aucune de ces opération n'est mentionnée sur le relevé de compte de l'année 2006,

– la banque a déterminé les pertes et profits en additionnant les sommes injectées desquelles elle a déduit les sommes retirées, ce qui ne prend pas en compte le transfert depuis un autre établissement de 500 titres MULTI OPP BSI FOCUS MODER pour un montant de 50 370 euros, de sorte qu'elle a investi 232 765 euros et non 182 395 euros,

– elle avait donné ordre au CRÉDIT FONCIER DE MONACO de vendre ces titres dès leur transfert et pour des raisons inconnues cet ordre a été annulé et la vente n'a eu lieu qu'un an plus part pour la somme de 46 990 euros soit avec une perte de 3 380 euros,

– en suivant le mode de calcul de la banque, elle aurait subi une perte de 19 595,91 euros et non un gain de 30 774,43 euros,

– elle a procédé à une analyse complète de son portefeuille pour la période du 23 août 2007 au 18 novembre 2009, date à laquelle elle a rapatrié ses fonds en Italie à l'exception des titres GREEN WAY ARBITRAGE qu'elle est contrainte de conserver,

– elle a restreint son analyse à cette période car il s'agit de la période où les pertes ont été les plus importantes et au cours de laquelle la banque s'est « appropriée » son portefeuille,

– début 2009, elle n'a plus laissé la banque gérer seule le portefeuille au moyen des ordres en blanc signés en 2002,

– sa perte s'élève à 25 024 euros et la plupart des actions GREEN WAY, dont elle ne peut disposer du fait d'une procédure de restriction d'achat, subissent d'importantes pertes qu'elle ne peut évaluer avant la fin de la procédure de restriction d'achat,

– les ordres d'achat relatifs à ces titres sont incomplets en ne précisant pas la quantité ni le cours limite et la dénomination des titres GREEN WAY ARBITRAGE et GREEN WAY LIMITED est différente entre les rapports de gestion des 23 août 2007 et 18 novembre 2009, il conviendra donc que la banque s'explique sur ce point,

– la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO a procédé à des achats et ventes d'action en l'absence de tout ordre : achat le 23 juillet 2004 d'actions MORGAN US EQ GRW substituées au cours de l'année 2006 par des actions MSUS EQUITY GRWA USD sans explication, achat d'actions CFM ACTION MULTIGESTION le 6 avril 2005 et vente le 22 mai 2006, de même que pour l'achat et la vente des actions CFM COURT TERM EUR,

– divers ordres vierges non signés par ses soins ont été complétés par la banque elle-même,

– elle a subi un important préjudice financier en sorte que son action est recevable,

– elle est parfaitement fondée à réclamer la condamnation de la banque défenderesse à lui payer la somme totale de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice moral et financier subi,

– les propos de la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO au paragraphe 3 de la page 5 de ses conclusions du 25 mars 2010 sont particulièrement déplacés en ce qu'ils mentionnent « Subsidiairement, son argumentation est dénuée de tout fondement, mais aussi particulièrement outrancière et vexatoire, tant il est vrai que chez des plaideurs de plus en plus nombreux la calomnie et l'outrage remplacent la rigueur d'une démonstration (et pour cause) »,

– les conseillers salariés MM. MARTINO puis SAMAMA du CRÉDIT FONCIER DE MONACO lui ont demandé de signer des ordres en blanc,

– elle avait demandé que les titres constituant son portefeuille soient non risqués et revendables à tout moment compte tenu de son âge élevé et de la nécessité pour elle de disposer de liquidités à tout moment, elle souhaitait investir dans des fonds sûrs permettant d'obtenir des intérêts réguliers,

– jusqu'en 2008, elle a laissé les conseillers de la banque gérer discrétionnairement son portefeuille malgré l'absence de mandat de gestion en toute confiance,

– à partir de 2008, son portefeuille a enregistré des pertes qui se sont accentuées, c'est pourquoi elle a écrit à plusieurs reprises à la banque et a été reçue en rendez-vous, qu'elle a notamment été accompagnée par M. RAVERA,

– contrairement aux dires de la banque, elle n'est pas restée passive et a manifesté son mécontentement,

– ce n'est qu'après le départ de M. SAMAMA que la banque lui a communiqué l'ensemble des correspondances des années 2008 et 2009,

– la banque a commis une faute en ne lui faisant pas signer un contrat pour chaque nouvelle action achetée,

– aucune note d'information sur les différents titres ne lui a été transmise, à charge pour la banque de prouver le contraire,

– la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO n'a pas respecté son obligation d'information et de conseil, préférant procéder à des opérations spéculatives à son insu et n'a pas vendu les titres litigieux lorsque le marché à commencé à décliner,

– à partir de 2009, les ordres ont été passés exclusivement par ses soins,

– à cette période les conseillers M. et S. ont quitté précipitamment leurs fonctions et la banque pourra éclairer le Tribunal sur ce point,

– elle cite plusieurs ordres en blanc remplis avec légèreté, dont certains ne sont revêtus que de son paraphe qui ne figure pas sur le carton de signature,

– la gestion de la banque s'est révélée désastreuse, certaines actions ont été vendues trop tôt alors qu'elles ont progressé par la suite et que les titres GREEN WAY ont rapidement perdu de leur valeur et que des actions en dollars ont été achetées alors que cette monnaie était en difficulté par rapport à l'euro,

– les opérations non sollicitées par ses soins ont engendré d'importants frais bancaires ;

Par conclusions du 9 décembre 2010, la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO reprend les mêmes demandes que celles formulées précédemment ;

La banque défenderesse met en exergue, outre ses moyens tels que développés dans ses écritures précédentes que :

– son analyse de l'évolution du portefeuille d'E.C. est logique dans la mesure où la rentabilité d'un placement s'apprécie à la date à laquelle le client met fin à ses relations avec la banque en comparant les sommes injectées par l'investisseur avec les gains retirés par les opérations sur ces sommes ainsi qu'à la valeur des titres éventuellement transférés vers un autre portefeuille dans un autre établissement, les sommes injectées s'entendent des liquidités et non des titres provenant d'un autre portefeuille car un tel titre n'a pas été acquis avec les liquidités considérées et sur le portefeuille ouvert dans ses livres,

– E.C. ne peut prétendre intégrer le titre MULTI OPP BSI FOCUS MODER (produit de gestion alternative donc spéculatif) aux liquidités destinées à faire fructifier son portefeuille et ne justifie pas avoir donné instruction de vendre ces titres dès leur transfert alors qu'existe un ordre de vente signé de la main de la cliente en date du 2 mai 2008,

– à la date où E.C. a sollicité le transfert de son portefeuille vers un autre établissement, les résultats enregistrés étaient positifs,

– la demanderesse forfaitise son préjudice alors qu'un préjudice financier est chiffrable objectivement,

– l'analyse d'E.C., outre qu'elle est dépourvue de valeur probante car nul ne peut se constituer de preuve à soi-même, occulte les liquidités retirées au cours de l'existence du compte,

– la demanderesse retient arbitrairement le début de son analyse au 23 août 2007 alors que le compte fonctionne depuis 2002, la valorisation des différentes Sicav GREEN WAY n'y figure pas et les calculs sont sujets à caution et contiennent des erreurs,

– les dates que la banque fait valoir ne sont pas erronées contrairement à ce que prétend E.C. mais portent deux dates différentes s'agissant de la date de l'opération et de la date de valeur,

– la dénomination des titres MORG. STA US AQ GRW puis MS US EQUITY GRW A n'est pas fluctuante puisque les titres portent le même numéro ISIN, il s'agit donc d'une simple évolution de l'intitulé au sujet duquel la demanderesse n'a jamais demandé d'explication,

– les changements de dénomination des titres GREEN WAY ont été explicités par plusieurs courriers en italien à la suite de décision de leur conseil d'administration,

– compte tenu des moyens de communication modernes, il n'y avait aucune nécessité de faire signer à E.C. des ordres en blanc et que même à supposer que tel aurait été le cas, elle ne pourrait s'en prévaloir car ayant accepté ce mode de fonctionnement et selon l'adage « nemo auditur propriam turpidudinem allegans »,

– en réalité les ordres ont été signés par la cliente lors de ses visites à la banque,

– E.C. reconnaît dans ses écritures qu'avant la période qu'elle vise du 23 août 2007 au 18 novembre 2009, elle décidait des opérations et maîtrisait parfaitement l'évolution de ses placements et en était satisfaite, ce qui implique que la banque aurait décidé de se substituer à sa cliente en pleine crise financière alors que la banque n'aurait jamais accepté de mener de gestion sans mandat,

– les titres CFM ÉQUILIBRE LUX ont été acquis le 9 novembre 2005, ceux MS US EQUITY (MORGAN STANLEY US EQUITY) le 23 juillet 2004 soit bien avant la période alléguée de gestion discrétionnaire par la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO,

– E.C. n'est nullement une profane et disposait d'un portefeuille titre dans un autre établissement ce qui montre une activité boursière diversifiée et le titre provenant du portefeuille ouvert au sein de la BSI ne correspond pas à un type d'investissement pour investisseur non avisé,

– E.C. avait donné procuration à son neveu M.C. qui est avocat à Rome, spécialisé dans le droit commercial, et donc à même de demander des explications à la banque s'il s'estimait lui ou sa tante mal conseillé,

– E.C. était habituée depuis 2003 à intervenir sur des produits de gestion alternative qu'elle a conservés durant plusieurs années démontrant ainsi sa satisfaction,

– le titre CFM PRUDENCE LUX a été acheté le 9 novembre 2005 pour un montant de 51 091,38 euros et revendu le 6 mai 2008 avec une plue value pour 51 535,27 euros,

– le titre MS US EQUITY a été acheté le 23 juillet 2004 et revendu à la demande expresse d'E.C. le 13 mars 2009, que dès lors la perte enregistrée est imputable à celle-ci,

– le titre transféré de la BSI ayant été acquis dans le portefeuille d'un autre établissement aucun défaut de conseil de la banque défenderesse ne saurait être reconnu,

– le 16 août 2007 E.C. a acheté 235 parts du fonds CAAM INTERINV SHORT TERM P pour un montant de 24 703,20 euros, produit pour lequel elle avait déjà opté les 2 février (235 parts) et 2 mai 2007 (84 parts) avant d'en revendre une partie le 4 juin 2007 (144 parts) puis les 4 janvier (1 part), 17 mars (381 parts) et 19 mai 2008 (28 parts), donc ce produit a été acheté avant la période critiquée,

– s'agissant du titre EMTN 100 % 130611, E.C. a pris connaissance de la notice d'information avant de décider d'investir 44 000 euros le 9 mai 2008, la cession de ce titre a été effectuée à l'occasion de la liquidation du portefeuille donc sur instructions de la cliente qui doit assumer la responsabilité de la perte constatée,

– l'achat du titre GREEN WAY WEEKLY a été demandé par ordre écrit signé de la main d'E.C. le 2 mai 2008 et que ce produit fait partie de la gamme des placements GREEN WAY dans laquelle elle avait déjà effectué des placements depuis 2003,

– le compte a fonctionné durant plusieurs années sans qu'il soit allégué une défaillance de la banque,

– les accusations portées par E.C. dans ses conclusions en page 14 sont proprement scandaleuses puisqu'elle argue que la banque aurait spéculé avec ses avoirs, en usant d'ordres en blanc pour chercher à se soustraire à toute action en responsabilité en cas de pertes, cette argumentation étant outrancière et vexatoire, le Tribunal lui reconnaîtra le droit de la souligner en sorte que la demande de bâtonnement d'E.C. est sans objet ;

Dans ses dernières écritures, E.C. modifie ses demandes et sollicite désormais que la juridiction :

– lui alloue le bénéfice de son exploit introductif d'instance et de ses précédentes conclusions,

– rejette l'ensemble des demandes de la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO,

– par conséquent, condamne la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO à lui payer la somme de 49 097,83 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice financier outre celle complémentaire de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral et pour résistance abusive et injustifiée ;

Au soutien de ses demandes, E.C. en sus de ses moyens précédemment développés, expose que :

– aucune loi ne prétend que les banques n'engagent pas leur responsabilité dans la gestion du portefeuille de leurs clients contrairement aux affirmations de la banque défenderesse, qu'il appartiendra donc à cette dernière de verser aux débats des exemples d'application de la jurisprudence selon laquelle la banque ne serait pas tenue à réparation intégrale du préjudice,

– il appartient à la banque de démontrer le fondement de la règle de calcul qu'elle a appliquée pour estimer que son portefeuille avait fructifié,

– son portefeuille a subi une perte totale de 25 024 euros sur la période allant du 23 août 2007 au 18 novembre 2009 à laquelle s'ajoutent les pertes réalisées sur les titres GREEN WAY qui n'avaient pu être vendus jusqu'à ce jour,

– le capital investi dans ces valeurs s'élève à 51 500 euros, au cours de l'année 2009 une partie des titres GREEN WAY a pu être vendue avant qu'ils soient frappés d'une procédure de restriction d'achat pour un montant total de 11 941,22 euros et que récemment la banque a pu procéder à la vente des titres GREEN WAY restant dans son portefeuille pour un montant de 15 484,95 euros, que la perte relative à ces titres s'élève donc à 24 073,83 euros,

– les demandes tendant au remboursement de ladite somme de 24 073,83 euros sont relatives aux erreurs de gestion réalisées par la banque sans aucun accord de sa part, ladite somme s'ajoutant à celle de 25 024 euros,

– ses pertes financières se chiffrent par conséquent à la somme totale de 49 097,83 euros,

– à titre « reconventionnel », elle sollicite la condamnation de la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO à lui payer la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de la résistance abusive et manifestement injustifiée de la défenderesse qui fait preuve de mauvaise foi pour tromper le Tribunal,

– la banque relève une seule erreur dans ses calculs à savoir une différence de 116,26 euros concernant la plus-value des titres CAAM,

– il est surprenant que la banque ne procède qu'à un comparatif global et non titre par titre,

– qu'elle ne forfaitise pas sa demande,

– la banque a privilégié ses propres intérêts pour spéculer d'août 2007 à septembre 2009 avec le portefeuille au moyen d'ordres en blanc en investissant dans tous les produits diffusés par la maison-mère du CRÉDIT FONCIER DE MONACO à savoir le CAAM et qu'il y a des probabilités pour que les conseillers M. et S. aient tenu compte de leurs objectifs commerciaux pour choisir les titres achetés,

– elle n'avait pas la maîtrise pleine et entière de son portefeuille,

– la banque ne peut prétendre qu'elle n'a jamais manifesté son mécontentement, qu'il est surprenant que la défenderesse qualifie son neveu d'expert financier du fait de sa qualité d'avocat alors que ni lui ni elle ne sont des experts de la finance,

– son neveu et elle ont adressé de nombreuses lettres au CRÉDIT FONCIER DE MONACO afin d'obtenir des explications sur la gestion désastreuse du portefeuille et que ce n'est que le 5 août 2009 qu'elle a pu obtenir les documents qui demeuraient en banque restante,

– dans l'intervalle les conseillers qui l'ont reçue lui ont assuré que la situation était normale et que les pertes allaient être compensées par des gains à venir,

– la banque a versé aux débats de nombreux documents qu'elle n'a jamais eus en sa possession comme par exemple le prospectus de la gamme GREEN WAY,

– la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO ne rapporte pas la preuve de ses prétendues qualités d'expertise financière tandis que si elle avait été expérimentée, elle n'aurait pas signé des ordres en blanc mais les auraient remplis précisément et aurait acquis des titres moins risqués de renommée internationale,

– elle a cru en la bonne foi de M. M. qui lui avait dit que seuls des titres sans risque seraient acquis ;

Par écritures en date du 6 avril 2011, la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO entend voir le Tribunal :

– au principal, constater qu'E.C. ne peut faire valoir aucun préjudice,

– en conséquence, déclarer son action irrecevable faute d'intérêt à agir,

– en application du principe de l'immutabilité du litige, au visa de l'article 431 du Code de procédure civile,

– dire et juger que la demande d'E.C. tendant à la voir condamnée à lui payer « la somme de 49 097,83 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice financier, en outre, reconventionnellement (sic) (...) la somme complémentaire de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral et pour résistance manifestement abusive et injustifiée » est irrecevable,

– subsidiairement, prononcer la nullité de l'attestation de M.C. produite par E.C. sous le n° 25 et celle de L.Q. produite sous le n° 35 par la demanderesse comme ne respectant pas les exigences de l'article 324 du Code de procédure civile, les écarter en conséquence des débats,

– débouter E.C. de l'ensemble de ses demandes comme radicalement infondées,

– dans tous les cas, condamner la demanderesse à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et vexatoire ;

La défenderesse maintient son argumentation précédente et y ajoutant indique que :

– elle n'a jamais soutenu que le droit positif conduirait à exonérer les banques de toute responsabilité dans la gestion du portefeuille de leurs clients, et qu'E.C. ne lui a jamais confié la gestion de son portefeuille,

– le banquier est tenu d'une obligation de moyen dans la mesure où il ne saurait garantir un résultat à défaut de maîtrise des marchés financiers, l'éventuelle responsabilité du banquier doit être appréciée au regard des circonstances de temps et de fait et n'est pas retenue pour la seule raison que les opérations auraient préjudicié le client, en spéculant le client accepte les risques,

– E.C. n'a subi aucune perte, les résultats devant s'apprécier sur l'ensemble du portefeuille et non titre par titre,

– la demanderesse nie avoir annulé l'ordre de vente des titres provenant de la BSI alors que la banque n'avait aucun intérêt à en retarder la vente, et le préjudice n'est pas établi à défaut de connaître la valeur à l'entrée dans le portefeuille du CRÉDIT FONCIER DE MONACO,

– l'analyse d'E.C. est sans valeur et occulte les opérations antérieures au 23 août 2007 qui avaient généré des plus-values et ne tient pas compte des retraits en espèces, outre des erreurs de calculs,

– E.C. se prévaut du témoignage de M. Q. produit sous le n° 35, or cette attestation est nulle puisque le témoin ne précise pas sa profession qui se veut justifiée par un entête et n'est pas intégralement rédigée de sa main,

– les calculs de M. Q. que reprend E.C. sont faux puisque la liquidation progressive des titres au cours de l'année 2009 n'a pas rapporté 11 941,22 euros mais 19 461,93 euros et qu'elle n'a pas investi 51 500 euros dans les produits GREEN WAY mais 47 491 euros,

– au cours de l'année 2010, la liquidation des produits GREEN WAY a généré un montant total de 23 071,02 euros et non 15 484,95 euros comme l'affirme la demanderesse,

– E.C. dispose toujours de titres GREEN WAY dont la liquidation est en cours et qui sont valorisés à hauteur de 6 153,99 euros,

– la revente des titres ayant rapporté entre 2009 et 2010 une somme totale de 42 532,95 euros pour 47 491 euros investis, E.C. ne peut affirmer avoir subi une perte totale à ce titre de 24 073,83 euros,

– compte tenu de la valorisation des titres GREEN WAY restant à liquider, une plus-value de 1 195,94 euros devrait être réalisée,

– E.C. a sollicité au début de l'instance un seul et même préjudice dans sa globalité et met en évidence désormais deux préjudices procédant de causes différentes, or, les préjudices nouvellement distingués ne se sont pas révélés depuis l'introduction de l'instance, en sorte que ces demandes sont irrecevables par application du principe de l'immutabilité du litige,

– E.C. a choisi d'investir dans des titres à orientation équilibrée ainsi que le montre le fait qu'elle a au moins conservé son capital durant la crise financière alors qu'à défaut, elle aurait subi de lourdes pertes,

– les titres qu'elle accuse la banque d'avoir acquis à son insu ont été achetés plusieurs mois avant son courrier du 21 novembre 2008, soit entre le 30 juin 2003 et le 10 juin 2008, or elle n'a jamais contesté ces acquisitions pendant plusieurs années et plusieurs mois pour les plus récentes,

– durant la période retenue par la demanderesse, le monde de la finance a connu l'une des périodes les plus chaotiques de son histoire, dès la moitié de l'année 2007 les marchés ont commencé à baisser et après une courte période de reprise la baisse s'est accentuée début 2008, en octobre 2008 l'ensemble des places financières a enregistré de très fortes baisses et l'indice CAC 40 a perdu 22 % de sa valeur, durant cette période aucun établissement financier ne saurait se voir reprocher d'avoir fourni de mauvais conseils,

– M.C. est avocat spécialisé en droit commercial et assisté d'experts-comptables et disposait donc de la possibilité de détecter d'éventuels manquements de la banque,

– l'attestation rédigée par M.C. sous le n° 25 est nulle comme ne répondant pas aux exigences de l'article 324 du Code de procédure civile puisqu'il indique n'avoir aucun lien de parenté avec E.C. et omet de préciser sa profession et que disposant d'une procuration sur le compte, il est directement intéressé au litige ;

Dans ses dernières conclusions additionnelles en date du 9 juin 2011, la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO reprend le bénéfice de ses précédentes écritures et y ajoutant demande au Tribunal de prononcer la nullité des attestations de M.C. produite sous le numéro 25 bis et de L.Q. produite sous le numéro 35 bis comme ne respectant pas les prescriptions de l'article 324 du Code de procédure civile ;

La défenderesse précise que M.C. indique dans cette nouvelle attestation ne pas avoir de lien de parenté ni d'alliance avec E.C. tout en mentionnant être son neveu et qu'il n'a pas d'intérêt au procès alors qu'il dispose d'une procuration sur le compte ; qu'il s'agit d'une attestation de complaisance ; que celle régularisée par L.Q. est également irrégulière dans la mesure où l'écriture des lettres majuscules est sensiblement différente de celle de l'auteur de l'attestation précédente du 10 janvier 2011 (pièce n° 35) alors qu'il est censé s'agir de la même personne, que la profession n'est pas précisée et que cette omission n'est pas anodine puisque L.Q. est rémunéré pour son intervention professionnelle par E.C. et qu'après avoir repris de manière manuscrite ses précédentes affirmations, il ne termine pas son attestation par la reprise de l'article 103 du Code pénal ;

Motifs de la décision,

Sur la recevabilité de l'action d'E.C.,

Attendu que la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO soulève l'irrecevabilité de l'action d'E.C. pour défaut d'intérêt à agir en l'absence de préjudice subi par sa cliente ;

Attendu que cette exception sera rejetée et l'action d'E.C. déclarée recevable, dès lors qu'E.C. qui s'estime victime des agissements de la banque, dans laquelle était ouvert son compte de portefeuille titres, dispose légitimement du droit d'agir contre cet établissement afin de faire vérifier par un Tribunal l'éventuelle responsabilité de la banque dans le préjudice financier qu'elle estime avoir subi ; qu'en tout état de cause, eu égard aux circonstances de la cause et notamment au fait que sont allégués l'abus d'ordres signés en blanc, un défaut d'information et de conseil et une gestion sans mandat, la demanderesse disposait à tout le moins d'un intérêt moral à agir ;

Sur le bâtonnement des conclusions du CRÉDIT FONCIER DE MONACO en date du 25 mars 2010,

Attendu qu'E.C. estime que la paragraphe 3 de la page 5 des conclusions du CRÉDIT FONCIER DE MONACO en date du 25 mars 2010 est manifestement injurieux et particulièrement outrageant ;

Que la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO répond que l'argumentation de la demanderesse est particulièrement outrancière également et vexatoire en sorte que le Tribunal doit lui reconnaître le droit de le faire remarquer et que la demande de bâtonnement est sans objet ;

Que le passage litigieux est ainsi rédigé :

« Subsidiairement, son argumentation est dénuée de tout fondement, mais aussi particulièrement outrancière et vexatoire, tant il est vrai que chez les plaideurs de plus en plus nombreux la calomnie et l'outrance remplacent la rigueur d'une démonstration (et pour cause) » ;

Attendu que si ces termes peuvent apparaître très directs et très critiques de l'argumentation adverse, ils n'excèdent pas les limites des droits de la défense et ne présentent aucun caractère injurieux ou vexatoire envers E.C., ni ne portent atteinte à la nécessaire dignité qui doit présider aux débats judiciaires ; Que de plus, E.C. a également usé de termes peu amènes envers son adversaire ;

Qu'en conséquence, il ne sera pas fait droit à la demande présentée par E.C. tendant à ce bâtonnement ;

Sur la nullité des attestations rédigées par M.C. et L.Q.,

Attendu que la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO sollicite la nullité des attestations établies par M.C. communiquées sous les numéros 25 et 25 bis et par L.Q. sous les numéros 35 et 35 bis, aux motifs qu'elles ne répondent pas aux exigences de l'article 324 du Code de procédure civile ;

Attendu qu'aux termes de l'article 324 du Code de procédure civile :

« L'attestation doit, à peine de nullité :

1° être établie par une personne remplissant les conditions requises pour être entendue comme témoin ;

2° être écrite, datée et signée de la main de son auteur ;

3° mentionner les noms, prénoms, date et lieu de naissance, demeure et profession de son auteur, ainsi que l'existence ou l'absence de lien de parenté, d'alliance, de subordination ou d'intérêt avec les parties ;

4° préciser si son auteur a quelque intérêt au procès ;

5° indiquer qu'elle est établie en vue de sa production en justice et que son auteur sait qu'une fausse attestation l'exposerait aux sanctions prévues par l'article 103 du Code pénal ;

6° être accompagnée de tout document officiel, en original ou en photocopie, justifiant de l'identité de son auteur et comportant sa signature » ;

Attendu, concernant les attestations de M.C. que celui-ci dans son attestation du 22 novembre 2009 (pièce n° 25) et dans celle du 15 mai 2011 (pièce n° 25 bis) mentionne qu'il n'a aucun lien de parenté ou d'alliance avec les parties puisqu'il est le neveu d'E.C. et ne mentionne pas sa profession et le fait qu'il disposait d'une procuration sur le compte litigieux ; que ces divergences et omissions sont contraires aux prescriptions de l'article 324 du Code de procédure civile susvisé ; qu'il convient en conséquence de prononcer la nullité de ces deux attestations et de les écarter des débats ;

Attendu, concernant les attestations de L.Q., que la première datée du 10 janvier 2011 produite sous le n° 35 ne mentionne pas la profession de son auteur et n'est pas entièrement rédigée de sa main ; que la seconde ne mentionne pas de manière manuscrite la profession, mais comporte un entête en langue italienne non traduit faisant état de la profession de l'auteur, que la seconde (pièce n° 35 bis) est entièrement écrite à la main mais comporte une calligraphie très différente de la première ; qu'en revanche, contrairement aux dires de la société défenderesse, elle fait état de la connaissance des sanctions prévues par l'article 103 du Code pénal ;

Que la première attestation doit être déclarée nulle et écartée des débats comme ne mentionnant pas la profession et n'étant pas écrite de la main de son auteur ; que la seconde doit également subir le même sort à défaut de mention manuscrite de la profession de son auteur et de l'indication du lien unissant l'auteur à E.C. et de la raison et des circonstances dans lesquelles L.Q. a été amené à rédiger une telle attestation alors qu'il semble être un professionnel de la comptabilité d'après l'entête rédigé en langue italienne ; que ces deux attestations déclarées nulles seront donc écartées des débats ;

Sur les demandes additionnelles et modificatives présentées par E.C.,

Attendu qu'en cours d'instance, E.C. qui avait sollicité dans son exploit introductif d'instance l'octroi d'une somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice tant moral que financier et 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et injustifiée a, en dernier lieu, requis la condamnation de la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO à lui payer la somme de 49 097,83 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice financier et de celle 50 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral et pour résistance manifestement abusive et injustifiée ;

Que la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO a, au nom de l'application du principe de l'immutabilité du litige, soulevé l'irrecevabilité de ces demandes ;

Attendu que les dernières demandes présentées par E.C. constituent en réalité des demandes additionnelles et modificatives, et non des demandes reconventionnelles comme elle l'indique ; qu'en effet, elles ne constituent pas une défense aux demandes de son adversaire mais sont, pour ce qui concerne les demandes pour préjudice financier et moral, l'objet même du litige ;

Attendu que ces demandes procèdent incontestablement des mêmes causes que celles initialement formulées, à savoir l'indemnisation des préjudices que la demanderesse estime avoir subis du fait des fautes commises par la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO ; qu'elles entrent dans la compétence du Tribunal saisi ;

Attendu que ces demandes apparaissent recevables dans la mesure où elles ne modifient pas l'objet et la cause du litige mais uniquement le montant de celui-ci lequel est susceptible d'évoluer en cours d'instance notamment du fait des communications de pièces intervenues entre les parties et en l'espèce de la poursuite du fonctionnement du compte titres ;

Que la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO sera déboutée de sa fin de non-recevoir sur ce point ;

Sur la responsabilité de la banque CRÉDIT FONCIER DE MONACO et le préjudice subi par E.C.,

Attendu que l'évaluation de la performance d'un portefeuille doit s'effectuer ainsi que l'a relevé le CRÉDIT FONCIER DE MONACO sur toute sa durée et non sur une période limitée tel que l'a effectuée E.C. en limitant son analyse à la période du 23 août 2007 au 18 novembre 2009 ;

Attendu que les obligations du banquier vis-à-vis de son client sont des obligations de moyens et non de résultat en matière de compte de portefeuille titres dans la mesure où ce type d'investissement présente forcément un aléa dont la banque ne saurait être tenue à garantie totale ; que ces obligations varient suivant que la banque se voit ou non confier un mandat de gestion par le client et, dans l'affirmative, suivant le type de mandat conféré ;

Attendu que, même en l'absence de mandat de gestion, la banque demeure tenue d'une obligation générale d'information et de conseil envers ses clients sauf à prouver l'excellente connaissance des milieux financiers de ceux-ci ; que le professionnel ne saurait s'affranchir de ses obligations par des clauses contractuelles figurant dans ses conditions générales de tenues de compte ;

Que si E.C. disposait depuis le 19 août 2002 d'un portefeuille dans un autre établissement bancaire dénommée BSI, il n'est pas établi qu'elle disposait d'une connaissance approfondie des milieux financiers et marchés boursiers de nature à exonérer la banque de ses propres obligations ;

Attendu cependant qu'elle a choisi de gérer elle-même son portefeuille et de ne pas en déléguer la gestion à un professionnel de la banque, en sorte qu'elle devait assumer les risques liés à son éventuelle inexpérience malgré les informations et conseils que la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO justifie lui avoir délivrés ; qu'en effet, cette banque démontre qu'elle a fourni à sa cliente une documentation complète contenant une information loyale et non mensongère sur les risques encourus sur les marchés financiers et les différents titres dans lesquels E.C. envisageait d'investir ;

Qu'E.C. allègue, sans en rapporter la preuve, qu'elle a signé des ordres en blanc afin de permettre à des conseillers de les remplir du fait de sa résidence à l'étranger ;

Que si la demanderesse se prévaut d'ordres d'achat et de vente passés à son insu dans la période courant du 23 août 2007 au 18 novembre 2009, les éventuelles pertes dont elle se plaint ont été enregistrées sur des titres acquis antérieurement à août 2007, soit à une période durant laquelle elle a été régulièrement informée de la teneur de ses avoirs lors de ses visites à la banque où elle a pu prendre connaissance de la correspondance qu'elle avait souhaité être laissée en « banque restante » ;

Qu'elle ne conteste pas avoir été informée avant cette période des opérations réalisées sur son compte et n'a pas remis en cause avant le dernier trimestre 2008 le contenu de son portefeuille et les opérations réalisées sur ses instructions ;

Attendu que son mécontentement est né lors de la crise financière qui a affecté l'ensemble des places boursières avec une acuité sans précédent depuis la crise économique de 1929 ; qu'au cours de cette période troublée, il est incontestable que les marchés financiers ont enregistré de lourdes pertes et qu'il en a été de même des investissements effectués dans la gestion dite alternative – dont les produits détenus par E.C. sont majoritairement à l'origine du litige – même si le but premier de ce type d'investissement est d'être déconnecté des marchés ;

Attendu que l'analyse évolutive de son portefeuille depuis l'origine, après ajout des sommes investies en cours de tenue du compte et après déduction des montants retirés en espèces et de la valeur des titres transférés ou restant inscrits en compte et ce, sans qu'il puisse être fait grief au CRÉDIT FONCIER DE MONACO de la gestion d'un titre issu d'un autre établissement dont la valeur à l'entrée en portefeuille au CRÉDIT FONCIER DE MONACO n'est pas établie et qui a été vendu sur instructions expresses de la cliente laquelle ne démontre pas avoir donné auparavant instruction pour ce faire, ne met pas en évidence de perte du capital d'E.C. malgré les aléas de l'économie au cours de la période d'ouverture du compte titres et fait au contraire apparaître, ainsi que le démontre la banque, l'existence d'une plus-value ;

Attendu qu'ainsi, E.C. qui a toujours géré elle-même ses avoirs ne saurait faire grief à la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO d'avoir manqué à ses obligations de conseil et d'information et d'être à l'origine d'un quelconque préjudice subi de ce fait ; qu'ainsi, la résistance opposée par la banque aux demandes d'indemnisation de sa cliente était justifiée ;

Attendu qu'E.C. sera en conséquence déboutée de sa demande en paiement des sommes de 49 097,83 euros au titre du préjudice matériel et de 50 000 euros au titre du préjudice moral et pour résistance abusive et injustifiée ;

Sur la demande reconventionnelle présentée par la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO,

Attendu que la défenderesse sollicite la condamnation d'E.C. à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et vexatoire ;

Attendu que compte tenu de la technicité de la matière, des fluctuations de son portefeuille, de son âge et de sa nationalité étrangère, E.C. a pu se méprendre sur la portée de ses droits ; que la recherche de l'éventuelle responsabilité de la banque n'apparaît ni abusive ni vexatoire pour la société défenderesse ;

Que dès lors, la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO sera déboutée de sa demande reconventionnelle ;

Sur les dépens,

Attendu qu'E.C. qui succombe devra supporter les dépens de l'instance par application de l'article 231 du Code de procédure civile ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL,

statuant contradictoirement,

Déclare recevable l'action formée par E.C. ;

Dit n'y avoir lieu d'ordonner le bâtonnement des écritures déposées le 25 mars 2010 par la société CRÉDIT FONCIER DE MONACO ;

Déclare nulle et écarte des débats les attestations rédigées par M.C. produites sous les numéros 25 et 25 bis et par L.Q. sous les numéros 35 et 35 bis ;

Déclare recevable les demandes additionnelles et modificatives formulées par E.C. en cours d'instance ;

Déboute E.C. de l'intégralité de ses demandes ;

Déboute la société anonyme monégasque CRÉDIT FONCIER DE MONACO des fins de sa demande reconventionnelle ;

Condamne E.C. aux dépens distraits au profit de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, sous sa due affirmation ;

Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le greffier en chef, au vu du tarif applicable.

Composition🔗

Mme GRINDA-GAMBARINI, Prés., Mme VIKSTRÖM, Juge, Mme LEONARDI-FLEURICHAMP, Juge.

M. IGNACIO, Subst. du Proc. Gén., Mme VALLAURI, Greff.

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