Tribunal de première instance, 2 décembre 2010, La société U. c/ La Société V.
Abstract🔗
Transport - Abordage maritime - Opérations de sauvetage - Remorquage - Indemnité de sauvetage - Dommages - Origine des dommages - Absence de preuve de la faute du remorqueur
Résumé🔗
Le navire qui s'est ensablé à 2,50 mètres par l'avant est redevable d'une indemnité de sauvetage au remorqueur qui l'a secouru au titres des opérations de sauvetage qui ont duré presque 24 heures, le tribunal ne disposant pas de données expertales lui permettant de savoir si les échecs répétés étaient dus à une difficulté tenant à la charge que représentait le navire ou à un équipement insuffisant voir inadapté du remorqueur.
Le propriétaire du navire secouru qui ne démontre pas que le remorqueur ait volontairement procédé à plusieurs tentatives de sauvetage et l'ait déplacé en pleine connaissance de cause sur les rochers pour l'endommager, ne caractérise pas que le remorqueur ait commis une faute répondant à la définition de l'article L. 322.7 du Code de la mer et est débouté de sa demande pour les dommages causés.
Motifs🔗
TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
JUGEMENT DU 2 DECEMBRE 2010
I - En la cause n° 2005/000083 (assignation du 18 août 2004) de :
La Société de droit italien dénommée U., ayant son siège social, X1 TRAPANI (Italie), agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice Monsieur Antonino GRIMAUDO domicilié en cette qualité audit siège ;
DEMANDERESSE, ayant primitivement élu domicile en l'étude de Maître Jean-Charles GARDETTO, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Thomas GIACCARDI, avocat en cette même Cour, puis en celle de Maître Thomas GIACCARDI, devenu depuis lors avocat-défenseur et plaidant par ledit avocat-défenseur ;
d'une part ;
Contre :
La Société V., domiciliée X2, ILE DE MANN, prise en la personne de son représentant légal ;
DÉFENDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Georges BLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Jean-Marc AUDAN, avocat au barreau de Paris ;
d'autre part ;
II - En la cause n° 2006/000050 (assignation du 25 août 2005) de :
La société V., société de droit de l'île de Man, enregistrée sous le numéro X, dont le siège social est X3, Douglas (Iles de Man), agissant poursuites et diligences de l'un de ses directeur en exercice, demeurant et domicilié en cette qualité audit siège ;
DEMANDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Georges BLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Jean-Marc AUDAN, avocat au barreau de Paris,
d'une part ;
Contre :
La société anonyme B., devenue C., dont le siège social est X 1 Paris La Défense cedex (numéro de contrat : X) prise en la personne de son agent général en Principauté de Monaco, Monsieur c. et j. SA., demeurant et domiciliés tous deux en cette qualité à Monaco X4 ;
DÉFENDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et par Maître Hervé LAROQUE, avocat au barreau de Paris,
Monsieur X, conseil maritime, demeurant et domicilié en cette qualité sis à Monaco X5 ;
DÉFENDEUR, ayant élu domicile en l'étude de Maître Patricia REY, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et par ledit avocat-défenseur,
En présence de :
La Société de droit italien dénommée U., dont le siège social est TRAPANI, X6 (Italie), prise en la personne de son représentant légal en exercice Monsieur A. GR., demeurant et domicilié en cette qualité audit siège ;
DÉFENDERESSE, ayant primitivement élu domicile en l'étude de Maître Jean-Charles GARDETTO, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Thomas GIACCARDI, avocat en cette même Cour, puis en celle de Maître Thomas GIACCARDI, devenu depuis lors avocat-défenseur et plaidant par ledit avocat-défenseur ;
d'autre part ;
LE TRIBUNAL,
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT MARQUET, huissier, en date du 18 août 2004, enregistré (n° 2005/000083) ;
Vu le jugement avant dire droit de ce Tribunal en date du 16 juin 2005 ayant notamment renvoyé la cause et les parties à l'audience du 14 juillet 2005 ;
Vu le jugement avant dire droit de ce Tribunal en date du 26 juillet 2005 statuant en la forme par mesure d'instruction, ayant notamment renvoyé la cause et les parties à l'audience du 6 octobre 2005 ;
Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Marie-Thérèse ESCAUT-MARQUET, huissier, en date du 25 août 2005, enregistré (n° 2006/000050) ;
Vu les conclusions de Maître Jean-Charles GARDETTO, avocat-défenseur, au nom de la société U., en date des 15 février 2006, 1er mars 2007 et 20 juin 2007, puis celles de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur au nom de cette même partie, en date du 10 mars 2010 ;
Vu les conclusions de Maître Georges BLOT, avocat-défenseur, au nom de la société V., en date des 23 mars 2006, 30 novembre 2006, 29 mars 2007 et 10 décembre 2009 ;
Vu les conclusions de Maître Patricia REY, avocat-défenseur, au nom de Monsieur X, en date des 16 novembre 2005 et 3 février 2010 ;
Vu les conclusions de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de la société C., en date des 14 décembre 2005, 10 mai 2006 et 21 avril 2010 ;
Ouï Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, pour la société U., en ses plaidoiries et conclusions ;
Ouï Maître Jean-Marc AUDAN, avocat au barreau de Paris, assisté de Maître Georges BLOT, avocat-défenseur, pour la société V., en ses plaidoiries et conclusions ;
Ouï Maître Hervé LAROQUE, avocat au barreau de Paris, assisté de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, pour la SA C., en ses plaidoiries et conclusions ;
Ouï Maître Patricia REY, avocat-défenseur, pour X, en ses plaidoiries et conclusions ;
Ouï le ministère public ;
CONSIDÉRANT LES FAITS SUIVANTS :
La Société V. est propriétaire d'un bateau dénommé « G. » battant pavillon du Royaume-Uni, assuré auprès de la Compagnie C..
Le 1er juillet 2004, le navire s'est ensablé dans la baie de Mondello et a fait l'objet d'une opération de sauvetage par le remorqueur « P. » appartenant à la société U., lequel a conduit le navire jusqu'au port de Palerme.
Rappel de procédure :
Le Président de ce Tribunal par ordonnance du 6 août 2004 a :
- autorisé la Société de droit italien dénommée U., ayant son siège social X1- Sicile (Italie), à faire procéder à la saisie conservatoire du navire dénommé « G. », battant pavillon britannique, immatriculé à LONDRES sous le numéro X appartenant à la Société V. et ce, pour avoir sûreté garantie et paiement de la somme de CINQUANTE CINQ MILLE EUROS (55.000 euros), montant auquel a été évaluée provisoirement la créance de la requérante, sauf à parfaire ou à diminuer ;
- fixé à un mois le délai dans lequel la requérante devra former, à peine de nullité, l'action en validité de la saisie ainsi autorisée ;
- dit que cette même requérante devra en outre, également à peine de nullité de la saisie, notifier dans le délai de trois jours au propriétaire du navire copie du procès verbal de saisie ;
- dit que ledit procès verbal sera également notifié au Directeur des affaires maritimes ainsi, le cas échéant, qu'au consul de Grande-Bretagne ;
- dit que la requérante devra prendre en charge les droits de port afférents au mouillage du navire saisi pendant la durée de la saisie ;
Le 6 août 2004, il a été procédé à la saisie conservatoire du navire.
Le 18 août 2004, la société de droit italien U. a fait assigner la Société V. en validation de la saisie et en paiement.
Cette affaire a été inscrite sous le numéro 2005/83.
Ce tribunal par jugements des :
16 juin 2005 :
s'est déclaré compétent pour statuer sur le présent litige ;
a :
- rejeté l'exception de sursis à statuer formée par la société de droit italien U. ;
- donné acte à la Société V. de ce qu'elle se réserve d'appeler en garantie la compagnie C. et son conseil monégasque X ;
- renvoyé la cause et les parties à l'audience du JEUDI 14 JUILLET 2005 à 9 HEURES pour conclusions au fond de la société U. ;
- condamné la société de droit italien U. aux dépens de la présente instance, avec distraction au profit de Maître Georges BLOT, avocat-défenseur sous sa due affirmation ;
- 26 juillet 2005 a :
- autorisé la Société V. à appeler en garantie la compagnie C. et son conseil monégasque X ;
- fixé à UN MOIS (1 mois) le délai de l'appel en garantie de la compagnie C. et de son conseil monégasque X et à l'audience du JEUDI 6 OCTOBRE 2005 à 9 heures la date pour laquelle ces parties devront être assignées par la Société V. ;
- renvoyé la cause et les parties à ladite audience du JEUDI 6 OCTOBRE 2005 à 9 heures.
Le juge des référés a ordonné par décisions des :
13 juillet 2005, une mesure d'expertise du navire ;
22 mai 2007, la mainlevée de la saisie contre consignation de la somme de 100.000 euros affectée spécialement au paiement de la créance de la société U..
Cette somme a été déposée à la Caisse des Dépôts et Consignations le 11 juin 2007.
Le 25 août 2005, la Société V. a fait assigner la SA C. et Monsieur X en garantie.
Cette affaire a été inscrite sous le numéro 2006/50.
Moyens et prétentions des parties :
La société U. expose :
- qu'elle est propriétaire du navire remorqueur dénommé « P » immatriculé à Naples sous le numéro 1770 ;
- que le 1er juillet 2007 et sur ordre de la Capitainerie du port de Palerme ce remorqueur a dû porter secours au navire dénommé « G » appartenant à la Société V. qui s'était échoué au large de Palerme ;
- que le remorqueur a dû procéder à plusieurs tentatives sur deux jours pour remettre le navire à flots ;
- que le surlendemain du sauvetage, le capitaine du navire a quitté le port sans convenir du montant de l'indemnité due en vertu du Code Italien de Navigation ;
soutient que les pièces numéros 3 et 11 produites par la partie adverse constituent des témoignages ne remplissant aucune des conditions prévues par l'article 324 du Code de Procédure Civile ;
fait valoir que le Code de la mer monégasque s'applique aux navires battant pavillon de la Principauté de Monaco, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ni pour le navire de plaisance, ni pour le remorqueur ;
- que la compétence territoriale du Tribunal de Première Instance est fondée sur l'article 3 du Code de Procédure Civile et que cette compétence n'implique pas automatiquement qu'il faille faire application du Code de la mer monégasque ;
- que les dispositions de l'article 491 du Code italien de la navigation ont vocation à s'appliquer à un sinistre qui s'est produit dans les eaux territoriales italiennes ;
- que le calcul de l'indemnité de sauvetage prend en compte les circonstances de l'opération de sauvetage et la valeur du navire secouru ;
- que la valeur du bateau déclarée à l'assureur est de 700.000 euros et non de 285.000 euros ; que l'on ne voit pas la raison pour laquelle la Société V. aurait eu intérêt à faire assurer son bien à une valeur supérieure à sa valeur réelle ;
- que les opérations ont débuté le 1er juillet 2004 à 22h30 pour se terminer le 3 juillet 2004, qu'elles ont consisté en la recherche du navire, en plusieurs tentatives de déséchouage et ont été particulièrement délicates ;
- que l'indemnité doit être fixée à la somme de 100.000 euros ;
- que selon la jurisprudence italienne, et en cas de saisie du navire, le créancier a le droit d'obtenir le remboursement des frais de gardiennage du navire lesquels s'élèvent à la somme de 47.281,60 euros ;
- que le navire de la Société V. a procédé à une véritable fuite jusqu'au port de Monaco ; que cette société a tout fait pour se soustraire au paiement de l'indemnité de sauvetage en sollicitant une expertise, en ne procédant pas à la rémunération de l'expert ;
- que les désordres dont se prévaut la partie adverse ne sont pas imputables à la concluante, que c'est le capitaine du G. qui, par négligence, a échoué le navire et endommagé sa coque ;
- que l'expertise ne permet pas d'établir la moindre responsabilité de la société U. sur les désordres invoqués ;
- que la Société V. a empêché l'expert de mener à bien sa mission, qu'une fois le navire mis à terre, elle a fait effectuer des travaux de réparation sans que l'expert ait eu le temps de constater les désordres qui affectaient la coque ;
- qu'il n'est même pas certain que les dommages invoqués aient eu pour origine l'échouage du bateau ;
- qu'il convient de relever que les désordres n'ont pas empêché le G. de prendre la mer ;
* conclut :
- à la nullité des témoignages produits par la Société V. sous les numéros 3 et 11 pour ne pas être conformes à l'article 324 du Code de Procédure Civile ;
- à ce qu'elle s'en rapporte à justice sur les appels en garantie ;
- au débouté de la Société V. de l'ensemble de ses demandes ;
- à la condamnation de la Société V. à lui payer les sommes de :
100.000 euros au titre de l'indemnité de sauvetage avec intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2004 ;
47.281,60 euros montant des frais de gardiennage ;
15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.
- à la déduction de sa créance de la somme de 100.000 euros consignée, la Caisse des Dépôts et Consignations devant se dessaisir de cette somme à son profit sur signification du jugement à intervenir ;
- à l'exécution provisoire de la décision à intervenir ;
La Société V. expose :
- que le 1er juillet 2004, son navire s'est dirigé vers la baie de MONDELLO pour y effectuer une vérification du système hydraulique du gouvernail, que le capitaine s'est fié au sondeur lequel indiquait une profondeur largement supérieure au tirant d'eau du bateau et que lors de cette approche au ralenti, le bateau s'est immobilisé en se posant doucement sur un banc de sable ;
- que le remorqueur a souhaité avec insistance que tout le monde soit débarqué, demande à laquelle le capitaine s'est opposé car s'il y avait été fait droit la prise de mer aurait privé la concluante de tout moyen de défense ;
soutient que la pièce numéro 11 ne doit pas s'apprécier comme étant un témoignage au sens de l'article 324 du Code de Procédure Civile, s'agissant de la confirmation du prix de vente du bateau établi par Monsieur c. I. ;
- que l'article L. 322-1 du Code de la Mer attribue compétence à la loi monégasque et que le tribunal doit pouvoir appliquer les dispositions tirées de ce code non seulement aux causes ayant motivé la mesure conservatoire et l'assignation au fond mais aussi aux conséquences ;
- que compte tenue d'une durée de travail effectif de 8 heures, d'une opération de sauvetage par mer calme et sans aucun risque, la demande présentée « résulte d'une grossière manipulation ».
- que la valeur vénale du bateau est de 285.000 euros ;
- que le coût d'assistance pour avarie grave est de 650 euros par heure ;
- que le navire a été tiré par l'avant, en totale contradiction avec les règles de secours et d'assistance les plus élémentaires, que si le navire avait été tiré par l'arrière, il se serait désensablé tout seul et serait reparti ;
- que le témoignage du capitaine du G. contraste singulièrement avec le contenu de l'extrait du journal nautique du « P. » ;
- que la complexité des opérations rapportée par la société U. ne doit pas masquer l'objectif de « prise de mer » ; que la rupture du câble de tirage à plusieurs reprises en raison de l'usure et de la faiblesse des amarres, traduit la légèreté et le manque de professionnalisme de la société requérante ;
- que le bateau a été tiré et positionné sur des rochers ;
- qu'aucune demande d'indemnité n'a été présentée par la société U., qu'une telle réclamation n'est intervenue que le 6 juillet 2004 auprès de la compagnie d'assurances et non du propriétaire du bateau ;
- que le passage obligé dans les 24 heures au port de Calvi pour vérifications, comme l'avait suggéré la capitainerie du port de Palerme, ne saurait être analysé comme une fuite ;
- que l'étendue des dommages causés à la coque et imputables à la société U. résulte de la facture n° 142 de la Société P., du questionnaire relatif au sinistre du 3 juillet 2004, du rapport d'inspection du 1er juin 2005, de l'accédit du 4 novembre 2005, du contrat du 22 juin 2007 ; que le 31 mai 2005 une avarie importante par voie d'eau s'est produite, conséquence du dommage subi sur la semelle d'échouage lors de l'opération de désensablement ;
- qu'elle est bien fondée à solliciter la réparation des dommages causés à la coque, résultant directement des opérations de remorquage, d'un montant de 60.422 euros hors taxe ;
- qu'en l'état des rigueurs procédurales et autres contraintes imposées par l'expert judiciaire et malgré les insistances du conseil de la concluante, les travaux ont été exécutés mais que des clichés photographiques et autres pièces ont été remis à l'expert ;
- qu'une somme de 80.000 euros englobera le coût de réparation et du préjudice subi ;
- qu'elle a dû subir la procédure et été contrainte d'engager un référé expertise ;
- que la loi du pavillon (Royaume Uni) précise que seule la mesure de la ligne de charge détermine les compétences à « skipper » un navire, laquelle est en l'espèce de 23,68 mètres ; que cette longueur inférieure à 24 mètres résulte du courrier de Monsieur SA. expert en date du 7 juillet 2005 et de la télécopie du 29 juillet 2005 émanant de M. C. A organisme officiel britannique ;
- que la compagnie C. ne saurait affirmer que les 24,56 mètres reportés sur le British registry sont la ligne de charge ;
- que la détention d'un certificat de compétence de capitaine de yacht ne pouvait pas être exigée du capitaine du navire ;
- que le refus de garantie est fondé sur le rapport de l'expert de la compagnie sans que celle-ci ait été en mesure d'administrer la preuve de l'affirmation tenant à l'absence de capacités du capitaine eu égard à la taille et au tonnage du navire ;
- que le contrat n° 224 56 801 04 couvre la responsabilité civile, la défense et le recours et les dommages relatifs au G., que la compagnie d'assurance doit sa garantie quant à l'ensablement et ses conséquences, y compris l'existence de dommages de nature évolutive constatés depuis fin mai 2005 ;
- que la position adoptée par la compagnie d'assurances justifie l'allocation de dommages intérêts ;
- que la prise en charge directe des frais de désensablement et de remorquage, à les supposer fondés, aurait évité les procédures ;
- que la concluante est contrainte d'assurer seule sa défense ;
- qu'elle a, le 23 juin 2004, donné mandat à Monsieur X « pour agir au nom de la société en signant les contrats de travail de l'équipage du yacht… » ;
- que Monsieur X est un conseil professionnel en Principauté de Monaco, que son préposé a rédigé les contrats de travail du capitaine et des marins, qu'il a ainsi embauché Monsieur Y alors que selon les affirmations de C. il n'avait pas les compétences nécessaires ;
- que Monsieur X a procédé au licenciement de Monsieur Y le 3 août 2004, qu'il a donc pris la véritable qualité de mandataire qu'il dénie aujourd'hui ;
- qu'en sa qualité de conseil, il lui appartenait d'apporter toute aide à la concluante, sur le choix du capitaine ;
- que Monsieur X a entretenu des relations directes avec la compagnie d'assurance laquelle lui a adressé le refus de garantie ;
* conclut :
à la jonction des deux instances ;
à la non application du code italien de la navigation ;
à la constatation de ce que la société U. ne produit pas de facture ;
à l'absence de créance certaine liquide est exigible ;
au débouté ;
à l'application du Code de la mer monégasque ;
à la responsabilité de la société U. des dommages causés lors de l'opération d'assistance suivie de remorquage ;
à la condamnation de la U. à lui payer les sommes de :
80.000 euros à titre de dommages intérêt ;
40.000 euros à titre de dommages intérêts, supplémentaires par application de l'article 1229 du Code civil ;
à la compensation, le cas échéant, entre les créances respectives des parties ;
au rejet des demandes de Monsieur X et de la compagnie C. ;
à l'absence de preuve du bien fondé du refus de garantie ;
à la garantie de la compagnie C. ;
à la condamnation de cette compagnie à la relever et garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre, y compris les dépens ;
à la condamnation de C. à lui payer la somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi résultant du refus de garantie ;
subsidiairement en cas de rejet de la demande de garantie, à la responsabilité de Monsieur X et à sa condamnation à réparer les conséquences dommageables subies par le concluant ;
à l'exécution provisoire de la décision ;
La société C. expose :
- qu'elle a refusé sa garantie par lettre du 11 août 2004 et que sa décision n'a pas été contestée par le conseil de l'assurée à l'époque ;
- que l'article 21 des conditions générales exclut de la garantie les accidents survenus lorsque la personne chargée de la navigation… « n'est pas titulaire du permis de conduire ou des certificats de capacité en état de validité exigés par la réglementation en vigueur » ;
- que le G. battant pavillon anglais fait, selon le certificate of British Registery, 24,56 mètres de long et 96,24 tonneaux de jauge brute et que selon la réglementation anglaise applicable le capitaine d'un bateau de plus de 24 mètres de longueur et de 80 tonneaux de jauge doit être titulaire d'un yacht master, ce qui n'est pas le cas ;
- que ce document est le titre de propriété du bateau opposable à tous et qu'il est surprenant que la Société V., après quatre ans de procédure, tente de soutenir que le bateau ne ferait pas cette longueur alors qu'elle n'a jamais demandé que l'expert procède à cette mesure ou qu'il en contrôle la jauge ;
- que les documents produits par son adversaire ne sont pas contradictoires et n'ont aucun effet vis à vis des tiers ;
- que Monsieur S. a basé ses calculs sur des plans de bateau dont la société C. ne dispose pas et qui ne lui ont pas été communiqués ;
- que la longueur hors tout du bateau est de 26,21 mètres ainsi que déclaré par la demanderesse et qu'elle figure dans le rapport de Monsieur M., expert de celle-ci ; qu'en conséquence et selon le courrier de Monsieur S. du 6 juillet 2006, la longueur inscrite sur le British Registery est la longueur de ligne de charge ;
- qu'elle rapporte la preuve des éléments fondant sa décision de refus de garantie ;
- que son assurée ne rapporte pas la preuve de l'importance des dommages relatifs au sinistre, les rapports de mer, livre de bord et autres documents n'étant d'ailleurs pas produits ;
- que les demandes de la société V. ne sont pas chiffrées ;
- que la société V. a vendu le navire et que l'acquéreur a fait procéder à des travaux bien plus importants que ceux relevant du litige ; que l'expert n'a pas été en mesure d'indiquer les conditions du sinistre, qu'après avoir constaté la présence de deux entrées d'eau, il a sollicité la mise à sec du navire et indiqué ensuite que les dégâts précités n'étaient plus visibles du fait des réparations intervenues avant la vente ;
- que le journal de bord du remorqueur indique que le capitaine du G. a répondu par la négative à la question portant sur l'existence d'infiltrations d'eau ;
- qu'un second sinistre est intervenu le 31 mai 2005, lequel ne lui a jamais été déclaré ;
- qu'en toute hypothèse, il appartenait à l'assurée de procéder aux mesures conservatoires nécessaires et aux réparations qui s'imposaient à la suite du sinistre du 1er juillet 2004, ce qu'elle n'a pas fait ;
- que la société V. ne justifie d'aucun préjudice complémentaire, ni de son évaluation de la somme de 200.000 euros ;
- que la société requérante est de mauvaise foi alors qu'elle n'a pas contesté le refus de garantie à l'origine et reconnu la responsabilité du capitaine lequel ne détenait pas les qualifications requises pour conduire le navire ;
* conclut :
à l'irrecevabilité et au mal fondé des demandes présentées ;
à sa mise hors de cause ;
au débouté de la société V. de toutes ses demandes ;
à titre subsidiaire à l'absence de preuve du préjudice ;
en tout état de cause à l'absence de jonction des procédures ;
à la condamnation de la société V. à lui payer la somme de 20.000 euros à titre de dommages intérêts ;
Monsieur X expose :
- que la procuration a été confiée à Monsieur Filippo VE., intervenant à titre gratuit suivant mandat spécial et personnel et non au concluant ;
- que Monsieur Filippo VE. s'est limité à signer à bord du G. les contrats d'engagement qui lui avaient été fournis, lesquels avaient été rédigés par la société F. de Douglas, Ile de Mann, gérant de la société V. ;
- que le capitaine et les autres membres de l'équipage ont été choisis par Monsieur MA. propriétaire des parts sociales de la société V. ;
- que la procuration ne concerne pas le choix, ni l'embauche de l'équipage mais la seule signature des contrats de travail ;
- qu'il semble acquis que le bateau avait une longueur de ligne de charge inférieure à 24 mètres ;
- que Monsieur X est intervenu après l'échouage afin de négocier un accord entre les parties et que son intervention a pris fin dès la saisie-conservatoire, que c'est dans ce cadre que Monsieur MA. lui a demandé de préparer la lettre de licenciement ;
- que Monsieur Filippo VE. n'est jamais intervenu en qualité de conseil juridique ; que Monsieur MA. ne s'est adressé à Monsieur Filippo VE. qu'en raison de l'intervention de ce dernier dans la cession des parts de la société V. ;
* conclut :
à l'irrecevabilité de la demande ;
à défaut au débouté ;
à la condamnation de la société V. à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive.
Sur quoi le Tribunal :
Sur la demande de jonction :
Il convient dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice de prononcer la jonction de l'action principale et des appels en garantie, les deux procédures étant en état ;
Sur l'exception de nullité des pièces 3 et 11 produites par la société V. :
La pièce numéro 3 ne remplit aucune des conditions exigées par l'article 324 du Code de Procédure Civile et plus particulièrement elle n'est ni datée, ni écrite de la main de son auteur, ni accompagnée d'aucun document officiel.
La pièce numéro 11 constitue une déclaration afférente à l'un des faits litigieux du procès à savoir la valeur du navire ; elle répond à la définition de l'attestation et est soumise aux formalités de l'article précité.
Son auteur intitule l'écrit « attestation » et déclare qu'il « atteste ».
Ce document dactylographié ne contient aucun des renseignements requis par l'article 324 du Code de Procédure Civile et il n'y est pas annexé de document « justifiant de l'identité de son auteur et comportant sa signature ».
La sanction de ces irrégularités est la nullité expressément prévue par le texte.
Sur la demande en paiement de l'indemnité de sauvetage :
Le Tribunal s'est déclaré compétent pour statuer sur la demande au fond, en application de l'article 3 - 9 ° du Code de Procédure Civile, dès lors que la mesure de saisie-conservatoire a été exécutée en Principauté de Monaco.
Ce principe de compétence territoriale ne détermine pas la loi applicable au fond lorsqu'il existe, comme en l'espèce, un élément d'extranéité.
La partie requérante revendique l'application de la loi italienne et la partie défenderesse celle du Tribunal saisi.
La Convention Internationale sur l'Assistance de Londres du 28 avril 1989 ne s'applique pas alors que le Tribunal saisi n'en est pas signataire (article 2).
Les navires en cause n'appartiennent pas à un même état, le navire assistant est italien et le navire assisté bat pavillon britannique ; il n'existe donc pas de loi commune aux deux bâtiments.
Les parties n'ont pas conclu de contrat d'assistance prévoyant la législation applicable.
Aux termes de l'article L.322-1 du Code de la Mer Monégasque, « l'assistance des navires en danger par d'autres navires, ainsi que les services de même nature rendus entre navires sont soumis aux dispositions du présent chapitre sans tenir compte des eaux où ils ont » été « prêtés ».
Il sera fait application de la loi du for et du chapitre II du titre II du Code de la Mer qui réglemente l'assistance, étant rappelé que le port de Monaco est le port d'attache du navire.
Le 1er juillet 2004, Monsieur Y capitaine du bateau G., a voulu s'arrêter dans la baie de Mondello afin d'effectuer des vérifications techniques hydrauliques sur le gouvernail ;
Il déclare s'être fié au sondeur et s'être ensablé à 2,50 mètres par l'avant (pièce numéro 2) et ce vers 21h50.
Il a fait appel aux gardes-côtes italiens et un remorqueur « Le P. » est venu sur les lieux vers 23h30. Monsieur Y ne s'est pas opposé à son intervention. Celui-ci affirme qu'il aurait dû et pu « très certainement par une manœuvre de marche arrière se désensabler » mais ne le démontre pas ; la société défenderesse ne produit aucun élément technique corroborant les dires de son capitaine.
Le remorqueur P. a dû procéder à plusieurs essais avant de parvenir à tirer le navire.
Il est demeuré sur place jusqu'à la fin des opérations.
Les parties sont contraires sur les causes de ces échecs.
Monsieur Y déclare :
- que lors du premier essai, le 1er juillet 2004 vers 23h30, le remorqueur aurait « aggravé la situation de stabilité car le bateau s'est approché des récifs » (pièce n° 1) ;
- que le lendemain matin, le remorqueur aurait tiré vers la droite contrairement à ses ordres et que le bateau a alors heurté les récifs, le centre s'encastrant dans les rochers ;
- que l'opération a réussi le 2 juillet 2004 à 22 heures après trois essais infructueux et que la semelle d'échouage du bateau aurait été arrachée sur toute sa longueur ;
Si l'on se réfère au journal nautique du remorqueur P., celui-ci est arrivé sur les lieux vers 22h45 et a réussi à déplacer le G. sur 10 mètres avant que le câble ne casse ; il est demeuré sur place et a procédé le lendemain vers 7h30 à plusieurs tentatives au cours desquelles le câble s'est rompu en raison de la charge subie, les opérations étant arrêtées à 12h30 en raison de la marée basse.
Le navire a été renfloué le soir à 22h30 après des essais qui ont débuté à 19 heures.
Le navire a ensuite été remorqué dans le port de Palerme où il est arrivé à 24 heures.
L'assistance a donc eu un résultat utile et elle donne lieu en application de l'article L.332-2 du Code de la Mer « à une équitable rémunération ».
Les parties n'ont pas convenu du montant de la rémunération qui doit être fixée par le Tribunal… « compte tenu des circonstances, notamment de la valeur du navire ou de la cargaison et du péril couru par eux comme par l'assistant ».
Il n'est pas justifié de conditions météorologiques difficiles ; si l'on se réfère au rapport de sinistre du Capitaine du port de Palerme la mer était calme.
Les fonds marins proches du G. étaient rocheux mais il n'est pas produit de document technique de nature à établir que ce fait, rendait l'opération d'assistance particulièrement difficile.
Les opérations se sont déroulées sur la période allant du 1er juillet 2004 vers 22h45 jusqu'au lendemain 22h30.
La durée des différentes tentatives a été rappelée dans le journal nautique du P. et n'est pas véritablement discutée.
Le tribunal ne dispose pas plus de données expertales lui permettant de savoir si les échecs répétés étaient dus à une difficulté tenant à la charge que représentait le G. ou à un équipement insuffisant voir inadapté du remorqueur.
La société V. a déclaré à son assureur que la valeur du G. était de 700.000 euros.
Cette société ne rapporte pas la preuve d'une valeur vénale de 285.000 euros et il résulte au contraire de l'ordonnance de référé rendue par le Tribunal de Commerce de Paris, dans le litige opposant l'acquéreur du yacht à cette société, que Monsieur HE. avait déjà versé une somme de 580.000 euros, la société réclamant un solde de 155.000 euros.
L'assistant n'a pas couru de péril particulier.
Au vu de l'ensemble de ces éléments et par application du dernier alinéa de l'article L.322-6 du Code de la Mer, l'indemnité sera fixée à la somme de 20.000 euros et les intérêts au taux légal seront dus à compter de l'assignation du 18 août 2004.
La jurisprudence invoquée par la société U., quant au remboursement des frais de gardiennage par le navire assisté se rapporte à l'Italie et non à la Principauté de Monaco.
Le Président du Tribunal ayant autorisé la mesure de saisie-conservatoire a expressément stipulé que la requérante devait « prendre en charge les droits de port afférents au mouillage du navire saisi pendant la durée de la saisie ».
La société U. sera déboutée de ce chef de demande.
Sur la demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts :
- pour les dommages causés au G. :
L'article L. 322.7 du Code de la Mer exclut la responsabilité de l'assistant envers l'assisté et n'autorise cette recherche qu' « en cas de faute intentionnelle ou inexcusable » cette dernière étant définie comme « la faute délibérée qui implique la conscience de la probabilité du dommage et son acceptation téméraire sans raison valable ».
La société V. ne démontre pas que le remorqueur P. ait volontairement procédé à plusieurs tentatives de sauvetage et déplacé le G. en pleine connaissance de cause sur les rochers pour l'endommager ; elle ne caractérise pas que la société U. ait commis une faute répondant à la définition de l'article précité et sera déboutée de sa demande.
- pour avoir travesti la réalité des opérations de sauvetage :
La société V. ne démontre pas ce fait, pas plus qu'elle n'établit ainsi qu'il a été dit dans le cadre de l'étude de la demande principale, que les tentatives avortées de désensablage seraient imputables à l'impéritie de la société U..
- pour ne pas justifier d'une créance fondée en son principe, ni de circonstance susceptible d'en menacer le recouvrement :
Le Tribunal n'est plus saisi de la demande en validité de la saisie qui a fait l'objet d'une mainlevée contre consignation en cours de procédure.
La mesure de saisie-conservatoire a été autorisée et aucun recours n'a été formé à l'encontre de cette décision.
Le capitaine du G. et alors que par courrier du 3 juillet 2004, la société U. lui avait demandé de ne pas quitter le port tant qu'elle ne serait pas payée, a pris la mer le jour même pour revenir dans le port de Monaco, en faisant escale en Corse où la société U. a tenté vainement de faire procéder à une saisie.
Ces faits caractérisent la menace qu'un créancier peut légitimement éprouver quant au recouvrement de la créance dont il se prévaut.
La demande de dommages intérêts sera rejetée.
- sur la demande de dommages intérêts fondée sur l'article 1229 du Code Civil :
La procédure engagée par la société requérante n'a pas de caractère abusif alors que le bien fondé de sa demande dans son principe est reconnu ; la procédure de référé engagée par la société V. ne peut pas être imputée à la faute de la société U., pas plus que le délai d'immobilisation du navire, la société V. disposant de moyens légaux pour en obtenir la mainlevée si elle le désirait.
Les risques d'avarie du navire ne sont pas établis.
La société U. n'a pas par son comportement rendu impossibles « les réparations nécessaires pour éviter toute aggravation ».
Sur la demande de dommages intérêts présentée par la société U. pour résistance abusive :
Il ne peut pas être reproché à la société V. d'avoir sollicité une mesure d'expertise alors qu'elle prétendait que l'opération de sauvetage avait causé des dommages à son bien.
Le navire de la société V. a quitté le port de Palerme alors que la société U. lui avait demandé de rester sur place en invoquant son droit à indemnité ;
Celle-ci a dû prendre une mesure conservatoire en Principauté de Monaco, cette procédure ayant préalablement échoué en France.
La société V. a fait preuve d'une résistance abusive et il sera alloué à la requérante une somme de 10.000 euros à titre de dommages intérêts.
Sur l'appel en garantie de la compagnie C. :
La société V. a assuré son bateau auprès de la compagnie C., au titre notamment des garanties :
dommages… à concurrence de 705.000 euros ;
frais de renflouement à concurrence de 45.800 euros ;
frais d'aide et de sauvetage à concurrence de 30.500 euros.
Le contrat d'assurance prévoit une exclusion générale de la garantie pour « les accidents survenus lorsque la personne chargée de la navigation n'est pas titulaire du permis de conduire ou des certificats de capacité en état de validité exigés par la réglementation en vigueur » (page 21 des conditions générales).
Il n'est pas discuté que la réglementation applicable en cette matière est la loi anglaise, le G. battant pavillon britannique.
Monsieur Jacques Y est titulaire d'un permis français de conduire en mer des navires de plaisance à moteur A. B. C, permis qui « donne le droit de piloter uniquement à titre d'agrément. Toute personne désirant commander un navire à titre lucratif doit avoir la qualification exigée d'un capitaine professionnel » (pièce 5-2 de la compagnie C.).
Le 11 août 2004, par lettre recommandée adressée au Cabinet X, l'assureur a refusé sa garantie au motif que « le permis de naviguer présenté par le skipper Monsieur Y n'était pas conforme à la réglementation en vigueur » qui exigeait un « yacht master certificate of competence » pour un navire d'une longueur de 24,56 mètres et de jauge brute de 96,94 tonneaux.
La société V. qui le 3 août 2004 a licencié Monsieur Y en raison de sa négligence/incompétence et de la non validité de son permis de conduire en mer, discute la longueur du navire et prétend que celle indiquée sur le certificat d'immatriculation à savoir 24,56 mètres ne correspondrait pas à la longueur de la ligne de charge qui seule devrait être prise en compte.
Il résulte de la télécopie émanant du capitaine t. D. en date du 20 janvier 2005 et à en tête de la O. (pièce n° 22) :
- qu'il n'est pas exigé de titre de compétence pour les navires de moins de 24 mètres de ligne de charge ;
- que pour les petites embarcations à usage commercial, le chef de bord doit présenter un titre de compétence idoine ;
- que pour les navires commerciaux de gros tonnage à voile et à moteur, en ce compris les yachts de plus de 24 mètres de ligne de charge, les capitaines doivent présenter les titres de compétence appropriés.
Selon l'attestation délivrée par le R. le 28 septembre 2007 (pièce n° 7), la longueur de ligne de charge du G. serait de 23,76 mètres.
Monsieur Richard SA., expert ingénieur breveté, déclare :
- que la ligne de charge est de 23,68 mètres calculée d'après les plans qui lui ont été remis ;
- que la longueur figurant sur le certificat d'immatriculation britannique ne correspond pas à la ligne de charge mais aux mesures « de la partie avant de l'extrémité supérieure de l'étrave jusqu'à l'avant de la mèche inférieure » conformément à la réglementation applicable en 1967, ce qui a été confirmé par le service d'immatriculation britannique (pièce n° 25) mais ce dernier document n'est pas produit ;
- que la longueur de la ligne de charge a été introduite en 1969 soit après la construction du navire (1966).
Le G. a bien été construit en 1966 mais le certificat d'immatriculation britannique a été délivré le 29 mars 2001, il indique une longueur de 24,56 mètres et vise la loi en matière de navire marchande de 1995 et les réglementations de 1993 telles qu'amendées.
Ce document est donc postérieur à l'introduction de la longueur de ligne de charge en 1969 et il n'existe donc pas de présomption que la longueur indiquée corresponde aux règles en vigueur jusqu'en 1967.
Les avis et documents produits par la société V. n'ont aucun caractère contradictoire ; ils sont insuffisants pour invalider les mentions portées sur le document officiel du G. alors que la longueur du bateau selon le constructeur est supérieure et de 26,21 mètres (rapport du Cabinet d'expertise Mo..
Il sera par ailleurs relevé qu'alors que la compagnie a dénié sa garantie au mois août 2004, que l'autorisation de l'appeler en la cause a été accordée le 26 juillet 2005 et que le juge des référés a ordonné une expertise les 13 juillet et 4 août 2005, la société V. n'a jamais demandé au contradictoire de l'ensemble des parties que mission soit donnée à l'expert de procéder à la vérification de cette longueur de ligne de charge.
Monsieur Y ne disposait pas du titre de compétence exigé par la dimension du navire ; le refus de garantie est justifié ; la société V. sera déboutée de sa demande de prise en charge du sinistre par son assureur et de sa demande de dommages intérêts, le bien fondé de la position de l'assureur étant retenu par le Tribunal.
Sur l'appel en garantie de Monsieur X :
Le 23 juin 2004, la société V. a donné procuration à Monsieur Filippo VE. « Cabinet juridique X » pour signer les contrats de travail de l'équipage du yacht.
Ce mandat n'a pas été confié à Monsieur Filippo VE. en nom personnel mais en sa qualité de membre du « Cabinet juridique X » auquel il appartient de telle sorte que la société requérante est bien en droit d'agir à l'encontre de Monsieur X en sa qualité de commettant, Monsieur Filippo VE. n'ayant pas agi en dehors du lien de préposition.
L'objet du mandat est spécial à savoir exclusivement « agir au nom de la société en signant les contrats de travail de l'équipage du yacht de la société… ».
Monsieur Filippo VE. n'avait pas reçu pour mission de recruter l'équipage, ni même d'établir les contrats de travail ; son rôle était limité à faire signer lesdits documents par le capitaine et les marins.
Le mandataire a rempli ses obligations et sa responsabilité ne peut pas être recherchée au titre du recrutement du capitaine dont il n'était pas chargé et qu'il n'a pas effectué.
L'intervention de Monsieur X dans le licenciement de Monsieur Y (courrier du 3 août 2004) est sans relation avec le mandat du 23 juin 2004 et n'en modifie par les caractéristiques.
Il n'est pas démontré que Monsieur X soit intervenu auprès de la société V. en qualité de conseil professionnel en matière maritime et il n'était pas tenu d'un devoir de conseil sur le choix du capitaine et sur les compétences requises.
La société V. sera déboutée de son appel en garantie.
Sur la demande de dommages intérêts présentée par Monsieur X :
La procédure engagée à l'encontre de Monsieur X présente un caractère abusif alors que celui-ci n'est à aucun moment intervenu dans le recrutement de Monsieur Y.
Il lui sera alloué une somme de 2.500 euros à titre de dommages intérêts.
Sur la demande de dommages intérêts présentée par la compagnie C. :
La société C. ne caractérise pas la mauvaise foi de la société V. dans son appel en cause et résultant semble-t-il d'un changement dans la position de son assurée quant à son droit à garantie.
Elle sera déboutée de sa demande de dommages intérêts.
Sur les dépens :
La procédure a été rendue nécessaire par la carence de la société V., laquelle est déboutée de ses appels en garantie.
Les dépens seront mis à sa charge.
Sur la demande d'exécution provisoire :
Il n'y a ni titre authentique, ni promesse reconnue.
L'urgence n'est pas caractérisée.
La demande d'exécution provisoire sera rejetée.
Dispositif🔗
PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL,
Statuant contradictoirement,
Prononce la jonction des procédures engagées sous les numéros 2005/000083 et 2006/000050 ;
Déclare nulles les attestations produites par la société V. et portant les n° 3 et 11 ;
Faisant application du Code de la Mer Monégasque ;
Condamne la société V. à payer à la société U. la somme de 20.000 euros au titre de l'indemnité de sauvetage avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 18 août 2004 et celle de 10.000 euros à titre de dommages intérêts ;
Déboute la société U. de sa demande de paiement des frais de gardiennage ;
Dit que la Caisse des Dépôts et Consignation se dessaisira des sommes consignées par la société V. au profit de la société U. sur signification du présent jugement et à hauteur des sommes allouées en principal, intérêts et frais ;
Dit que le surplus des sommes consignées sera restitué à la société V. ;
Déboute la société V. de sa demande de prise en charge des frais de réparation du navire par application de l'article L.322-7 du Code de la mer ;
Déboute la société V. de ses demandes de dommages intérêts ;
Dit que le capitaine du navire ne disposait pas du titre de compétence exigé par la taille du bateau ;
Déboute la société V. de sa demande de garantie à l'encontre de la compagnie C. et de sa demande de dommages intérêts ;
Déboute la Compagnie C. de sa demande de dommages intérêts ;
Déclare recevable l'action en recherche de responsabilité dirigée contre X en sa qualité de commettant de Monsieur Filippo VE. ;
Dit que le mandat spécial a été exécuté par le mandataire ;
Dit que Monsieur X n'était pas tenu d'un devoir de conseil ;
Déboute la société V. de sa demande de garantie à l'encontre d X ;
Condamne la société V. à payer à Monsieur X la somme de 2.500 euros à titre de dommages intérêts ;
Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;
Met les dépens à la charge de la société V. dont distraction au profit de Maîtres Thomas GIACCARDI, Patricia REY et Joëlle PASTOR-BENSA, avocats-défenseurs sous leurs due affirmation.
Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le greffier en chef, au vu du tarif applicable ;
Composition🔗
Ainsi jugé et prononcé en audience publique du Tribunal de Première Instance de la Principauté de Monaco, le 2 DECEMBRE 2010, par Madame Brigitte GRINDA-GAMBARINI, Président, officier de l'ordre de Saint-Charles, Madame Michèle HUMBERT, Juge, Madame Sophie LEONARDI-FLEURICHAMP, Juge, en présence de Monsieur Michael BONNET, Substitut du Procureur Général, assistés de Madame Nadine VALLAURI, Greffier.