Tribunal de première instance, 6 mars 2008, G. A. c/ la Société Générale Bank & Trust (Monaco)

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Abstract🔗

Inscription de faux

Procédure : articles 294 et 279 du Code de procédure civile

- Le tribunal disposant d'éléments d'appréciation suffisants

Faux : article 290 du Code de procédure civile s'applique à

- Tout document établi et produit pour servir de preuve au cours d'une instance civile de nature à avoir une valeur probatoire et à entraîner des effets juridiques

Résumé🔗

Sur la procédure

Par déclaration faite au greffe général le 12 octobre 2006, G. A. a déclaré s'inscrire en faux contre un document établi à l'en-tête « SOCIÉTÉ GÉNÉRALE BANK & TRUST » intitulé « convention de compte » et portant la date du 14 mai 2001, que la SAM Société Générale Bank & Trust avait produit en pièce n° 19 dans l'instance les opposant ;

En cas d'inscription de faux, l'article 294 du Code de procédure civile impose au Tribunal de procéder pour l'instruction de l'affaire comme il est dit aux articles 279 à 286 inclusivement ;

Selon l'article 279 du Code de procédure civile, soit le Tribunal statue immédiatement, s'il possède des éléments d'appréciation suffisants, soit il ordonne la comparution des parties puis, si cela est nécessaire, d'autres mesures d'instruction ;

Il n'y a dès lors pas lieu de remettre l'examen de l'incident jusqu'au jugement de l'affaire au fond ;

Sur le faux

L'inscription de faux prévue par l'article 290 du Code de procédure civile s'applique à tout document établi pour servir de preuve au cours d'une instance civile, même sous la forme d'une photocopie, lorsque le document ainsi versé aux débats est de nature à avoir une valeur probatoire et à entraîner des effets juridiques ;

En l'espèce, le document établi à l'en-tête « SOCIÉTÉ GÉNÉRALE BANK & TRUST » intitulé « convention de compte » et daté du 14 mai 2001, porte une signature attribuée à G. A. et a été produit par la SAM Société Générale Bank & Trust pour faire la preuve de l'existence d'une seconde convention d'ouverture de compte conclue entre eux ;

La pièce produite par la SAM Société Générale Bank & Trust sous le numéro 19 est donc de celles susceptibles d'être alléguées comme fausses ;

Il résulte des explications des parties, corroborées par l'examen de l'original de la pièce litigieuse et sa comparaison avec la convention d'ouverture de compte initiale, que celle-là a été réalisée par la photocopie de celle-ci sur laquelle :

1°) ont été rajoutées la date du « 14.05.01 » et la mention « ouverture compte non géré pour transfert des titres du compte géré n° 544351 » ;

2°) la mention « guichet » a été remplacée par l'adresse « 13, bd Princesse Charlotte 98000 MONACO », et le numéro « 544 351 » par « 537 127 » dans la rubrique intitulé « N° de tiers », avant qu'elle soit à nouveau photocopiée pour être produite aux débats ;

Un tel document, qui associe à la signature de G. A. des mentions que cette signature n'avait pas pour objet d'approuver, constitue un faux ;

L'éventuelle véracité des faits constatés dans un faux matériel est sans incidence sur la qualification de faux, et qu'il importe donc peu, à ce stade du procès, que G. A. ait approuvé tacitement ou même expressément l'ouverture de ce second compte conformément aux mentions portées par la SAM Société Générale Bank & Trust sur l'acte litigieux ;

Il convient en conséquence, sans qu'il y ait lieu d'ordonner de plus amples mesures d'instruction, de déclarer faux le document établi à l'en-tête « SOCIÉTÉ GÉNÉRALE BANK & TRUST », intitulé « convention de compte » et portant la date du 14 mai 2001, produit par la SAM Société Générale Bank & Trust en photocopie et en original sous le numéro 19 ;

Conformément à l'article 296 du Code de procédure civile il convient de dire que le présent jugement sera mentionné en marge de l'acte d'inscription de faux.


Motifs🔗

TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

R.

JUGEMENT DU 6 MARS 2008

En la cause de :

M. G. A., né le 16 décembre 1945 à Beausoleil, de nationalité française, demeurant via Santa Anna à Vintimille (Italie) ;

DEMANDEUR, ayant élu domicile en l'étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

d'une part ;

Contre :

La société anonyme monégasque SOCIETE GENERALE BANK & TRUST (MONACO), immatriculée au registre du Commerce et de l'Industrie de Monaco, dont le siège social est 13-15 boulevard des Moulins à Monaco, prise en la personne de son Président délégué en exercice, demeurant en cette qualité audit siège ;

DÉFENDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Etienne LEANDRI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

d'autre part ;

Le Tribunal,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 1er décembre 2005, enregistré ;

Vu les conclusions de Maître Étienne Leandri, avocat défenseur, au nom de la société SOCIÉTÉ GÉNÉRALE BANK & TRUST (MONACO), en date des 15 décembre 2005, 29 juin, 13 décembre 2006, 31 mai et 11 octobre 2007 ;

Vu les conclusions de Maître Jean-Pierre Licari, avocat défenseur, au nom de G. A., en date des 26 octobre 2006, 15 février et 12 juillet 2007 ;

Ouï Maître Jean-Pierre Licari, avocat-défenseur, pour G. A, en ses plaidoiries et conclusions ;

Ouï Maître Étienne Leandri, avocat-défenseur, pour la société SOCIÉTÉ GÉNÉRALE BANK & TRUST (MONACO), en ses plaidoiries et conclusions ;

Ouï le ministère public ;

Considérant les faits suivants :

Par acte d'huissier du 1er décembre 2005, G. A. a fait assigner la SAM Société Générale Bank & Trust devant le Tribunal afin qu'elle soit condamnée, avec exécution provisoire, à lui payer la somme de 156 578,91 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2003 et subsidiairement à compter de l'assignation, en réparation du préjudice financier causé par des manquements à ses obligations contractuelles, la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice moral et 10 000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Il soutient que, le 24 janvier 2000, il a donné à la SAM Société Générale Bank & Trust mandat de gérer un portefeuille de titres d'une valeur de 324 118,35 euros, essentiellement composé de fonds communs de placement de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, d'emprunts obligataires et de titres européens ; il aurait opté pour une gestion équilibrée avec un risque moyen, mais ces choix n'auraient pas été respectés par la SAM Société Générale Bank & Trust, laquelle aurait investi la majeure partie du portefeuille dans des valeurs à hauts risques, notamment dans le secteur des hautes technologies, et qui aurait conservé en portefeuille des valeurs dont le cours ne cessait de baisser ; par ailleurs la SAM Société Générale Bank & Trust se serait soustraite à son obligation d'information et n'aurait pas tenu compte des craintes exprimées par son client, lequel, après avoir pris connaissance du relevé du 5 décembre 2000, aurait décidé de résilier le mandat le 21 janvier 2001 ;

Postérieurement à cette résiliation, la SAM Société Générale Bank & Trust aurait réalisé des opérations sans l'accord du client et aurait refusé d'exécuter certains ordres en invoquant l'existence d'un nantissement dont elle n'était pas titulaire, puisqu'il avait été consenti à la maison mère Société Générale, et qui était limité à 115 000 francs ; ces deux sociétés n'auraient d'ailleurs pas hésité à ouvrir, à l'insu de G. A., un compte sur lequel elles auraient transféré des titres qu'elles se seraient octroyé le droit de nantir au-delà de la valeur contractuelle du nantissement ; de ce fait, il aurait cru que certains de ses titres, sortis de son portefeuille, étaient vendus, alors qu'en réalité ils étaient conservés sur un compte dont il ignorait l'existence ;

En raison des agissements de la SAM Société Générale Bank & Trust, G. A. aurait subi une perte en capital de 81 578,91 euros ; le manque à gagner serait de 75 000 euros ; enfin il serait bien fondé à demander réparation d'un préjudice moral à concurrence de 50 000 euros ;

Par conclusions du 29 juin 2006, la SAM Société Générale Bank & Trust répond que G. A. lui a consenti un mandat de gestion par acte du 24 janvier 2000, et que le 4 février 2000 il a ouvert auprès d'elle un compte sous le numéro 544351, qui a permis la constitution et la gestion du portefeuille de titre ; lors de l'ouverture de ce compte, le client aurait demandé l'établissement de relevés mensuels à conserver au guichet, et serait revenu sur cette dernière instruction le 17 août 2000 ; la SAM Société Générale Bank & Trust se serait conformée aux instructions ainsi données ;

Suite à la résiliation du mandat de gestion, le compte n° 544351 n'aurait pas été clôturé par G. A., mais, selon une convention du 14 mai 2001, celui-ci aurait ouvert auprès de la SAM Société Générale Bank & Trust un autre compte, sous le numéro 537127 ; les deux comptes auraient alors fonctionné en parallèle et les actifs auraient été progressivement transférés du premier vers le second ;

Selon les termes du mandat de gestion, G. A. aurait opté pour une gestion classique et un profil équilibré prévoyant d'investir seulement 30 % du portefeuille en liquidités, en avoirs monétaires ou en obligations, et 70 % sur des titres plus risqués avec une diversification géographique impliquant une intervention sur les pays émergents ; l'action de la SAM Société Générale Bank & Trust aurait été conforme aux objectifs définis et G. A. serait mal fondé à soutenir que le profil choisi, qui prévoyait un investissement en actions, excluait la prise de risques ; les pertes constatées s'inscriraient dans l'évolution des marchés au cours de la période considérée ; par ailleurs les investissements auraient été diversifiés, tant en ce qui concerne l'achat de titres en direct que le choix de certains fonds d'investissement géographiques, eux-mêmes diversifiés sectoriellement ; le choix des marchés boursiers, notamment celui du Japon, ne caractériserait pas une prise de risques démesurée ;

G. A. serait également mal fondé à lui reprocher d'avoir cédé des valeurs dont le cours avait monté alors que de telles ventes permettaient de réaliser le profit attendu par le client ; les choix faits correspondraient aux anticipations de la banque et l'examen des opérations menées à leur terme démontrerait la pertinence de ces choix au cours d'une année boursière difficile ; G. A. serait également mal fondé à reprocher l'acquisition de warrants destinés à protéger le portefeuille du client contre un risque de forte baisse du dollar ; enfin les comparaisons opérées par G. A. entre l'évolution de son portefeuille et celle des indices des places de Paris, Milan, Francfort et Londres sur une période de gestion inférieure à une année ne seraient pas pertinentes compte tenu du délai nécessaire à la structuration du portefeuille ;

G. A. serait également mal fondé à se plaindre d'un manquement de la SAM Société Générale Bank & Trust à son obligation d'information ; celle-ci se serait conformée aux instructions données par le client, jusqu'en août 2000, de conserver au guichet les documents qui lui étaient destinés, et G. A. aurait rencontré son chargé de clientèle chaque mois dans les locaux de la banque ;

Le compte n° 537127 n'aurait pas été ouvert à l'insu du client puisque serait produite aux débats la convention d'ouverture du 14 mai 2001 dûment signée par ses soins ; les prétendus ordres illicites correspondraient en réalité au transfert progressif des avoirs du compte n° 544351 vers le compte n° 537127 ; au demeurant, ce dernier compte continuerait toujours à fonctionner, conformément aux instructions du client, comme le démontrerait la liste récapitulative des opérations du 1er juin 2001 au 31 mai 2006, alors que les opérations sur le compte n° 544351 auraient concerné la période du 1er février 2000 au 24 septembre 2001 seulement ; l'inexécution de certains ordres s'expliquerait quant à elle par l'existence d'un cours limite de vente fixé par le client, ou par l'existence d'un nantissement au profit de la société française Société Générale consenti par acte du 17 mai 2000 aux termes duquel la valeur des actifs gagés devait correspondre à 130 % du montant du gage, soit 22 791,12 euros ;

Enfin, faute de justifier d'un manquement de la SAM Société Générale Bank & Trust à ses obligations, G. A. ne rapporterait pas la preuve du préjudice qu'il prétend avoir subi ;

Reconventionnellement, la SAM Société Générale Bank & Trust réclame 25 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Par déclaration au greffe du 12 octobre 2006, G. A. a déclaré s'inscrire en faux contre le document intitulé convention de compte et daté du 14 mai 2001, produit par la SAM Société Générale Bank & Trust sous le numéro 19 ;

Par conclusions des 26 octobre 2006, 19 février 2007 et 12 juillet 2007, G. A. soutient qu'il n'a jamais signé cette convention du 14 mai 2001 prévoyant l'ouverture d'un second compte auprès de la SAM Société Générale Bank & Trust, et que la pièce opposée par celle-ci est un faux réalisé par la photocopie de la convention prévoyant l'ouverture du premier compte et qui a ensuite été altérée, en portant la date du 14 mai 2001, en ajoutant des mentions relatives aux conditions de fonctionnement, et en modifiant les dispositions concernant la rubrique courrier et le numéro de compte ;

G. A. conteste l'affirmation de la SAM Société Générale Bank & Trust selon laquelle la révocation du mandat de gestion aurait provoqué la clôture du premier compte et l'ouverture du second et relève que la banque ne conteste même plus avoir établi un faux grossier ; l'argument selon lequel le client aurait accepté tacitement l'ouverture de ce second compte serait infondé et ne pourrait, en tout état de cause, faire échec à l'incident de faux ; l'ouverture du second compte suite à la révocation du mandat de gestion aurait été imaginée par la SAM Société Générale Bank & Trust afin de permettre le nantissement, au profit de sa société mère, des titres transférés sur ce second compte ; jusqu'au 19 avril 2005, date de la fin du gage, aucune des opérations faites sur ce compte n'aurait été initiée par G. A. ;

Il ajoute que la portée du faux est déterminante pour la solution du litige, et que si la manœuvre n'avait pas été déjouée, elle aurait été de nature à tromper le Tribunal ;

Il demande en conséquence au Tribunal de déclarer fausse la pièce produite aux débats par la SAM Société Générale Bank & Trust sous le numéro 19 ; il réclame également 20 000 euros en réparation du préjudice causé par la résistance abusive de la SAM Société Générale Bank & Trust concernant l'incident de faux ;

Par conclusions des 13 décembre 2006, 6 juin 2007 et 11 octobre 2007 la SAM Société Générale Bank & Trust conteste l'existence d'un faux et, reconventionnellement, sollicite 10 000 euros de dommages et intérêts en raison du caractère abusif et vexatoire de l'incident ;

Elle soutient que la pièce n° 19 qu'elle verse aux débats ne fait qu'authentifier l'existence d'un compte ouvert sous le numéro 537127 dont son client a eu parfaitement connaissance, et dont il a d'ailleurs demandé la clôture en cours de procédure ; cette pièce serait « une photocopie de la précédente ouverture de compte mais portant expressément le n° 537127 en date du 14 mai 2001 » ;

Ce compte aurait été ouvert par G. A., tout en maintenant le premier, au moment de la révocation du mandat de gestion par lettre du 21 janvier 2001 ; alors que le 4 février 2000, aucune date n'avait été portée sur la première fiche d'ouverture du compte n° 544351, le 14 mai 2001, suite à la résiliation du mandat de gestion par lettre du 21 janvier 2001, G. A. aurait lui-même établi par photocopie l'écrit argué de faux ; le client aurait d'ailleurs reçu les relevés du compte 537127, sans élever aucune contestation, ainsi que le démontrerait une lettre de sa part du 4 octobre 2001 ; il aurait donc « ratifié l'ouverture de ce nouveau compte qui est intervenue après la révocation du mandat de gestion qui a généré ipso facto la révocation du compte n° 544351 qui y était directement rattaché » ;

La fiche d'ouverture du premier compte n'ayant jamais été altérée, et les mentions apposées sur la fiche d'ouverture du second compte étant matériellement exactes, les deux documents seraient conformes à la vérité ; en l'absence d'altération de la vérité, et dans la mesure où l'ouverture du second compte n'a pas été faite à l'insu de G. A. quel qu'ait été par ailleurs le procédé utilisé par les parties, aucun faux ne serait caractérisé ;

Enfin G. A. instituerait un débat sur le fond étranger à l'essence même d'un incident de faux civil, la matérialité de la fiche d'ouverture de compte ne pouvant être mise en cause ; la SAM Société Générale Bank & Trust sollicite la jonction de l'incident de faux avec le fond dans la mesure où l'incident relève en fait de l'appréciation au fond de l'ensemble des éléments soumis à l'appréciation du Tribunal ; à défaut le Tribunal pourrait établir sa conviction sur les éléments qui lui sont soumis, selon les prescriptions de l'article 281 du Code de procédure civile ;

L'affaire a été plaidée sur l'incident à l'audience du 8 novembre 2007, et mise en délibéré ; elle a été remise au rôle le 6 décembre 2007 pour les conclusions du ministère public ;

Par conclusions déposées à l'audience du 7 janvier 2008, le Procureur général conclut à ce qu'il soit procédé pour l'instruction de l'affaire comme il est dit aux articles 279 à 286 du Code de procédure civile ; l'affaire a alors été remise en délibéré jusqu'à ce jour ;

Sur quoi,

Sur la procédure

Attendu que par déclaration faite au greffe général le 12 octobre 2006, G. A. a déclaré s'inscrire en faux contre un document établi à l'en-tête « SOCIÉTÉ GÉNÉRALE BANK & TRUST », intitulé « convention de compte » et portant la date du 14 mai 2001, que la SAM Société Générale Bank & Trust avait produit en pièce n° 19 dans l'instance les opposant ;

Attendu qu'en cas d'inscription de faux, l'article 294 du Code de procédure civile impose au Tribunal de procéder pour l'instruction de l'affaire comme il est dit aux articles 279 à 286 inclusivement ;

Attendu que selon l'article 279 du Code de procédure civile, soit le Tribunal statue immédiatement, s'il possède des éléments d'appréciation suffisants, soit il ordonne la comparution des parties puis, si cela est nécessaire, d'autres mesures d'instruction ;

Attendu qu'il n'y a dès lors pas lieu de remettre l'examen de l'incident jusqu'au jugement de l'affaire au fond ;

Sur le faux

Attendu que l'inscription de faux prévue par l'article 290 du Code de procédure civile s'applique à tout document établi pour servir de preuve au cours d'une instance civile, même sous la forme d'une photocopie, lorsque le document ainsi versé aux débats est de nature à avoir une valeur probatoire et à entraîner des effets juridiques ;

Attendu en l'espèce, le document établi à l'en-tête « SOCIÉTÉ GÉNÉRALE BANK & TRUST », intitulé « convention de compte » et daté du 14 mai 2001, porte une signature attribuée à G. A. et a été produit par la SAM Société Générale Bank & Trust pour faire la preuve de l'existence d'une seconde convention d'ouverture de compte conclue entre eux ;

Attendu que la pièce produite par la SAM Société Générale Bank & Trust sous le numéro 19 est donc de celles susceptibles d'être alléguées comme fausses ;

Attendu qu'il résulte des explications des parties, corroborées par l'examen de l'original de la pièce litigieuse et sa comparaison avec la convention d'ouverture de compte initiale, que celle-là a été réalisée par photocopie de celle-ci, sur laquelle :

1) ont été rajoutées la date du « 14.05.01 » et la mention « ouverture compte non géré pour transfert des titres du compte géré n° 544351 »

2) la mention « guichet » a été remplacée par l'adresse « 13 Bd Princesse Charlotte 98000 MONACO », et le numéro « 544 351 » par « 537 127 » dans la rubrique intitulée « N° de tiers », avant qu'elle soit à nouveau photocopiée pour être produite aux débats ;

Attendu qu'un tel document, qui associe à la signature de G. A. des mentions que cette signature n'avait pas pour objet d'approuver, constitue un faux ;

Attendu que l'éventuelle véracité des faits constatés dans un faux matériel est sans incidence sur la qualification de faux, et qu'il importe donc peu, à ce stade du procès, que G. A. ait approuvé tacitement ou même expressément l'ouverture de ce second compte conformément aux mentions portées par la SAM Société Générale Bank & Trust sur l'acte litigieux ;

Attendu qu'il convient en conséquence, sans qu'il y ait lieu d'ordonner de plus amples mesures d'instruction, de déclarer faux le document établi à l'en-tête « SOCIÉTÉ GÉNÉRALE BANK & TRUST », intitulé « convention de compte » et portant la date du 14 mai 2001, produit par la SAM Société Générale Bank & Trust en photocopie et en original sous le numéro 19 ;

Attendu que conformément à l'article 296 du Code de procédure civile il convient de dire que le présent jugement sera mentionné en marge de l'acte d'inscription de faux et des pièces reconnues fausses, et de prescrire la conversation de ces pièces au greffe, annexées à l'acte d'inscription de faux ;

Sur l'abus de procédure

Attendu que la SAM Société Générale Bank & Trust est mal fondée à soutenir que l'incident a été soulevé abusivement ;

Attendu au contraire que ses contestations ont eu pour effet de retarder la solution du litige, alors même qu'elle connaissait les conditions matérielles dans lesquelles le document litigieux avait été confectionné ; qu'elle a persisté en effet à soutenir que ce document pouvait faire la preuve du consentement de G. A., allant même jusqu'à affirmer que « le 14 mai 2001 le sieur A a établi par photocopie l'écrit argué de faux » ;

Attendu que l'issue de la procédure a été retardée de ce fait de plus d'une année ; qu'il convient d'allouer à G. A. 8 000 euros de dommages et intérêts en raison de l'abus commis par la SAM Société Générale Bank & Trust dans le droit de se défendre en justice ;

Sur les dépens

Attendu que, conformément à l'article 231 du Code de procédure civile, la partie qui succombe est condamnée aux dépens ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal, statuant contradictoirement, sur incident de faux,

Vu les articles 279 alinéa 1, et 290 et suivants du Code de procédure civile,

Vu la déclaration d'inscription de faux du 12 octobre 2006, et la pièce annexée,

Déclare faux le document établi à l'en-tête « SOCIÉTÉ GÉNÉRALE BANK & TRUST », intitulé « convention de compte » et portant la date du 14 mai 2001, produit par la SAM Société Générale Bank & Trust en photocopie et en original sous le numéro 19 ;

Ordonne la mention du présent jugement en marge de la déclaration d'inscription de faux, ainsi que de la photocopie et de l'original de la pièce litigieuse, lesquels seront conservés au greffe et demeureront annexés à la déclaration d'inscription de faux ;

Renvoie l'affaire et les parties à l'audience du JEUDI 3 AVRIL 2008 à 9 heures pour les conclusions au fond de G. A. ;

Condamne la SAM Société Générale Bank & Trust à payer à G. A. 8 000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de sa résistance abusive sur l'incident de faux ;

Condamne la SAM Société Générale Bank & Trust aux dépens de l'incident, distraits au profit de Maître Jean-Pierre Licari, avocat-défenseur, sous sa due affirmation ;

Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le greffier en chef, au vu du tarif applicable.

Composition🔗

Mme Grinda-Gambarini, prés. ; M. Dubes, prem. subst. proc. Gén. ; Mes Licari et Léandri, av. déf.

Note🔗

Ce jugement visant les articles 279, alinéa 1 et 290 et suivants du Code de procédure civile ainsi que la déclaration d'inscription de faux du 12 octobre 2006 et la pièce annexée,

– a déclaré faux le document établi à l'en-tête « Société générale Bank & Trust » intitulé « convention de compte » et portant date du 14 mai 2001, produit par la SAM Société Général Bank & Trust en photocopie et en original sous le numéro 19 ;

– a ordonné la mention du présent jugement en marge de la déclaration d'inscription de faux ainsi que de la photocopie et de l'original de la pièce litigieuse lesquels seront conservés au greffe et demeureront annexés à la déclaration d'inscription de faux.

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