Tribunal de première instance, 1 février 2007, B. c/ SA Monte Paschi Banque

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Abstract🔗

Banques

Responsabilité - Faute quasi délictuelle - Non-exécution de l'ordre donné de transférer sans délai sur un compte (de la fille) les fonds déposés dans le compte (de la mère) avant le décès du titulaire de celui-ci - Préjudice : perte d'une chance de récupérer une partie des fonds

Résumé🔗

Par le seul effet du transfert du compte n° 8086547001 de Madame B. sur le compte de Madame D. n° 5406463001 suivant ordre en date du 3 avril 2002, les fonds sont passés dans le patrimoine de cette dernière, sans qu'il soit nécessaire de s'appesantir sur les raisons de ce transfert, lesquelles ne sont d'ailleurs pas précisément établies et ne sont pas davantage nécessaires à la solution du litige ;

L'action initiée par Madame B. pour obtenir la restitution des fonds ne saurait donc être de nature contractuelle dans la mesure où la banque est un tiers non partie au mandat confié par la titulaire du compte pour gérer les fonds déposés ;

Le litige ne peut dès lors se résoudre qu'en dommages et intérêts par suite du préjudice résultant de la perte de chance de récupérer des fonds par la faute professionnelle éventuelle de la banque sur le fondement quasi délictuel ;

En effet la faute quasi délictuelle peut résulter de l'abstention d'une personne, même non dictée par la malice ou l'intention de nuire, qui cause un dommage alors que le fait omis résulte comme en l'espèce d'une obligation conventionnelle à laquelle la victime n'était pas partie ;

L'ordre écrit, dont le contenu ne fait l'objet d'aucune discussion, avait pour objectif le transfert sans délai de tous les fonds apparaissant au crédit du compte de dépôt à vue de Madame D. à l'effet de les déposer sur le compte de Monsieur B. ouvert le jour même ;

Il ne fait pas débat que la clôture du compte n'y est pas réclamée expressément ;

Sauf exceptions, le transfert de l'intégralité des fonds déposés sur un compte n'entraîne pas ipso facto la clôture de ce dernier, laquelle s'analyse en une rupture unilatérale des relations contractuelles, non visé par le mandat ;

Le compte dont s'agit ne pouvait être clôturé par la banque hors les cas expressément prévus de conserve, tel le décès du titulaire ;

Il n'est aucunement spécifié dans l'attestation de Monsieur B., dont le contenu est précisément exploitable en ce que son auteur est un tiers par rapport aux relations contractuelles alléguées, qu'un mandat aurait été définitivement donné de clôturer le compte en ce que ce dernier a simplement rapporté les faits suivant lesquels avait été évoqué l'ensemble des questions soulevées par l'incidence de l'état de santé de la titulaire des comptes sur le devenir des fonds, dont l'hypothèse de leur clôture ;

Il en résulte que la banque était en mesure de transférer les fonds sans clôturer le compte dès lors que rien n'indique que l'exécution de l'ordre n'aurait pas pu être effective avant le décès de la titulaire dudit compte ;

D'ailleurs elle a exécuté l'ordre verbal de vente des titres Motorola sans invoquer un quelconques empêchement ;

La carence du banquier a entraîné le blocage des fonds et a fait tomber la procuration, privant ainsi Madame B. de la possibilité de les récupérer alors même qu'il n'est pas douteux que la banque n'ignorait rien de leur prévoyance et de sa volonté d'organiser un transfert rapide avant le décès de sa mère ;

Ce faisant, la banque a commis une faute quasi délictuelle qui a causé un préjudice financier à Madame B. ;


Motifs🔗

Le Tribunal,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Considérant les faits suivants :

De nationalité américaine, Madame C. B. a ouvert un compte de dépôt auprès de la Banque Monte Paschi à Monaco suivant acte en date du 10 juin 1991 ;

Sa mère, Madame D. O., a également ouvert un compte dans cette banque portant le n° 5406463001 ;

Aux termes d'un acte signé le 21 février 2002, Madame O. D. a donné pouvoir à Monsieur D. B., époux de Madame C. B., née D., « de régir, gérer et administrer tant activement que passivement toutes affaires présentes et à venir avec la Monte Paschi Banque, et notamment » d'accomplir un certain nombre d'actes énumérés ;

Suivant lettre en date du 3 avril 2002, Madame C. B. a sollicité de la banque Monte Paschi de Monaco, le transfert de ses avoirs détenus sur son compte n° 8086547001 sur celui de sa mère n° 5406463001 et la clôture de son compte n° 8086547001 ;

Le 18 mars 2004, Monsieur B. a ouvert un compte n° 01815120 auprès de la banque Monte Paschi de Monaco conformément à une convention d'ouverture signée le même jour ;

Au moyen d'une note manuscrite datée du 18 mars 2004, rajoutée sur un courrier de la banque Monte Paschi en date du 17 mars 2004 destiné à Madame O. D. et comportant la liste des avoirs détenus dans ses livres sur le compte n° 05406463001 et le portefeuille n° 124572, Monsieur D. B. a donné l'ordre suivant :

please transfer the total assets of this account to my personal account opened this date in your bank and in my name

Monaco 18 mars 2004 «

Concomitamment et sur ordre verbal de Monsieur B., la banque a procédé à la vente de titre Motorola ;

Madame O. C., épouse D. est décédée le 19 mars 2004 à Nice et sa succession a été ouverte auprès de Maître Hervet Benoît, notaire dans cette ville ;

Dans une lettre en date du 7 mai 2004, la Monte Paschi Banque SA, à laquelle il était reproché de ne pas avoir donné suite à l'ordre écrit, a notamment indiqué aux époux B.

Vous vous étonnez de ce que notre établissement n'ait pas donné suite aux demandes que vous lui aviez formulées.

Ces dernières n'entraient pas dans le cadre du mandat qui a été conféré. »

Par lettres recommandées adressées à la Banque Monte Paschi de Monaco et au siège français situé à Paris le 11 juin 2004, Maître Deplano, conseil des époux B., a sollicité l'indemnisation du préjudice qui aurait résulté de l'immobilisation des fonds intégrés dans la succession de Madame D. et de l'impossibilité consécutive de les récupérer ;

Par acte d'huissier en date du 3 mars 2005, Madame C. B. née D. a fait assigner la SA Monte Paschi Banque, dont le siège est situé à Paris, au Parquet de Madame le Procureur général de la cour d'appel de Monaco, et en tant que de besoin la société Monte Paschi Banque SA, en sa succursale à Monaco, pour s'entendre condamner :

lui payer la somme de 283 016,78 euros correspondant aux sommes qu'elle détient en compte ;

lui payer celle de 13 551,46 euros représentant la moins value depuis la date de l'ordre de virement non exécuté ;

lui payer la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts toutes causes de préjudices confondues ;

aux dépens distraits au profit de Maître Joëlle Pastor-Bensa, avocat défenseur, sous sa due affirmation ;

Elle prétend que la banque Monte Paschi de Monaco lui aurait conseillé de ne pas conserver des fonds sur un compte personnel en qualité de citoyenne américaine soumise à la réglementation contraignante issue des événements du 11 septembre 2001, et ainsi de les transférer sur un compte ouvert au nom de sa mère avec procuration donnée aux époux B. ;

Elle ajoute qu'à l'issue d'un entretien qui se serait déroulé le 18 mars 2004 entre un responsable de la banque et son époux, en présence d'un tiers l'ayant accompagné, Monsieur J. B., il aurait été conseillé à Monsieur B., compte tenu de l'état de santé de Madame O. D., de vendre des actions de la société Motorola puis de transférer la totalité des fonds sur un compte ouvert le jour même à son nom, ordres qu'il aurait donnés le jour même ;

Elle en déduit qu'une faute aurait été commise par le banquier qui n'aurait pas exécuté l'ordre de transfert des fonds au mépris de la note écrite en date du 18 mars 2004, acte qui relèverait du mandat confié par Madame O. D., lequel serait rédigé dans les termes les plus larges en matière bancaire sans énumération limitative quant aux actes et comptes concernés ;

Au moyen de conclusions, la société anonyme Monte Paschi Banque SA dont le siège est situé à Paris, représentée par la société étrangère Monte Paschi Banque SA, en sa succursale sise à Monaco, sollicite du tribunal :

qu'il dise et juge que Madame B. est irrecevable en sa demande, dès lors qu'elle ne pouvait donner aucun ordre à l'effet de voir transférer à son seul profit le solde des avoirs détenus sur le compte de sa mère à la date de son décès, et considérant que seuls les héritiers sont en droit de formuler une demande de transfert du solde du compte clôturé ;

qu'il relève que Madame B. n'a pas donné suite à la requête formulée par lettre en date du 7 mai 2004 tendant à obtenir un certificat de décès et l'acte de dévolution de la succession établi par un notaire monégasque,

qu'il constate le défaut de preuve d'un prétendu conseil du banquier de transférer ses fonds sur le compte de sa mère et que la preuve inverse ressort du dossier en ce qu'une lettre de ce dernier en date du 21 février 2002 prenait seulement acte de sa demande expresse formulée pour des raisons de commodité après lui avoir rappelé à diverses reprises qu'elle devait régulariser sa situation bancaire au regard de la nouvelle législation fiscale des États-Unis applicable dès le 10 juin 2001 ;

qu'il dise et juge qu'il n'est pas justifié du préjudice allégué eu égard à des avoirs évalués à la somme totale de 290 270,43 euros et à l'absence de communication des éléments propres à permettre un transfert des fonds au notaire chargé du règlement de la succession ;

qu'il la déboute en conséquence de ses demandes ;

qu'il condamne Madame B. au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices tant matériel que moral que leur occasionnerait cette demande abusive et vexatoire ;

qu'il la condamne aux entiers dépens, distraits au profit de Monsieur le Bâtonnier É. Leandri, avocat défenseur, aux offres de droit ;

Aux termes de conclusions additionnelles, la défenderesse formule en outre les demandes suivantes :

enjoindre à la dame B. de produire l'acte de décès de sa mère, dame O. D. et aussi l'acte de notoriété daté et signé par les parties, aux lieu et place du simple projet communiqué selon bordereau du 18 janvier 2006 ;

dire et juger le cas échéant que le projet d'acte de notoriété après décès de la dame O. D., à supposer qu'il ait été régularisé en l'état, authentifie bien l'existence d'une hoirie dont fait partie la dame B., mais laquelle ne peut seule revendiquer le transfert de l'intégralité de l'actif du compte dont sa mère était détentrice auprès de la Monte Paschi Banque ;

rejeter des débats l'attestation du sieur B. produite par la dame B., comme émanant d'un tiers étranger aux relations contractuelles des parties et en raison de son caractère évasif, sauf à retenir le cas échéant qu'il résulte de ses dires que dans le cadre de la procuration le sieur B. avait bien donné ordre de vendre les obligations Motorola, alors qu'il n'avait nullement pouvoir pour concomitamment requérir la clôture du compte et le transfert de l'intégralité des avoirs sur celui de son épouse, laquelle au demeurant ne paraît pas avoir été présente à la banque à la date indiquée du 18 mars 2004 ;

Débouter la dame B. de son action en responsabilité envers la banque dès lors que son époux le sieur D. B. n'avait procuration que pour gérer le compte, et non pour le clôturer ;

cet égard, il est fait état de ce que Madame B. ne serait pas en droit de poursuivre la responsabilité de la banque faute d'avoir été partie au contrat et demeurant la signataire de l'acte d'estimation de portefeuille postérieurement au 18 mars 2004, date de l'entretien auquel elle n'était pas présente, soit à une période où elle n'était plus habilitée pour gérer le compte de la défunte ni en relation contractuelle d'aucune sorte relativement à ce compte ;

Aux termes de conclusions récapitulatives, Madame B. réitère ses demandes et sollicite un rejet des demandes reconventionnelles ;

Elle soutient que la responsabilité du banquier découlerait de son accord donné verbalement le 18 mars 2004 pour procéder à l'opération discutée et sur la confirmation postérieure de sa mise à exécution ;

Elle ajoute que l'acte de clôture du compte accompagné du virement du solde sur un autre compte serait un acte d'administration non étranger au mandat, que l'inexécution de cet ordre ou l'exécution avec retard serait fautive dès lors qu'elle génèrerait un préjudice, et qu'en tout état de cause, dans l'hypothèse de l'impossibilité de recouvrer les fonds qui étaient sa propriété, le manquement du banquier à son obligation de conseil serait encore démontré ;

Au moyen de conclusions réitératives sur exception de communication de pièces, il est réclamé la communication, dans un délai à fixer, conformément à l'article 274 du Code civil, de :

l'acte de décès de Madame O. D. ;

une expédition de l'acte de notoriété établi par Maître Hervet, notaire à Nice ;

le courrier électronique reçu de la banque dont il est fait état au sein de la lettre du conseil de la demanderesse en date du 02 juillet 2004 et le projet d'engagement comportant la clause de porte fort alléguée ;

Sur quoi,

Sur l'incident de communication de pièces :

Attendu que la demanderesse n'a certes pas communiqué l'acte de décès de Madame D. sans fournir une quelconque justification ;

Attendu toutefois qu'il y a lieu de rappeler qu'un projet d'acte de notoriété établi par Maître Hervet a été produit et soumis au débat ;

Attendu qu'il en ressort que Madame D. est décédée le 19 mars 2004 et qu'elle laisse, pour lui succéder, trois enfants héritiers pour le tout par parts égales, seuls points qui intéressent la cause et qui ne sont pas sérieusement contredits ;

Attendu qu'il en résulte simplement que n'étant pas l'unique héritière de Madame D., ce qui n'a pas été véritablement discuté, Madame B. ne serait pas en mesure de revendiquer seule des biens successoraux en cette qualité ;

Attendu qu'en tout état de cause, la banque peut se rapprocher du notaire désigné à l'effet d'accomplir les actes qui lui incombent indépendamment de la présente procédure ;

Attendu qu'en l'état du litige qui oppose uniquement Madame B. et la banque sur une éventuelle responsabilité de cette dernière par suite de l'inexécution alléguée d'un ordre de transfert de fonds du vivant de Madame D. et de l'impossibilité de récupérer les fonds intégrés dans la succession, la communication des pièces afférentes à la succession n'est pas utile et ne saurait être ordonnée au visa de l'article 274 du Code de procédure civile ;

Attendu que la communication des pièces dont il est fait allusion au sein du courrier en date du 2 juillet 2004 n'est pas davantage nécessaire puisqu'il n'apparaît pas que Madame B. s'y soit expressément référée en tant qu'élément de preuve de la responsabilité du banquier ;

Attendu que la demande de communication de pièces sera donc intégralement rejetée ;

Sur l'irrecevabilité des demandes :

Attendu qu'au moment où l'ordre de transfert des fonds a été donné par Monsieur B., soit le 18 mars 2004, la titulaire du compte n'était pas décédée ;

Attendu que la défenderesse, n'invoque expressément aucune fin de non-recevoir identifiable ;

En tout état de cause, elle ne peut soutenir sa demande d'irrecevabilité, en alléguant a priori d'un défaut de qualité et d'intérêt à agir de Madame B. pour revendiquer des fonds intégrés dans la succession de Madame D., au seul motif clairement énoncé que la mandataire n'aurait pas été en mesure de donner l'ordre de transférer à son bénéfice le solde des avoirs détenus sur le compte de sa mère à la date de son décès, alors qu'il n'est pas établi qu'elle aurait agi en qualité d'héritière ;

Attendu qu'il n'est par ailleurs justifié d'aucune cause d'irrecevabilité, notamment en relation avec le fait que l'ordre aurait été donné par Monsieur B. hors la présence de son épouse ;

Attendu que la demande d'irrecevabilité des demandes au principal sera donc rejetée ;

Sur le fond :

Attendu que les demandes sont formulées à l'encontre de la SA Monte Paschi Banque représentée par sa succursale à Monaco ;

Attendu que le fondement de l'action principale n'est pas précisé ;

Attendu que le Tribunal doit vérifier que l'action est fondée et pour ce faire définir l'exact fondement des demandes qui lui sont soumises ;

Attendu que par le seul effet du transfert du compte n° 8086547001 de Madame B. sur le compte de Madame D. n° 5406463001 suivant ordre en date du 3 avril 2002, les fonds sont passés dans le patrimoine de cette dernière, sans qu'il soit nécessaire de s'appesantir sur les raisons de ce transfert, lesquelles ne sont d'ailleurs pas précisément établies et ne sont pas davantage nécessaires à la solution du litige ;

Attendu que l'action initiée par Madame B. pour obtenir la restitution des fonds ne saurait donc être de nature contractuelle dans la mesure où la banque est un tiers non partie au mandat confié par la titulaire du compte pour gérer les fonds déposés ;

Attendu que Madame B. ne saurait davantage tirer argument de l'existence de l'ordre de transfert des avoirs en date du 18 mars 2004 pour agir contre le banquier sur un fondement contractuel, dès lors qu'à supposer que cet acte soit susceptible de créer des obligations à la charge de la banque, point déjà sujet à controverse, aucun élément de la cause ne permet de combattre la présomption tirée de son contenu d'où il ressort qu'il a bien été donné par Monsieur B. agissant seul et à titre personnel en vertu du mandat nominatif à lui consenti par Madame D.

Attendu que fait également défaut la preuve de ce que les questions relatives à la préservation des fonds initialement détenus par Madame B. et à leur restitution, seraient entrées dans le champ contractuel ;

Attendu que le litige ne peut dès lors se résoudre qu'en dommages et intérêts par suite du préjudice résultant de la perte de chance de récupérer des fonds par la faute professionnelle éventuelle de la banque sur le fondement quasi délictuel ;

Attendu qu'en effet la faute quasi délictuelle peut résulter de l'abstention d'une personne, même non dictée par la malice ou l'intention de nuire, qui cause un dommage alors que le fait omis résulte comme en l'espèce d'une obligation conventionnelle à laquelle la victime n'était pas partie ;

Attendu certes que le mandat était très large, tel que cela ressort d'une interprétation littérale de la convention, laquelle concorde manifestement avec l'intention évidente des parties de mettre en place une gestion des fonds facilitée ;

Attendu qu'il comporte en effet une liste d'actes très importante et ne se résume pas à des actes usuels dans la gestion des comptes bancaires mais s'étend à de véritables engagements (prêts, nantissement) ;

Attendu que cette liste n'est pas limitative par suite de l'utilisation de l'adverbe « notamment » ;

Attendu que l'ordre écrit, dont le contenu ne fait l'objet d'aucune discussion, avait pour objectif le transfert sans délai de tous les fonds apparaissant au crédit du compte de dépôt à vue de Madame D. à l'effet de les déposer sur le compte de Monsieur B. ouvert le jour même ;

Attendu qu'il ne fait pas débat que la clôture du compte n'y est pas réclamée expressément ;

Attendu que, sauf exceptions, le transfert de l'intégralité des fonds déposés sur un compte n'entraîne pas ipso facto la clôture de ce dernier, laquelle s'analyse en une rupture unilatérale des relations contractuelles, non visé par le mandat ;

Attendu que le compte dont s'agit ne pouvait être clôturé par la banque hors les cas expressément prévus de conserve, tel le décès du titulaire ;

Attendu qu'il n'est aucunement spécifié dans l'attestation de Monsieur B., dont le contenu est précisément exploitable en ce que son auteur est un tiers par rapport aux relations contractuelles alléguées, qu'un mandat aurait été définitivement donné de clôturer le compte en ce que ce dernier a simplement rapporté les faits suivant lesquels avait été évoqué l'ensemble des questions soulevées par l'incidence de l'état de santé de la titulaire des comptes sur le devenir des fonds, dont l'hypothèse de leur clôture ;

Attendu qu'il en résulte que la banque était en mesure de transférer les fonds sans clôturer le compte dès lors que rien n'indique que l'exécution de l'ordre n'aurait pas pu être effective avant le décès de la titulaire dudit compte ;

Attendu d'ailleurs qu'elle a exécuté l'ordre verbal de vente des titres Motorola sans invoquer un quelconque empêchement ;

Attendu que la carence du banquier a entraîné le blocage des fonds et a fait tomber la procuration, privant ainsi Madame B. de la possibilité de les récupérer alors même qu'il n'est pas douteux que la banque n'ignorait rien de leur provenance et de sa volonté d'organiser un transfert rapide avant le décès de sa mère ;

Attendu que ce faisant, la banque a commis une faute quasi délictuelle qui a causé un préjudice financier à Madame B. ;

Attendu que l'attitude de la demanderesse, qui a accompli des actes hasardeux et porteurs de risques évidents, par convenance personnelle, n'est pas exempte de reproches ;

Attendu que n'étant plus propriétaire des fonds déposés à titre personnel mais pouvant seulement prétendre à une quote-part dans le cadre de la liquidation de la succession, Madame B. ne saurait obtenir ni leur restitution intégrale, ni l'octroi de dommages et intérêts équivalents ;

Attendu que tirant argument de ces circonstances, et rappelant que le préjudice ne peut résulter que de la perte de chance de récupérer une partie des fonds, le montant des dommages et intérêts sera limité à la somme de 100 000 euros ;

Attendu que le surplus des préjudices ne ressort d'aucun élément de preuve et qu'un préjudice moral, non explicité, est manifestement incompatible avec les circonstances de la cause ;

Attendu que les dépens seront supportés par la partie qui succombe, soit par la SA Monte Paschi Banque ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL, statuant publiquement et contradictoirement,

Dit qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de communication de pièces des défenderesses ;

Rejette les demandes d'irrecevabilité soutenues par la SA Monte Paschi Banque ;

Dit que la SA Monte Paschi Banque, a commis une faute quasi délictuelle à l'origine d'un préjudice financier subi par Madame B. ;

Condamne la SA Monte Paschi Banque, à payer à Madame B. la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne la SA Monte Paschi Banque, aux dépens, distraits au profit de Maître Joëlle Pastor-Bensa, avocat défenseur, sous sa due affirmation ;

Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le Greffier en chef au vu du tarif applicable ;

Composition🔗

Mme Grinda-Gambarini, prem. prés. ; Mme Dubes, prem. subs. proc. gén. ; Mes Pastor-Bensa et Leandri, av. déf. ; Deplano, av. bar. de Nice. -

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