Tribunal de première instance, 25 mars 2004, A. G. c/ V. A.

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Abstract🔗

Divorce

Pension alimentaire : art. 206-23 du Code civil accordée à l'épouse - Suppression de la pension : l'épouse disposant de revenus suffisants pour assurer sa subsistance art. 177 du Code civil

Résumé🔗

Par jugement contradictoire en date du 11 janvier 2001, le Tribunal de première instance a prononcé avec toutes conséquences de droit le divorce des époux A. G. / V. A. aux torts exclusifs du mari qui a été notamment condamné à payer à son ancienne épouse le premier de chaque mois et d'avance une pension alimentaire d'un montant de 7 000 francs, soit 1 067,14 euros ;

Suivant exploit en date du 6 mars 2003, A. G. a régulièrement fait assigner V. A. aux fins d'être déchargé du paiement de la pension alimentaire dont il est débiteur envers celle-ci également de faire condamner V. A. à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

En application de l'article 185 du Code civil, les époux contribuent aux charges du mariage en proportion de leurs facultés respectives, à défaut de dispositions particulières dans leur contrat de mariage ;

La législation applicable en telle matière prévoit la possibilité de voir perdurer cette obligation même en cas de rupture du lien conjugal ;

En effet, l'article 206-23 du Code civil édicte qu'à défaut d'avantages matrimoniaux suffisant à assurer sa subsistance, l'époux au profit de qui le divorce a été prononcé peut obtenir à la charge de son conjoint une pension alimentaire « ;

Ainsi, il doit être déduit des termes de cet article que l'obligation pour un époux fautif de verser une pension à son ancien conjoint afin que celui-ci puisse subvenir à ses besoins présente un caractère alimentaire et que toute demande relative à l'augmentation ou à la diminution de cette obligation doit satisfaire aux règles applicables en matière d'aliments, notamment à l'article 177 du Code civil qui stipule que » les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit « ;

Par conséquent, si toute pension alimentaire doit au premier chef couvrir les besoins estimés de celui qui les reçoit, il n'en demeure pas moins, en principe, que son montant doit également s'apprécier en fonction des ressources de celui qui la sert ;

Mais en l'espèce A. G. ne forme pas une demande tendant à voir diminuer le montant de la pension alimentaire due à son ex-épouse en raison d'une régression de sa propre situation de fortune, mais sollicite purement et simplement la suppression de cette pension compte tenu de la nouvelle situation financière de son ancienne épouse ;

Il découle de l'objet précis de la prétention principale d'A. G. que le Tribunal doit se borner à apprécier si la bénéficiaire de la pension alimentaire dont la suppression est demandée dispose désormais de besoins suffisant à assurer sa subsistance ;

En effet, il n'y a pas lieu dans ce cas de tenir compte des facultés financières du demandeur, lesquelles sont indifférentes pour l'appréciation préalable des besoins de la défenderesse ;

Ainsi il convient de se référer au procès-verbal de contrat dressé le 3 juillet 2003 duquel il ressort que V. A. était salariée à cette époque en qualité d'employée de bureau suppléante auprès du service de l'état civil de Monaco et qu'à ce titre, elle a perçu durant la période de juillet 2002 à juin 2003, une rémunération nette de 19 250,16 euros ainsi qu'une somme de 8 518,50 euros au titre de prestations familiales diverses, soit au total des revenus annuels s'établissant à 27 768,56 euros ;

De surcroît contrairement aux allégations de la défenderesse, qui soutient que son contrat de travail n'est pas à durée indéterminée et est arrivé à son terme le 14 novembre 2003, il résulte du courrier versé aux débats, daté du 28 novembre 2003 et adressé au conseil d'A. G. par le secrétaire général de la Mairie de Monaco, que V. A. devait être nommée et titularisée en qualité d'employée de bureau avec effet à compter du 8 octobre 2003 et qu'à ce titre, elle allait bénéficier d'un salaire au moins identique à celui perçu alors qu'elle n'était que suppléante ;

Il doit être déduit de ces éléments que dorénavant, V. A. dispose à elle seule de revenus suffisants pour subvenir à ses propres besoins, en sorte que l'allocation d'une pension alimentaire n'est plus justifiée ;

En conséquence il convient de faire droit à la demande d'A. G. et de le décharger du paiement de la pension alimentaire auquel il a été condamné par le jugement du 11 janvier 2001.


Motifs🔗

Le Tribunal,

Considérant les faits suivants :

Par jugement contradictoire en date du 11 janvier 2001, le Tribunal de première instance a prononcé avec toutes conséquences de droit le divorce des époux A. G. / V. A. aux torts exclusifs du mari qui a été notamment condamné à payer à son ancienne épouse le premier de chaque mois et d'avance une pension alimentaire d'un montant de 7 000 francs, soit 1 067,14 euros ;

Suivant exploit en date du 6 mars 2003, A. G. a régulièrement fait assigner V. A. aux fins d'être déchargé du paiement de la pension alimentaire dont il est débiteur envers celle-ci et également de faire condamner V. A. à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

l'appui de ses prétentions, le demandeur expose que son ancienne épouse dispose désormais, consécutivement à son emploi au service de l'état civil de la Mairie de Monaco, de revenus professionnels suffisants qui sont de surcroît augmentés de diverses allocations ;

Dans ses conclusions du 14 mai 2003, V. A. demande au Tribunal de débouter A. G. de ses prétentions et, reconventionnellement, de le condamner à lui payer une somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour les préjudices matériel et moral ainsi occasionnés ;

Au soutien de ses demandes, V. A. fait notamment valoir qu'A. G. ne verse à l'appui de son action aucun justificatif relatif à ses propres revenus et charges ;

En réplique, le demandeur a indiqué qu'un évident souci de loyauté aurait dû imposer à V. A. d'informer son ancien époux de l'évolution de sa situation professionnelle et du montant actuel de l'ensemble de ses ressources, soit 2 314,04 euros par mois, dont le quantum paraît suffisamment élevé pour couvrir ses besoins personnels, étant relevé qu'A. G. entend prouver ses affirmations par la production au débat d'un procès-verbal de constat établi suite à une ordonnance de référé rendue le 25 juin 2003 ayant autorisé un huissier à se rendre auprès du chef de service du personnel de la Mairie de Monaco pour obtenir tous renseignements utiles ;

A. G. ajoute qu'il s'est remarié le 17 juin 2002 et que de cette union est issu un fils dont l'entretien et l'éducation engendrent des charges importantes que ses activités professionnelles d'agent immobilier lui permettent de supporter, ce qui ne serait pas le cas de la pension alimentaire litigieuse ;

Dans de nouvelles écritures judiciaires datées du 15 octobre 2003, V. A. relève en substance que son contrat de travail n'est pas à durée indéterminée et arrive à son terme le 14 novembre 2003 ; que par conséquent, il ne peut être allégué par le demandeur une amélioration de sa situation professionnelle et financière, que celui-ci n'a d'ailleurs toujours pas justifié dans ses précédents écrits, ce à quoi A. G. répond que toute considération relative à ses propres revenus doit être déclarée hors débat étant donné que l'objet de la demande concerne exclusivement V. A. ;

Sur ce,

Attendu qu'en application de l'article 185 du Code civil, les époux contribuent aux charges du mariage en proportion de leurs facultés respectives, à défaut de dispositions particulières dans leur contrat de mariage ;

Attendu que la législation applicable en telle matière prévoit la possibilité de voir perdurer cette obligation même en cas de rupture du lien conjugal ;

Qu'en effet, l'article 206-23 du Code civil édicte » qu'à défaut d'avantages matrimoniaux suffisant à assurer sa subsistance, l'époux au profit de qui le divorce a été prononcé peut obtenir à la charge de son conjoint une pension alimentaire « ;

Qu'ainsi, il doit être déduit des termes de cet article que l'obligation pour un époux fautif de verser une pension à son ancien conjoint afin que celui-ci puisse subvenir à ses besoins présente un caractère alimentaire et que toute demande relative à l'augmentation ou à la diminution de cette obligation doit satisfaire aux règles applicables en matière d'aliments, notamment à l'article 177 du Code civil qui stipule que » les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit " ;

Que par conséquent, si toute pension alimentaire doit au premier chef couvrir les besoins estimés de celui qui la reçoit, il n'en demeure pas moins, en principe, que son montant doit également s'apprécier en fonction des ressources de celui qui la sert ;

Mais attendu qu'en l'espèce A. G. ne forme pas une demande tendant à voir diminuer le montant de la pension alimentaire due à son ex-épouse en raison d'une régression de sa propre situation de fortune, mais sollicite purement et simplement la suppression de cette pension compte tenu de la nouvelle situation financière de son ancienne épouse ;

Attendu qu'il découle de l'objet précis de la prétention principale d'A. G. que le Tribunal doit se borner à apprécier si la bénéficiaire de la pension alimentaire dont la suppression est demandée dispose désormais de besoins suffisant à assurer sa subsistance ;

Qu'en effet, il n'y a pas lieu dans ce cas de tenir compte des facultés financières du demandeur, lesquelles sont indifférentes pour l'appréciation préalable des besoins de la défenderesse ;

Attendu, ainsi qu'il convient de se référer au procès-verbal de constat dressé le 3 juillet 2003 duquel il ressort que V. A. était salariée à cette époque en qualité d'employée de bureau suppléante auprès du service de l'état civil de Monaco et qu'à ce titre, elle a perçu durant la période de juillet 2002 à juin 2003, une rémunération nette de 19 250,16 euros ainsi qu'une somme de 8 518,50 euros au titre de prestations familiales diverses, soit au total des revenus annuels s'établissant à 27 768,56 euros ;

Attendu de surcroît que contrairement aux allégations de la défenderesse, qui soutient que son contrat de travail n'est pas à durée indéterminée et est arrivé à son terme le 14 novembre 2003, il résulte du courrier versé aux débats, daté du 28 novembre 2003 et adressé au conseil d'A. G. par le secrétaire général de la Mairie de Monaco, que V. A. devait être nommée et titularisée en qualité d'employée de bureau avec effet à compter du 8 octobre 2003 et qu'à ce titre, elle allait bénéficier d'un salaire au moins identique à celui perçu alors qu'elle n'était que suppléante ;

Attendu qu'il doit être déduit de ces éléments que dorénavant, V. A. dispose à elle seule de revenus suffisants pour subvenir à ses propres besoins, en sorte que l'allocation d'une pension alimentaire n'est plus justifiée ;

Attendu en conséquence qu'il convient de faire droit à la demande d'A. G. et de le décharger du paiement de la pension alimentaire auquel il a été condamné par le jugement du 11 janvier 2001 ;

Attendu que le Tribunal ne relève aucun abus dans l'exercice de sa défense par V. A. ; qu'il s'ensuit que la demande en paiement de dommages-intérêts formée par A. G. doit être rejetée ;

Attendu de même qu'eu égard à l'issue du litige, le demandeur ne saurait être condamné au paiement de dommages-intérêts pour procédure dite abusive ;

Et attendu que les dépens doivent être supportés par V. A. par application de l'article 231 du Code de procédure civile ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL,

Statuant contradictoirement,

Décharge A. G. du paiement de la pension alimentaire auquel il a été condamné par jugement du Tribunal de première instance en date du 11 janvier 2001 ;

Déboute A. G. du surplus de ses prétentions ;

Déboute V. A. de sa demande reconventionnelle.

Composition🔗

M. Narmino, prés. ; Mlle Le Lay, prem. subst. du proc. gén. ; Mes Sbarrato, Mullot, av. déf.

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