Tribunal de première instance, 2 mai 2002, A.-G. c/ B.-G.

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Abstract🔗

Baux d'habitation

Loi n° 1235 du 28 décembre 2000 - Renouvellement du bail fondé sur la loi n° 1118 du 18 juillet 1988 modifiée, expirant le 30 avril 2001 - Conditions : article 33 de la loi n° 1235 - non acceptation de l'offre du bailleur faite au locataire de renouveler : d'où non reconduction du bail

Résumé🔗

T. G. ne soutient pas que la clause résolutoire du bail conclu en mars 1996 aurait trouvé à s'appliquer avant l'échéance contractuelle ; elle se borne à prétendre que « le législateur a clairement indiqué qu'en cas de refus de signer le nouveau contrat prévu par le texte, il (le locataire) serait déchu de ses droits », à l'occasion de la discussion en séance publique du Conseil National de l'article 31 de la loi n° 1235 ;

L'article 33 de cette loi, inséré dans le titre relatif aux « dispositions transitoires » édicte que les baux en cours consentis sur la base des dispositions de la loi n° 1118 du 18 juillet 1988, modifiée, demeurent valables jusqu'à leur terme ; par application de ce texte, le bail consenti à M. G. a eu effet jusqu'au 30 avril 2001 ;

L'article 31 instaure un délai de trois mois, expirant à la fin du premier trimestre 2001, pour formaliser le bail prévu à l'article 30 ; selon cet article, le bail doit répondre aux dispositions de la loi nouvelle, notamment à son article 18 ; le second alinéa de l'article 31 prévoit l'hypothèse où aucun bail ne serait établi dans ce délai ; dans ce cas, les dispositions de l'article 30 sont applicables de plein droit, sauf en ce qui concerne la majoration du loyer ;

L'article 30 est ainsi conçu :

« À compter de la promulgation de la présente loi, les locataires et occupants à titre principal qui étaient maintenus dans les lieux par application de l'ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1995 bénéficient d'un bail de six ans à effet immédiat.

Ce bail, répondant aux dispositions de la présente loi, est consenti aux personnes susvisées et à leur conjoint s'il y a lieu.

Il est établi sur la base des conditions antérieures d'occupation et du dernier loyer échu. Une majoration maximale de 13 % peut être appliquée annuellement jusqu'au terme de ce bail et pour la première fois à dater du 1er janvier 2002. » ;

Le bail de six ans à effet immédiat ne peut bénéficier, aux termes de cet article qu'aux locataires et occupants maintenus dans les lieux par application de l'ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1959, ce qui ne peut s'appliquer à M. G., titulaire d'un bail consenti sur le fondement de la loi n° 1118 précitée ;

L'article 31, qui se réfère « au bail prévu à l'article 30 », n'est pas davantage applicable à la situation de la cause ;

En conséquence seul l'article 33 précité apparaît pertinent en l'espèce, les autres dispositions transitoires de la loi n° 1235 - auxquelles il ne renvoie pas - n'ayant pas lieu de s'appliquer compte tenu de l'existence d'un bail valable jusqu'à son terme du 30 avril 2001 ;

Il est établi par les pièces produites que M. G. n'a pas accepté l'offre réitérée par sa bailleresse de lui consentir un nouveau bail ; certes, cette offre ne semble pas s'être accompagnée des éléments de référence prévus par l'article 18 de la loi ; que M. G. n'en tire cependant, du fait de sa défaillance en la cause, aucune conséquence de droit ; elle s'est au demeurant abstenue de saisir d'un éventuel litige sur ce point la Commission arbitrale des loyers, étant relevé que le montant du nouveau loyer réclamé ne semblait pas contesté par elle ;

En conséquence la rencontre des volontés des parties quant à la conclusion d'un nouveau bail n'est pas intervenue ; il s'ensuit qu'à la date de son expiration, le bail n'a pu être reconduit au profit de M. G. ;

Dès lors cette défenderesse apparaît occuper les lieux depuis le 1er mai 2001 sans titre ; cette situation commande de faire droit à la demande de constatation formée de ce chef, sauf à modifier dans le sens indiqué la date à compter de laquelle cette occupation indue a débuté.


Motifs🔗

Le Tribunal,

Considérant les faits suivants :

Il résulte des pièces produites que T. G. née A. a consenti à M. G. née B. un bail à loyer relatif à un appartement de deux pièces principales ; le bail a été conclu à compter du 1er mars 1996 pour une durée de cinq ans et deux mois s'achevant le 30 avril 2001, moyennant un loyer annuel de 19 002 francs outre les charges, sous l'empire de la loi n° 1159 du 29 décembre 1992 ayant modifié la loi n° 1118 du 18 juillet 1988 ;

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 16 mars 2001, le mandataire de la bailleresse a proposé à M. G. l'établissement, à compter du 1er mai 2001, d'un nouveau bail de six ans avec un montant de loyer porté à 3 000 francs par mois, outre les charges ;

Par acte extra-judiciaire de Maître Claire Notari, huissier, en date du 21 juin 2001, M. G. a été sommée de répondre à ce courrier, de même qu'étaient commandés les paiements des loyers des mois d'avril, mai et juin 2001 ;

M. G. n'a pas donné suite à cette sommation, de même qu'elle laissé sans réponse un courrier recommandé avec accusé de réception du 25 juin 2001 émanant de la Direction de l'Habitat l'invitant à se prononcer sans délai sur la proposition de bail de la propriétaire ;

Par lettre du 10 juillet 2001 cependant, M. G. faisait connaître à l'agence M., représentant T. G., qu'elle n'était pas opposée au montant du nouveau loyer réclamé tout en sollicitant la communication des références utilisées pour sa fixation ;

Diverses mises en demeure ultérieures d'avoir à signer le nouveau bail et à s'acquitter des loyers impayés sont restées sans réponse ;

Par l'exploit susvisé du 20 février 2002, T. G. a fait assigner M. G. en vue :

  • de faire constater qu'elle est occupante sans droit ni titre depuis le 30 juin 2001 en application de la loi n° 1235 du 28 décembre 2000,

  • d'obtenir son expulsion des lieux à compter du jugement à intervenir,

  • d'obtenir paiement de la somme de 4 021,93 euros au titre des arriérés de loyers et charges, outre indemnités d'occupation dues jusqu'à la libération des lieux, avec intérêts au taux légal à compter du 10 décembre 2001, ainsi que de la somme de 2 500 euros à titre de dommages-intérêts,

le tout, sous le bénéfice de l'exécution provisoire du présent jugement ;

La demanderesse fait valoir, au soutien de ses prétentions, que M. G., refusant de signer un nouveau contrat de bail conformément à la loi n° 1235 précitée, se trouve déchue de ses droits locatifs et occupe en conséquence les lieux sans droit ni titre ; elle réclame par ailleurs le paiement des sommes qui lui sont dues et insiste sur la résistance fautive opposée depuis plus d'une année par la défenderesse ;

Sur quoi :

Attendu que M. G. s'abstenant systématiquement de retirer les courriers recommandés avec accusé de réception qui lui sont destinés, aucun élément ne permet de soutenir qu'elle a eu connaissance de l'assignation introductive de la présente instance, cet acte n'ayant pas été délivré à sa personne ;

Qu'il y a lieu en conséquence de statuer par défaut à son encontre, même s'il est établi par la correspondance parvenue sur le bureau du Tribunal le 11 avril 2002 qu'elle a été informée par le greffe de ce que l'affaire serait plaidée et mise en délibéré à cette date ; que cet élément ne permet pas de considérer que sont réunies en la cause les conditions d'application de l'article 214 alinéa 2 du Code de procédure civile ;

Attendu que T. G. ne soutient pas que la clause résolutoire du bail conclu en mars 1996 aurait trouvé à s'appliquer avant l'échéance contractuelle ; qu'elle se borne à prétendre que « le législateur a clairement indiqué qu'en cas de refus de signer le nouveau contrat prévu par le texte, il (le locataire) serait déchu de ses droit », à l'occasion de la discussion en séance publique du Conseil National de l'article 31 de la loi n° 1235 ;

Attendu que l'article 33 de cette loi, inséré dans le titre relatif aux « dispositions transitoires » édicte que les baux en cours consentis sur la base des dispositions de la loi n° 1118 du 18 juillet 1988, modifiée, demeurent valables jusqu'à leur terme ; que par application de ce texte, le bail consenti à M. G. a eu effet jusqu'au 30 avril 2001 ;

Attendu que l'article 31 instaure un délai de trois mois, expirant à la fin du premier trimestre 2001, pour formaliser le bail prévu à l'article 30 ; que selon cet article, le bail doit répondre aux dispositions de la loi nouvelle, notamment à son article 18 ; que le second alinéa de l'article 31 prévoit l'hypothèse où aucun bail ne serait établi dans ce délai ; que dans ce cas, les dispositions de l'article 30 sont applicables de plein droit, sauf en ce qui concerne la majoration du loyer ;

Attendu que l'article 30 est ainsi conçu :

« À compter de la promulgation de la présente loi, les locataires et occupants à titre principal qui étaient maintenus dans les lieux par application de l'ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1995 bénéficient d'un bail de six ans à effet immédiat.

Ce bail, répondant aux dispositions de la présente loi, est consenti aux personnes susvisées et à leur conjoint s'il y a lieu.

Il est établi sur la base des conditions antérieures d'occupation et du dernier loyer échu. Une majoration maximale de 13 % peut être appliquée annuellement jusqu'au terme de ce bail et pour la première fois dater du 1er janvier 2002. » ;

Attendu que le bail de six ans à effet immédiat ne peut bénéficier, aux termes de cet article qu'aux locataires et occupants maintenus dans les lieux par application de l'ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1959, ce qui ne peut s'appliquer à M. G., titulaire d'un bail consenti sur le fondement de la loi n° 1118 précitée ;

Attendu que l'article 31, qui se réfère « au bail prévu à l'article 30 », n'est pas davantage applicable à la situation de la cause ;

Attendu en conséquence que seul l'article 33 précité apparaît pertinent en l'espèce, les autres dispositions transitoires de la loi n° 1235 - auxquelles il ne renvoie pas - n'ayant pas lieu de s'appliquer compte tenu de l'existence d'un bail valable jusqu'à son terme du 30 avril 2001 ;

Attendu qu'il est établi par les pièces produites que M. G. n'a pas accepté l'offre réitérée par sa bailleresse de lui consentir un nouveau bail ; que certes, cette offre ne semble pas s'être accompagnée des éléments de référence prévus par l'article 18 de la loi ; que M. G. n'en tire cependant, du fait de sa défaillance en la cause, aucune conséquence de droit ; qu'elle s'est au demeurant abstenue de saisir d'un éventuel litige sur ce point la Commission arbitrale des loyers, étant relevé que le montant du nouveau loyer réclamé ne semblait pas contesté par elle ;

Attendu en conséquence que la rencontre des volontés des parties quant à la conclusion d'un nouveau bail n'est pas intervenue ; qu'il s'ensuit qu'à la date de son expiration, le bail n'a pu être reconduit au profit de M. G. ;

Attendu dès lors que cette défenderesse apparaît occuper les lieux depuis le 1er mai 2001 sans titre ; que cette situation commande de faire droit à la demande de constatation formée de ce chef, sauf à modifier dans le sens indiqué la date à compter de laquelle cette occupation indue a débuté ;

Attendu qu'à défaut de titre d'occupation lui bénéficiant M. G. doit être expulsée des lieux ; que le Tribunal estime cependant devoir lui octroyer un délai de trois mois pour libérer les locaux, eu égard à la date de son entrée dans l'appartement actuellement occupé ;

Attendu qu'il est constant que les loyers et indemnités d'occupation ne sont pas versés depuis le mois d'avril 2001 ; qu'au titre de ce mois, les loyers et charges s'établissent à 2 594,06 francs, soit 395,46 euros (7 782,18 : 3) ; qu'à compter du 1er mai 2001, des indemnités d'occupation compensant le préjudice subi par la demanderesse doivent être octroyées ; qu'au regard des éléments suffisants d'appréciation dont le Tribunal dispose, il convient de fixer à 400 euros par mois le montant de ces indemnités ; qu'il s'ensuit que M. G. doit être condamnée au paiement de la somme de 3 200 euros pour la période de mai à décembre 2001, outre 400 euros par mois d'occupation tant qu'elle se maintiendra dans les lieux ;

Attendu que la réparation étant fixée à la date de ce jour, le Tribunal n'estime pas devoir l'assortir des intérêts réclamés ;

Attendu que la résistance fautivement opposée par M. G. à la légitime demande de T. G., qui a dû s'adresser à la justice et exposer des frais pour ce faire, justifie l'octroi de dommages-intérêts complémentaires à son profit, devant être évalués à 1 000 euros compte tenu des circonstances de la cause ;

Attendu qu'aucun élément n'établit l'existence d'une situation d'urgence qui n'est pas même alléguée par la demanderesse ; qu'il s'ensuit que la demande d'exécution provisoire n'a pas lieu d'être satisfaite, les conditions d'application de l'article 218 du Code de procédure civile n'étant pas réunies ;

Attendu que les dépens suivent la succombance ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

Statuant par défaut,

Constate que M. G. est occupante sans droit ni titre depuis le 1er mai 2001 ;

La condamne en conséquence à libérer les lieux loués dans les trois mois suivant la signification du présent jugement ;

Ordonne à défaut de ce faire son expulsion et celle de tous occupants de son chef de l'appartement et de la cave, avec l'assistance d'un serrurier et le concours de la force publique si nécessaire ;

Condamne M. G. à payer à T. G. la somme de 395,46 euros au titre des loyers et charges du mois d'avril 2001 et celle de 3 200 euros à titre d'indemnités d'occupation pour la période de mai à décembre 2001 ;

La condamne en outre au paiement d'une indemnité de 400 euros par mois d'occupation à partir du 1er janvier 2002 et d'une somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts ;

Composition🔗

M. Narmino, prés. ; M. Fougeras Lavergnolle, juge supl. subst. proc. gén. ; Me Pasquier-Ciulla.

Note🔗

Ce jugement est devenu définitif.

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