Tribunal de première instance, 18 janvier 2001, C. c/ C.

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Abstract🔗

Succession

Descendants légitimes - Libéralités consenties à l'un d'eux - Détermination de la masse partageable (C. civ., art. 789) - Quotité disponible (1/2) et réserve héréditaire (1/4) (C. civ., art. 780, al. 2) - Restitution des fruits excédant la portion disponible (C. civ., art. 795)

Résumé🔗

Jugement ordonnant expertise :

S. B.-C. est décédée à Monaco le 7 mars 1994, laissant deux enfants légitimes, M. et E. C., et ce en l'état d'un testament olographe des 15 juin 1989 et 26 juin 1989 et d'un codicille du 28 septembre 1990.

Le Tribunal se trouve saisi d'une action du fils à l'égard de sa sœur tendant à la désignation d'un expert aux fins de voir liquider et clôturer la succession, en déterminant au préalable la masse partageable compte tenu de la quotité disponible.

Quant aux droits de chacun des héritiers, il y a lieu de se référer aux dispositions de l'article 780 du Code civil, lequel prévoit que les libéralités effectuées par la de cujus ne peuvent excéder le tiers de ses biens, en présence de deux enfants, la réserve de chacun d'eux étant alors égale à 1/3 de l'actif successoral.

Cependant l'alinéa 2 de l'article 780 dispose que la quotité disponible est de la moitié s'il est disposé en faveur d'un (ou de plusieurs) descendants légitimes, chacun d'eux voyant sa réserve héréditaire ramenée à 1/4 de la masse partageable ; or il y a lieu de constater, en l'espèce, que dame B.-C. a gratifié sa fille de legs effectués par préciput et hors part, portant sur des bijoux et des parts de société civile, outre l'endossement à son profit d'un chèque.

À l'effet de déterminer si les dispositions libérales, dont s'agit, ont excédé la quotité disponible, calculée comme il vient d'être indiqué, et doivent dès lors faire l'objet de la réduction instituée par l'article 787 du Code civil, il y a lieu de former une masse de tous les biens de la de cujus en y réunissant fictivement ceux dont il a été disposé par donation entre vifs, d'après leur état à l'époque des donations et leur valeur au temps du décès du donateur, et ce, conformément à ce que prévoit l'article 789 dudit code.

Le notaire n'ayant pas été en mesure de procéder à ce calcul et le tribunal ne disposant pas davantage d'éléments probants à cet égard, il apparaît opportun avant dire droit, de désigner un expert.

Jugement après expertise :

Il s'évince, en définitive, de l'analyse du Tribunal que la masse partageable s'élève - en l'état des éléments d'appréciation soumis à l'expert par les parties - à une somme globale arrondie à 2 480 592 francs, incluant au sens de l'article 789 du Code civil, les biens composant effectivement l'actif et ceux dont il aurait été disposé du vivant de la de cujus.

Par référence aux mêmes dispositions légales et à l'analyse précitée, il n'apparaît exister aucune dette successorale, en sorte que cette masse partageable brute correspond à l'actif net.

Dès lors, eu égard à l'interprétation déjà donnée par le tribunal, dans sa décision avant dire droit, des dispositions de l'article 780 alinéa 2 du Code civil, la quotité disponible s'élève à la moitié de cette somme, soit 1 240 296 francs, les deux héritiers réservataires ayant vocation à appréhender chacun la moitié de l'autre fraction, soit 1/4 de la masse globale.

En conséquence, dès lors que l'intention de la de cujus était de disposer de sa quotité disponible au profit de sa fille E., celle-ci a vocation à appréhender cette fraction, soit 1/2 de la masse, outre sa part d'héritière réservataire de 1/4, soit donc 3/4 de la masse totale, alors que M. C. peut prétendre à sa seule part légale 1/4, soient respectivement les sommes de 1 860 444 francs pour E. C. et de 620 148 francs pour M. C.

S'agissant enfin des intérêts auxquels peut prétendre M. C. et qui ne pouvaient être inclus dans l'actif de la masse partageable, il convient de dire qu'en application de l'article 795 du Code civil, E. C. doit restituer les fruits de ce qui excède la portion disponible à compter du jour du décès du donateur, soit le 7 mars 1994, dès lors que la demande en réduction a été faite en l'espèce dans l'année.

Dès lors, E. C. apparaît devoir à son frère les intérêts des capitaux auxquels elle est tenue à compter de la date susvisée, et ce, sur la somme précitée de 620 148 francs et au taux légal, étant en effet observé que les dispositions de l'article 1009 du Code civil ne permettent pas de retenir en l'espèce l'existence d'intérêts composés, à défaut de toute demande judiciaire ou convention spéciale.


Motifs🔗

Le Tribunal,

(Audience du 18 janvier 2001)

Attendu que saisi de deux instances opposant M. C. à sa sœur E. C. et relatives à la succession de leur mère S. C. épouse B. décédée à Monaco le 7 mars 1994, le Tribunal de Première Instance a, suivant jugement du 8 janvier 1998 :

• ordonné la jonction des instances introduites selon exploits respectifs des 16 février 1995 et 4 avril 1995,

• déclaré nulles diverses attestations et ordonné le retrait des débats d'autres pièces produites par E. C.,

• débouté M. C. des fins de sa demande de bâtonnement,

et, tout en se déclarant compétent pour connaître de la succession mobilière et immobilière de S. B.-C., domiciliée à Monaco, décédée le 7 mars 1994, et en faisant application de la loi monégasque :

• constaté qu'en présence des libéralités consenties par la de cujus au profit d'un descendant légitime, la quotité disponible est équivalente à la moitié de ses biens tandis que chacune des parties à l'instance voit sa réserve héréditaire ramenée à 1/4 de la masse partageable,

• accueilli avant dire droit sur la demande de liquidation et clôture de la succession B.-C., la demande d'expertise formulée par M. C. et désigné à cet effet André Garino, avec mission :

  • d'entendre les parties et se faire communiquer tous éléments lui permettant de déterminer la masse partageable subsistante au jour d'ouverture de la succession, en y rapportant « fictivement » tous biens meubles ou immeubles dont il aurait été disposé par la de cujus de son vivant,

  • de prendre connaissance des testaments et codicilles de la de cujus,

  • dresser inventaire et chiffrer, en l'état des droits respectifs des parties, les attributions susceptibles d'être effectuées au profit de chacune d'elle,

  • préciser à cet égard, s'agissant des immeubles, s'ils sont commodément partageables en nature et proposer le cas échéant des lots et mises à prix en vue d'une licitation,

• débouté M. C. des fins de sa demande d'attribution de la somme consignée entre les mains du séquestre judiciaire,

• débouté E. C. des fins de sa demande de dommages-intérêts,

• ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

• réservé les dépens en fin de cause ;

Attendu que ledit expert ayant déposé son rapport le 13 juillet 1999, M. C. s'opposait à son homologation en formulant les observations suivantes :

Sur les produits de la cession de la SCI Saint Joseph :

L'expert aurait eu tort de conclure à l'intégration de la somme de 1 800 000 francs à la masse partageable, tout en constatant le désaccord des parties sur la quotité applicable ; en effet, la donation effectuée du vivant de la de cujus et ayant porté sur une somme d'argent, devrait être rapportée en totalité à la masse partageable, sans qu'E. C. puisse prétendre aux 3/4 de cette somme ;

Sur les intérêts légaux et composés retenus par l'expert :

La somme susvisée de 1 800 000 francs aurait dû rester dans le patrimoine de la défunte depuis 1991, en sorte que sa sœur n'était pas fondée à profiter des fruits d'une libéralité rapportable entre cette date et février 1995, date de l'assignation ; le comptable R. aurait en effet recalculé lesdits intérêts de 1991 à 1999, soit une somme totale de 1 418 334 francs ;

Sur les bijoux :

L'expert aurait eu tort d'évoquer un accord des parties sur leur évaluation alors en outre que les plus beaux bijoux n'ont pas été évalués, l'estimation retenue par André Garino ne pouvant dès lors être entérinée à concurrence de la somme de 36 780 francs, mais plutôt d'un montant de 236 780 francs correspondant à quatre autres pièces en platine et brillants ;

Sur le bateau « L. C. » :

L'expert aurait conclu à tort qu'aucune somme ne devait à ce titre être rapportée à la masse partageable, étant observé qu'E. C. n'avait pas les moyens financiers d'acquérir un tel bateau et que seule sa mère aurait pu l'acheter et lui en faire donation ;

Sur l'avantage d'habitation :

L'expert a relevé qu'E. C. avait occupé l'appartement de la « Villa M. » pendant 22 ans, évaluant l'avantage subséquent à la somme de 1 433 591,75 francs dont rapport doit être fait à la masse partageable ; cependant, la superficie et le classement dudit local étant différents de ceux retenus par M. Garino, l'avantage d'habitation doit être calculé ainsi que l'a chiffré M. R., soit une somme de 2 276 417 francs ;

Sur les comptes financiers :

Une somme de 20 000 francs perçue indûment par E. C. devrait être considérée comme une avance sur partage et être rapportée à la masse partageable ; dans ses conclusions du 19 janvier 2000, il demande au Tribunal de constater qu'il ne saurait se voir attribuer une avance de 33 000 francs ;

Sur les sommes dues par E. C. :

L'expert aurait justement chiffré à 15 000 francs le montant des loyers versés par les locataires de l'immeuble « L. S. » mais omis d'y ajouter les intérêts au taux légal depuis l'exploit d'assignation, soit 3 968,65 francs et donc une créance globale de 18 968,65 francs ;

Par ailleurs, M. C. se prétend créancier de la masse au titre des frais de ravalement de la façade s'étant élevés à une somme de 90 718,77 francs, outre les intérêts légaux, soit la somme de 114 726,17 francs ;

Sur les sommes réclamées par E. C. :

L'expert a fort justement débouté celle-ci des fins de ses prétentions tendant à l'octroi d'un salaire au titre du temps passé auprès de ses parents ;

Attendu que M. C. formulant encore diverses observations inhérentes à d'autres objets et réclamations, récapitule l'ensemble de son argumentation de la manière suivante :

« I. - Sommes à rapporter à la masse successorale par la défenderesse

au titre du chèque de 1 800 000 francs,

deuxième vente SCI Saint Joseph, à

compter de mars 1991 jusqu'à fin 1999,

en principal et intérêts,

selon décompte R. .......................... 3 218 334,78 francs

au titre des bijoux ................................... 236 780 francs

au titre du bateau .................................... 180 000 francs

au titre de l'avantage d'habitation sur

une base de 6 968 francs de loyer annuel

en 1976 et selon calcul de M. R. pratiqué

sur les mêmes bases de l'expert Garino............. 2 276 417 francs

au titre des sommes versées au

compte de la défenderesse le 3 mars 1994............... 20 000 francs

au titre des sommes versées par la défunte

à sa fille selon attestation de la défenderesse

du 28 novembre 1987, y ajouté les intérêts

principaux et composés............................. 192 763,18 francs

au titre d'objets divers disparus

(Vase Gallé, tables gigognes)........................ pour mémoire

au titre de la première vente réalisée par

la SCI Saint Joseph en 1983 à M.-B.

portant sur un bien de 480 000 francs à l'époque..... pour mémoire

II. - Créance personnelle du concluant contre la succession de la défunte

au titre des montants de ravalement de façade

de l'immeuble » L. S. « versés en 1981

et 1982 d'un principal de 90 718,77 francs,

y ajouté les intérêts principaux et composés

à compter de l'assignation......................... 114 726,17 francs

III. - Créance personnelle du concluant contre la défenderesse

au titre de la restitution des loyers dus sur

l'immeuble » L. S. « pour la période

du 8 mars 1984 au 31 mars 1994, y ajouté les

intérêts de droit à compter de l'assignation........ 18 968,65 francs

IV. - Sommes restant en indivision

Restent en effet à partager et à liquider par moitié entre les parties les sommes d'argent restant en compte tant auprès des banques que du notaire, soit :

auprès de la Société Marseillaise de Crédit

au 31 mars 1994 outre tous accessoires éventuels.... 22 622,32 francs

en l'étude de Maître Louis-Constant Crovetto

(ou de la Caisse des Dépôts et Consignations)

outre tous accessoires éventuels.................... 61 390,02 francs »

Attendu que M. C. entend en définitive voir :

• « rejeter les conclusions expertales de Monsieur Garino en ce qu'elles apparaissent infondées en divers chefs,

• constater que le total des sommes à rapporter à la masse partageable par la défenderesse s'élève à 6 124 294,96 francs, intérêts arrêtés au 31 décembre 1999,

• attribuer au concluant 50 % de ladite masse, soit la somme de 3 052 147,48 francs,

• condamner en conséquence la défenderesse à verser ledit montant au concluant outre tous intérêts à courir à compter du 1er janvier 2000,

• condamner la défenderesse à régler au concluant la somme en principal et intérêts de 18 968,65 francs au titre des loyers versés par les locataires de l'immeuble » L. S. «.

• constater que le concluant détient une créance personnelle contre la succession au titre du ravalement de façade de l'immeuble » L. S. « d'un montant de 114 726,17 francs,

• condamner en conséquence la défenderesse à lui rembourser ledit montant avant partage,

• voir ensuite procéder au partage des sommes restant en compte tant auprès de la Société Marseillaise de Crédit soit 22 622,32 francs qu'auprès du notaire chargé de la succession soit 61 390,02 francs,

• attribuer en conséquence au concluant 50 % de ces deux montants soit la somme de 42 006,17 francs,

• condamner enfin la défenderesse aux entiers dépens » ;

Attendu qu'E. C., répliquant aux observations de M. C., fait valoir pour l'essentiel les arguments suivants :

1° Quant à la cession du bien immobilier de la SCI Saint Joseph :

suite à la vente dudit bien, la de cujus percevait une somme de 1 800 000 francs, M. C. une somme de 133 333 francs et elle-même 100 000 francs ;

Toutefois, sa mère endossait à son profit ce chèque de 1 800 000 francs, en sorte qu'elle accepte désormais de voir réintégrer cette somme en principal et intérêts de droit, soit 2 203 570 francs à la masse partageable ;

M. C. ayant cependant perçu une somme supérieure à la sienne, il doit quant à lui rapporter à la masse 33 333 francs outre les intérêts, soit 41 058,69 francs ;

2° Quant aux bijoux :

L'expert les a justement évalués à la somme de 36 780 francs, alors que M. C. ne justifie nullement de l'existence d'autres bijoux dans le patrimoine de la de cujus au jour de son décès ;

3° Quant au bateau L. C. :

L'expert a également justement retenu qu'elle en était la légitime propriétaire, à défaut de toute preuve contraire rapportée par M. C. ;

4° S'agissant de l'avantage d'habitation :

Elle n'en conteste nullement le principe, mais indique que l'expert a eu tort de poursuivre son décompte jusqu'en 1998, alors que sa mère est décédée le 7 mars 1994 ; elle se reconnaît donc redevable d'une somme en principal de 502 333 francs, et ce, sans intérêts composés - non applicables en l'espèce - mais avec intérêts au taux légal ;

5° Sur les comptes financiers :

Elle consent à ce que la somme de 20 000 francs soit rapportée à la masse, outre les soldes créditeurs et compte notaire, soit 104 012,34 francs ;

6° S'agissant de l'immeuble « L. S. » :

Le montant des loyers doit revenir au nu-propriétaire qu'est M. C., soit une somme de 15 000 francs qu'elle reconnaît devoir sans intérêt, à défaut de toute sommation en ce sens ;

Elle s'oppose en revanche au paiement du ravalement de façade, selon elle déjà acquitté par sa mère de son vivant (annexe 18 du rapport d'expertise) ;

7° Salaire dû au titre du temps passé auprès de ses parents :

À compter de l'année 1990, elle s'est occupée de ses deux parents, puis de 1992 à 1994 de feue sa mère, en sorte qu'elle s'estime fondée à solliciter une rémunération égale au SMIG et s'élevant forfaitairement à 5 000 francs par mois ;

Elle se déclare en conséquence créancière de la succession à concurrence d'une somme en principal de 240 000 francs, outre 23 826 francs d'intérêts, soit 263 826 francs ;

8° Sur les objets reçus et réclamations diverses :

Après avoir réclamé la maquette « St Geran », M. C. a refusé sa restitution, ce qui démontrerait le peu de sérieux de ses revendications ;

M. C. a par ailleurs sollicité divers objets venant de la succession de son père ne faisant pas l'objet du présent litige, et sans rapporter aucune preuve à cet égard ;

9° Sur les sommes dues par M. C. :

Celui-ci devrait rapporter les sommes reçues de la « de cujus », soit 275 642 francs avec intérêts au taux légal depuis l'année 1976 : 275 642 francs + 556 315 francs = 831 957 francs ;

M. C. lui serait enfin redevable d'une somme prêtée de 1987 à 1988 s'élevant à 16 000 francs, assortie des intérêts de droit, soit une dette de 30 128 francs qu'il y aura lieu de compenser avec la somme de 15 000 francs dont il est créancier envers elle ;

Attendu en définitive qu'E. C. entend voir :

• « dire et juger qu'elle est créancière de la succession pour un montant de 263 826 francs en récompense de ses prestations fournies à feue la dame B.-C. depuis l'année 1990,

• dire qu'elle sera payée en priorité de cette somme par la succession,

• lui donner acte de ce qu'elle entend rapporter à la succession la somme en principal de 1 800 000 francs représentant la cession des parts de la SCI Saint Joseph augmentée des intérêts au taux légal, soit au total la somme de 2 203 570 francs,

• dire que les bijoux seront soit portés en valeur à la masse pour 36 780 francs ou soit répartis en lots d'égale valeur entre les parties par tirage au sort,

• donner acte qu'elle entend rapporter à la masse les avantages en nature reçus par elle pour la somme de 502 333 francs en principal et intérêts,

• dire que M. C. doit être condamné à rapporter à la masse la somme de 275 000 francs outre intérêts de droit, soit 556 315 francs représentant le montant des avances perçues par lui,

• dire que M. C. doit être condamné à rapporter à la masse la somme de 33 335 francs outre intérêts de droit, soit 41 508 francs représentant le trop perçu par lui sur la cession des parts de la SCI Saint Joseph,

• dire et juger que la masse brute s'élève à la somme de 3 760 817,62 francs et la masse nette à la somme de 3 496 991,62 francs, déduction faite de la somme représentant le montant de l'indemnisation due à la dame C., soit 263 826 francs,

• dire et juger que sur cette somme 1/4 doit revenir au sieur C., soit 874 247,90 francs,

• lui donner acte de ce qu'elle reconnaît devoir au sieur C. la somme de 15 000 francs,

• dire et juger que M. C. lui doit la somme en principal de 16 000 francs outre intérêts de droit, soit 30 128 francs,

• ordonner la compensation entre ces deux créances et dire et juger que le sieur C. doit payer à la dame C. la somme de (16 000 + 14 128) - 15 000, soit 15 128 francs,

• débouter le sieur C. de toutes ses autres demandes comme étant totalement infondées » ;

Attendu que suivant une note adressée à la juridiction le 10 novembre 2000 et réitérée le 16 novembre 2000, le conseil de M. C. soulevait une exception ayant trait à la communication tardive de certaines pièces effectuée par le conseil d'E. C. et en réclamait le rejet pur et simple ;

Attendu qu'estimant pour sa part qu'aucun délai n'avait été imparti pour ladite communication, le conseil d'E. C. s'opposait à cette exception ;

Sur ce :

I. - Sur l'exception de non communication de pièces :

Attendu qu'il est constant et au demeurant non contesté par les parties qu'alors que l'affaire avait été fixée à plaider le 13 juillet 2000 pour l'audience du 23 novembre 2000, le Tribunal avait admis le dépôt de conclusions par Maître Lorenzi jusqu'au 25 octobre 2000 ;

Qu'il résulte des pièces de la procédure que si ce conseil a bien déposé ses conclusions dans les délais impartis, soit le 6 octobre 2000, il a cependant produit des pièces le 10 novembre 2000 ;

Attendu que le conseil de la partie adverse a alors refusé ladite communication et sollicité le rejet pur et simple desdites pièces ;

Attendu que dès lors que le conseil d'E. C. s'était vu impartir une date limite située au 25 octobre 2000 pour le dépôt de ses conclusions - voire la communication des pièces afférentes -, il ne pouvait dès lors raisonnablement attendre la réclamation de son contradicteur en ce sens pour communiquer, à treize jours de l'audience des plaidoiries, les pièces suivantes :

• « Pièce A procès-verbal de constat du 2 juin 1999 Mme E. C.

• Pièce B lettre du docteur F. P. du 5 mars 1999

• Pièce C copies de (3) chèques de la Banco di Roma années 1977

• Pièce D attestation du 3 janvier 1996 de Madame G. C. + copie de la carte d'identité

• Pièce E attestation de Monsieur P. B. du 4 mars 1999

• Pièce F attestation du 2 mars 1999 de Monsieur B. J.-P. + copie de la carte d'identité

• Pièce G attestation de Monsieur J.-P. R. + copie de sa carte d'identité

• Pièce H attestation du 15 mars 2000 de Madame J. G. + copie de sa carte d'identité »

Attendu qu'une telle communication s'avère tardive, en sorte que M. C. apparaît fondé à solliciter le rejet des pièces dont s'agit ;

II. - Au fond :

Attendu qu'en l'état des principes déjà énoncés par la présente juridiction en son jugement du 8 janvier 1998 et avant d'examiner les conditions d'application de l'article 780 alinéa 2 du Code civil, il y a lieu de procéder à la détermination de la masse partageable ;

Attendu qu'il s'évince à cet égard des dispositions de l'article 789 du Code civil, qu'à l'effet de procéder le cas échéant à la réduction sollicitée, il y aura lieu de former une masse de tous les biens existant au décès du donateur ou testateur, en y réunissant fictivement ceux dont il a été disposé par donation entre vifs, d'après leur état à l'époque des donations et leur valeur au temps du décès du donateur ;

Qu'il conviendra alors, en application du même texte, de calculer sur l'ensemble de tous ces biens, et après en avoir déduit les dettes, quelle est, eu égard à la qualité des héritiers, la quotité disponible ;

Qu'il y aura enfin lieu d'examiner la nature et le montant des créances personnelles réciproques respectivement invoquées par les deux héritiers en litige ;

A. - Détermination de la masse partageable :

Attendu que celle-ci se compose, d'après le législateur, de l'ensemble des biens existant au jour du décès du donateur ou testateur, avec réunion fictive de ceux dont il a disposé par donation entre vifs d'après leur valeur au temps du décès de la de cujus ;

Attendu qu'il convient d'évoquer successivement chacun des biens dont s'agit en l'état de l'analyse de l'expert, et étant précisé que les parties ne mentionnent pas l'existence d'autres biens meubles ou immeubles que ceux ci-après envisagés ;

1° Le prix de cession du bien immobilier de la SCI Saint Joseph :

Attendu que l'expert a relevé et les parties s'accordent à dire que le prix de cession du bien immobilier de la SCI Saint Joseph à la SCI Marina s'est élevé à la somme de 1 800 000 francs, qui doit donc être intégrée à la masse partageable ;

Que André Garino a par ailleurs indiqué que les intérêts légaux et composés sont dus et doivent être également rapportés, soit pour les années 1995, 1996, 1997, 1998 et 1999, une somme de 403 064 francs ;

Attendu cependant, que seule la valeur des biens au temps du décès du donateur, soit en mars 1994, doit être présentement prise en considération au sens de l'article 789 du Code civil ;

Que s'agissant en effet des intérêts, il y aura lieu, après détermination de la quotité disponible, de faire ultérieurement application des dispositions de l'article 795 du Code civil ;

Attendu en outre, que l'expert a justement apprécié que M. C. avait reçu au titre de cette cession une avance sur partage de 33 000 francs, au demeurant non contestée, qu'il y a lieu de réintégrer dans la masse partageable ;

2° Les bijoux :

Attendu que les bijoux mentionnés dans les dispositions testamentaires n'ont pas tous été remis à la jouissance d'E. C., celle-ci ayant en revanche apporté à l'expert d'autres bijoux laissés par sa mère ;

Qu'à cet égard, l'évaluation des seules pièces données effectivement par la de cujus à sa fille apparaît avoir été réalisée justement par l'expert Garino qui en a chiffré l'ensemble à une somme de 36 780 francs ;

Attendu que les arguments de M. C. sont sans portée, aucune justification n'étant par lui apportée de l'existence d'autres bijoux donnés à sa sœur, ou présents dans son patrimoine à la date du décès de leur mère, en sorte que seule la somme susvisée doit intégrer la masse partageable ;

3° Le bateau :

Attendu que l'acte de vente dudit bateau fait état d'un prix d'acquisition de 180 000 francs en 1983, en sorte que l'expert relève la très faible valeur dudit bien, et ce, plus encore à la date du décès de la de cujus en 1994 ; qu'en outre, aucun élément ne permet à André Garino de dire qu'E. C. aurait acquis ledit bateau avec des fonds de sa mère, ou que cette dernière lui en aurait fait donation de son vivant ;

Qu'ainsi que le préconise l'expert, il n'y a donc pas lieu de rapporter à la masse partageable ladite somme ;

4° L'avantage d'habitation :

Attendu qu'après avoir relevé qu'E. C. reconnaît avoir gracieusement occupé l'un des deux appartements de la « Villa M. », soit la première partie à partir de 1973 et la seconde partie dès 1983, le tout pour une surface cumulée de 110 m2 environ, l'expert Garino rappelle que la mère était usufruitière et E. C. nue-propriétaire de cette villa ;

Que s'agissant de l'évaluation de cet avantage non contesté par E. C., l'expert s'est référé aux chiffres du marché locatif (bien dit « à surface corrigée ») pour une période de vingt deux ans (1976 à 1998) et a calculé les intérêts légaux et composés dus à raison des sommes en cause, soit une somme totale de 1 433 591,75 francs ;

Attendu que M. C. critique ledit mode de calcul (évoquant pour sa part une divergence quant à la superficie et au classement du local dont s'agit) tandis qu'E. C. s'estime débitrice d'une somme de 502 333 francs en principal, sa dette n'ayant selon elle couru que jusqu'au décès de sa mère, et devant être assortie d'intérêts au taux légal, et non composés ;

Attendu que l'analyse effectuée par l'expert Garino n'apparaît encourir la critique qu'en ce qui concerne la durée prise en compte et les intérêts appliqués ;

Attendu en effet que le Tribunal entend se référer à la méthode comparative choisie par l'expert (cf. marché locatif pour un bien relevant du secteur protégé et donc « à surface corrigée ») tout en limitant son calcul dans une période comprise entre l'année 1976 et l'année 1994 (seulement janvier, février et mars), date du décès de la de cujus ;

Que dès lors, de 1976 à 1993, E. C. a bénéficié d'un avantage évalué à 493 400 francs auquel il y a lieu d'ajouter la somme de 13 399,99 francs arrondie à 13 400 francs pour les trois premiers mois de 1994, jusqu'au décès de sa mère, soit un avantage d'habitation global de 506 800 francs devant être rapporté à la masse partageable ;

Attendu que s'agissant des intérêts applicables, il y aura également lieu d'examiner cette question ultérieurement, après détermination de la quotité disponible ;

5° Le virement et les sommes versées à E. C. :

Attendu que l'expert relève qu'une somme de 20 000 francs a été virée du compte de la défunte à celui d'E. C. le 3 mars 1994 et qu'il s'agit d'une avance sur partage ;

Que ledit virement n'étant pas contesté par E. C., il y a lieu de dire que ce montant de 20 000 francs doit être rapporté à la masse partageable, étant rappelé qu'il faisait partie du patrimoine de S. B.-C. à la date de son décès ;

Attendu qu'aucun élément ni investigation de l'expert ne permettent en revanche de dire que d'autres sommes (chiffrées en principal et intérêts par M. C. à 192 763,18 francs) auraient été versées par la défunte à sa fille et devraient réintégrer le patrimoine de cette succession ;

6° Les comptes financiers et soldes créditeurs :

Attendu que le solde du compte bancaire de la défunte auprès de la Société Marseillaise de Crédit s'élevait au 31 mars 1994 à la somme de 22 622,32 francs, alors que le compte de la succession C. ouvert en l'étude de Maître Louis-Constant Crovetto s'élevait au 20 octobre 1995 à la somme de 61 390,02 francs ; qu'une somme totale de 84 012,34 francs doit donc de ce chef être intégrée à la masse partageable ;

7° Les sommes reçues par M. C. :

Attendu que si l'expert a pu valablement évoquer les 33 000 francs perçus en sus dans le cadre de l'opération de cession de la SCI Saint Joseph précédemment évoquée, il n'a cependant pas été en mesure de se prononcer sur le bien fondé des allégations d'E. C. concernant certaines sommes reçues de la défunte par son frère entre 1971 et 1976, dont le montant se serait élevé à 275 642 francs ; qu'il n'y a donc pas lieu de rapporter à la masse de telles sommes dont la réalité ne s'induit pas des pièces produites ;

Attendu quant au surplus des réclamations, que le Tribunal n'est pas plus que l'expert Garino en mesure d'en déterminer le bien fondé et peut seulement préciser que M. C. a refusé la restitution de la maquette « Saint Geran » initialement sollicitée ;

Attendu qu'il est enfin établi par l'expert et nullement contesté qu'aucun autre bien immobilier n'entre dans la masse successorale de Mme B.-C. ;

B. - Les dettes de la masse partageable :

1° Le ravalement de façade :

Attendu que M. C. déclare qu'il a, à deux reprises, par chèques des 4 novembre 1981 et 18 mai 1982, réglé l'entreprise Monacolor pour les travaux de ravalement de l'immeuble « L. S. », et ce, alors que lesdits frais auraient dû incomber à sa mère, usufruitière ; qu'il sollicite de ce chef une somme de 114 726,17 francs en principal et intérêts ;

Attendu qu'E. C. a quant à elle fourni à l'expert copie d'un talon de chèque établi par sa mère, établissant que celle-ci avait donné à M. C. une somme de 60 000 francs pour le ravalement de l'immeuble ;

Attendu que le caractère effectif de cette dette de la masse successorale n'est dès lors pas établi avec certitude, ainsi que l'a conclu l'expert Garino, en sorte qu'il n'y a pas lieu de déduire cette somme de l'actif susvisé ;

2° Le salaire qui serait dû à E. C. par la masse partageable :

Attendu que l'expert missionné par le Tribunal a justement refusé d'examiner cette question qui ne lui a pas été soumise par la juridiction ;

Attendu qu'E. C. soutient qu'elle s'est occupée de ses deux parents de 1990 à 1992, puis de sa mère seule de 1992 à 1994, en sorte qu'elle s'estime créancière d'une somme totale de 263 826 francs en principal et intérêts, correspondant au salaire qu'elle aurait perçu sur une base forfaitaire de 5 000 francs par mois ;

Attendu que s'il est à cet égard concevable qu'une succession puisse se voir reconnaître débitrice d'une indemnisation due à l'un des héritiers qui se serait consacré à l'entretien et l'assistance du de cujus de son vivant, ce n'est que dans la mesure où ce descendant établit que les tâches réalisées ont excédé le cadre des simples obligations et devoirs des enfants envers leurs parents ;

Qu'en l'occurrence et contrairement à ses allégations, E. C., qui vivait dans le même immeuble, mais non dans le même appartement que ses parents, ne justifie nullement avoir consacré quatre années de sa vie au service exclusif de ces derniers, alors au contraire que les attestations produites par M. C. démontrent à suffisance que feue S. B.-C. était très souvent seule, aidée seulement d'une femme de ménage et dépourvue de moyen de transport ;

Attendu que la masse partageable n'apparaît donc redevable à ce titre d'aucune somme envers E. C. ;

Attendu qu'il s'évince en définitive de l'analyse ci-dessus, que la masse partageable s'élève - en l'état des éléments d'appréciation soumis à l'expert par les parties - à une somme globale arrondie à 2 480 592 francs incluant, au sens de l'article 789 du Code civil, les biens composant effectivement l'actif et ceux dont il aurait été disposé du vivant de la de cujus ;

Attendu que par référence aux mêmes dispositions légales et à l'analyse précitée, il n'apparaît exister aucune dette successorale, en sorte que cette masse partageable brute correspond à l'actif net ;

Attendu dès lors, qu'eu égard à l'interprétation déjà donnée par le Tribunal des dispositions de l'article 780 alinéa 2 du Code civil, la quotité disponible s'élève à la moitié de cette somme, soit 1 240 296 francs, les deux héritiers réservataires ayant vocation à appréhender chacun la moitié de l'autre fraction, soit 1/4 de la masse globale ;

Attendu en conséquence, que dès lors que l'intention de la de cujus était de disposer de sa quotité disponible au profit de sa fille E., celle-ci a vocation à appréhender cette fraction, soit 1/2 de la masse, outre sa part d'héritière réservataire de 1/4, soit donc 3/4 de la masse totale, alors que M. C. peut prétendre à sa seule part légale de 1/4, soient respectivement les sommes de 1 860 444 francs pour E. C. et de 620 148 francs pour M. C. ;

Attendu - s'agissant enfin des intérêts auxquels peut prétendre M. C. et qui ne pouvaient être inclus dans l'actif de la masse partageable - qu'il convient de dire qu'en application de l'article 795 du Code civil, E. C. doit restituer les fruits de ce qui excède la portion disponible à compter du jour du décès du donateur, soit le 7 mars 1994, dès lors que la demande en réduction a été faite en l'espèce dans l'année ;

Que dès lors, E. C. apparaît devoir à son frère les intérêts des capitaux auxquels elle est tenue à compter de la date susvisée, et ce, sur la somme précitée de 620 148 francs et au taux légal, étant en effet observé que les dispositions de l'article 1009 du Code civil ne permettent pas de retenir en l'espèce l'existence d'intérêts composés, à défaut de toute demande judiciaire ou convention spéciale ;

C. - Les dettes réciproques personnelles :

Attendu qu'E. C. se reconnaît débitrice envers son frère M., nu-propriétaire de l'immeuble « L. S. », du montant des loyers versés par les différents locataires, soit une somme de 15 000 francs correspondant au calcul de l'expert ;

Qu'aucune mise en demeure n'ayant été adressée par M. C. à sa sœur, cette somme ne pourra produire intérêts qu'à compter du présent jugement, l'assignation initiale tendant seulement à la désignation d'un expert judiciaire ;

Attendu, en revanche, qu'E. C. se déclare créancière de son frère pour une somme totale de 30 128 francs correspondant à une somme de 16 000 francs prêtée de 1987 à 1988, outre les intérêts de droit ;

Attendu cependant, que l'expert Garino ne s'est pas prononcé sur cette demande qui ne lui a pas été soumise ; que les pièces produites ne permettent pas d'en établir le bien fondé, en sorte que le Tribunal ne saurait y faire droit ;

Attendu que la présente juridiction doit enfin rappeler que la demande de validation de l'inscription hypothécaire provisoire est devenue sans objet depuis que la désignation d'un séquestre, en la personne de Jean-Paul Samba, a été décidée par ordonnance de référé pour une somme de 2 000 000 francs ;

Qu'il convient désormais de donner mainlevée dudit séquestre, tout en autorisant Jean-Paul Samba à se libérer de la somme qu'il détient entre les mains du notaire ci-après désigné, chargé de procéder aux opérations de partage conformément à la présente décision ;

Attendu que le Tribunal se trouve enfin saisi d'une demande de dommages-intérêts formulée par M. C. à l'encontre de sa sœur ;

Attendu que la complexité de cette situation successorale et la nécessité d'instaurer une expertise démontrent en fait que la fille de la de cujus a pu raisonnablement se méprendre sur sa propre vocation successorale et n'apparaît avoir commis aucun abus ; que M. C. doit donc être débouté de ce chef de demande ;

Attendu quant à l'exécution provisoire initialement réclamée, que M. C. ne motive pas ce chef de demande, en sorte qu'il ne saurait y être fait droit ;

Et attendu qu'en raison de leur succombance respective, les parties doivent supporter chacune pour moitié les dépens de la présente instance ;

_________________________

Le tribunal

(Audience du 8 janvier 1998)

Attendu que, selon exploit du 16 février 1995, M. C., exposant que sa mère S. C. épouse B. - décédée au Centre Hospitalier Princesse Grace le 7 mars 1994 en laissant deux enfants, lui-même et sa sœur É. C. aurait, en méconnaissance des dispositions des articles 780 et suivants du Code civil, avantagé la requise en lui laissant davantage que la quotité disponible, entend voir désigner tel expert qu'il appartiendra au Tribunal de choisir à l'effet de :

« - Se faire communiquer tous éléments lui permettant de déterminer le montant de l'actif successoral et sa composition et entendre les parties à cette fin,

  • Dire et déterminer la quotité dont pouvait valablement disposer la de cujus sans préjudicier aux droits du requérant en sa qualité d'héritier réservataire,

  • Dresser la liste des biens de toutes natures revenant au requérant tant du chef de son père que de celui de sa mère, tous deux décédés et notamment un bateau à moteur » L. C. «, amarré au port de Monaco, immatriculé au nom de la requise,

  • Procéder aux vérifications des comptes bancaires dont se trouve titulaire la requise »,

ladite expertise étant instaurée aux fins de liquidation et partage de la succession B. C. et délivrance de tous les biens et valeurs pouvant lui revenir ;

Que par le même exploit, M. C. entend également voir :

« - désigner tel séquestre qu'il plaira au Tribunal aux fins de conservation puis délivrance de la somme de 1 500 000 francs aux hoirs de ladite succession dans les proportions découlant des dispositions légales régissant les successions en général et la quotité disponible en particulier,

  • et condamner É. C. aux entiers dépens » ;

Attendu que, suivant un second exploit du 4 avril 1995, M. C., autorisé par ordonnance du Président du Tribunal en date du 22 mars 1995 à prendre une inscription provisoire d'hypothèque judiciaire sur le bien dénommé « Villa M. » situé à Monaco, appartenant à É. C., pour avoir sûreté, garantie et paiement de la somme de 2 000 000 francs, a fait assigner É. C. aux fins de voir :

« - valider l'inscription hypothécaire provisoire prise le 29 mars 1995 à l'encontre de la requise sur le bien immobilier dénommé » Villa M. «, propriété de la requise,

  • en conséquence, ordonner l'inscription hypothécaire définitive sur ledit lot en vertu de l'article 762 du Code de procédure civile,

  • et condamner la requise au paiement de la somme de 200 000 francs à titre de dommages-intérêts, sa résistance étant manifestement abusive et injustifiée, ainsi qu'aux entiers dépens,

  • et s'entendre ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir » ;

Que le demandeur sollicitait par conclusions du 14 février 1996 la jonction de la procédure initiée le 16 février 1995 (R. 597-95) et de cette dernière instance introduite par exploit du 4 avril 1995 (R. 786-95) ;

Attendu qu'É. C., qui entend quant au fond voir débouter M. C. de l'ensemble de ses demandes et a dans un premier temps conclu à la radiation de l'hypothèque judiciaire provisoire susvisée, expose ultérieurement que l'instance en validation d'hypothèque ne peut plus être jointe à la procédure au fond, dès lors que le juge des référés a, par ordonnance du 10 avril 1996, ordonné la radiation de l'hypothèque dont s'agit et désigné M. Jean-Paul Samba en qualité de séquestre pour une somme de 2 000 000 francs ;

Que répondant de ce chef aux remarques de M. C., elle indique que ladite somme ayant été par elle consignée, M. le Conservateur des Hypothèques de la Principauté de Monaco a bien procédé à la radiation de l'hypothèque provisoire prise par le requérant ; que la défenderesse sollicite en outre la condamnation de M. C. à lui payer une somme de 200 000 francs à titre de dommages-intérêts pour la procédure abusive ;

Attendu que M. C. ayant par la suite estimé qu'il bénéficiait toujours d'une garantie légale sous le contrôle d'un séquestre judiciaire, laquelle n'avait pu lui être ôtée par la radiation de l'hypothèque considérée, réitère sa demande de jonction des deux instances susvisées ;

Que se référant aux textes du Code civil régissant la matière successorale, M. C. explique qu'en sa qualité d'héritier réservataire il se trouve dans l'obligation de solliciter une expertise face à l'intention délibérée de sa co-héritière de faire échapper au calcul de la masse successorale partageable l'ensemble des biens y afférents ;

Que rappelant en effet que les libéralités ou legs faits par la de cujus ne sauraient en l'espèce excéder le tiers de ses biens, M. C. précise que sa sœur a refusé de se plier aux prescriptions légales, et que cette attitude notarialement constatée justifie le recours à l'expertise en vertu de l'article 787 du Code civil ; qu'au demeurant, le demandeur estime que sa sœur ne conteste pas formellement le recours à un homme de l'art pour les éléments meubles qu'elle détient ;

Que tout en faisant valoir qu'il justifie déjà du montant de sa réserve, M. C. entend en définitive - réitérant sa demande de jonction-voir :

« - d'ores et déjà attribuer le montant de 2 000 000 francs au profit du concluant, sauf à parfaire ou à diminuer,

  • donner acte de qu'il a effectivement produit sous le numéro de pièce 22 un chèque d'un montant de 1 800 000 francs au profit de la défenderesse,

  • et en outre, prononcer le bâtonnement des écrits judiciaires de la défenderesse et, notamment, les passages incriminés suivants :

Attendu que si tel était réellement le cas, cela démontrerait le manque de sentiments qu'il avait envers feue sa mère, laquelle dans les moments difficiles qu'il a connus, du fait de ses agissements personnels, qui l'avaient conduit à fréquenter contre son gré, ce que dans sa famille on nomme pudiquement le club Méditerranée du Rocher (lequel jouxte en contrebas côté Est Musée Océanographique) lui avait porté secours moral et financier,

  • ... les lettres qu'il a écrites à feue sa mère à l'époque sont parfaitement claires à ce sujet ; Attendu qu'il est possible de constater à leur lecture qu'après s'en être pris à ses propres parents, et plus particulièrement d'une manière véhémente vis-à-vis de son père, il y énonce des allégations pour le moins peu courtoises vis-à-vis des membres de sa belle famille,

  • s'entendre retirer des débats les pièces 3, 12, 37, 38, 39 produites par la défenderesse pour n'être pas conformes procéduralement,

  • de même, retirer des débats les pièces 14, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 25 bis, 26, 27 sur le fondement de l'Ordre public supérieur en vertu de l'article 22 de la Constitution de la Principauté de Monaco,

  • désigner tel expert qu'il appartiendra avec pour mission celle résultat du présent exploit, aux fins, notamment, de liquidation et délivrance au concluant des biens de toutes natures lui revenant en sa qualité d'héritier réservataire, étant donné acte à la défenderesse de ce que ne s'opposant pas à ladite mesure pour les biens meubles, elle n'a pas justifié des raisons de son opposition à celle-ci relativement aux immeubles,

  • et condamner la défenderesse aux entiers dépens » ;

Attendu qu'É. C. fait valoir en réplique que l'instance en validation d'inscription d'hypothèque ne repose plus sur aucun fondement légal pour prospérer devant cette juridiction, et ce, dès lors que la radiation est d'ores et déjà intervenue ; qu'elle en déduit l'impossibilité d'ordonner la jonction sollicitée et entend en outre voir débouter le demandeur de ses conclusions tendant à obtenir le bâtonnement d'une partie des écritures qu'elle a prises ;

Sur ce,

Attendu, en la forme, que par exploit du 4 avril 1995, M. C. a sollicité la validation de l'inscription judiciaire provisoire prise le 29 mars 1995 et demandé que soit ordonnée l'inscription d'hypothèque définitive sur ledit lot en vertu de l'article 762 du Code de procédure civile ;

Qu'après que le juge des référés ait, suivant ordonnance du 28 mai 1996, désigné M. Jean-Paul Samba en qualité de séquestre de la somme de 2 000 000 francs, qui devait être consignée entre ses mains par E. C. aux fins de mainlevée de l'inscription provisoire susvisée, le Conservateur des hypothèques a, sur la signification de cette ordonnance et justification de la consignation opérée, procédé le 5 juin 1996 à la radiation de l'inscription prise le 29 mars 1995, volume 181, n° 47, au profit de M. C. ;

Attendu qu'en l'état de cette radiation, M. C. modifiait les termes de sa demande par conclusions du 23 avril 1997 et sollicitait l'attribution à son profit de la somme consignée, la mesure de séquestre devant être selon lui maintenue jusqu'au prononcé du jugement à intervenir et après qu'il soit définitif ;

Attendu qu'en l'état de cette modification des termes de la demande, l'instance susvisée n'apparaît dès lors pas sans objet, en dépit de la radiation intervenue, et, compte tenu du lien de connexité certain existant entre cette procédure et l'instance au fond introduite par l'exploit du 16 février 1995, il y a lieu de faire droit à la demande de jonction, qui apparaît conforme à une bonne administration de la justice ;

Qu'il convient en conséquence de statuer par un seul et même jugement sur l'ensemble des demandes susvisées ;

Attendu que le Tribunal prononce en premier lieu, et à la demande de M. C., la nullité des attestations produites par sa sœur sous les numéros de pièces 3, 12, 37, 38 et 39, lesquelles ne sont pas conformes aux dispositions de l'article 324 du Code de procédure civile en ses prescriptions édictées aux paragraphes (2°), (3°), (5°) et même (6°) pour la pièce n° 3 ;

Attendu qu'en ce qui concerne la demande de retrait des débats des correspondances familiales contenues dans les pièces n° 14, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 25 bis, 26 et 27, que le Tribunal observe que les lettres dont la de cujus était destinataire constituent des biens successoraux, sur lesquels l'exercice de droits individuels apparaît prématuré avant qu'il ne soit procédé aux opérations de partage ;

Qu'en conséquence, la production en justice desdites pièces apparaissant irrégulière, il convient d'ordonner leur retrait des débats ;

Attendu, s'agissant du défaut allégué par M. C. de production de la pièce constitutive d'un chèque « Crédit Foncier de Monaco » d'un montant de 1 800 000 francs émis par M. C. le 13 mars 1991 et endossé au profit de sa fille, la défenderesse, qu'il convient de constater que ce document est désormais régulièrement produit sous la pièce n° 22 ;

Attendu, quant à la demande de bâtonnement des écrits judiciaires de la défenderesse, que les propos critiqués ont précisément trait aux courriers dont le rejet vient d'être ordonné et ne sont en outre pas suffisamment graves pour être susceptibles de mettre en cause l'honneur, ou la réputation de M. C., en sorte qu'il n'y a pas lieu d'y faire droit ;

Attendu qu'il convient quant au fond de rappeler que S. B.-C. est décédée à Monaco le 7 mars 1994, laissant deux enfants légitimes, M. et É. C., parties à la présente procédure, et ce, en l'état d'un testament olographe des 15 juin 1989 et 26 juin 1989 et d'un codicille du 28 septembre 1990 ;

Attendu que le Tribunal se trouve actuellement saisi d'une action du fils de la de cujus tendant à la désignation d'un expert aux fins de voir liquider et clôturer la succession, en déterminant au préalable la masse partageable compte tenu de la quotité disponible ;

Attendu, quant aux droits de chacun des héritiers, qu'il y a lieu de se référer aux dispositions de l'article 780 du Code civil, lequel prévoit que les libéralités effectuées par la de cujus ne peuvent excéder le tiers de ses biens en présence de deux enfants, la réserve de chacun d'eux étant alors égale à 1/3 de l'actif successoral ;

Attendu cependant que l'alinéa 2 de l'article 780 dispose que la quotité disponible est de la moitié s'il est disposé en faveur d'un (ou plusieurs) descendants légitimes ; que force est en l'espèce de constater que la dame B.-C. a, suivant les dispositions testamentaires susvisées, gratifié sa fille de legs effectués par préciput et hors part, portant sur des bijoux et des parts de société civile ;

Qu'en outre, les pièces produites démontrent que la dame B.-C. ayant, en suite de la vente des parts de ladite SCI intervenue en 1991, reçu un chèque de 1 800 000 francs, l'endossait au profit de sa fille, E. C., le 13 mars 1991 ;

Attendu qu'à l'effet de déterminer si les dispositions libérales dont s'agit ont excédé la quotité disponible, calculée comme il vient d'être indiqué, et doivent dès lors faire l'objet de la réduction instituée par l'article 787 du Code civil, il y a lieu de former une masse de tous les biens de la de cujus en y réunissant fictivement ceux dont il a été disposé par donation entre vifs, et ce, conformément à ce que prescrit l'article 789 dudit code ;

Attendu que le notaire, Me Crovetto, n'a pas en l'état été en mesure de procéder à ce calcul - ayant dressé deux procès-verbaux de défaut les 4 et 18 octobre 1994 et un procès-verbal de dire du 28 octobre 1994 qui n'a pas permis de faire un inventaire desdits biens - ;

Attendu que le Tribunal ne disposant pas davantage d'éléments probants à cet égard, il apparaît opportun, avant-dire-droit au fond sur les prétentions de chacune des parties, et étant observé que celles-ci ont à la barre du Tribunal déclaré s'accorder sur le principe d'une telle mesure, de désigner un expert avec la mission figurant au dispositif ci-après ;

Attendu, sur la demande accessoire formée par M. C. tendant à la désignation d'un séquestre, que cette mesure a été obtenue en cours d'instance suivant ordonnance de référé devenue définitive, en sorte que cette réclamation est devenue sans objet ; qu'en outre, l'attribution de la somme consignée entre les mains du séquestre apparaît prématurée, ladite mesure devant au contraire produire ses effets jusqu'à la liquidation de cette succession, la somme de 2 000 000 francs devant être « fictivement » réintégrée dans l'actif successoral pour permettre à l'expert de procéder au calcul susvisé ;

Attendu que la défenderesse doit d'ores et déjà être déboutée des fins de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts pour procédure abusive, dès lors que la présente décision fait droit à la demande de M. C. ;

Et attendu que la demande d'exécution provisoire du présent jugement apparaît fondée compte tenu de l'urgence requise par la loi et de ce que les parties s'accordent sur le principe de la mesure d'expertise ;

Et attendu que les dépens doivent être réservés ;

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

  • Ordonne la jonction des instances introduites suivant exploits respectifs du 16 février 1995 (numéro de rôle 597) et du 4 avril 1995 (numéro de rôle 786) ;

Faisant application de l'article 324 du Code de Procédure civile,

  • Déclare nulles les attestations produites par É. C. (pièces 3, 12, 37, 38 et 39) ;

  • Ordonne le retrait des débats des pièces communiquées par É. C. portant les numéros 14, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 25 bis, 26 et 27 ;

  • déboute M. C. des fins de sa demande de bâtonnement ;

Se déclarant compétent pour connaître de la succession mobilière et immobilière de S. B.-C., domiciliée à Monaco et qui y est décédée le 7 mars 1994, et faisant application de la loi monégasque,

  • Constate qu'en présence des libéralités consenties par la de cujus au profit d'un descendant légitime, la quotité disponible est équivalente à la moitié de ses biens tandis que chacune des parties à l'instance voit sa réserve héréditaire ramenée à 1/4 de la masse partageable ;

  • Accueille, avant dire droit sur la demande de liquidation et clôture de la succession B.-C., la demande d'expertise formulée par M. C. et désigne à cet effet M. André Garino, lequel aura pour mission :

• d'entendre les parties et se faire communiquer tous éléments lui permettant de déterminer la masse partageable subsistante au jour d'ouverture de la succession, en y rapportant « fictivement » tous biens meubles ou immeubles dont il aurait été disposé par la de cujus de son vivant,

• de prendre connaissance des testaments et codicilles de la de cujus,

• de dresser inventaire et chiffrer, en l'état des droits respectifs des parties, les attributions susceptibles d'être effectuées au profit de chacune d'elle,

• de préciser à cet égard, s'agissant des immeubles, s'ils sont commodément partageables en nature et proposer le cas échéant les lots et mises à prix en vue d'une licitation ;

  • Impartit à l'expert ainsi commis un délai de 8 jours pour l'acceptation ou le refus de sa mission, ledit délai courant à compter de la réception par lui de la copie de la présente décision qui lui sera adressée par le Greffe général ;

  • Dit qu'en cas d'acceptation de sa mission, ce même expert déposera au Greffe général un rapport écrit de ses opérations dans les quatre mois du jour où il les aura débutées, à défaut d'avoir pu concilier les parties, ce qu'il lui appartiendra de tenter dans toute la mesure du possible ;

  • Charge M. Jean-Charles Labbouz, Juge au siège, du contrôle de l'expertise, qui obéira aux dispositions des articles 344 à 365 du Code de procédure civile ;

  • Dit qu'en cas d'empêchement du juge ainsi commis, il sera procédé à son remplacement par simple Ordonnance ;

  • Déboute M. C. des fins de sa demande d'attribution de la somme consignée entre les mains du séquestre judiciaire ;

  • Déboute É. C. des fins de sa demande de dommages-intérêts ;

  • Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement.

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement après jugement du 8 janvier 1998,

Faisant droit à l'exception soulevée par M. C. portant sur la communication tardive par E. C. des pièces A, B, C, D, E, F, G et H, en ordonne le rejet ;

Faisant application des dispositions de l'article 789 du Code civil,

  • Dit et juge que la masse partageable nette s'élevait à la date du décès de S. B.-C., le 7 mars 1994, à la somme de 2 480 592 francs ;

  • Dit et juge que par référence aux dispositions de l'article 780 alinéa 2 du Code civil et à la qualité des héritiers parties à l'instance, la quotité disponible s'est alors élevée à la somme de 1 240 296 francs ;

  • Dit et juge qu'E. C. a vocation à appréhender les 3/4 de la somme susvisée, soit 1 860 444 francs et M. C. 1/4 de ce montant, soit la somme de 620 148 francs, assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 mars 1994 ;

Déclare E. C. personnellement débitrice envers M. C. d'une somme de 15 000 francs assortie des intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

  • Déboute les parties du surplus de leurs prétentions respectives ;

  • Déclare sans objet la demande de validation de l'inscription hypothécaire ;

  • Donne mainlevée du séquestre ordonné le 28 mai 1996 et autorise Jean-Paul Samba à se libérer de la somme de 2 000 000 francs entre les mains du notaire ci-après désigné ;

  • Ordonne le partage de la succession et désigne pour y procéder Maître Magali Crovetto-Aquilina, notaire, pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de la succession dont s'agit, conformément aux droits de chacun des héritiers et aux dispositions légales applicables ;

  • Désigne Mme Brigitte Gambarini, Premier Vice-Président, pour suivre les opérations de partage et faire rapport au cas où il s'élèverait des contestations ;

  • Dit que le magistrat et le notaire ainsi nommés pourront être remplacés, en cas d'empêchement, dans les conditions prévues par l'article 915 du Code de procédure civile.

Composition🔗

M. Narmino prés. ; Mlle Lelay prem. subst. proc. gén. ; Mes Karczag-Mencarelli, Lorenzi, av. déf.

Note🔗

Le jugement en date du 8 janvier 1998 est publié à la suite de celui du 18 janvier 2001.

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