Tribunal de première instance, 2 novembre 2000, C. c/ Société Pallas Monaco

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Abstract🔗

Banques

Contrat de gestion - Faute dolosive du banquier : placement au détriment du client, dans l'intérêt d'un tiers - Responsabilité de la banque - inapplication de la clause d'exonération

Résumé🔗

Il s'évince des faits de la cause que J. C. a ouvert auprès de l'établissement bancaire Pallas Monaco, filiale de Pallas Stem, qui la contrôlait à 62 %, en lui confiant un mandat de gestion pour une somme d'environ trois millions de francs ; que Pallas Monaco a pris la décision sans aviser son client de liquider la totalité du portefeuille de J. C., constitué de onze titres « placements père de famille » pour souscrire à la place le 3 février 1995 un certificat de dépôt négociable, d'un montant de 2 500 000 F à échéance du 17 mars 1995, qu'elle a alors renouvelé toujours à son insu, pour l'échéance du 18 septembre 1995, ce certificat de dépôt ayant été émis parla maison mère la banque Pallas Stern, alors qu'elle ne pouvait ignorer la mauvaise situation économique de celle-ci au point que son redressement judiciaire était prononcé en France le 30 juin 1995 et que C. fut dans l'obligation de déclarer sa créance.

Étant exclu que J. B. administrateur délégué de la Société Pallas Monaco, lequel a pris cette décision, ait pu agir de manière irresponsable ou sans se tenir au courant de l'actualité économique et financière, eu égard à sa grande expérience dans le domaine de la gestion de patrimoine, il existe des présomptions graves, précises et concordantes que ce ne peut être que dans un but étranger à l'intérêt du client que le placement litigieux a été envisagé, cet intérêt étant vraisemblablement celui de la société mère Pallas Stern, émettrice des titres dont les difficultés financières étaient alors importantes et avérées.

Il est acquis aux débats que le débiteur commet une faute dolosive lorsque, de propos délibéré, il se refuse à exécuter ses obligations contractuelles, même si ce refus n'est pas dicté par l'intention de nuire à son cocontractant.

Tel est le cas de l'espèce où la banque mandataire Pallas Monaco a agi dans un intérêt contraire à celui de son mandant et correspondant à celui d'un tiers.

Cette circonstance exclut que la Banque Pallas Monaco puisse revendiquer le bénéfice de la clause d'exonération de responsabilité précitée ; dès lors, par application des articles 1005 et 1831 du Code civil, la banque défenderesse doit être condamnée à indemniser J. C. du préjudice qui est résulté pour lui de la souscription du certificat de dépôt litigieux.


Motifs🔗

Le Tribunal,

Attendu que J. C., qui expose avoir ouvert un compte le 24 janvier 1994 auprès de Pallas Monaco en confiant à cet organisme un mandat de gestion pour une somme d'environ 3 millions de francs, et avoir subi un préjudice important du fait de l'emploi dolosif qu'aurait effectué cet établissement de l'intégralité de son portefeuille, a suivant exploit du 11 septembre 1996, fait assigner la société Pallas Monaco aux fins de voir dire et juger que :

« la société Pallas Monaco ne pouvait ignorer les difficultés financières de la Banque Pallas Stern au mois de janvier 1995,

que par suite, elle a commis une faute dolosive en liquidant tous les avoirs de son portefeuille et en réemployant le produit de cette réalisation dans la souscription d'un certificat de dépôt émis par cette banque » ;

et à l'effet de voir en conséquence condamner cette société à lui payer les sommes de :

• 3 000 000 francs de dommages-intérêts,

• et 150 000 francs au titre des frais irrépétibles ;

Attendu qu'au soutien de ses prétentions, J. C. expose pour l'essentiel que son éloignement de la France l'avait incité à souscrire un large mandat de gestion pour optimiser le mieux possible le placement de ses fonds ; que les sommes déposées en 1994 lors de l'ouverture du compte avaient été placées dans des valeurs de premier ordre ; que toutefois, en janvier 1995, sans l'avoir averti la société Pallas Monaco liquidait l'ensemble des valeurs composant son portefeuille et en remployait le produit en souscrivant le 3 février 1995 un certificat de dépôt négociable émis par la Banque Pallas Stern d'un montant de 2 500 000 francs à échéance du 17 mars 1995, qu'elle a alors renouvelé, toujours à son insu, pour l'échéance du 18 septembre 1995 ; qu'il devait cependant s'avérer que ladite banque connaissait de sérieuses difficultés financières, puisque son redressement judiciaire était prononcé en France le 30 juin 1995, J. C. étant alors dans l'obligation de déclarer sa créance ;

Attendu que compte tenu de telles circonstances, J. C. estime que la société Pallas Monaco se devait - en sa qualité de professionnel des placements - de procéder à une gestion prudente et avisée des avoirs qu'il lui avait confiés ;

Qu'il soutient qu'elle n'aurait selon lui jamais dû liquider la totalité de son portefeuille pour le réemployer dans la souscription en février 1995 du certificat de dépôt litigieux émis par la Banque Pallas Stern dont la communauté financière connaissait les difficultés ; que le demandeur reproche en outre à la société Pallas Monaco d'avoir voulu aider par cet apport de trésorerie la Banque Pallas Stern, avec laquelle elle était de surcroît affiliée ; qu'un placement aussi hasardeux constitue selon J. C. une faute grave qui devient dolosive dans les circonstances de l'espèce puisqu'effectué en parfaite connaissance de ses conséquences pour le client ;

Attendu que le demandeur évoque au soutien de ses réclamations la loi française du 24 février 1984 qui régit les établissements de crédit de droit monégasque, en l'état de laquelle les gérants de portefeuille doivent agir avec soin et diligence dans l'intérêt exclusif de leurs clients ;

Que J. C. invoque encore le règlement n° 90.05 de la commission des opérations de bourse française qui institue un devoir de conseil sur les risques spéculatifs encourus ;

Que s'agissant à cet égard de la gestion précisément opérée par la société Pallas Monaco, J. C. expose que le taux du placement critiqué n'était pas tellement attractif, dès lors que le premier placement s'est fait à 5,5 % et le second à 8 %, ce qui correspondait à des taux de rendement normaux ;

Que le demandeur précise en outre que Pallas Stern siégeait au conseil d'administration de sa filiale, laquelle dépendait étroitement de ses directives en raison du poids de son actionnariat, et ne pouvait dès lors ignorer les graves difficultés financières de la banque ; que J. C. produit pour en justifier un certain nombre de coupures de presse évoquant la situation très critique de Pallas Stern ;

Qu'estimant, dès lors, que le mandataire Pallas Monaco a fait un usage abusif des pouvoirs conférés par son client et déclarant non applicable toute clause d'exonération en matière de contrat de gestion, J. C., rectifiant par la suite sa demande initiale, sollicite la condamnation de Pallas Monaco à lui payer, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

• 2 500 000 francs en principal, outre intérêts avec anatocisme depuis le 17 mars 1995 au taux de 8 % l'an,

• outre la somme de 500 000 francs à titre de dommages-intérêts complémentaires,

• et la somme de 150 000 francs à titre des frais irrépétibles ;

Attendu que la société Pallas Monaco conclut au débouté de J. C. qui ne démontre selon elle aucune faute intentionnelle de sa part, ni même une quelconque imprudence et ne justifie en outre d'aucun préjudice déterminable, étant par elle observé que ce créancier aura un dividende dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire, dont le montant n'est pas encore connu à ce jour ;

Que la société Pallas Monaco rappelle que ce type de contrat de gestion est de nature aléatoire et qu'il ne pèse dès lors sur le mandataire qu'une obligation de moyens ; que de surcroît, la défenderesse indique qu'elle a été exonérée de toute responsabilité par J. C. dans le cadre d'une clause spécifique acceptée par ce dernier ;

Que la défenderesse déclare que son choix de gestion n'a été ni hasardeux, ni dolosif, étant précisé que le dépôt à terme d'une somme d'argent auprès d'un établissement financier n'est pas par nature spéculatif ; qu'il est en outre d'usage et courant que les gestionnaires placent ainsi qu'elle l'a fait auprès de leur clientèle les produits émis par leur propre groupe ;

Qu'enfin, la société Pallas Monaco expose que les appréciations de la place financière sur la situation de la Banque Pallas Stern sont restées très positives jusqu'à la cessation de ses paiements, la presse du 16 mai 1995 étant très optimiste compte tenu des négociations pendantes avec la société holding Comipar et de la qualité de son actionnariat ;

Que la défenderesse fait valoir que la date de cessation des paiements n'a en fait été fixée qu'au 22 juin 1995, tandis que les diverses expertises en cours démontrent l'absence d'éléments matériels précis sur la situation réelle de la banque ;

Qu'à défaut de toute preuve d'une faute lourde dont elle se serait rendue coupable, la défenderesse entend voir produire son effet de droit à la clause d'exonération de responsabilité ;

Attendu que par de nouveaux écrits judiciaires, J. C. précise que la société Pallas Monaco évoque elle-même divers articles de presse qui traitent de la situation précaire de Pallas Stern et sont donc révélateurs de la connaissance qu'elle en avait ;

Attendu qu'en réplique, la société Pallas Monaco sans répondre à ce moyen, produit une décision du Conseil de discipline des OPCVM du 6 juillet 1997, devant qui avait été déférée la Banque Pallas Stern par la Commission des Opérations de Bourse, et qui démontrerait le respect d'une certaine indépendance entre gestionnaires et dépositaires au sein de la banque Pallas Stern ;

Attendu que J. C. estime qu'une telle décision ne lui est pas opposable et qu'elle ne fait nullement obstacle à ce que la société Pallas Monaco ait commis à son égard une faute dolosive en liquidant tout son portefeuille et en remployant sans l'en aviser la totalité de sa réalisation dans la souscription d'un seul produit présentant des risques importants ;

Attendu que par jugement contradictoire du 9 juillet 1998, le Tribunal a ordonné une mesure d'expertise confiée à Pierre Colombani avec mission de :

« 1) prendre connaissance de tous documents contractuels liant la société Pallas Monaco à J. C.,

2) décrire les relations économiques et juridiques existant entre la société Pallas Monaco et la banque Pallas Stern,

3) se faire communiquer tous documents utiles - notamment courriers, compte rendus de réunions ou de conseils d'administration - à l'effet de vérifier :

a) si Pallas Monaco était tenue informée de l'évolution de la situation financière de la banque Pallas Stern, et ce, à compter de quelle période ;

b) si la société Pallas Monaco ou ses dirigeants se sont vus enjoindre ou ont pris l'initiative d'aider la banque Pallas Stern, notamment par une politique de souscription systématique, ou du moins plus importante de certificats de dépôt auprès de cette banque, et ce, à quelle époque ;

4) donner tous autres éléments utiles d'appréciation à l'effet de déterminer si le choix de gestion de la société Pallas Monaco avait pour but le seul intérêt de la banque Pallas Stern et fournir à cette occasion les raisons qui ont pu déterminer le gestionnaire de compte à modifier les placements de son client,

5) donner tous éléments d'ordre financier devant permettre de chiffrer le cas échéant le préjudice subi par J. C. du fait du dépôt incriminé » ;

Que l'expert commis a déposé son rapport le 28 septembre 1999 ;

Attendu que J. C. a conclu après expertise à l'homologation du rapport précité et à la condamnation de la société Pallas Monaco à lui payer la somme de 4 431 723 francs diminuée des dividendes reçus de la liquidation judiciaire de Pallas Stern ;

Qu'il réclame, en outre, un million de francs à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive, compte tenu du comportement procédural vexatoire de la défenderesse ;

Qu'il réclame, enfin, 200 000 francs de dommages-intérêts « au titre de l'article 1229 du Code civil monégasque » ainsi que le remboursement des frais d'expertise ;

Qu'il fait valoir que les conclusions de l'expert Colombani sont accablantes pour la banque Pallas Monaco en ce que celle-ci connaissait incontestablement par la commission bancaire les difficultés de la banque Pallas Stern, étant même établi que la défenderesse était assujettie à sa maison mère Pallas Stern par un contrôle de gestion ;

Attendu que la société Pallas Monaco a conclu en réplique le 19 janvier 2000 ; qu'elle critique le rapport établi par l'expert Colombani et fait notamment valoir qu'il comporte des appréciations inexactes et purement juridiques sur la souscription du certificat de dépôt, outre que l'expert aurait commis une confusion entre la connaissance d'une situation difficile de la Banque Pallas Stern et la démonstration d'une volonté de lui venir en aide ;

Qu'elle insiste particulièrement sur les difficultés qu'elle avait d'apprécier les risques d'une faillite de la Banque Pallas Stern ;

Qu'elle ajoute qu'elle a elle-même été abusée par des documents comptables falsifiés ou tronqués ;

Qu'elle fait d'ailleurs valoir qu'une information pénale est actuellement en cours pour présentation de faux bilan par la Banque Pallas Stern ;

Sur quoi :

Attendu que, sans égard pour les considérations expertales relatives à la régularité de la souscription du certificat de dépôt par la banque défenderesse, il résulte clairement du rapport de l'expert Colombani, ainsi que l'a déjà jugé le Tribunal le 9 juillet 1998, que la situation de la Banque Pallas Stern était pour le moins préoccupante voire alarmante à l'époque où la société Pallas Monaco a, début 1995, pris la décision de liquider la totalité du portefeuille de J. C. - constitué de onze titres « placements de père de famille » - pour souscrire à la place le certificat de dépôt Pallas Stern litigieux ;

Qu'ainsi, outre la confirmation de ce fait par les nombreuses coupures de presse produites, il apparaît que les experts Gendrot, Harmand et Piot commis par ordonnance de référé du 6 octobre 1995 du juge du Tribunal de commerce de Paris dans le cadre de la déconfiture de la banque Pallas Stern, avaient estimé devoir fixer à courant 1993 la date de la cessation des paiements de cette banque ;

Que c'est également au cours de cette année 1993 que l'agence de notation « Standard & Poor's » avait déclassé les certificats de dépôt de la banque Pallas Stern les faisant passer, sur l'échelle ADEF, de la cote T1 (« catégorie investissement - note la plus favorable - créance offrant une forte sécurité à l'échéance fixée »), à la cote T2 (« catégorie spéculative - créance sensible aux évolutions de la conjoncture et présentant dès lors un certain caractère spéculatif ») ;

Que la société « Standard & Poor's-ADEF » terminait d'ailleurs ainsi son « communiqué de presse » du 27 avril 1993 figurant en annexe du rapport de l'expert :

« en dépit de cette politique, l'exercice en cours sera difficile dans la mesure où le résultat d'exploitation de la banque ne permettra pas de couvrir le fort impact négatif des provisions immobilières... » ;

Que cette cote T2 avait été maintenue jusqu'au 23 juin 1995, date à laquelle la cotation était passée à T4 (« catégorie spéculative - créance émise par une entreprise en risque important de défaut de paiement, ou déjà en défaut sur tout ou partie de sa dette ») ;

Attendu que cette mauvaise situation économique de Pallas Stern depuis 1993, et en tout cas début 1995 à l'époque de la souscription du certificat en cause, était nécessairement connue de la banque Pallas Monaco dans la mesure où celle-ci était contrôlée à hauteur de 62 % par Pallas Stern et où les associés de Pallas Monaco étaient notamment la banque Pallas France et P. M., lui-même administrateur de Pallas Stern et de Comipar ;

Que d'ailleurs, ainsi que l'a relevé l'expert Colombani en page 17 de son rapport, les procès-verbaux des conseils d'administration de Pallas Monaco révèlent la présence permanente lors de ces réunions de :

• P. M.,

• P. V., directeur général de Pallas Stern,

• C. V., directeur général de Pallas Stern (en remplacement de P. V.),

• G. O., directeur général adjoint de Pallas Stern ;

Attendu que ces éléments établissent à suffisance le contrôle de Pallas Monaco par Pallas Stern et, surtout, le fait que la banque monégasque connaissait nécessairement en son temps la mauvaise situation économique de la maison mère française et ce, bien que J. B. - alors administrateur délégué de Pallas Monaco - ait toujours prétendu, contre toute vraisemblance, que ce n'est qu'en juin 1995 qu'il a appris la situation économique réelle de Pallas Stern ;

Que cette connaissance, indépendamment de toute éventuelle présentation de faux bilans par Pallas Stern, est en tout cas acquise en mars 1995 puisqu'on peut lire dans le procès-verbal établi lors de la réunion du conseil d'administration de Pallas Monaco qui s'est tenu le 17 mars 1995, en présence notamment de P. M., de J. B. et de C. V. :

« questions diverses

Parmi les sujets divers discutés lors de ce conseil a été évoquée la suspension momentanée de notre agrément de banque qui, à ce jour, dépend essentiellement de l'avis favorable ou défavorable que pourrait être amenée à donner la commission bancaire au comité des Établissements de Crédit en fonction de la situation de la banque Pallas Stern... » ;

Attendu qu'en fonction de ces éléments se pose la question de comprendre comment il a alors pu paraître opportun à J. B. ès-qualités, de liquider le portefeuille « placements de père de famille » de J. C. pour le remplacer par un certificat de dépôt Pallas Stern, d'autant que c'est précisément le jour de la réunion précitée du 17 mars 1995 du conseil d'administration de Pallas Monaco que J. B. a pris la décision de « casser » ledit certificat pour en souscrire un autre de même montant mais pour une durée plus longue (6 mois) ;

Attendu qu'étant exclu que J. B. - fort de l'expérience qu'il revendique de 40 ans dans le domaine de la gestion de patrimoine - ait pu agir de manière irresponsable ou sans se tenir au courant de l'actualité économique et financière, il existe des présomptions graves, précises et concordances que ce ne peut être que dans un but étranger à l'intérêt du client que le placement litigieux a été envisagé, cet intérêt étant vraisemblablement celui de la société mère Pallas Stern émettrice des titres dont les difficultés financières étaient alors importantes et avérées ;

Attendu qu'il est acquis aux débats que le débiteur commet une faute dolosive lorsque, de propos délibéré, il se refuse à exécuter ses obligations contractuelles, même si ce refus n'est pas dicté par l'intention de nuire à son cocontractant ;

Que tel est le cas de l'espèce où la banque mandataire Pallas Monaco a agi dans un intérêt contraire à celui de son mandant et correspondant à celui d'un tiers ;

Que cette circonstance exclut que la Banque Pallas Monaco puisse revendiquer le bénéfice de la clause d'exonération de responsabilité précitée ; que, dès lors, par application des articles 1005 et 1831 du Code civil la banque défenderesse doit être condamnée à indemniser J. C. du préjudice qui est résulté pour lui de la souscription du certificat de dépôt litigieux ;

Attendu qu'il résulte du rapport d'expertise - non sérieusement discuté sur ce point - que le portefeuille « placement de père de famille » du demandeur d'une valeur d'environ trois millions de francs début 1995, s'il avait été maintenu dans sa composition d'alors, aurait normalement été valorisé en septembre 1999 (date du dépôt du rapport Colombani) à la somme de 4 431 723 francs ;

Qu'il est par ailleurs acquis aux débats qu'à cette date, J. C. avait reçu en dividendes au titre de sa production dans la liquidation judiciaire Pallas Stern les sommes de 380 000 francs (juin 1998), 365 000 Francs (septembre 1998) et 525 000 francs (juillet 1999), soit en tout 1 270 000 francs actualisés à 1 306 549 francs en fonction du taux de rendement du portefeuille 1999 (4,08 %) ;

Que la perte nette de J. C. s'élevait ainsi en septembre 1999 à la somme de 3 125 174 francs, soit 4 431 723 - 1 306 549 ;

Attendu que la Banque Pallas Monaco doit, en conséquence, être condamnée à payer cette somme au demandeur et ce sous déduction des autres dividendes que le demandeur a pu percevoir postérieurement à septembre 1999 ;

Attendu que le demandeur réclame, par ailleurs, à la banque Pallas Monaco un million de francs de dommages-intérêts pour « comportement procédural vexatoire en paroles et par écrits », outre 200 000 francs « au titre de l'article 1229 du Code civil » ;

Attendu, sur la première demande, qu'il apparaît que par sa résistance injustifiée la banque a contraint J. C. à agir en justice et à ainsi exposer des frais ;

Que cette attitude caractéristique d'un abus justifie que la banque soit condamnée à régler au demandeur 100 000 francs de dommages-intérêts eu égard aux éléments d'appréciation dont le Tribunal dispose ;

Attendu, sur la seconde demande de dommages-intérêts que J. C. ne donne aucune indication de la faute distincte qui aurait été commise par la banque et du préjudice spécifique qui en serait résulté pour lui, faute et préjudice devant être différents de ceux déjà invoqués à l'occasion de la demande précédente ;

Que cette demande doit donc être rejetée ;

Attendu que J. C. sollicite également que la Banque Pallas Monaco soit condamnée à lui rembourser les frais d'expertise qu'il a exposés ;

Qu'il n'y a toutefois pas lieu de statuer sur cette demande dans la mesure où ces frais font partie intégrante des dépens et qu'à ce titre, ils seront supportés par la Banque Pallas Monaco qui succombe ;

Attendu que la banque défenderesse devra effectivement supporter les entiers dépens par application de l'article 231 du Code de procédure civile ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal statuant contradictoirement,

Ayant tels égards que de droit pour le rapport déposé par l'expert Colombani le 28 septembre 1999,

  • Condamne la société anonyme monégasque Pallas Monaco à payer à J. H. C. la somme de 3 125 174 francs, diminuée des éventuels dividendes perçus dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Pallas Stern postérieurement à septembre 1999 ;

  • Condamne également la société Pallas Monaco à payer au demandeur 100 000 francs de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

  • Rejette le surplus de la demande.

Composition🔗

M. Narmino prés. ; Mlle Lelay prem. subst. proc. gén. ; Mes Brugnetti, Pasquier-Ciulla av. déf. ; D'Ornano av. bar. de Marseille ; Manceau av. bar. de Paris.

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