Tribunal de première instance, 16 mars 2000, C. c/ N.

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Abstract🔗

Divorce - Séparation de corps

Conversion de la Séparation de Corps en divorce - Conditions : délai de 3 ans (C. civ., art. 206-33) - Effets : nouvelle attribution de torts (non) - Droit à pension alimentaire en cas de torts partagés (non)

Procédure civile

Donné acte : offre unilatérale de régler une pension alimentaire ne constitue ni contrat judiciaire, ni condamnation

Résumé🔗

Il est constant que les époux C. et N. ont été séparés de corps à leurs torts et griefs réciproques par jugement du tribunal du 13 juin 1996 ; que ce jugement est définitif pour avoir été signifié par huissier le 2 juillet 1996 et n'avoir pas fait l'objet d'un recours ; que le délai de trois ans requis à l'article 206-33 du Code civil s'est écoulé entre la date où le jugement contradictoire précité est devenu définitif et celle de l'audience à laquelle a été débattue la présente demande de conversion ; que depuis la séparation de corps des époux C. N. aucune réconciliation ou reprise de la vie commune n'apparaît avoir eu lieu.

Il y a lieu, dès lors, de faire droit à la demande des parties et de déclarer convertie en divorce la séparation de corps qui a été prononcée entre les époux, à leurs torts et griefs réciproques, et ce, avec toutes conséquences légales, notamment celles prévues par les articles 206-18 et 206-33 quant aux publications à intervenir.

En l'état des articles 206-23 et 206-36 du Code civil, un divorce ou une séparation de corps aux torts et griefs réciproques ne peut générer de condamnation à pension alimentaire au profit d'un époux.

Ainsi compte tenu de l'offre alors formulée par C. dans le jugement de séparation de corps du 13 juin 1996, il a simplement été donné acte à celui-ci de son accord pour régler à son épouse une pension alimentaire indexée de 1 000 francs.

Ce « donné acte », qui ne constitue pas une condamnation et qui se distingue d'un contrat judiciaire en ce qu'il ne constate aucun accord des parties sur une contestation soumise au Tribunal, n'a de valeur contraignante que morale et ne saurait dès lors générer d'effets de droit, ainsi que cela a été jugé entre les mêmes parties par le Tribunal correctionnel sur citation pour abandon de famille le 9 juin 1998 et par le juge de paix sur requête en autorisation de saisie-arrêt le 9 juillet 1998.

En conséquence C. peut valablement, à l'occasion de la présente procédure de conversion, ne plus maintenir son offre de règlement, simple offre unilatérale qui ne constituait pas une mesure accessoire au prononcé de la séparation de corps.


Motifs🔗

Le Tribunal,

Considérant les faits suivants :

Suivant l'exploit susvisé en date du 23 juin 1999, R. C. a régulièrement fait assigner L. N., qu'il a épousée devant l'officier d'état civil de Monaco le 14 février 1992, à l'effet de voir convertir en divorce le jugement de séparation de corps prononcé par le Tribunal le 13 juin 1996 aux torts et griefs réciproques des époux ;

Il demande, par ailleurs, qu'il lui soit donné acte qu'il n'entend plus verser à la défenderesse la somme de 1 000 francs qu'il avait de lui même accepté de régler à l'occasion de la procédure antérieure de séparation de corps ;

Il fonde sa position, notamment, sur le fait que L. N. a, entre-temps, mis un enfant au monde des œuvres d'un tiers ;

L. N. a répliqué le 28 octobre 1999 qu'elle ne s'opposait pas à la demande de conversion formée par son mari ; elle sollicite, en conséquence, que soit prononcée la conversion en divorce mais avec maintien des mesures accessoires ordonnées à l'occasion du jugement de séparation de corps et, notamment, s'agissant de la pension susvisée ;

R. C. a conclu en réponse le 15 décembre 1999 ; il confirme ne plus être d'accord pour régler une pension alimentaire à L. N. ;

Celle-ci a conclu en dernier lieu le 19 janvier 2000 ;

Elle fait valoir que R. C. ne peut revenir unilatéralement sur l'engagement qu'il avait pris de lui régler une pension de 1 000 francs et qui vaut contrat judiciaire ; elle demande que, le cas échéant, il soit condamné à lui verser cette pension indexée ;

Sur quoi :

Attendu qu'il est constant que les époux C. et N. ont été séparés de corps à leurs torts et griefs réciproques par jugement du Tribunal du 13 juin 1996 ;

Que ce jugement est définitif pour avoir été signifié par huissier le 2 juillet 1996 et n'avoir pas fait l'objet d'un recours ;

Attendu que le délai de trois ans requis à l'article 206-33 du Code civil s'est écoulé entre la date où le jugement contradictoire précité est devenu définitif et celle de l'audience à laquelle a été débattue la présente demande de conversion ;

Que depuis la séparation de corps des époux C. et N., aucune réconciliation ou reprise de la vie commune n'apparaît avoir eu lieu ;

Qu'il y a, dès lors, lieu de faire droit à la demande des parties et de déclarer convertie en divorce la séparation de corps qui a été prononcée entre les époux par jugement du Tribunal de première instance en date du 13 juin 1996 à leurs torts et griefs réciproques, et ce, avec toutes conséquences légales, notamment celles prévues par les articles 206-18 et 206-33 quant aux publications à intervenir ;

Attendu qu'il est constant qu'en l'état des articles 206-23 et 206-36 du Code civil, un divorce ou une séparation de corps aux torts et griefs réciproques ne peut générer de condamnation à pension alimentaire au profit d'un époux ;

Qu'ainsi, compte tenu de l'offre alors formulée par R. C. dans le jugement de séparation de corps du 13 juin 1996, il a simplement été donné acte à celui-ci de son accord pour régler à son épouse une pension alimentaire indexée de 1 000 francs ;

Que ce « donné acte », qui ne constitue pas une condamnation et qui se distingue d'un contrat judiciaire en ce qu'il ne constate aucun accord des parties sur une contestation soumise au Tribunal, n'a de valeur contraignante que morale et ne saurait dès lors générer d'effets de droit, ainsi que cela a été jugé entre les mêmes parties par le Tribunal correctionnel sur citation pour abandon de famille le 9 juin 1998 et par le juge de paix sur requête en autorisation de saisie-arrêt le 9 juillet 1998 ;

Qu'en conséquence, R. C. peut valablement, à l'occasion de la présente procédure de conversion, ne plus maintenir son offre de règlement, simple offre unilatérale qui ne constituait pas une mesure accessoire au prononcé de la séparation de corps ;

Qu'il lui en sera donné acte et que L. N. doit, en conséquence, être déboutée de sa demande sur ce point ;

Et attendu que par application de l'article 206-34 du Code civil, les dépens devront être partagés par moitié entre les parties ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal statuant contradictoirement,

Convertit en divorce, avec toutes conséquences de droit, la séparation de corps qui a été prononcée aux torts et griefs réciproques des époux R. C. – L. N. par jugement du Tribunal de première instance en date du 13 juin 1996 ;

Prend acte que R. C. n'entend plus maintenir son offre de régler une pension alimentaire à L. N. ;

Déboute L. N. de sa demande sur ce point ;

Composition🔗

M. Narmino, prés. ; Mlle Lelay, prem. subst. proc. gén. ; Mes Pasquier-Ciulla, Gardetto et Michel, av. déf.

Note🔗

L'époux avait demandé la conversion de la séparation de corps prononcée aux torts et griefs réciproques, en divorce, sans maintien de la pension alimentaire qu'il avait consenti à régler unilatéralement ; son épouse sans s'opposer à cette conversion, sollicitait le maintien de cette pension.

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