Tribunal de première instance, 14 novembre 1996, Éliophot c/ SA Abbey Road International

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Abstract🔗

Exequatur

Jugement initial français - Conditions de l'article 18 de la Convention franco-monégasque réunies - Exequatur accordée - Jugement rectificatif du premier - Conditions de l'article 18 non réunies : partie ni comparante ni appelée - Exequatur refusée

Résumé🔗

Dès lors que la décision française revêtue de la formule exécutoire, présente tous caractères propres à justifier de son authenticité, qu'elle a été rendue par une juridiction française compétente, qu'elle a été régulièrement signifiée et qu'elle apparaît devoir être considérée comme passée en force de chose jugée au sens de l'article 500 du Code de procédure civile français et exécutoire en France par application de l'article 501 dudit code, il s'en suit que les conditions prévues par l'article 18 de la Convention franco-monégasque relative à l'aide mutuelle judiciaire, rendue applicable à Monaco par l'ordonnance souveraine n° 106 du 2 décembre 1949, étant réunies en l'espèce, qu'il y a lieu de faire droit à la demande d'exequatur concernant ce jugement.

Tel n'est point le cas pour le jugement rectificatif de celui susvisé, rendu sur requête, étant donné qu'il n'est pas justifié que le tribunal ait statué après avoir entendu la défenderesse ou celle-ci dûment appelée, conformément aux dispositions de l'article 463 du Nouveau Code de procédure civile français, de sorte qu'en ce qui concerne ce deuxième jugement l'exequatur ne saurait être accordé.


Motifs🔗

Le Tribunal,

Attendu que selon l'exploit susvisé, la société à responsabilité limitée Eliophot a fait assigner la société anonyme Abbey Road International aux fins d'obtenir en Principauté de Monaco l'exequatur d'un jugement rendu le 4 septembre 1991 par le Tribunal de commerce d'Aix-en-Provence dont le dispositif est ainsi conçu :

« Le Tribunal après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant en premier ressort et contradictoirement,

Dit que le dépliant réalisé par les sociétés défenderesses est une contrefaçon grossière du dépliant constituant la propriété exclusive de la société Éliophot.

De même suite condamne conjointement et solidairement la société Grand Hôtel de Florence et la société Abbey Road International à payer à la société Éliophot une somme de 10 000 francs à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral et intellectuel subi, et une somme de 10 000 francs en réparation de son préjudice matériel.

Condamne par ailleurs la société Abbey Road International à payer à la société Éliophot une somme de 20 000 francs en réparation du préjudice que cette dernière a subi du fait de la concurrence déloyale de cette société.

Condamne conjointement et solidairement les défenderesses à supporter les dépens de l'instance. »

et du jugement de ce même tribunal du 29 janvier 1992, rectifiant le précédent, et ainsi libellé :

« Le tribunal statuant sur requête, tout d'abord dit qu'il sera indiqué dans son jugement du 4 septembre 1991 rendu entre la société Éliophot et les sociétés Grand Hôtel de Florence et Abbey Road International, que ces dernières sont condamnées à payer à la société Éliophot conjointement et solidairement une somme de 5 000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Ordonne l'exécution provisoire en ce qui concerne sa demande du 4 septembre 1991. Rejette la demande d'Éliophot tendant à voir publication de la décision dans des journaux. »

Sur ce,

Attendu que l'article 18 de la convention relative à l'aide mutuelle judiciaire entre la France et la Principauté de Monaco, rendue applicable à Monaco par l'ordonnance souveraine n° 106 du 2 décembre 1949, permet au tribunal, saisi d'une demande d'exequatur d'une décision française, de déclarer celle-ci exécutoire dans la Principauté après avoir vérifié seulement, au regard de la loi du pays d'origine, soit la loi française, l'authenticité de cette décision, la compétence de la juridiction dont elle émane, la régularité des citations délivrées aux parties, ainsi que la réalité de sa force de chose jugée, puis, au regard du droit de for, soit de la loi monégasque, l'absence de contrariété à l'Ordre public des dispositions qu'elle comporte.

Attendu que la décision du 4 septembre 1991 a été versée aux débats sous la forme d'une expédition revêtue de la formule exécutoire française qui présente tous caractères propres à justifier de son authenticité, et a été rendue par sa juridiction française compétente ; qu'elle a été régulièrement signifiée le 26 novembre 1996 et apparaît devoir être considérée comme passée en force de chose jugée au sens de l'article 500 du Code de procédure civile français et exécutoire en France par application de l'article 501 dudit code ;

Que dès lors les conditions prévues par l'article 18 de la Convention franco-monégasque précitée étant réunies en l'espèce, il y a lieu de faire droit à la demande d'exequatur du jugement du 4 septembre 1991 ;

Que tel n'est pas le cas pour le jugement rendu sur requête du 29 janvier 1992, dès lors qu'il n'est pas justifié de ce que le tribunal ait statué après avoir entendu la société Abbey Road International ou celle-ci dûment appelée, conformément aux dispositions de l'article 463 du Nouveau Code de procédure civile français ; qu'en conséquence l'exequatur dudit jugement ne saurait être accordé ;

Et attendu que les dépens doivent être partagés par moitié entre les parties, en raison de leur succombance respective ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant par défaut,

Déclare exécutoire dans la Principauté de Monaco, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 4 septembre 1991 par le Tribunal de commerce d'Aix-en-Provence dont le dispositif se trouve ci-dessus rapporté ;

Déboute cependant la société à responsabilité limitée Éliphot de sa demande d'exequatur du jugement rectificatif du 29 janvier 1992 ;

Fait masse des dépens ;

Composition🔗

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet, prem. subst. proc. gén. ; Me Escaut, av. déf.

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