Tribunal de première instance, 9 février 1995, S. c/ État de Monaco

  • Consulter le PDF

Abstract🔗

Vente

Faculté de rachat par l'État d'un appartement dépendant d'un immeuble domanial - Fixation du prix de rachat par une commission ayant mandat d'appliquer des modalités contractuelles de calcul - Non-respect de ces modalités - Renvoi des parties devant la commission pour une nouvelle détermination du prix

Résumé🔗

La clause d'un contrat par laquelle les parties ont convenu que le prix de rachat par l'État de l'appartement dépendant d'un immeuble domanial, acquis par un particulier, sera fixé par la commission instituée par l'article 18 du règlement du 16 décembre 1977 - selon les modalités de calcul reprises dans le contrat - prévues à l'article 17 dudit règlement - s'analyse en une convention de détermination de prix, par un tiers, telle que régie par l'article 1434 alinéa 2 du Code civil.

Il appartient aux membres de la commission d'accomplir le mandat dont ils sont chargés, conformément à l'article 1830 du Code civil ainsi que de rendre compte de leur gestion au sens de l'article 1832 dudit code, le tribunal disposant d'un pouvoir de contrôle, au vu du procès-verbal dressé par la commission, sur les conditions dans lesquelles elle s'est acquittée de son mandat.

S'il ressort de ce contrôle que la commission n'a pas déterminé le prix en appliquant tous les critères de calcul prévus, en omettant celui relatif à l'évolution des prix sur le marché immobilier local, la vente ne saurait avoir lieu en l'état ; il s'ensuit que s'impose la saisine de la commission en vue de la fixation du prix de rachat de l'appartement conformément aux règles applicables, étant précisé que les parties ont affirmé leur volonté de parvenir à la vente envisagée et demande en fait l'exécution du contrat.


Motifs🔗

Le Tribunal,

Considérant les faits suivants :

Dans le cadre d'une politique d'accession à la propriété en faveur des locataires d'appartements dépendant d'immeubles domaniaux, l'État, par son département des Finances et de l'Économie, a établi un règlement relatif à la vente desdits appartements aux personnes de nationalité monégasque, lequel a été publié au Journal de Monaco du 16 décembre 1977 ;

Ce règlement prévoit en particulier que les acquéreurs qui désireraient céder leur appartement devront en proposer la vente en priorité à l'État (article 16) ; l'article 17 dispose pour sa part :

« Si l'État décide de racheter l'appartement, le prix de ce rachat sera calculé sur la base du prix de cession initial, réajusté en tenant compte de critères généraux (évolution de l'indice du coût de la construction), locaux (évolution des prix sur le marché immobilier), particuliers à l'immeuble et à son environnement en enfin propres à l'appartement lui-même (prise en considération, d'une part, des éventuelles améliorations apportées à ce dernier - à l'exception des travaux à caractère décoratif ou somptuaire, ou encore de stricte convenance personnelle - et, d'autre part, des dégradations subies et de la vétusté).

Ce prix de rachat devra être indiqué dans la notification prévue au 2e alinéa de l'article 16. »

L'article 18 du règlement édicte :

« Le prix de rachat, déterminé comme indiqué ci-dessus, sera fixé par une Commission présidée par le Conseiller du Gouvernement pour les Travaux Publics et les Affaires Sociales et composée de deux représentants du Conseil Communal et de deux représentants du Département des Finances et de l'Économie, dont l'Inspecteur du Service de l'Enregistrement et du Timbre à la Direction des Services Fiscaux.

La Commission pourra s'adjoindre des experts à titre consultatif. »

Par acte en date du 7 août 1985 de Me Jean-Charles Rey, alors notaire, P. S. a acquis de l'État un appartement de deux pièces principales, outre les dépendances, situé à Monaco pour le prix de 951 800 francs ; cet acte reproduit, dans le cadre de la clause relative au cas où l'acquéreur désirerait vendre l'appartement dont s'agit, les termes des articles 16 et 17 du règlement du 16 décembre 1977 précité et énonce en particulier :

« Ce prix de rachat devra être fixé par la Commission prévue à l'article 18 du règlement... » ;

P. S. ayant fait part à l'État de son intention de vendre l'appartement acquis le 7 août 1985, l'Administrateur des Domaines, par lettre du 17 septembre 1991, lui a fait connaître :

« ... L'État a l'intention de racheter cet appartement. Le montant du prix de rachat sera porté à votre connaissance dans les plus brefs délais... »,

puis, par lettre du 24 septembre 1991 :

« ... la commission instituée par le règlement relatif à la vente des appartements dépendant d'immeubles domaniaux aux personnes de nationalité monégasque a fixé le prix de rachat de votre appartement à la somme de 1 060 000 francs. Je vous serais très obligé de bien vouloir m'indiquer la suite que vous entendez réserver à cette proposition... » ;

Estimant ce prix trop faible, S. a fait part à l'État, par lettre du 2 octobre 1991, de son refus d'accepter la proposition qui lui était faite ;

Le 23 octobre suivant, l'État l'a informé qu'il ne reviendrait pas sur le prix fixé par la Commission et a confirmé sa position le 17 décembre 1991 ;

Saisi par S. le 23 décembre 1991 d'un recours pour excès de pouvoir des décisions de l'Administrateur des Domaines et d'une demande accessoire en indemnité, le Tribunal Suprême s'est déclaré incompétent pour connaître du recours et a rejeté la requête par décision du 10 novembre 1992 ;

Selon l'assignation susvisée du 2 mars 1993, S. a saisi le Tribunal de Première Instance d'une demande dirigée contre l'État, tendant pour l'essentiel à faire juger que le prix de rachat de l'appartement doit s'établir conformément aux prescriptions du contrat du 7 août 1985, c'est-à-dire en retenant les trois critères de réajustement de prix, soit à la somme de 1 832 000 francs ;

Il poursuit donc la condamnation de l'État à lui payer cette somme avec intérêts de droit à compter du 24 septembre 1991 et demande au Tribunal d'enjoindre à son adversaire de produire aux débats « le résultat des travaux de la Commission prévue par l'article 18 du règlement », en sollicitant en outre le paiement de 20 000 francs à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et l'exécution provisoire de la décision à intervenir ;

L'État a conclu le 17 juin 1993 à l'irrecevabilité de la demande, et de celles qui en sont l'accessoire, tendant à voir fixer le prix de rachat de l'appartement à la somme de 1 832 000 francs ; subsidiairement, il demande le rejet de l'ensemble des prétentions élevées par S. ;

En réponse, S. maintient ses demandes initiales qu'il estime recevables et fondées et observe que les travaux de la Commission ne sont pas produits aux débats, en invitant le Tribunal à en tirer toutes conséquences utiles ;

L'État ayant pris le 16 décembre 1993 des conclusions réitérant ses précédents écrits judiciaires, S., par conclusions en réplique du 16 février 1994, demande en outre au Tribunal de juger qu'il résulte de ces conclusions du 16 décembre 1993 que le prix de rachat proposé n'a pas été calculé conformément au règlement du 16 décembre 1977 et à l'acte du 7 août 1985, de dire que l'État a retenu à tort l'indice national du bâtiment BT 01 au lieu de l'indice du coût de la construction et, très subsidiairement, de renvoyer les parties devant la Commission pour l'établissement d'un prix de rachat conforme aux prescriptions contractuelles ;

À l'audience du 8 juin 1994 fixée pour les plaidoiries, le Tribunal a ordonné la communication aux débats du procès-verbal établi par la Commission instituée par l'article 18 du règlement du 16 décembre 1977 ;

L'État ayant produit cette pièce aux débats le 22 juin suivant, S. a pris de nouvelles conclusions aux termes desquelles il demande au Tribunal de constater, au vu de cette pièce, que le prix de rachat offert n'a pas été calculé conformément aux prescriptions contractuelles et réglementaires, de juger en conséquence nulle et de nul effet l'offre de rachat ainsi calculée, et de renvoyer les parties devant la Commission afin de fixer un nouveau prix de rachat tenant compte des trois critères fixés par l'article 17 du règlement, en réitérant pour le surplus ses précédentes demandes ;

Dans d'ultimes conclusions du 18 octobre 1994, l'État déclare reprendre les moyens développés dans ses écrits judiciaires des 17 juin et 16 décembre 1993 et conclut, à titre principal, à l'irrecevabilité ou, subsidiairement, au rejet au fond de l'ensemble des demandes de S. ;

À l'appui de ses prétentions, P. S. fait valoir pour l'essentiel, dans ses écrits judiciaires antérieurs à la communication de la pièce litigieuse :

  • que le prix offert de 1 060 000 francs ne correspond a priori qu'à un ajustement du prix d'acquisition en fonction du seul critère de l'évolution du coût de la construction,

  • que ce prix doit être corrigé par application des deux autres critères contractuels, relatifs à l'évolution des prix sur le marché immobilier et aux améliorations apportées à l'appartement (réfection du parquet et des peintures),

  • que l'État ayant admis n'avoir pas tenu compte de l'évolution du prix du bien sur le marché immobilier, il y a eu violation flagrante des dispositions contractuelles faisant obligation de retenir ce paramètre, sans préjudice d'autres violations qui pourraient résulter de l'examen du procès-verbal de la commission, réclamé en vain depuis des années à l'État,

  • que sa prétention visant à voir fixer à 1 832 000 francs le prix de l'appartement est fondée sur l'application des critères contractuels et ne vise en aucun cas un objectif de spéculation,

  • que l'État ayant fait référence à l'indice qu'il aurait appliqué, il en résulte qu'il ne s'agit pas de celui visé par la convention ; de même S. déduit des conclusions de l'État en date du 16 décembre 1993 que celui-ci a omis de prendre en considération l'évolution des prix sur le marché immobilier ; il estime qu'il appartient au Tribunal de contrôler si tous les paramètres contractuels ont bien été appliqués, ce qui selon lui n'a pas été appliqués, ce qui selon lui n'a pas été le cas ;

Dans ses dernières conclusions prises après la production du procès-verbal de la commission, S. constate que l'examen de cette pièce, versée aux débats après de multiples demandes de sa part sur l'injonction du Tribunal, ne fait que confirmer sa thèse selon laquelle le prix offert ne respecte pas les modalités de calcul telles que définies par l'article 17 du règlement ; il observe qu'il n'a été tenu compte que de l'évolution des prix sur le marché immobilier ; il en résulte selon lui que l'offre de rachat de l'État est nulle et non avenue, en sorte qu'il pourrait être prétendu que l'État est désormais forclos pour présenter une nouvelle offre, ce qu'il s'abstient toutefois de faire en se bornant à solliciter le renvoi des parties devant la commission en vue d'une nouvelle estimation du bien conforme aux règles contractuelles ;

À cet égard, sur l'évolution de l'indice du coût de la construction, il estime qu'aurait dû être appliqué l'indice officiel et non l'indice BT 01 ;

Sur l'évolution des prix sur le marché immobilier, il constate que l'État n'en a tenu aucun compte et que la commission nouvellement saisie devra réparer cette omission ;

Sur les travaux d'amélioration, il conteste la règle d'amortissement sur cinq années retenue ;

Pour s'opposer à ces prétentions, l'État soutient pour sa part :

  • que le prix de rachat de l'appartement a été évalué conformément aux stipulations de l'acte de vente par la Commission et que le Tribunal n'a pas le pouvoir de fixer lui-même un autre prix d'achat, dès lors qu'il ne peut se substituer aux parties pour préciser les termes du contrat ni enjoindre à l'autorité administrative de réajuster ledit prix,

  • que dans l'hypothèse - non avérée - d'une sous-évaluation, le Tribunal ne pourrait que renvoyer les parties devant la Commission,

  • qu'il s'ensuit que la demande de fixation d'un nouveau prix n'est pas recevable,

  • que le critère d'évolution du prix en fonction du marché immobilier ne sert pas de base à l'évaluation du prix de rachat de l'appartement mais constitue l'une des références auxquelles la commission peut recourir pour réajuster le prix du logement, étant observé que le règlement ne prévoit aucune pondération particulière entre les critères indiqués,

  • que les critères retenus par le règlement sont uniquement destinés à permettre à l'État de retrouver son droit de propriété sur le logement à un prix l'autorisant à répéter l'opération au profit d'un autre monégasque, en dehors de tout aspect spéculatif,

  • que la commission a réajusté le prix à 1 060 000 francs en stricte conformité avec les dispositions de l'acte de vente du 7 août 1985 et du règlement du 16 décembre 1977, lequel n'impose nullement un mode de calcul tenant compte fidèlement de l'évolution des prix sur le marché immobilier,

  • qu'il était donc loisible à la commission de retenir l'indice BT 01 qui prend déjà en considération l'évolution du marché immobilier,

  • qu'en décider autrement reviendrait à nier le caractère social du régime d'accession à la propriété institué par le règlement et conduirait, à brève échéance, à la disparition ce régime ;

Après avoir versé aux débats le procès-verbal de la commission en date du 12 septembre 1991, l'État conteste de plus fort la pertinence des prétentions émises par S. ; il rappelle que celui-ci n'est pas fondé à critiquer le prix retenu, ni en droit ni en fait ;

En droit, l'État fait valoir que la clause laissant la détermination du prix à l'arbitrage d'un tiers - en l'espèce la commission - n'autorise pas le Tribunal à apprécier les modalités selon lesquelles le tiers a fixé le prix, lequel s'impose aux parties ;

En fait, l'État soutient que le prix n'est pas contestable dès lors que les stipulations contractuelles ne prévoient pas d'appliquer un prix de « marché » tel qu'il s'observe sur le marché libre ; il constate que le contrat ne fait pas référence à la valeur vénale mais impose au contraire de calculer le prix de rachat sur la base du prix de cession initial, ce qui reflète la volonté d'éviter que l'acquéreur ne réalise un gain spéculatif à la faveur d'une revente ; il rappelle que c'est le prix de cession initial qui doit servir de base au prix de rachat, la commission ayant pour fonction de procéder à un simple réajustement de ce prix en disposant d'une entière liberté dans la prise en compte des critères indiqués ;

Qu'en particulier, la commission n'était pas tenue de retenir l'indice INSEE, ou l'indice BT 01, en l'absence de précision contractuelle sur ce point, étant relevé que l'application de l'un ou l'autre des coefficients multiplicateurs aboutit à des différences insignifiantes ;

De façon générale, l'État estime que la commission dispose de la plus grande liberté pour fixer le prix et que sa décision ne peut être remise en cause ;

Il considère, enfin, que la demande en paiement de dommages-intérêts présentée par S. n'est pas fondée ;

Sur quoi :

Attendu que la compétence de ce Tribunal pour connaître de l'exécution d'un contrat de droit privé n'est pas contestée par les parties ; qu'elle résulte au demeurant des règles applicables en la cause ;

Attendu que la clause du contrat du 7 août 1985 par laquelle les parties ont convenu, dans l'hypothèse considérée, que le prix de rachat par l'État de l'appartement acquis par S. sera fixé par la commission instituée par l'article 18 du règlement du 16 décembre 1977 dans les conditions - reprises dans le contrat -de l'article 17 de ce règlement s'analyse en une convention de détermination de prix par un tiers, telle que régie par l'article 1434 alinéa 2 du Code civil ;

Qu'à cet égard, si le conseil de S. a mis en cause, lors de l'audience des plaidoiries, l'indépendance de la commission administrative de l'article 18 par rapport à l'État défendeur, il n'en a pas toutefois contesté de façon formelle dans ses écrits judiciaires la qualité de tiers apte à fixer le prix de rachat ni n'a soutenu que l'État aurait lui-même fixé le prix par l'intermédiaire d'un organe qui n'en serait que l'émanation ; qu'il s'est en outre abstenu de tirer les conséquences juridiques nécessaires qui auraient pu résulter d'une telle situation ;

Attendu au demeurant que la composition mixte de cette commission n'autorise pas à affirmer que cet organe, dépourvu de personnalité juridique, s'identifie à l'État et n'a pas la qualité de tiers par rapport à celui-ci ;

Attendu, au contraire, que S. demande le renvoi des parties devant cette commission en vue d'une nouvelle détermination du prix, admettant par là même la validité de la clause contractuelle sur ce point ;

Attendu que si une telle clause a pour objet de parvenir à une détermination du prix s'imposant aux parties et donc au Tribunal, encore faut-il qu'elle ait été mise en œuvre conformément aux dispositions contractuelles et que le tiers ait rempli l'office dont il était investi ;

Attendu, sur ce point, que les parties apparaissent avoir donné mandat à la commission de fixer le prix de rachat de l'appartement en prévoyant formellement que la détermination de ce prix, au sens de l'article 18 du règlement et de la clause contractuelle, s'effectuerait selon les modalités de calcul énoncées à l'article 17 ;

Qu'il appartenait dès lors aux membres mandataires de la commission d'accomplir le mandat dont ils étaient chargés, conformément à l'article 1830 du Code civil, ainsi que de rendre compte de leur gestion, au sens de l'article 1832 dudit code ;

Attendu que ces obligations supposent, en cas de contestation par l'un des mandants, de l'exécution du mandat, comme en l'espèce, qu'un contrôle puisse s'exercer sur les conditions dans lesquelles la commission s'est acquittée de son mandat ;

Qu'il appartient au Tribunal de procéder à ce contrôle au vu du procès-verbal dressé par la commission le 12 septembre 1991 dont la production aux débats a eu lieu, en définitive, le 22 juin 1994 ;

Attendu que l'analyse de ce document révèle que la commission a entériné l'avis de l'expert Tonelli, qu'elle avait la faculté de s'adjoindre à titre consultatif ainsi que le prévoit l'article 18 alinéa 2 du règlement, ledit expert ayant proposé un prix de rachat arrondi à 1 060 000 francs ; que la commission a décidé de ne pas prendre en considération les travaux exécutés dans l'appartement par S. en 1985 au motif qu'ils devaient être considérés comme amortis et a conclu en ce sens :

« Après l'examen des plans de l'appartement cédé et à la suite d'un échange de vues, la commission décide que le prix de rachat des biens cédés doit, compte tenu de leur situation, de leur superficie et de la visite des lieux qui a été effectuée, être fixé à la somme de 1 060 000 F » ;

Qu'en ce qui concerne les données relatives à l'évaluation de l'appartement, telles qu'exposées par l'expert Tonelli, il résulte du procès-verbal, selon les mentions de ce document :

« ... en application des critères habituellement retenus en pareille matière, le prix des biens vendus pourrait être évalué de la façon suivante :

  • Prix d'acquisition, le 7.8.85 : 951 800 F

  • indice BT 01 août 85 : 394,2

  • indice BT 01 avril 91 (dernier connu) : 466,6

  • Prix actualisé : 951 800 x 466,6 : 394,2 = 1 126 610,50 F

  • Abattement pour vétusté 1 % l'an, soit 6 % : 67 596,60 F

Le prix de rachat s'établirait donc à 1 059 013,90 F arrondi à 1 060 000 F » ;

Attendu qu'en application de l'article 17 du règlement, la commission devait déterminer le prix en le calculant sur la base du prix de cession initial, réajusté en tenant compte :

1° - de critères généraux (évolution de l'indice du coût de la construction),

2° - de critères locaux (évolution des prix sur le marché immobilier),

3° - de critères particuliers à l'immeuble et à son environnement,

4° - de critères propres à l'appartement lui-même (prise en considération, d'une part, des éventuelles améliorations et, d'autre part, des dégradations subies et de la vétusté) ;

Attendu que s'il ne peut être admis, dans la mesure où l'indice BT 01 constitue bien un indice du coût de la construction, qu'il a été tenu compte du premier critère, de même qu'ont été pris en considération, eu égard aux références faites à la situation des biens cédés, à l'amortissement des travaux d'amélioration et à la vétusté, les troisième et quatrième critères, il est manifeste, à la lecture du procès-verbal de la commission, qu'il n'a été tenu aucun compte du deuxième critère relatif à l'évolution des prix sur le marché immobilier local ;

Attendu qu'il s'ensuit que la commission n'apparaît pas avoir fixé le prix, qu'il lui appartenait de déterminer, conformément aux prescriptions de l'article 17 et aux clauses contractuelles ; qu'elle n'a pas de ce fait accompli le mandat dont elle était chargée par les parties ;

Attendu en conséquence que la vente ne peut avoir lieu en l'état, faute d'une détermination régulière du prix de cession par la commission ; que toutefois les parties affirment leur volonté de parvenir à la vente envisagée, l'État en maintenant son offre de rachat et S. en demandant la fixation d'un prix déterminé différemment ;

Qu'ainsi il ne peut qu'être constaté que les parties demandent en fait l'exécution du contrat ;

Attendu, dans ces conditions, qu'il y a lieu de provoquer à nouveau la saisine de commission administrative instituée par l'article 18 du règlement en vue de la fixation du prix de rachat dans les conditions prévues à l'article 17, après avoir constaté l'inexécution du mandat confié à la commission et l'absence d'effet de droit de l'offre de prix de rachat proposé par l'État le 24 septembre 1991 ;

Que pour ce faire, il y a lieu de renvoyer l'État à saisir ladite commission en vue de la fixation du prix de rachat de l'appartement et de ses dépendances conformément aux règles applicables ;

Attendu que la résistance fautive opposée par l'État à produire le procès-verbal de la commission, en dépit des demandes réitérées de S. formulées dès l'introduction de la présente instance, alors que la contestation élevée par ce demandeur et les termes du présent litige commandaient depuis l'origine cette communication de pièce en l'état de la règle imposant au mandataire de rendre compte de sa gestion, justifie que soit allouée à S. l'indemnité qu'il réclame en réparation du préjudice subi de ce chef, consécutif aux délais anormaux auxquels il a été confronté ;

Attendu que l'urgence qui s'attache au règlement du présent litige et à la conclusion de la vente à laquelle les parties entendent parvenir légitime la demande d'exécution provisoire du présent jugement ; qu'il y a donc lieu d'y faire droit par application de l'article 202 du Code de procédure civile ;

Attendu que les dépens suivent la succombance ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Constate que la commission instituée par l'article 18 du règlement administratif publié le 16 décembre 1977 ne s'est pas conformée aux règles édictées par l'article 17 pour la détermination du prix de rachat des biens acquis par P. S. le 7 août 1985 qu'elle était contractuellement chargée de fixer ;

Dit en conséquence sans effet de droit l'offre de prix de rachat proposée par l'État de Monaco le 24 septembre 1991 et ultérieurement ;

Constatant que les parties entendent toutefois parvenir à la vente desdits biens,

Dit que la commission devra être à nouveau réunie en vue de la fixation du prix de rachat dans les conditions prévues au contrat du 7 août 1985 et à l'article 17 du règlement précité ;

Renvoie l'État à saisir ladite commission à cette fin ;

Condamne l'État à payer à S. la somme de 20 000 francs à titre de dommages-intérêts ;

Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement ;

Composition🔗

MM. Narmino, V. prés., Serdet, prem. subst. ; Proc. gén. ; - Mes Léandri, Sanita, av. déf. ; Piwnica, av. au bar. de Paris.

  • Consulter le PDF