Tribunal de première instance, 23 janvier 1992, B. P. c/ B.

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Abstract🔗

Procédure civile

Conclusions : faculté de conclure avant l'audience de plaidoiries - Dépôt au greffe des conclusions la veille de celle-ci - Recevabilité (CPC, art. 180 et 181) - Exception de communication de pièces : pièces excipées connues de l'autre - Rejet de l'exception

Baux d'habitation

Promesse de bail vaut bail : accord sur éléments essentiels - Article 1590 du Code civil - Commencement d'exécution : délivrance de la chose, prise de possession, paiement de loyers

Résumé🔗

Le tribunal ayant, lors d'une audience, fixé la date des plaidoiries en réservant expressément au défenseur la faculté de conclure entre temps, les conclusions déposées la veille au greffe, doivent être déclarées recevables comme conformes aux dispositions des articles 180 et 181 du Code de procédure civile.

Le défenseur ne saurait utilement se prévaloir de l'exception de communication de pièces prévue par l'article 274 du Code de procédure civile, dès lors qu'il est constant, au regard des pièces qu'il détient, que celles employées par le demandeur, au soutien de son action, ont été portées à sa connaissance.

Un écrit constituant une promesse synallagmatique de bail vaut bail et en produit tous les effets dès lors que l'accord des parties a porté sur les éléments essentiels du contrat de louage de choses, au sens de l'article 1549 du Code civil, étant observé au surplus que le bail litigieux a reçu un commencement d'exécution par les parties, l'une ayant délivré la chose louée l'autre en ayant pris possession et réglé des loyers exigibles pour une certaine période.

Pour dénier l'existence de ce bail, la demanderesse ne saurait utilement se prévaloir de ce que la promesse de bail prévoyait l'établissement ultérieur d'un contrat de bail, lequel n'a jamais été signé par les parties, du fait de leur désaccord sur la prise en charge des travaux que nécessiterait l'état des lieux, pour les rendre conformes à leur usage.

En effet, un tel différend qui ne concernait qu'une des modalités d'exécution du bail, s'avérait ainsi dépourvu de tout effet juridique quant à la validité de la promesse synallagmatique de bail dont les conditions d'existence soient réunies.

Il s'ensuit que le défendeur dispose d'un titre locatif et que la demanderesse doit être déboutée de sa demande en expulsion et au paiement d'indemnité d'occupation.


Motifs🔗

Le Tribunal,

Attendu que suivant exploit en date du 27 février 1991 (Instance n° 512 du rôle général de 1991), J. B. P. a fait assigner G. B., exerçant le commerce en Principauté, sous l'enseigne « A. » aux fins d'obtenir son expulsion sous astreinte, avec exécution provisoire, des locaux lui appartenant dépendant de l'immeuble « Le M. » à Monaco ainsi que sa condamnation au paiement de la somme de 63 478 F à titre d'indemnité d'occupation ;

Qu'elle fait valoir au soutien de sa demande, que G. B. serait occupant sans droit, ni titre du studio qu'elle avait consenti à lui louer selon bail en date du 22 décembre 1989, dès lors que celui-ci s'était refusé à signer ledit bail ;

Qu'ainsi G. B. qui ne pouvait se prévaloir que d'une promesse unilatérale de bail, à laquelle il n'avait pas donné suite, devait en conséquence être expulsé des locaux, ainsi indûment occupés par lui, et condamné en outre à lui payer une somme de 63 478 F, montant de l'indemnité d'occupation des locaux litigieux ;

Attendu que suivant exploit en date du 27 juin 1991 (Instance n° 755 du rôle général de 1991), J. B. P., autorisée à procéder à la saisie-conservatoire du véhicule de marque Fiat immatriculé S 697 MC appartenant à G. B., par ordonnance du 1er février 1991, a fait assigner G. B. aux fins de faire condamner celui-ci au paiement de la somme de 63 478 F, montant actuel de sa créance, ainsi que de faire valider la saisie-conservatoire pratiquée sur ledit véhicule, selon exploit de maître Notari, huissier, en date du 29 mai 1991, et convertir cette mesure conservatoire en saisie-exécution ;

Attendu que G. B. a, in limine litis, soulevé l'exception de communication de pièces, au motif que la dame B. P. n'avait versé aux débats aucune pièce, à l'appui de sa demande ;

Qu'il a par ailleurs, sur le fond, soutenu que celle-ci, contrairement à ses allégations, lui avait consenti la location d'un studio, numéro 1 B 2 situé dans l'immeuble Le M. ainsi qu'en fait foi l'acte sous seing privé, daté du 27 octobre 1989, signé par le mandataire de la propriétaire dudit local et par lui-même, aux termes duquel il était convenu que le bail portant sur ce même studio était d'une durée d'un an, renouvelable, moyennant un loyer de 3 800 F par mois, outre 400 F de charges mensuelles ;

Qu'en outre ce bail avait reçu un commencement d'exécution dès lors que la demanderesse lui avait remis les clés des locaux qu'il avait effectivement occupés, à compter du 17 novembre 1989 ;

Qu'en conséquence il a conclu au rejet de toutes les demandes formées à son encontre, du fait qu'il avait la qualité de locataire des locaux dont s'agit, tout en sollicitant la mainlevée de la saisie-conservatoire pratiquée sur son véhicule, d'autant que cette mesure avait été effectuée hors du délai prescrit par l'ordonnance l'autorisant et que le procès-verbal de saisie ne lui avait pas été signifié ;

Attendu qu'enfin, à l'audience des plaidoiries, J. B. P. a conclu au rejet des conclusions de G. B., celles-ci ayant été déposées le jour de ladite audience ;

SUR CE,

En la forme,

Attendu, quant à la jonction, qu'en l'état de la connexité nécessaire existant entre les demandes respectivement introduites par exploits des 27 février et 27 juin 1991, à la requête de J. B. P., ainsi que dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, il échet d'ordonner la jonction des instances portant respectivement les numéros 512 et 755 du rôle général de 1991, pour y être statué par un seul et même jugement ;

Attendu, quant à l'irrecevabilité des conclusions de G. B., que celui-ci a conclu le 19 décembre 1991, après avoir déposé la veille ses conclusions au greffe général ; qu'en outre alors que la date des plaidoiries a été, à l'audience du 17 décembre 1991, fixée au 19 décembre 1991, le Tribunal a expressément réservé au défendeur la faculté de conclure entre temps ;

Qu'ainsi, il apparaît que les conclusions dont la demanderesse sollicite le rejet, doivent être déclarées recevables comme conformes aux dispositions des articles 180 et 181 du Code de procédure civile ;

Attendu, quant à l'exception de communication de pièces, que G. B. ne saurait utilement se prévaloir des dispositions de l'article 274 du Code de procédure civile, dès lors qu'il est constant, au regard des pièces qu'il détient, que celles employées par la demanderesse, au soutien de son action, ont été portées à sa connaissance ;

Au fond,

Attendu qu'il résulte des termes dépourvus de toute ambiguïté, de l'acte sous seing privé signé par les parties, en date du 27 octobre 1989, intitulé « Décompte location Bureau IB2. Le M. », que cet écrit constituait une promesse synallagmatique de bail valant bail et en produisait tous les effets, dès lors que l'accord des parties avait porté sur les éléments essentiels du contrat de louage de choses, au sens de l'article 1549 du Code civil, la promesse consentie par J. B. P. et acceptée par G. B., précisant tant l'objet du bail qui concernait le studio 1B2 situé dans l'immeuble Le M., que sa durée prévue pour une année renouvelable à compter du 1er novembre 1989, ainsi que le prix de la location fixé à la somme de 3 800 F par mois, outre les charges ;

Qu'il convient, au surplus, d'observer que le bail litigieux avait reçu un commencement d'exécution par les parties, du fait que J. B. P. a effectivement délivré la chose louée à G. B., lequel en a pris possession le 12 décembre 1989 tandis que celui-ci lui a réglé les loyers exigibles pour la période de novembre 1989 à avril 1990, ainsi que l'établissent les pièces produites ;

Attendu que pour dénier l'existence de ce bail, la demanderesse ne saurait utilement se prévaloir de ce que la promesse de bail prévoyait l'établissement ultérieur d'un contrat de bail, lequel n'a jamais été signé par les parties, du fait de leur désaccord sur la prise en charge des travaux que nécessitait l'état des lieux, pour les rendre conformes à leur usage ;

Qu'en effet, l'existence d'un tel différend qui ne concernait qu'une des modalités d'exécution du bail, s'avérait ainsi dépourvu de tout effet juridique quant à la validité de la promesse synallagmatique de bail dont les conditions d'existence étaient réunies ;

Attendu que G. B. disposant ainsi d'un titre locatif sur ledit studio, il s'ensuit que J. B. P. doit être déboutée de ses demandes en expulsion et en paiement d'indemnité d'occupation dirigées à l'encontre de ce dernier ;

Attendu d'autre part, qu'aucune condamnation n'étant présentement prononcée à l'égard de G. B., il y a lieu, après avoir constaté que la saisie-conservatoire pratiquée le 29 mai 1991 a été régulièrement poursuivie, après permission du président du tribunal, et apparaît satisfaire tant aux prescriptions des articles 754 et suivants du Code de procédure civile qu'à celles des articles 511 et suivants du même code, d'ordonner la mainlevée de ladite saisie-conservatoire ;

Attendu qu'enfin les dépens suivront la succombance de la demanderesse ;

Dispositif🔗

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Joint les instances portant les numéros 512 et 755 du rôle général de 1991 ;

Déboute J. B. P. de toutes ses demandes ;

Ordonne la mainlevée de la saisie-conservatoire pratiquée selon exploit de maître Claire Notari, huissier, en date du 29 mai 1991, sur le véhicule Fiat immatriculé S 697 MC ;

Composition🔗

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet, prem. subst. proc. gén. ; Mes Lorenzi et Blot, av. déf. ; Licari, av.

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